Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La société coopérative artisanale du sanitaire, de l'électricité et du chauffage (CASEC) a demandé au tribunal administratif de Dijon la décharge de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2012.
Par un jugement n° 1303259 du 9 décembre 2014, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 9 février 2015 et des mémoires enregistrés le 24 septembre 2015 et le 25 août 2016, la société CASEC, représentée par Me Le Berre, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 9 décembre 2014 ;
2°) de lui accorder la décharge demandée ;
3°) de condamner l'Etat au paiement des intérêts moratoires ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle doit être exonérée de la cotisation foncière des entreprises en application des dispositions de l'article 1454 du code général des impôts, dès lors qu'elle fonctionne conformément à son objet ;
- elle fournit à ses membres, qui exercent le métier de plombier-chauffagiste ou d'électricien, des matériels et équipements nécessaires à leur activité artisanale, ce qui implique un travail de transformation et de réparation ou des prestations de service, et ne constitue pas une simple revente en l'état ;
- les seules reventes en l'état ne représentent qu'une part très faible de son chiffre d'affaires et n'ont donc qu'un caractère accessoire.
Par des mémoires enregistrés le 6 juillet 2015 et le 20 juin 2016 et un mémoire enregistré le 21 octobre 2016, qui n'a pas été communiqué, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que la société requérante ne justifie pas, par des pièces comptables, du caractère accessoire des reventes en l'état qu'elle réalise.
Par une ordonnance du 19 octobre 2016 la clôture d'instruction a été fixée au 10 novembre 2016, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération ;
- la loi n° 83-657 du 20 juillet 1983 relative au développement de certaines activités d'économie sociale ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Clot, président,
- et les conclusions de Mme Bourion, rapporteur public ;
1. Considérant que la société coopérative artisanale du sanitaire, de l'électricité et du chauffage (CASEC), qui regroupe des artisans et entreprises artisanales, a pour objet la réalisation de toutes opérations et la prestation de tous services susceptibles de contribuer, directement ou indirectement, au développement de l'activité de ses associés dans les domaines de la plomberie, du sanitaire, du chauffage, de l'électricité et des énergies renouvelables ; qu'elle a demandé à être exonérée de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2012, en se prévalant des dispositions de l'article 1454 du code général des impôts ; qu'elle relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette imposition ;
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 1454 du code général des impôts : " Sont exonérées de la cotisation foncière des entreprises, les sociétés coopératives et unions de sociétés coopératives d'artisans de même que les sociétés coopératives et unions de sociétés coopératives de patrons bateliers, lorsque ces différents organismes sont constitués et fonctionnent conformément aux dispositions législatives et réglementaires qui les régissent. " ;
3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 4 de la loi du 20 juillet 1983 relative au développement de certaines activités d'économie sociale : " Les sociétés coopératives artisanales sont régies par les dispositions du présent titre et, en ce qu'elles ne sont pas contraires à celles-ci, par les dispositions du chapitre Ier du titre III du livre II de la partie législative du code de commerce, de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération et du code de commerce. " ; que l'article 1er de cette même loi du 20 juillet 1983 dispose que : " Les sociétés coopératives artisanales ont pour objet la réalisation de toutes opérations et la prestation de tous services susceptibles de contribuer, directement ou indirectement, au développement des activités artisanales de leurs associés, ainsi que l'exercice en commun de ces activités. (...) " ; que si les dispositions de cette loi, et celles de la loi du 10 septembre 1947, dont l'article 1er, dans sa rédaction alors applicable, prévoit que l'un des " objets essentiels " des sociétés coopératives est de " réduire, au bénéfice de leurs membres (...), le prix de revient (...) de certains produits ou de certains services en assumant les fonctions des entrepreneurs ou intermédiaires dont la rémunération grèverait ce prix de revient ", ne font pas obstacle à ce qu'une société coopérative artisanale soit considérée comme fonctionnant conformément aux dispositions législatives et réglementaires qui la régissent, lorsqu'elle procure à ses associés des produits, objets ou marchandises destinés à être revendus par ceux-ci en l'état, il n'en va ainsi que si ces opérations commerciales n'ont qu'un caractère accessoire, et, par suite, que les services effectivement rendus à ses membres par la coopérative gardent pour principal objet de contribuer, directement ou indirectement, au développement de leurs activités purement artisanales de production, de transformation, de réparation ou de prestation de service ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société requérante exerce une activité de groupement d'achats destinée à procurer à ses adhérents des matériels et équipements nécessaires à leur activité artisanale ; que l'utilisation d'équipements qui nécessitent la mise en oeuvre d'une main d'oeuvre spécifique et d'opérations de mise en route et de contrôle liées aux métiers de plombier-chauffagiste et d'électricien est inhérente à l'activité même de ces artisans et ne peut être regardée comme constituant de leur part une opération purement commerciale de revente en l'état ; que la vente, par la société requérante, de tels équipements à ses adhérents doit ainsi être regardée comme relevant d'un fonctionnement conforme aux dispositions qui régissent les sociétés coopératives artisanales, sans qu'elle ait à justifier, par la production des factures de ces derniers, qu'ils les utilisent effectivement dans le cadre de leur activité artisanale ;
5. Considérant qu'il résulte aussi de l'instruction que la société requérante procure également à ses adhérents des produits électroménagers destinés à être revendus en l'état ; que l'exercice de cette activité purement commerciale ne fait pas obstacle à ce qu'elle bénéficie de l'exonération de la cotisation foncière des entreprises, à condition qu'elle ne présente qu'un caractère accessoire ; que la société requérante produit, pour la première fois en appel, des états, certifiés par son expert comptable et son commissaire aux comptes, selon lesquels les ventes d'appareils électroménagers susceptibles d'être revendus en l'état par ses adhérents, qu'elle a réalisées au cours de la période du 11 octobre 2011 au 31 mars 2013, se sont élevées à la somme de 49 481,68 euros hors taxes, alors que son chiffre d'affaires total a été de 3,11 millions d'euros ; qu'ainsi, il résulte de l'instruction que ces opérations commerciales n'ont revêtu qu'un caractère accessoire ; que, dès lors, la société CASEC peut être regardée comme ayant fonctionné conformément aux dispositions législatives qui régissent les sociétés coopératives artisanales ; que, par suite, elle était en droit de bénéficier, au titre de l'année 2012, de l'exonération prévue par l'article 1454 du code général des impôts ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société CASEC est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ;
7. Considérant que les intérêts moratoires prévus par l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, sont, en vertu de l'article R. 208-1 de ce code, " payés d'office en même temps que les sommes remboursées par le comptable chargé du recouvrement des impôts " ; qu'il n'existe aucun litige né et actuel entre le comptable et la société requérante au sujet de ces intérêts ; que, dès lors, les conclusions de celle-ci qui tendent au versement par l'État d'intérêts moratoires ne sont pas recevables ;
8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le paiement à la société CASEC d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Dijon du 9 décembre 2014 est annulé.
Article 2 : La société CASEC est déchargée de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2012.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 2 000 euros à la société CASEC au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société CASEC est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à société coopérative artisanale du sanitaire, de l'électricité et du chauffage (CASEC) et au ministre de l'économie et des finances.
Délibéré après l'audience du 5 janvier 2017 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
Mme Dèche, premier conseiller,
M. Savouré, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 26 janvier 2017.
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N° 15LY00459