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09/06/2016 | FRANCE | N°14LY01067

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 09 juin 2016, 14LY01067


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...A...ont demandé au tribunal administratif de Dijon de prononcer la décharge ou, à défaut, la réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2008, de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2009, ainsi que des majorations dont ces cotisations ont été assorties.

Par un jugement n° 1300403 du 17 décembre 2013, le tribunal administratif de Dijon a :

-

déchargé la majoration de 10 % mise à la charge des intéressés sur le fondement de l'article 1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...A...ont demandé au tribunal administratif de Dijon de prononcer la décharge ou, à défaut, la réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2008, de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2009, ainsi que des majorations dont ces cotisations ont été assorties.

Par un jugement n° 1300403 du 17 décembre 2013, le tribunal administratif de Dijon a :

- déchargé la majoration de 10 % mise à la charge des intéressés sur le fondement de l'article 1758 A du code général des impôts au titre de l'année 2009 (article 1er),

- rejeté le surplus des conclusions de leur demande (article 2).

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 avril 2014, M. et MmeA..., représentés par Me Dion, avocat, demandent à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement du 17 décembre 2013 ;

2°) de prononcer la décharge ou, à défaut, la réduction des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la procédure d'imposition est irrégulière dans la mesure où, en les mettant en demeure de payer les impositions litigieuses alors qu'ils avaient formé une réclamation assortie d'une demande de sursis de paiement, l'administration a méconnu les dispositions de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales ;

- les rectifications relatives à la déduction en charges au titre des exercices clos les 31 mai 2008 et 2009 des frais de carburant, d'entretien des véhicules et d'amortissement du matériel de transport doivent être réduits dans la mesure où les véhicules Peugeot Partner et Nissan étaient utilisés exclusivement à titre professionnel et où le véhicule Renault Scénic faisait l'objet d'un usage professionnel à hauteur de 50 % ;

- les travaux d'aménagement du sous-sol de leur maison réalisés au cours de l'exercice clos en 2008 constituent des dépenses déductibles car où ils ont été engagés dans le seul intérêt de l'exploitation ;

- l'application de la majoration de 40 % pour manquement délibéré aux rectifications notifiées au titre de l'exercice clos en 2009 n'est pas justifiée, en l'absence de preuve du caractère intentionnel des omissions reprochées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 septembre 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Meillier,

- et les conclusions de Mme Chevalier-Aubert, rapporteur public.

1. Considérant que M. B...A..., qui exerce à titre individuel une activité de maçonnerie et de couverture, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant, en matière de bénéfices industriels et commerciaux, sur les exercices compris dans la période du 1er juin 2007 au 31 mai 2010 ; qu'à l'issue de ce contrôle, l'administration a, d'une part, rehaussé, selon la procédure contradictoire, le bénéfice déclaré au titre de l'exercice clos en 2008 et, d'autre part, évalué d'office, selon la procédure du 1° de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales, le bénéfice de l'exercice clos en 2009 ; qu'en conséquence de ce contrôle, M. et MmeA..., qui n'avaient souscrit leur déclaration d'ensemble de leurs revenus que plus de trente jours après notification d'une mise en demeure s'agissant de l'année 2008 et au cours du délai de trente jours imparti par une mise en demeure s'agissant de l'année 2009, ont été assujettis, d'une part, à une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2008, établie selon la procédure de taxation d'office prévue par le 1° de l'article L. 66 du livre précité et résultant de la rectification du bénéfice industriel et commercial de l'exercice clos en 2008 et, d'autre part, à une cotisation d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2009, établie selon la procédure contradictoire et résultant, notamment, de l'inclusion dans leur revenu imposable du bénéfice fixé d'office de l'exercice clos en 2009 ; que le complément d'impôt établi d'office au titre de l'année 2008 a été assorti de la majoration de 40 % prévue au b du 1 de l'article 1728 du code général des impôts tandis que la cotisation d'impôt sur le revenu établie selon la procédure contradictoire au titre de l'année 2009 a été assortie, d'une part, de la majoration de 10 % prévue à l'article 1758 A du même code et, d'autre part, de la majoration de 40 % prévue au a de l'article 1729 dudit code ; que, par jugement du 17 décembre 2013, le tribunal administratif de Dijon, après avoir prononcé la décharge de la majoration de 10 % précitée, a rejeté le surplus des conclusions de la demande des contribuables tendant à la décharge ou, à défaut, à la réduction de l'ensemble des cotisations et majorations mises à leur charge ; que M. et Mme A...relèvent appel, dans cette mesure, de ce jugement ;

Sur le bien-fondé des impositions :

2. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature (...) / 2° (...) les amortissements réellement effectués par l'entreprise (...) " ;

3. Considérant que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que, dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

En ce qui concerne des frais de déplacement :

4. Considérant que M.A..., qui possédait trois véhicules, à savoir un pick-up 4x4 de marque Nissan, un véhicule utilitaire Peugeot Partner et un véhicule de tourisme Renault Scénic, a déduit de son résultat des frais d'entretien et des charges d'amortissement de ces trois véhicules, justifiés par des factures, ainsi que des dépenses d'achat de carburant mentionnées sur des reçus de carte bancaire ;

5. Considérant, toutefois, que le vérificateur, ayant constaté que le véhicule Renault Scénic n'était assuré que pour un usage exclusivement privé et que les véhicules Nissan 4x4 et Peugeot Partner étaient assurés pour un usage tant professionnel que privé, a estimé que le véhicule Renault Scénic était utilisé à titre exclusivement personnel et que les deux autres véhicules n'étaient affectés que pour moitié à un usage professionnel ; qu'en conséquence, il a considéré que les factures d'entretien se rapportant au véhicule Renault Scénic n'étaient pas déductibles et que les autres factures d'entretien, présumées se rattacher aux deux autres véhicules, n'étaient déductibles qu'à hauteur d'une quote-part d'utilisation professionnelle de 50 % ; qu'en l'absence de mention sur les reçus de carte bancaire permettant de rattacher les frais de carburant aux différents véhicules, le vérificateur a réparti ces dépenses de façon égale entre les trois véhicules et a seulement accepté la déduction de 50 % des achats de carburant rattachés aux véhicules Nissan 4x4 et Peugeot Partner, soit un tiers des achats totaux de carburant ;

6. Considérant qu'en l'absence d'autre élément fourni par les contribuables, le service pouvait prendre en compte les mentions portées sur les certificats d'assurance pour déterminer si les véhicules litigieux étaient affectés à un usage professionnel ou privé ; qu'il appartient aux contribuables de combattre la présomption d'utilisation privée résultant des mentions de ces certificats d'assurance, ces mentions étant, en l'espèce, de nature à laisser penser que les charges litigieuses ont des contreparties partiellement dépourvues d'intérêt pour l'entreprise de M. A... ;

7. Considérant qu'en l'espèce, les requérants n'apportent aucun élément tendant à établir que M. A...aurait, ainsi qu'ils le soutiennent, utilisé le véhicule Renault Scénic pour aller chercher chaque jour son apprenti à la gare de Beaune ; que, si les requérants indiquent que M. A...a employé quatre salariés au cours de certaines périodes et qu'il avait besoin de ses trois véhicules pour se rendre avec l'ensemble de son personnel sur les chantiers, ils n'identifient toutefois pas ces périodes, ni n'établissent l'impossibilité de transporter cinq personnes dans les deux véhicules utilitaires dont ils allèguent, sans le démontrer, qu'ils ne comportaient chacun que deux places ; que, par ailleurs, les listes des chantiers, des fournisseurs et des devis en cours qu'ils produisent ne suffisent pas à conférer un caractère probant et fiable à leurs calculs tendant à évaluer le kilométrage parcouru à titre professionnel au moyen des véhicules Peugeot Partner et Nissan 4x4 ainsi que le montant des frais d'entretien et de carburant devant, selon eux, être regardés comme exposés pour l'activité professionnelle de M.A... ;

8. Considérant que, dans ces conditions, et compte tenu des explications respectivement fournies par les deux parties, le caractère professionnel des frais de déplacement rejetés par le service n'est pas établi ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause la comptabilisation en charges de ces frais au motif qu'ils n'avaient pas été engagés dans l'intérêt de l'entreprise ;

En ce qui concerne les travaux d'aménagement du sous-sol de la maison de M. et Mme A... :

9. Considérant qu'en décembre 2007 et janvier 2008, M. et Mme A...ont réalisé des travaux d'aménagement dans le sous-sol de leur maison d'habitation, consistant en la pose d'une porte de garage ainsi que d'un carrelage ; que M. A...a déduit de son résultat les factures correspondant à ces travaux ; qu'ayant relevé qu'au plan cadastral aucun local professionnel n'avait été déclaré au sein de cette habitation, le vérificateur a estimé que ce sous-sol était utilisé à des fins privatives ;

10. Considérant que, pour combattre cet élément, qui est de nature à laisser penser que les charges en cause ont des contreparties dépourvues d'intérêt pour l'entreprise de M. A..., les requérants soutiennent que le sous-sol est affecté à l'usage des salariés et à l'accès à un atelier utilisé pour son activité professionnelle ; que les photographies des lieux qu'ils produisent ne permettent toutefois pas, à elles-seules, de déterminer l'usage professionnel ou privé des lieux ; qu'au surplus, M. A...a reconnu lui-même, dans ses observations en réponse à la proposition de rectification, que la porte du sous-sol donnait également accès à une partie privée ;

11. Considérant que, dans ces conditions, et compte tenu des explications respectivement fournies par les deux parties, le caractère professionnel des dépenses de travaux rejetées par le service n'est pas établi ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause la déduction en charges de ces dépenses au motif qu'elles n'avaient pas été engagées dans l'intérêt de l'exploitation ;

Sur la majoration pour manquement délibéré :

12. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration (...) comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt (...) entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre (...) de la taxe sur la valeur ajoutée (...), la preuve de la mauvaise foi (...) incombe à l'administration. " ;

13. Considérant que l'administration a fait application, au titre de l'année 2009, de la majoration de 40 % prévue par le a de l'article 1729 du code général des impôts, la procédure d'évaluation d'office des bénéfices industriels et commerciaux de l'exercice clos le 31 mai 2009 ayant révélé l'insuffisance des bases mentionnées par M. A...dans la déclaration de résultats qu'il a souscrite, tardivement après expiration du délai imparti par une mise en demeure, au titre de cet exercice ; que le service a motivé l'application de cette majoration par des motifs tirés, notamment, de l'absence de tenue d'une comptabilité sincère et probante, diverses anomalies ayant été relevées, et notamment l'absence de distinction entre les frais professionnels et les dépenses personnelles du dirigeant, et de la circonstance que le contrôle fiscal externe de 2005 avait donné lieu aux mêmes chefs de redressement ; que, dans ces conditions, le ministre apporte la preuve de l'intention délibérée du contribuable d'éluder l'impôt et, par suite, de l'existence d'un manquement délibéré ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande ;

Sur le recouvrement :

15. Considérant que le moyen tiré de ce que l'administration a méconnu les dispositions de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales en mettant les contribuables en demeure de payer les impositions litigieuses alors qu'ils avaient formé une réclamation assortie d'une demande de sursis de paiement est relatif au recouvrement de l'impôt et est, par suite, inopérant dans le cadre du présent litige, qui porte sur l'assiette des impositions mises à la charge de M. et MmeA... ; que c'est donc à bon droit que le tribunal a jugé que ce moyen était sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

16. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. et Mme A...demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B...A...et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 19 mai 2016 à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

M. Pourny, président-assesseur,

M. Meillier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 juin 2016.

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N° 14LY01067


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY01067
Date de la décision : 09/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-01-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. Charles MEILLIER
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : DION

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-06-09;14ly01067 ?
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