La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/03/2016 | FRANCE | N°14LY04003

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 31 mars 2016, 14LY04003


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 15 avril 2014 du préfet de l'Yonne refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant son pays de destination en cas de reconduite d'office.

Par un jugement n° 1401616 du 26 septembre 2014, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 décembre 2014,

M. C..., représenté par Me Berdugo, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 15 avril 2014 du préfet de l'Yonne refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant son pays de destination en cas de reconduite d'office.

Par un jugement n° 1401616 du 26 septembre 2014, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 décembre 2014, M. C..., représenté par Me Berdugo, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 26 septembre 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 15 avril 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Yonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que l'arrêté attaqué :

- méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 (7°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 janvier 2016, le préfet de l'Yonne, représenté par MeB..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. C... d'une somme de 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. C...n'a pas été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 20 novembre 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi, signé le 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Meillier,

- et les observations de MeA..., substituant MeB..., représentant le préfet de l'Yonne.

1. Considérant que M. D... C..., resssortissant marocain né en 1975, est entré en France le 10 août 2002 selon ses déclarations ; qu'il a sollicité le 21 juillet 2011 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il a fait l'objet le 24 février 2012 d'un arrêté portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ; que, par jugement du 14 juin 2012, le tribunal administratif de Dijon a annulé cet arrêté et a enjoint à l'autorité administrative de réexaminer la situation de l'intéressé ; qu'après avoir consulté la commission du titre de séjour, laquelle a rendu le 11 décembre 2013 un avis favorable à la régularisation de la situation de M. C..., le préfet de l'Yonne a, par arrêté du 15 avril 2014, refusé de délivrer un titre de séjour à l'intéressé, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination ; que, par jugement du 26 septembre 2014, le tribunal administratif de Dijon a rejeté la demande de M. C... tendant à l'annulation de ce dernier arrêté ; que M. C... relève appel de ce jugement ;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;

3. Considérant que, dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas applicables à un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ; qu'en revanche, elles lui sont applicables lorsqu'il sollicite son admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale ;

4. Considérant, d'une part, que le fait pour un étranger de résider habituellement en France depuis plus de dix ans ne constitue pas, en soi, une considération humanitaire ou un motif exceptionnel ; qu'en tout état de cause, M. C... ne conteste pas n'avoir produit devant l'administration pour les années 2006 à 2010 que des copies de quittances de loyers manuscrites ; que le préfet relève qu'un passeport lui a été délivré le 31 décembre 2009 par le consulat marocain à Valence en Espagne ; que, contrairement à ce que soutient l'intéressé, le tribunal administratif de Dijon ne s'est pas prononcé dans son jugement du 14 juin 2012 sur la réalité et la durée de son séjour en France depuis 2002 ; que, dans ces conditions, et alors même que la commission du titre de séjour, saisie de cette question par le préfet, a estimé que les éléments produits laissaient penser que sa présence est effective depuis dix ans sur le sol français, le requérant ne peut être regardé comme justifiant d'une résidence habituelle en France depuis plus de dix ans ;

5. Considérant, d'autre part, que, par les bulletins de paie qu'il produit, M. C... justifie travailler, sous couvert d'un contrat à durée déterminée, dans le secteur de la restauration, en qualité de plongeur, depuis octobre 2011 ; qu'il présente également une promesse d'embauche établie en juillet 2011 par un autre employeur potentiel ; que, toutefois, les éléments qu'il fait valoir au titre de son insertion professionnelle ne constituent pas davantage des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels justifiant la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que, s'agissant de l'aspect professionnel de la demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée par M.C..., les premiers juges ont substitué à cette base légale erronée celle tirée du pouvoir discrétionnaire, dont dispose le préfet, de régulariser ou non la situation d'un étranger ; que, compte tenu des éléments relevés aux points 4 et 5 du présent arrêt, il n'apparaît pas qu'en refusant de régulariser la situation de l'intéressé en lui délivrant une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", le préfet ait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

7. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

8. Considérant que M. C...est célibataire et sans enfant ; que s'il fait valoir qu'il a un frère de nationalité française et une soeur titulaire d'une carte de résident valable dix ans, il ne justifie pas être dépourvu de toute attache au Maroc, où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt-sept ans ; que, dans ces conditions, et compte tenu également des éléments, mentionnés aux points 4 et 5 du présent arrêt, relatifs à la durée de son séjour en France et à sa situation professionnelle, la décision de refus de titre de séjour n'a pas porté, eu égard aux buts qu'elle poursuit, une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale ; que, par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés ; que pour les mêmes raisons, cette décision n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de l'intéressé ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

10. Considérant que le présent arrêt de rejet n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par M. C... doivent être rejetées ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

11. Considérant, d'une part, qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. C... doivent, dès lors, être rejetées ;

12. Considérant, d'autre part, qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C...une somme quelconque au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que les conclusions présentées à ce titre par le préfet de l'Yonne doivent, dès lors, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du préfet de l'Yonne présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Yonne.

Délibéré après l'audience du 10 mars 2016 à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

M. Pourny, président-assesseur,

M. Meillier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 31 mars 2016.

''

''

''

''

2

N° 14LY04003


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY04003
Date de la décision : 31/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. Charles MEILLIER
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : CLAISSE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-03-31;14ly04003 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award