Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SARL Réalisation Conception Production (R.C.P) a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la restitution d'un crédit d'impôt recherche constitué au cours de l'année 2010 pour un montant de 102 422 euros.
Par un jugement n° 1208384 du 17 février 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 20 avril 2015, la SARL Réalisation Conception Production (R.C.P), représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon en date du 17 février 2015 ;
2°) de lui accorder la restitution d'un crédit d'impôt recherche constitué au cours de l'année 2010 assorti des intérêts moratoires à compter du 14 avril 2011 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient :
- que la procédure est entachée d'irrégularités substantielles du fait que l'administration a procédé à un emport irrégulier de documents se rapportant à une des salariées, a procédé à une vérification de comptabilité excédant trois mois et a méconnu le principe du débat oral et contradictoire ;
- que les travaux réalisés répondent à la définition des opérations de recherche scientifique ou technique fixée par l'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts et aux conditions de prise en charge des dépenses de personnel conformément aux dispositions de l'article 49 septies G de l'annexe III au code général des impôts et au rescrit du 5 octobre 2010.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 novembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient :
- que le moyen tiré de l'irrégularité de la vérification de comptabilité présente un caractère inopérant au regard du droit de la société Armeuble à bénéficier de la restitution de crédit d'impôt en litige ;
- que l'opération de recherche en cause ne présente pas un caractère innovant, ou une amélioration substantielle, au sens de l'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts, mise au point par une démarche de recherche impliquant la mise en oeuvre de moyens humains spécifiques.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bourion,
- et les conclusions de Mme Chevalier-Aubert, rapporteur public.
1. Considérant que la société Armeuble, aux droits de laquelle vient la SARL Réalisation Conception Production (R.C.P) à la suite d'une transmission de patrimoine intervenue à son profit le 20 avril 2013, exerçait une activité de fabrication et vente de tringles à rideaux et de produits assimilés sous l'enseigne commerciale Europe 2000 ; que la société Armeuble a déclaré être titulaire d'un crédit d'impôt recherche au titre de l'année 2010 d'un montant de 102 422 euros au titre de travaux ayant abouti à la création d'un nouvel écran de cinéma ; qu'à la suite d'une vérification de comptabilité dont la société Armeuble a fait l'objet au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010, le vérificateur a sollicité l'avis de la délégation régionale à la recherche et à la technologie de Rhône-Alpes, qui a considéré que les travaux de recherche de la société n'étaient pas éligibles au crédit d'impôt recherche, ce dont la société Armeuble a été informée par la proposition de rectification du 24 octobre 2011 consécutive au contrôle ; que la société Armeuble a déposé une réclamation aux fins de restitution du crédit d'impôt recherche au titre de dépenses engagées en 2010, qui a fait l'objet d'une décision implicite de rejet ; que la SARL R.C.P interjette appel du jugement du 17 février 2015 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande de restitution ;
Sur la régularité de la procédure :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 199 ter B du code général des impôts : " Le crédit d'impôt pour dépenses de recherche défini à l'article 244 quater B est imputé sur l'impôt sur le revenu dû par le contribuable au titre de l'année au cours de laquelle les dépenses de recherche prises en compte pour le calcul du crédit d'impôt ont été exposées. L'excédent de crédit d'impôt constitue au profit de l'entreprise une créance sur l'Etat d'égal montant. Cette créance est utilisée pour le paiement de l'impôt sur le revenu dû au titre des trois années suivant celle au titre de laquelle elle est constatée puis, s'il y a lieu, la fraction non utilisée est remboursée à l'expiration de cette période. " ; qu'aux termes de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales : " Les réclamations relatives aux impôts, contributions, droits, taxes, redevances, soultes et pénalités de toute nature, établis ou recouvrés par les agents de l'administration, relèvent de la juridiction contentieuse lorsqu'elles tendent à obtenir soit la réparation d'erreurs commises dans l'assiette ou le calcul des impositions, soit le bénéfice d'un droit résultant d'une disposition législative ou réglementaire (...) " ;
3. Considérant que la demande de remboursement d'un crédit d'impôt recherche présentée sur le fondement des dispositions précitées de l'article 199 ter B du code général des impôts constitue une réclamation au sens de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales ; que la décision par laquelle l'administration rejette tout ou partie d'une telle réclamation n'a pas le caractère d'une procédure de reprise ou de redressement et peut être contestée directement devant le tribunal administratif ; qu'ainsi, nonobstant la circonstance que l'administration, qui avait, en vertu des dispositions des articles L. 10 et L. 45 B du livre des procédures fiscales, la faculté de remettre en cause le montant des crédits d'impôt non encore imputés, sans engager une vérification de comptabilité, ait néanmoins mis en oeuvre une telle procédure, les moyens tirés de l'irrégularité de ce contrôle, et en particulier d'une durée de vérification de comptabilité excédant trois mois et de l'absence d'un réel débat oral et contradictoire avec le vérificateur, présentent un caractère inopérant au regard du droit de la société appelante à bénéficier de la restitution du crédit d'impôt en litige ;
Sur l'éligibilité des dépenses :
4. Considérant qu'aux termes du I de l'article 244 quater B du code général des impôts : " Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année. Le taux du crédit d'impôt est de 30 % pour la fraction des dépenses de recherche inférieure ou égale à 100 millions d'euros (...) " ; qu'aux termes de l'article 49 septies F de l'annexe III au même code : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, sont considérées comme opérations de recherche scientifique ou technique : / (...) c. Les activités ayant le caractère d'opérations de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté " ;
5. Considérant que la SARL R.C.P fait valoir que les travaux de recherche, qui ont consisté à réaliser de nombreux tests sur le dimensionnement du tube aluminium et sur les caractéristiques des 184 tissus employés pour déterminer leur niveau de perméabilité au son, constituent des opérations de développement expérimental d'un nouvel écran de cinéma trans-sonore, effectuées au moyen de prototypes ; que la SARL R.C.P soutient, en s'appuyant sur des rapports du cabinet Inciativas et de l'Institut français du textile habillement (IFTH), que le produit mis au point comporte des modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état de l'art existant mais qu'il apporte un " concept nouveau sans concurrence " ; que, toutefois, il ressort du même rapport du 17 septembre 2012 de l'IFTH que ces travaux ont consisté en des tests de différents tissus destinés à identifier ceux présentant les propriétés requises et en une amélioration des conditions de découpe, la société ayant procédé à une nouvelle configuration d'électrode pour la soudure ; que cette constatation est d'ailleurs confirmée par le nouveau rapport du 18 mars 2014 d'un expert désigné par l'administration, indiquant qu'il s'agit d'assemblages de matériaux existants qui ne lèvent pas de verrous techniques même si les travaux ont abouti à un produit de nouvelle génération ; que, si la SARL R.C.P remet en cause le profil de l'expert et se plaint de ce que ce dernier ne s'intéresserait qu'aux techniques mises en oeuvre dans le domaine du textile et non à la création du nouveau produit, elle ne critique pas utilement les conclusions de son rapport faute d'établir en quoi cet écran trans-sonore comporte une amélioration substantielle présentant un caractère de nouveauté au sens des dispositions précitées ; qu'en conséquence, et sans qu'il soit besoin d'examiner si les personnels dont les dépenses comptabilisées au crédit d'impôt recherche répondaient aux conditions posées par l'article 49 septies G de l'annexe III au code général des impôts, c'est à bon droit que l'administration a exclu les dépenses exposées dans le cadre de ce projet du champ d'application du crédit d'impôt recherche ;
6. Considérant, que si la SARL R.C.P entend se prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales des instructions 4-A-1-00 et 4 A-3-12 §30, celles-ci ne sauraient utilement s'appliquer dès lors que la première prévoit de ne s'appliquer qu'au titre des années 1999 à 2003 et que la seconde est postérieure à l'année en litige et ne fait au demeurant pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle dont il est fait application dans le présent arrêt ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL R.C.P n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande dont il était saisi ;
Sur les frais exposés en cours d'instance :
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui, dans la présente instance, n'est pas la partie perdante, la somme demandée par la SARL R.C.P au titre des frais exposés en cours d'instance et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL R.C.P est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Réalisation Conception Production (R.C.P) et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 4 février 2016 à laquelle siégeaient :
M.Pruvost, président de chambre,
M. Pourny, président-assesseur,
Mme Bourion, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 mars 2016.
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N° 15LY01354