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03/12/2015 | FRANCE | N°14LY02524

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 03 décembre 2015, 14LY02524


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B..., épouseC..., a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 20 décembre 2013 du préfet du Rhône refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignant, comme pays de reconduite d'office à l'expiration de ce délai, le pays dont elle a la nationalité, ou tout pays pour lequel elle établit être légalement admissible.

Par un jugement n° 1402556-1402796 du 2 juillet 2014, le tribun

al administratif de Lyon a, sous le n° 1402796, d'une part, annulé ces décisions et, d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B..., épouseC..., a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 20 décembre 2013 du préfet du Rhône refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignant, comme pays de reconduite d'office à l'expiration de ce délai, le pays dont elle a la nationalité, ou tout pays pour lequel elle établit être légalement admissible.

Par un jugement n° 1402556-1402796 du 2 juillet 2014, le tribunal administratif de Lyon a, sous le n° 1402796, d'une part, annulé ces décisions et, d'autre part, enjoint au préfet du Rhône de réexaminer la situation de Mme C...dans un délai de deux mois.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 août 2014, le préfet du Rhône demande à la cour d'annuler le jugement du 2 juillet 2014, en tant qu'il statue sur la demande n° 1402796.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit ; en effet, il n'était pas tenu de suivre ou de contester dans sa décision l'indication portée par le médecin de l'agence régionale de santé selon laquelle l'intéressée ne pourrait pas voyager sans risque dans la mesure où cette indication présentait un caractère superfétatoire et où aucune difficulté particulière n'avait été portée à sa connaissance sur ce point ;

- l'Arménie dispose de structures médicales et de médicaments permettant de soigner la pathologie de MmeC... ; dès lors, le refus de séjour opposé à l'intéressée n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision de refus de titre de séjour n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni celles de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 juillet 2015, Mme C..., représentée par Me Proust, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat d'une somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- ayant considéré qu'un traitement approprié existait dans le pays d'origine, le préfet était tenu de motiver sa décision sur la possibilité pour elle de voyager sans risque ;

- il n'existe pas de traitement approprié dans le pays d'origine, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges ;

- son intégration est ancienne et exemplaire.

Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 novembre 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Meillier.

1. Considérant que Mme A...B..., épouseC..., ressortissante arménienne née en 1982, a sollicité le 3 mai 2013 la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par décisions du 20 décembre 2013, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné son pays de destination ; que, par un jugement du 2 juillet 2014, le tribunal administratif de Lyon a, sous le n° 1402796, annulé ces décisions et enjoint au préfet du Rhône de réexaminer la situation de Mme C... dans un délai de deux mois ; que le préfet du Rhône relève appel, dans cette mesure, de ce jugement ;

Sur l'appel du préfet :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé : " (...) le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; / - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays (...) " ;

3. Considérant qu'il incombe au préfet de prendre en considération les modalités d'exécution d'une éventuelle mesure d'éloignement dès le stade de l'examen d'une demande de titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " présentée sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en particulier, il doit s'assurer de la capacité de l'étranger à voyager sans risque à destination de son pays d'origine ; qu'à cet égard, la circonstance que, depuis l'intervention de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé, le médecin de l'agence régionale de santé n'est pas tenu, en particulier lorsqu'il estime qu'il n'existe pas de traitement approprié dans le pays d'origine, de se prononcer sur le point de savoir si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays est sans influence sur l'étendue des obligations du préfet ;

4. Considérant que, par avis du 12 juin 2013, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de Mme C...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il n'existait pas de traitement approprié dans son pays d'origine, que les soins nécessités par son état devaient être poursuivis pendant douze mois et que l'intéressée ne pouvait voyager sans risque vers son pays d'origine ; qu'en se fondant sur divers éléments relatifs aux capacités locales en matière de soins médicaux et de médicaments disponibles en Arménie, le préfet a toutefois estimé que Mme C... pouvait bénéficier d'un traitement approprié en Arménie et que, dès lors, elle ne remplissait pas les conditions de délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, pour annuler la décision de refus de titre de séjour du 20 décembre 2013, le tribunal administratif de Lyon a relevé que, si le préfet du Rhône avait pu estimer qu'un traitement approprié existait dans le pays d'origine de MmeC..., il ne contestait pas l'impossibilité pour l'intéressée de voyager sans risque vers ce pays, ce qui faisait obstacle, au moins provisoirement, à ce qu'elle puisse y bénéficier du traitement nécessité par son état de santé ;

5. Considérant que, pour contester le jugement attaqué, le préfet du Rhône se borne à soutenir qu'il n'était pas tenu de se prononcer sur la capacité de l'intéressée à voyager sans risque vers son pays d'origine dans la mesure où, d'une part, l'indication portée à cet égard par le médecin de l'agence régionale de santé présentait un caractère superfétatoire et où, d'autre part, aucune difficulté particulière n'avait été portée à sa connaissance sur ce point ; qu'il ne conteste pas que, comme l'a estimé le médecin de l'agence régionale de santé, Mme C...ne pouvait voyager sans risque vers son pays d'origine ; que, dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le préfet ne pouvait, sans méconnaître les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, refuser d'autoriser le séjour en France de l'intéressée ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Rhône n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé les décisions du 20 décembre 2013 et lui a enjoint de réexaminer la situation de Mme C... ;

Sur les conclusions de Mme C...présentées au titre des frais exposés et non compris dans les dépens :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante, le versement à Me Proust, avocat de MmeC..., d'une somme de 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Proust renonce à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet du Rhône est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera une somme de 500 euros à Me Proust au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Proust renonce à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme A...B..., épouseC.... Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 12 novembre 2015 à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

M. Pourny, président-assesseur,

M. Meillier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 décembre 2015.

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N° 14LY02524


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY02524
Date de la décision : 03/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. Charles MEILLIER
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : SELARL BERNARDI ESQUERRE MONTEIRO PROUST

Origine de la décision
Date de l'import : 24/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-12-03;14ly02524 ?
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