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09/07/2015 | FRANCE | N°14LY03222

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 09 juillet 2015, 14LY03222


Vu la requête, enregistrée le 22 octobre 2014, présentée pour M. B...D...-A..., domicilié ... ;

M. D... -A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401143 du 18 septembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 10 avril 2014 par lesquelles le préfet de l'Allier a rejeté sa demande de titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Allier de lui délivrer une carte de séj

our temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à ...

Vu la requête, enregistrée le 22 octobre 2014, présentée pour M. B...D...-A..., domicilié ... ;

M. D... -A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401143 du 18 septembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 10 avril 2014 par lesquelles le préfet de l'Allier a rejeté sa demande de titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Allier de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter du jugement à intervenir et sous astreinte de 30 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour lui de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- l'arrêté a été signé par une autorité incompétente ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des considérations humanitaires et exceptionnelles justifiant une admission au séjour et a méconnu les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 janvier 2015, présenté par le préfet de l'Allier qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé ;

Vu le mémoire, enregistré le 13 mars 2015 présenté pour M. D... -A... qui conclut aux mêmes fins que précédemment ;

Vu l'ordonnance en date du 20 mars 2015 fixant la clôture d'instruction au 8 avril 2015, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 avril 2015, présenté pour M. D... -A... qui conclut aux mêmes fins que précédemment ;

Vu l'ordonnance en date du 9 avril 2015 portant réouverture de l'instruction en application des articles R. 613-1 et R. 613-4 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 avril 2015, présenté par le préfet de l'Allier qui conclut aux mêmes fins que précédemment ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 pris pour son application ;

Vu le code de justice administrative ;

En application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative, le rapporteur public a été dispensé d'exposer ses conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 juin 2015 le rapport de M. Segado, premier conseiller.

1. Considérant que M. D... -A..., ressortissant camerounais né le 11 juin 1980, est entré régulièrement en France le 17 octobre 2003 muni d'un visa étudiant ; qu'il a été ensuite titulaire d'un titre de séjour en qualité étudiant régulièrement renouvelé jusqu'au 30 novembre 2007 ; qu'il a sollicité, le 23 avril 2008, plusieurs mois après l'expiration de son titre, la délivrance d'une carte de séjour temporaire ; que, par décisions du 7 décembre 2010, le préfet des Alpes Maritimes lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire ; que, par jugement du 5 mai 2011, le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ; que M. D... -A... a présenté une nouvelle demande de titre de séjour le 5 juillet 2012 ; que, par décisions du 25 septembre 2012, le préfet de l'Allier a rejeté cette demande et l'a obligé à quitter le territoire français ; que le 6 février 2014, l'intéressé a formé une troisième demande de titre de séjour ; que, par des décisions du 10 avril 2014 le préfet de l'Allier a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que M. D... -A... relève appel du jugement du 18 septembre 2014 par lequel le Tribunal Administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces dernières décisions ;

2. Considérant, en premier lieu, que les décisions contestées ont été signées par M. Serge Bideau, secrétaire général de la préfecture de l'Allier qui a reçu, par arrêté du préfet de l'Allier du 20 janvier 2014 publié le 21 janvier 2014 au recueil des actes administratifs de l'Etat dans le département de l'Allier, délégation à l'effet de signer " tous arrêtés, décisions, circulaires, contrats, conventions relevant des attributions de l'Etat dans le département de l'Allier, à l'exception des déclinatoires de compétences et arrêtés de conflit et des actes pour lesquels une délégation a été confiée à un chef de service de l'Etat dans le département ", les décisions en litige ne relevant pas ainsi de ces exceptions ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions contestées doit être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

4. Considérant que M. D... -A... fait valoir qu'il vit en France depuis 10 ans et demi, qu'il a obtenu une licence, un master I et master II de sociologie, qu'il a ensuite travaillé de 2005 à 2011 comme inspecteur de la qualité dans une compagnie d'assurances, qu'il a créé un tissu amical et social en France, que sa mère gravement malade, une soeur de nationalité française, un frère et sa belle soeur et leur fils résident sur le territoire français, qu'un frère réside en Côte d'Ivoire, qu'une autre soeur est décédée, qu'il a été adopté sous adoption simple par M.A..., père missionnaire français et qu'il vit en union libre depuis trois ans avec une personne de nationalité française ; que toutefois, si sa mère souffre d'insuffisance rénale chronique de stade terminal et a subi une transplantation rénale nécessitant un suivi strict et régulier en France, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant s'occupe de sa mère, à proximité de laquelle il ne réside pas, ou que sa présence en France s'avèrerait indispensable pour cette dernière eu égard à son état de santé ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'il est dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 23 ans avant de venir en France pour poursuivre des études ; que, par ailleurs, les pièces produites au dossier sont insuffisamment circonstanciées concernant l'ancienneté et l'intensité de la relation amoureuse qu'il déclare avoir avec un ressortissant français depuis trois années ; qu'enfin, les éléments lacunaires concernant sa relation avec un ressortissant français et les documents généraux sur la situation des homosexuels au Cameroun ne suffisent pas à constater que l'orientation sexuelle dont il fait désormais état dans ses écritures présentées devant le Tribunal et la Cour l'exposerait personnellement et directement à des persécutions qui feraient obstacle à ce qu'il puisse mener une vie privée normale au Cameroun ; que, par suite, et eu égard à ses conditions de séjour en France, les décisions litigieuses n'ont pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ces décisions ont été prises et n'ont, ainsi, pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de ses décisions sur la situation personnelle de l'intéressé ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;

6. Considérant que M. D... -A..., qui réside dans l'Allier, fait valoir que sa mère, qui est domiciliée..., qu'elle a bénéficié pour ce motif d'un titre de séjour ; que toutefois il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé s'occupe de sa mère ou que sa présence en France serait rendue nécessaire en raison de l'état de cette dernière ; que s'il soutient par ailleurs qu'il encourt des risques dans son pays d'origine en raison de son orientation sexuelle, les éléments produits au dossier ne sont pas suffisamment précis et circonstanciés quant à la réalité de risques pesant de façon individualisée sur sa personne ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant qu'il ne relevait pas de considérations humanitaires ou d'un motif exceptionnel au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

7. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...)Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950." et qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants. " ;

8. Considérant que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les éléments lacunaires concernant la relation du requérant avec un ressortissant français et les documents généraux sur la situation des homosexuels au Cameroun ne suffisent pas à établir qu'il encourt des risques pour sa vie ou sa liberté en cas de retour dans son pays en raison de son orientation sexuelle dont il fait désormais état dans ses écritures présentées devant le Tribunal et la Cour ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui n'est opérant qu'à l'encontre de la décision fixant le pays de destination, doit être écarté ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D... -A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D... -A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D...-A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Allier.

Délibéré après l'audience du 18 juin 2015, à laquelle siégeaient :

M. Seillet, président,

M. Segado et MmeC..., premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 9 juillet 2015.

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N° 14LY03222


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY03222
Date de la décision : 09/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Juan SEGADO
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : PACCARD

Origine de la décision
Date de l'import : 03/09/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-07-09;14ly03222 ?
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