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31/03/2015 | FRANCE | N°14LY01393

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 31 mars 2015, 14LY01393


Vu la requête, enregistrée le 2 mai 2014, au greffe de la Cour, présentée pour Mme D... A...C..., domiciliée ...;

Mme A...C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400177 du 10 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 décembre 2013 du préfet du Rhône lui refusant la délivrance d'un certificat de résidence, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté pour excè

s de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un certificat de rési...

Vu la requête, enregistrée le 2 mai 2014, au greffe de la Cour, présentée pour Mme D... A...C..., domiciliée ...;

Mme A...C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400177 du 10 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 décembre 2013 du préfet du Rhône lui refusant la délivrance d'un certificat de résidence, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler ledit arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ainsi que les dépens ;

Mme A...C...soutient que :

- le préfet du Rhône a commis une erreur de fait de sa situation dès lors qu'elle est entrée en France en 2005 pour venir vivre auprès de sa soeur à laquelle ses parents l'avaient confiée par un acte algérien de kafala et justifie y avoir résidé entre 2006 et 2013 ;

- la décision lui refusant le droit au séjour est intervenue en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de celles de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ainsi que des circulaires des 12 mai 1998, 19 décembre 2002 et 27 novembre 2012 et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle est arrivée en France à la suite d'un jugement de kafala qui a considéré que son intérêt commandait, au sens des stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant, qu'elle soit recueillie chez sa soeur en France ;

- les décisions lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination sont illégales par exception de l'illégalité de la décision lui refusant le droit au séjour

- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le délai de départ volontaire à trente jours sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 mars 2015, présenté par le préfet du Rhône qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme A...C...d'une somme de 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le préfet du Rhône soutient que :

- Mme A...C...ne justifie par aucun moyen probant de l'ancienneté de sa présence sur le territoire national ;

- elle ne démontre pas son impossibilité de mener une vie privée et familiale dans son pays ni son intégration dans la société française ;

- la requérante n'est pas fondée à exciper de l'illégalité du refus de séjour pour solliciter l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- cette décision n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la requérante n'a avancé aucun élément qui aurait justifié le prolongement du délai de départ volontaire ;

Vu la décision du 20 mai 2014 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme A...C... ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention de New York relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

Sur sa proposition, le rapporteur public a été dispensé de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative par la présidente de la formation de jugement ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mars 2015 :

- le rapport de Mme Bouissac, présidente,

- et les observations de Me B...pour Mme A...C... ;

1. Considérant que Mme A...C..., de nationalité algérienne, née le 1er décembre 1991, a été confiée, par jugement du 20 août 2004 du Tribunal de Mostaganem, à sa soeur qu'elle est venue rejoindre en France le 15 août 2005 ; qu'elle a sollicité le 20 mars 2013 la délivrance d'un certificat de résidence auquel le préfet du Rhône a, par décision du 9 décembre 2013, opposé un refus qu'il a assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel elle serait renvoyée en cas d'exécution d'office de cette mesure d'éloignement ; que Mme A...C... relève appel du jugement du 10 avril 2014 du Tribunal administratif de Lyon rejetant sa demande tendant à l'annulation desdites décisions ;

Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5. au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; /2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant que Mme A...C...soutient qu'elle réside en France depuis 2005, année au cours de laquelle, alors âgée de quatorze ans, elle est venue habiter à Vénissieux chez sa soeur, de nationalité française, à laquelle ses parents avaient délégué leur autorité parentale en vertu d'un acte algérien de kafala ; que, toutefois, elle ne démontre pas, par les justificatifs qu'elle produit, en l'occurrence des attestations peu circonstanciées et dépourvues de valeur probante ainsi que des documents administratifs ou sociaux par trop discontinus, y avoir vécu de façon stable au cours des années 2006 à 2010 ; qu'elle ne le démontre pas davantage par la production de factures d'achats effectués en 2011 et de certificats médicaux dépourvus de valeur probante ; qu'ainsi, l'erreur de fait alléguée commise par le préfet du Rhône n'est pas établie ;

4. Considérant que Mme A...C..., ainsi qu'il a été dit, ne démontre pas vivre en France de façon stable et continue depuis qu'elle y est entrée en 2005 ; que si elle soutient résider auprès de sa soeur de nationalité française et avoir en France une autre soeur et sa grand-mère maternelle, il ressort des pièces du dossier qu'elle est célibataire et sans charge de famille sur le territoire et n'est pas dépourvue d'attaches familiales en Algérie où résident ses parents et ses frères ; que par les pièces qu'elle produit, elle ne justifie pas davantage de sa bonne insertion alléguée dans la société française ; que, dans ces conditions, Mme A...C...n'est pas fondée à soutenir que le préfet du Rhône a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis ; que les moyens tirés de ce que la décision de refus de séjour méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles du 5. de l'article 6 de l'accord franco-algérien doivent être écartés ; que, pour les mêmes motifs, la décision refusant le droit au séjour à Mme A...C...n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

5. Considérant que Mme A...C...ne peut utilement se prévaloir, au soutien du moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'accord franco-algérien et de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des circulaires ministérielles des 12 mai 1998 et 19 décembre 2002, ni de celle du 28 novembre 2012 ;

6. Considérant que si en application des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ", doit être regardé comme un enfant en application de l'article premier de cette convention " tout être humain âgé de moins de dix-huit ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt, en vertu de la législation qui lui est applicable " ; que dès lors la méconnaissance des stipulations de ladite convention ne peut être invoquée, à l'appui de la demande de Mme A...C..., majeure, au sens de la convention, à la date de la décision contestée ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) " ;

8. Considérant que Mme A...C...s'étant vu refuser, par décision du 9 décembre 2013, la délivrance d'un titre de séjour, elle entrait dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

9. Considérant que l'illégalité du refus de séjour n'ayant pas été démontrée, Mme A... C... n'est pas fondée à s'en prévaloir, par voie d'exception, à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

10. Considérant que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation, au soutien duquel sont invoqués les mêmes éléments qu'à l'encontre du refus de certificat de résidence, sans argumentation spécifiquement rapportée aux effets de la mesure d'éloignement critiquée, doit être rejeté par les mêmes motifs que ceux déjà énoncés ;

Sur la légalité de la décision fixant le délai de départ volontaire à trente jours :

11. Considérant que l'illégalité du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français n'ayant pas été démontrée, Mme A...C...n'est pas fondée à s'en prévaloir, par voie d'exception, à l'encontre de la décision lui assignant un délai de départ volontaire de trente jours ;

12. Considérant que si Mme A...C...soutient que cette décision procède d'une appréciation manifestement erronée de sa situation, ce moyen n'est assorti d'aucune précision et ne peut en conséquence qu'être rejeté ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, la somme que demande Mme A...C...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le préfet du Rhône en application des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A...C...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du préfet du Rhône tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...A...C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 10 mars 2015 à laquelle siégeaient :

Mme Bouissac, présidente,

M. Besse, premier conseiller,

Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 31 mars 2015.

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N° 14LY01393


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY01393
Date de la décision : 31/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme BOUISSAC
Rapporteur ?: Mme Dominique BOUISSAC
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : BESCOU

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-03-31;14ly01393 ?
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