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31/03/2015 | FRANCE | N°14LY00009

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 31 mars 2015, 14LY00009


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 6 janvier 2014, présentée pour Mme B... C...A..., domiciliée... ;

Mme A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1306462 du 9 décembre 2013 par lequel le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 5 décembre 2013 par lesquels le préfet de l'Isère a, d'une part, pris à son encontre une obligation de quitter le territoire français sans délai, prononcé une interdiction de retour sur le territoire français penda

nt une durée de deux ans et prescrit qu'elle pourrait faire l'objet d'un éloignemen...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 6 janvier 2014, présentée pour Mme B... C...A..., domiciliée... ;

Mme A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1306462 du 9 décembre 2013 par lequel le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 5 décembre 2013 par lesquels le préfet de l'Isère a, d'une part, pris à son encontre une obligation de quitter le territoire français sans délai, prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans et prescrit qu'elle pourrait faire l'objet d'un éloignement forcé à destination du pays dont elle a la nationalité ou de tout autre pays dans lequel elle est légalement admissible et a, d'autre part, décidé son assignation à résidence ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdits arrêtés ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer sa situation après lui avoir délivré une autorisation provisoire de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, à payer à son conseil, la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle ;

Mme A...soutient :

- que l'obligation de quitter le territoire français méconnait l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans la mesure où elle souffre d'une pathologie nécessitant des soins continus, des examens couteux, un suivi spécialisé et une intervention chirurgicale qui ne peuvent être réalisés dans son pays d'origine ; que cette décision a été prise sans qu'elle ait pu présenter au préalable au préfet des observations écrites ou orales ; qu'en particulier, elle n'a pu faire état auprès du préfet, avant qu'il ne prenne la décision attaquée, du fait qu'elle devait rencontrer son chirurgien le lendemain de l'audience devant le Tribunal ; que le préfet aurait dû saisir le médecin de l'agence régionale de santé avant de prendre à son encontre une obligation de quitter le territoire français ;

- que la décision prononçant à son encontre une interdiction de territoire français n'est pas suffisamment motivée ; que le préfet a commis une erreur de droit en se fondant uniquement sur la circonstance qu'elle s'était maintenue sur le territoire français au-delà du délai de départ volontaire pour prendre à son encontre une interdiction de territoire français sur le fondement de l'article L. 511-1 III alors qu'il aurait dû également tenir compte de sa durée de présence en France, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace à l'ordre public que sa présence en France constitue ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la lettre en date du 6 février 2015, informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour était susceptible de relever d'office l'irrecevabilité des moyens de légalité externe présentés par MmeA..., ces moyens se rattachant à une cause juridique distincte des moyens invoqués en première instance dans le délai de recours contentieux ;

Vu la décision du 23 janvier 2014 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme A... ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le traité sur l'Union européenne ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 ;

Vu l'arrêt rendu par la Cour de justice de l'Union européenne le 22 novembre 2012, dans l 'affaire C 277/11 ;

Vu l'arrêt rendu par la Cour de justice de l'Union européenne le 10 septembre 2013, dans l'affaire C 383/13 PPU ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Sur sa proposition, le rapporteur public a été dispensé de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative par le président de la formation de jugement ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mars 2015 :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, premier conseiller ;

1. Considérant que MmeA..., née le 16 août 1983, de nationalité ivoirienne, déclare être entrée en France le 31 novembre 2011 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour ; que l'intéressée, qui avait déposé une demande de titre de séjour en qualité d'étudiante, a fait l'objet le 15 février 2012 d'un refus de titre assorti d'une obligation de quitter le territoire français, qui ont été confirmés par le Tribunal administratif de Lyon, par jugement du 29 mai 2012, puis par la Cour administrative d'appel de Lyon, par arrêt du 12 décembre 2012 ; que MmeA..., s'étant maintenue sur le territoire français après ces décisions, le préfet de l'Isère a, le 5 décembre 2013, pris à son encontre une décision d'obligation de quitter le territoire français sans délai, prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans, prescrit qu'elle pourrait faire l'objet d'un éloignement forcé à destination du pays dont elle a la nationalité ou de tout autre pays dans lequel elle est légalement admissible et décidé son assignation à résidence ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français sans délai :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 I. du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 5° Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé. " ;

3. Considérant que Mme A...s'étant vu, par décision du 15 février 2012, refuser le renouvellement de son récépissé de demande de carte de séjour, elle entrait dans le cas prévu par les dispositions précitées du 5° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

Sur les moyens de légalité externe :

4. Considérant que, devant le tribunal administratif, dans le délai de recours contentieux, Mme A...n'a présenté, à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, que des moyens de légalité interne ; que les moyens tirés, d'une part, de ce qu'elle n'aurait pas pu présenter des observations écrites ou orales et, d'autre part, que le préfet aurait dû saisir le médecin de l'agence régionale de santé avant de prendre la décision attaquée, fondés sur une cause juridique distincte, constituent une demande nouvelle irrecevable en appel ;

Sur le moyen de légalité interne :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " ;

6. Considérant que sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;

7. Considérant que Mme A...produit, à l'appui de sa requête, différents certificats médicaux attestant qu'elle souffre d'une pathologie gynécologique nécessitant une intervention chirurgicale ; que, toutefois, ces documents ne permettent ni de démontrer que l'absence de traitement de cette pathologie aurait pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni d'établir l'absence de possibilité de traitement dans son pays d'origine ; qu'à ce titre, le certificat médical du 17 décembre 2013, au demeurant postérieur aux décisions contestées, produit par l'intéressée indique seulement que cette " intervention ne peut être réalisée dans les conditions optimales dans le pays d'origine de la patiente compte tenu des risques opératoires et de la prévention des complications post opératoires " ; que, par suite, le préfet de l'Isère n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en obligeant Mme A...à quitter le territoire ;

Sur l'interdiction de retour en France pendant une durée de deux ans :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " III. L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. (...) Lorsque l'étranger ne faisant pas l'objet d'une interdiction de retour s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire, l'autorité administrative peut prononcer une interdiction de retour pour une durée maximale de deux ans à compter de sa notification. (...) L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. " ;

9. Considérant que la décision attaquée, qui vise les dispositions précitées et précise que Mme A...est célibataire sans enfant, ne séjournait en France que depuis deux ans alors qu'elle a vécu en dehors de la France jusqu'à l'âge de 28 ans, qu'elle s'est maintenue sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire et qu'il existe un risque qu'elle se soustrait à nouveau à l'obligation de quitter le territoire français, est suffisamment motivée ;

10. Considérant que si la requérante soutient que le préfet a pris sa décision d'interdiction de retour en France au seul motif qu'elle s'est maintenue sur le territoire français au-delà du délai de départ volontaire, ainsi qu'il vient d'être indiqué au point 9, le préfet a pris en compte les différents critères prévus à l'article L. 511-1 III précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour prendre à l'encontre de Mme A...la décision litigieuse ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'il aurait commis une erreur de droit doit être écarté ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que MmeA..., qui n'a présenté aucun moyen contre la décision fixant son pays de destination et celle l'assignant à résidence, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles qu'elle présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 10 mars 2015 à laquelle siégeaient :

Mme Bouissac, présidente,

M. Besse, premier conseiller,

Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 31 mars 2015.

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N°14LY00009


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY00009
Date de la décision : 31/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme BOUISSAC
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : ZAIEM

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-03-31;14ly00009 ?
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