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30/10/2014 | FRANCE | N°13LY01469

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 30 octobre 2014, 13LY01469


Vu la requête, enregistrée le 10 juin 2013, présentée pour M. A...B..., domicilié ... ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201171 du 13 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du président du conseil général de la Côte-d'Or du 18 avril 2012 réduisant son allocation de revenu de solidarité active (RSA) de 100 euros à compter du 1er mars 2012 et suspendant totalement le versement de cette allocation à compter du 1er avril 2012 ;

2°) de condamner le départ

ement de la Côte-d'Or à lui verser l'allocation de RSA à compter du 1er avril 2012, y c...

Vu la requête, enregistrée le 10 juin 2013, présentée pour M. A...B..., domicilié ... ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201171 du 13 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du président du conseil général de la Côte-d'Or du 18 avril 2012 réduisant son allocation de revenu de solidarité active (RSA) de 100 euros à compter du 1er mars 2012 et suspendant totalement le versement de cette allocation à compter du 1er avril 2012 ;

2°) de condamner le département de la Côte-d'Or à lui verser l'allocation de RSA à compter du 1er avril 2012, y compris les intérêts au taux légal et les intérêts des intérêts, dans un délai de 15 jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge du département de la Côte-d'Or les entiers dépens de première instance et d'appel, dont le timbre fiscal de 35 euros payé en première instance, et une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- par décision du 18 avril 2012, le président du conseil général de la Côte-d'Or a maintenu la décision du 24 février 2012 par laquelle il a diminué son allocation de RSA à compter du 1er mars 2012 pour une durée d'un mois et décidé de la poursuite de la procédure de suspension du RSA passé ce délai sauf démarche de sa part et a rejeté sa demande indemnitaire de 60 000 euros qu'il avait formulée par courrier du 17 mars 2012 ;

- la décision du 18 avril 2012 est insuffisamment motivée dès lors qu'elle mentionne un avis de l'équipe pluridisciplinaire qui ne lui a pas été communiqué et qui n'est pas annexé à la décision ;

- cette décision méconnaît les dispositions de l'ancien article R. 262-68 du code de l'action sociale et des familles car n'ayant jamais fait l'objet d'une décision de suspension, seule une décision de réduction de son allocation de RSA pouvait être prise ;

- cette décision a été prise irrégulièrement dès lors qu'une mesure de suspension ne pouvait intervenir qu'après l'organisation d'une nouvelle procédure contradictoire prévue aux articles L. 262-37 et R. 262-69 du code de l'action sociale et des familles ;

- cette décision est irrégulière faute de mention de la durée de la suspension alors que le 2° de l'ancien article R. 262-68 du code de l'action sociale et des familles limite expressément cette durée à 4 mois et que ceci ne saurait être compensé par la mention de 3 mois figurant dans la décision du 24 février 2012 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 septembre 2013, présenté pour le département de la Côte-d'Or, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. B...une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- à titre principal, la requête est irrecevable faute d'être accompagnée d'une copie du jugement attaqué ;

- à titre subsidiaire, les moyens de légalité externe relatifs à un vice de forme et des vices de procédure étant sans incidence sur les droits au bénéfice du revenu de solidarité active et n'ayant pas conduit à la privation d'une garantie procédurale substantielle, sont inopérants ;

- la décision du 18 avril 2012, qui mentionne les textes applicables et les circonstances de faits, est suffisamment motivée et respecte donc les exigences de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la commission pluridisciplinaire a bien été consultée conformément à l'article L. 262-39 du code de l'action sociale et des familles et le département de la Côte-d'Or n'était pas tenu de produire l'avis émis par la commission pluridisciplinaire, aucune obligation de transmission à l'intéressé de l'avis de cette commission ou d'un procès-verbal n'existant ;

- par les décisions des 24 février et 18 avril 2012, il a bien été procédé dans un premier temps à une réduction de l'allocation de RSA pour une période d'un mois avant de suspendre totalement cette allocation à compter d'avril 2012 et ce en l'absence de toute démarche de M.B... ;

- le code de l'action sociale et des familles n'impose pas des décisions matériellement distinctes pour la réduction et la suspension du RSA ;

- rien n'obligeait le département de la Côte-d'Or à organiser une nouvelle procédure contradictoire entre la période de réduction du RSA et celle de sa suspension, la réduction étant une modalité de la décision de suspension de l'article L. 262-37 du code de l'action sociale et des familles et rien ne prévoit l'organisation de deux procédures distinctes selon que la suspension est totale ou partielle ;

- M. B...a bien été mis à même de faire valoir ses observations avant l'édiction de la décision du 24 février 2012 ;

- la décision précise le terme de la mesure de suspension ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 octobre 2013, présenté pour M. B...qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que sa requête est recevable, le jugement attaqué ayant été adressé le 10 juin 2013 par télécopie au greffe de la Cour ; que seule une réduction d'un montant maximal de 100 euros pouvait être prise à son encontre, et non une décision de suspension intégrale ; que la référence à l'article L. 262-37 du code de l'action sociale et des familles ne saurait suffire en matière de durée ; que les moyens de légalité externe doivent être examinés ; que ces illégalités externes ont nui à ses droits réels au bénéfice du RSA en le privant de la connaissance de l'avis de la commission pluridisciplinaire et en conduisant directement à une suspension intégrale de son RSA sans procédure contradictoire et sans indication de la durée de la suspension

Vu le mémoire, enregistré le 31 octobre 2013, présenté pour le département de la Côte-d'Or qui confirme ses précédentes écritures ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 novembre 2013, présenté pour M. B...qui confirme, par les mêmes moyens que précédemment, les conclusions de sa requête ;

Vu la décision du 20 mars 2013, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M.B... ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le décret n° 2012-294 du 1er mars 2012 relatif aux procédures d'orientation, de suspension et de radiation applicables aux bénéficiaires du revenu de solidarité active, notamment son article 4 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 octobre 2014 :

- le rapport de Mme Cottier, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;

- et les observations de Me Dandon, avocat du département de la Côte-d'Or ;

1. Considérant que par décision du 24 février 2012, le président du conseil général de la Côte-d'Or a décidé de diminuer pour une durée d'un mois de 100 euros l'allocation de revenu de solidarité active (RSA) perçue par M. B...à compter du 1er mars 2012 et de suspendre, sauf démarche de ce dernier, le versement de l'allocation de RSA pour trois mois à compter d'avril 2012 ; que par décision du 18 avril 2012, le président du conseil général a, d'une part, rejeté le recours administratif obligatoire formé par M. B... et a ainsi maintenu la décision du 24 février 2012 et a, d'autre part, rejeté la demande indemnitaire de 60 000 euros que celui-ci avait formulée par courrier du 17 mars 2012 ; que M. B... fait appel du jugement du Tribunal administratif de Dijon du 13 décembre 2012 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 18 avril 2012 du président du conseil général de la Côte-d'Or rejetant son recours et maintenant la décision du 24 février 2012 et d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à la caisse d'allocations familiales de procéder à la régularisation du paiement du RSA avec effet rétroactif à compter du 1er avril 2012 ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles : " Le revenu de solidarité active a pour objet d'assurer à ses bénéficiaires des moyens convenables d'existence, d'inciter à l'exercice d'une activité professionnelle et de lutter contre la pauvreté de certains travailleurs, qu'ils soient salariés ou non salariés. " ; qu'aux termes de l'article L. 262-37 dudit code : " Sauf décision prise au regard de la situation particulière du bénéficiaire, le versement du revenu de solidarité active est suspendu, en tout ou partie, par le président du conseil général : 1° Lorsque, du fait du bénéficiaire et sans motif légitime, le projet personnalisé d'accès à l'emploi ou l'un des contrats mentionnés aux articles L. 262-35 et L. 262-36 ne sont pas établis dans les délais prévus ou ne sont pas renouvelés (...). / Cette suspension ne peut intervenir sans que le bénéficiaire, assisté à sa demande par une personne de son choix, ait été mis en mesure de faire connaître ses observations aux équipes pluridisciplinaires mentionnées à l'article L. 262-39 dans un délai qui ne peut excéder un mois. (...) " ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 262-68 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction alors applicable : " La suspension du revenu de solidarité active mentionnée à l'article L. 262-37 peut être prononcée, en tout ou partie, dans les conditions suivantes : 1° Lorsque le bénéficiaire n'a jamais fait l'objet d'une décision de suspension, en tout ou partie, le président du conseil général peut décider de réduire l'allocation d'un montant maximal de 100 €, pour une durée qui peut aller jusqu'à un mois ; 2° Lorsque le bénéficiaire a déjà fait l'objet d'une telle décision, le président du conseil général peut réduire l'allocation pour un montant qu'il détermine et une durée d'au plus quatre mois. Toutefois, lorsque le foyer est composé de plus d'une personne, la réduction ne peut excéder 50 % du montant forfaitaire mentionné au 2° de l'article L. 262-2. Lorsque la décision a été fondée sur un motif erroné, il est procédé à une régularisation des sommes non versées. " ; que l'article R. 262-69 du même code prévoit que : " Lorsque le président du conseil général envisage de réduire ou suspendre en tout ou partie le revenu de solidarité active en application de l'article L. 262-37, il en informe l'intéressé par courrier en lui indiquant les motifs pour lesquels il engage cette procédure et les conséquences qu'elle peut avoir pour lui. / L'intéressé est invité à présenter ses observations à l'équipe pluridisciplinaire compétente dans un délai maximum d'un mois à compter de la date de notification de ce courrier. Il est informé de la possibilité d'être entendu par l'équipe pluridisciplinaire et, à l'occasion de cette audition, d'être assisté de la personne de son choix. " ;

4. Considérant, en premier lieu, que lorsqu'il statue sur un recours dirigé contre une décision par laquelle l'administration, sans remettre en cause des versements déjà effectués, détermine les droits d'une personne à l'allocation de revenu de solidarité active, il appartient au juge administratif, eu égard tant à la finalité de son intervention dans la reconnaissance du droit à cette prestation d'aide sociale qu'à sa qualité de juge de plein contentieux, non de se prononcer sur les éventuels vices propres de la décision attaquée, mais d'examiner les droits de l'intéressé sur lesquels l'administration s'est prononcée, en tenant compte de l'ensemble des circonstances de fait qui résultent de l'instruction ; qu'au vu de ces éléments, il appartient au juge administratif d'annuler ou de réformer, s'il y a lieu, cette décision en fixant alors lui-même les droits de l'intéressé, pour la période en litige, à la date à laquelle il statue ou, s'il ne peut y procéder, de renvoyer l'intéressé devant l'administration afin qu'elle procède à cette fixation sur la base des motifs de son jugement ;

5. Considérant qu'il s'ensuit que, à l'appui de sa contestation de la décision du 18 avril 2012 confirmant la réduction de 100 euros pour le mois de mars 2012 de son allocation de RSA et supprimant celle-ci à compter d'avril 2012 pour trois mois, M. B...ne saurait utilement se prévaloir des circonstances que ladite décision serait insuffisamment motivée ou qu'elle serait intervenue à la suite d'une procédure irrégulière, en méconnaissance des dispositions précitées des articles R. 262-68 et R. 262-69 du code de l'action sociale et des familles ;

6. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que le contrat d'insertion signé le 22 juillet 2011, énumérant les engagements réciproques de M. B...et du département de la Côte-d'Or, a pris fin le 31 octobre 2011 ; que par ce contrat, l'intéressé s'engageait à définir et mettre en oeuvre son projet professionnel avec le chargé d'insertion professionnel, à s'insérer dans un contrat de travail et à tenir son référent informé des résultats de ses démarches ; qu'il était précisé que pour continuer à percevoir le RSA, il devait respecter ses engagements ; que dans le cadre de la démarche de renouvellement de son contrat d'insertion, M. B...n'a pas donné suite à des convocations à des rendez-vous avec son conseiller référent formulées notamment par lettres des 30 septembre 2011 et 18 octobre 2011 ; qu'aucun nouveau contrat d'insertion n'a été signé à l'expiration du contrat du 22 juillet 2011 ; que pour expliquer l'absence de renouvellement d'un contrat d'engagements réciproques, M. B...se borne à faire valoir que, lassé de l'inefficacité des services d'insertion du département de la Côte-d'Or et ayant mené par lui-même de nombreuses démarches de recherche d'emploi, dont il avait informé les services du département, il ne souhaitait plus se rendre aux entretiens avec son conseiller référent et qu'il n'avait pas voulu rencontrer l'équipe pluridisciplinaire lors de la réunion du 9 février 2012 pour discuter d'une éventuelle suspension de son allocation de RSA ; que, dans ces conditions, M. B...ne justifie d'aucun motif légitime, au sens des dispositions précitées de l'article L. 262-37 du code de l'action sociale et des familles, l'ayant empêché de se rendre à des rendez-vous avec son conseiller référent et de rencontrer la commission pluridisciplinaire ; que, dès lors, le président du conseil général a pu à bon droit constater que l'impossibilité d'établir un contrat d'engagements réciproques résultait du fait de l'intéressé et ne reposait sur aucun motif légitime ; qu'ainsi, M. B...n'alléguant pas que son foyer est composé de plus d'une personne, le président du conseil général n'a pas fait une inexacte application des dispositions des articles L. 262-37 et L. 262-38 alors en vigueur du code de l'action sociale et des familles en décidant la réduction de 100 euros de son allocation de RSA pour le mois de mars 2012 puis en réduisant à zéro cette allocation pendant trois mois à compter d'avril 2012 ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la requête par le département de la Côte-d'Or, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction, et tendant à la mise à la charge du département des dépens et au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions du département de la Côte-d'Or tendant à l'application de ces dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du département de la Côte-d'Or tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au département de la Côte-d'Or.

Délibéré après l'audience du 2 octobre 2014 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

Mme Cottier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 octobre 2014.

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N° 13LY01469


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01469
Date de la décision : 30/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

04 Aide sociale.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: Mme Cécile COTTIER
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : NOUGARET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-10-30;13ly01469 ?
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