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22/05/2014 | FRANCE | N°13LY00123

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 22 mai 2014, 13LY00123


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 14 janvier 2013, présentée pour M. et Mme B...C..., domiciliés 1112 rue de Limonest à Chasselay (69380) ;

M. et Mme B...C...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1006833 du 6 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2006, mise en recouvrement le 31 mars 2010 ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée, ainsi

que la restitution des sommes versées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le vers...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 14 janvier 2013, présentée pour M. et Mme B...C..., domiciliés 1112 rue de Limonest à Chasselay (69380) ;

M. et Mme B...C...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1006833 du 6 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2006, mise en recouvrement le 31 mars 2010 ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée, ainsi que la restitution des sommes versées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 794 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent :

- qu'en jugeant que l'administration pouvait valablement remettre en cause, s'agissant des titres cédés par M. B...C..., le bénéfice de l'abattement prévu à l'article 150-0 D ter du code général des impôts au seul motif que l'intéressé n'avait pas exercé une fonction de direction au sein de la SARL Betrim Immobilier, alors que ce moyen n'était pas invoqué en défense, le Tribunal administratif a statué " ultra petita " ; que les premiers juges ont également commis une " erreur de droit " dans la mesure où l'instruction n° 5 C-1-07 du 22 janvier 2007 (n° 146), confirmée par le rescrit fiscal n° 2009-5-FP du 3 février 2009, prévoit que cet abattement s'applique également, sous certaines conditions, en cas de cession simultanée de l'intégralité des titres détenus par des associés membres d'un groupe familial ; qu'en l'espèce, la cession portait sur l'intégralité des titres de la société et la cession des titres de M. C...est intervenue à la même date que celle des titres de Mme A...C..., dirigeante partie à la retraite ;

- que, s'agissant de la condition de rémunération des fonctions de direction exercées par Mme A...C..., le Tribunal administratif a mal apprécié les faits au regard des articles 150-0 D ter et 885 O bis du code général des impôts, tels qu'interprétés par l'instruction n° 7-S-7-05 du 3 octobre 2005, opposable à l'administration en application de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales et précisant qu'aux fins de l'appréciation du caractère normal de la rémunération d'un dirigeant, il convient de prendre en compte la situation économique et financière de l'entreprise et les modalités de fonctionnement de celle-ci ; qu'en l'espèce, l'absence de rémunération de la gérante s'explique par les difficultés financières de la société et le souci de ne pas mettre celle-ci en péril ; que, de plus, il convient de tenir compte du fait que Mme C...a perçu des dividendes, assimilés à des revenus d'activité et soumis à cotisations sociales ; que, par ailleurs, un salaire a été versé à M.C..., cofondateur de la société formant avec son épouse un même foyer fiscal ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 mai 2013, présenté par le ministre de l'économie et des finances, qui conclut au rejet de la requête ;

Le ministre de l'économie et des finances fait valoir :

- que, s'agissant des titres cédés par M.C..., l'absence d'exercice par l'intéressé d'une fonction de direction pendant les cinq années précédant la cession suffit à fonder, sur le terrain de la loi fiscale, la remise en cause du bénéfice de l'abattement ;

- que, s'agissant des titres cédés par MmeC..., il n'est pas établi que la situation économique et financière de la SARL Betrim Immobilier ait été, au cours des cinq années précédant la cession, si dégradée qu'il aurait été impossible de verser une quelconque rémunération à la gérante ; que la perception de dividendes, au demeurant de montants peu élevés, ne permet pas de pallier l'absence de rémunération de cette fonction de direction ; que le choix de verser un salaire à M. C...seul, au lieu de partager cette rémunération entre lui et son épouse, constitue une décision de gestion ; qu'ainsi, Mme C...n'a pas perçu une rémunération normale au sens de l'article 885 O bis du code général des impôts ;

- que les prévisions de l'instruction n° 7-S-7-05 du 3 octobre 2005, relative à la notion de biens professionnels au sens de l'impôt sur la fortune, ne peuvent être utilement invoquées dans un litige relatif à un autre impôt ; qu'en tout état de cause, les contribuables ne remplissent pas les conditions relatives aux différents assouplissements prévus par cette instruction, alors notamment que MmeC..., qui n'a perçu que des dividendes, ne peut être regardée comme ayant complété sa rémunération par des dividendes ;

- que, dans la mesure où MmeC..., seule dirigeante de la société cédée, ne satisfait pas elle-même à la condition de rémunération normale, M. C...ne pouvait pas davantage bénéficier de l'abattement, en qualité de co-fondateur et sur le fondement de l'instruction n° 5 C-1-07 du 22 janvier 2007 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales :

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 avril 2014 :

- le rapport de M. Meillier, conseiller ;

- les conclusions de Mme Chevalier-Aubert, rapporteur public ;

1. Considérant que M. B...C...et Mme A...C..., son épouse, ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces à l'issue duquel a été rehaussé le montant de leur cotisation d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2006 ; que, par jugement du 6 novembre 2012, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à la décharge de cette imposition supplémentaire ; que M. et Mme C...relèvent appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification en date du 19 juin 2009 ainsi que de la réponse, en date du 5 août 2009, aux observations des contribuables, que, pour remettre en cause l'application de l'abattement prévu à l'article 150-0 D ter du code général des impôts à la cession des titres détenus par M. B... C..., le service vérificateur s'est fondé sur la circonstance que Mme A... C..., qui n'avait pas été rémunérée pour l'exercice de sa fonction de gérante, ne remplissait pas elle-même les conditions de l'abattement pour les titres qu'elle a elle-même cédés ; que l'administration fiscale a maintenu ce motif dans sa décision du 6 septembre 2010 rejetant la réclamation préalable de M. et Mme C...; que, dans ses écritures en défense présentées en première instance, le directeur régional des finances publiques a indiqué que si, en principe, seul le cédant qui remplit les conditions énoncées à l'article 150-0 D ter peut bénéficier de l'abattement, il était toutefois admis, par tempérament, que les dispositions de cet article s'appliquent également aux gains nets de cession de titres de sociétés réalisés par certains ou par tous les autres membres d'un groupe familial lorsque certaines conditions sont remplies mais qu'au cas particulier, à défaut pour Mme C...de remplir ces conditions, M.C..., co-fondateur et membre du groupe familial, ne pouvait pas non plus bénéficier de ce régime de faveur ; qu'ainsi, la rectification, bien que reposant implicitement sur le constat que M. C...ne remplissait pas lui-même les conditions de l'abattement au regard de la loi fiscale, n'était expressément motivée que par la circonstance que, l'épouse de l'intéressé ne remplissant elle-même pas davantage ces conditions, celui-ci ne pouvait pas non plus bénéficier du tempérament prévu par le n° 146 de l'instruction n° 5 C-1-07 du 22 janvier 2007 ; qu'en se bornant dans leurs écritures de première instance à soutenir que Mme C... remplissait la condition de " rémunération normale ", M. et Mme C...se sont implicitement placés sur le terrain de cette seule doctrine administrative ; que, pour justifier la rectification relative aux titres cédés par M.C..., le Tribunal administratif s'est, pour sa part, fondé, en premier lieu, sur un motif tiré de ce que l'intéressé n'avait pas exercé personnellement une fonction de direction au sein de la SARL Betrim Immobilier et, en second lieu, sur un motif tiré de ce que, Mme C...n'ayant pas reçu de rémunération en contrepartie de ses fonctions de gérante, M. et Mme C...ne pouvaient bénéficier de l'abattement prévu à l'article 150-0 D bis du code général des impôts ; que, par son second motif, dont seul le bien-fondé, à l'exclusion de la régularité, est contesté en appel, les premiers juges ont suffisamment motivé leur jugement au regard de l'argumentation développée devant eux par M. et Mme C...; qu'alors qu'il n'était pas allégué que M. C...aurait lui-même satisfait aux conditions de l'abattement sur le terrain de la loi fiscale, ledit motif, qui s'avère fondé, ainsi que cela sera dit ci-dessous, était de nature à lui seul à justifier le rejet de la demande de M. et MmeC..., en tant qu'elle concernait les titres cédés par M. C...; que la circonstance qu'en se fondant également sur la circonstance que l'intéressé n'avait pas exercé personnellement une fonction de direction au sein de la SARL Betrim Immobilier, le Tribunal administratif a retenu un premier motif dont le directeur régional des finances publiques ne s'était pas prévalu devant lui est, en l'espèce, sans incidence sur la régularité du jugement, dès lors que cet autre motif, étranger au motif de la rectification et au terrain de la doctrine administrative sur lequel se plaçaient à titre exclusif les deux parties, présentait un caractère surabondant ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le Tribunal aurait méconnu son office et statué " ultra petita " doit être écarté ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne la loi fiscale :

3. Considérant qu'aux termes du 1. du I. de l'article 150-0 A du code général des impôts, dans sa version alors applicable : " Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux (...) les gains nets retirés des cessions à titre onéreux, effectuées directement ou par personne interposée, de valeurs mobilières, de droits sociaux (...) sont soumis à l'impôt sur le revenu lorsque le montant de ces cessions excède, par foyer fiscal, 15 000 euros par an (...) " ; qu'aux termes du 1. du I. de l'article 150-0 D bis du même code, dans sa version alors applicable : " Les gains nets mentionnés au 1 de l'article 150-0 D et déterminés dans les conditions du même article retirés des cessions à titre onéreux d'actions, de parts de sociétés ou de droits démembrés portant sur ces actions ou parts sont réduits d'un abattement d'un tiers pour chaque année de détention au-delà de la cinquième (...) " ; qu'aux termes de l'article 150-0 D ter dudit code, dans sa version alors applicable : " I. L'abattement prévu à l'article 150-0 D bis s'applique dans les mêmes conditions (...) aux gains nets réalisés lors de la cession à titre onéreux d'actions, de parts ou de droits démembrés portant sur ces actions ou parts, acquis ou souscrits avant le 1er janvier 2006, si les conditions suivantes sont remplies : / 1° La cession porte sur l'intégralité des actions, parts ou droits détenus par le cédant dans la société dont les titres ou droits sont cédés (...) / 2° Le cédant doit : / a) Avoir exercé au sein de la société dont les titres ou droits sont cédés, de manière continue pendant les cinq années précédant la cession et dans les conditions prévues au 1° de l'article 885 O bis, l'une des fonctions mentionnées à ce même 1° ; / b) Avoir détenu directement ou par personne interposée ou par l'intermédiaire de son conjoint ou de leurs ascendants ou descendants ou de leurs frères et soeurs, de manière continue pendant les cinq années précédant la cession, au moins 25 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société dont les titres ou droits sont cédés ; / c) Dans l'année suivant la cession, cesser toute fonction dans la société dont les titres ou droits sont cédés et faire valoir ses droits à la retraite (...) / II. - Pour l'application du 1 du I de l'article 150-0 D bis, la durée de détention est décomptée à partir du 1er janvier de l'année d'acquisition ou de souscription des titres ou droits (...) " ; qu'aux termes de l'article 885 O bis du code général des impôts : " Les parts et actions de sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés, de plein droit ou sur option, sont également considérées comme des biens professionnels si leur propriétaire remplit les conditions suivantes : / 1° Etre, soit gérant nommé conformément aux statuts d'une société à responsabilité limitée ou en commandite par actions, soit associé en nom d'une société de personnes, soit président, directeur général, président du conseil de surveillance ou membre du directoire d'une société par actions. / Les fonctions énumérées ci-dessus doivent être effectivement exercées et donner lieu à une rémunération normale. Celle-ci doit représenter plus de la moitié des revenus à raison desquels l'intéressé est soumis à l'impôt sur le revenu dans les catégories des traitements et salaires, bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices agricoles, bénéfices non commerciaux, revenus des gérants et associés mentionnés à l'article 62 (...) " ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. B...C...et Mme A... C... ont créé le 23 mai 1997 la SARL RML, devenue la SARL Betrim Immobilier lors d'une assemblée générale extraordinaire en date du 10 juillet 1997, au cours de laquelle a été réalisée une augmentation de capital ; qu'à l'issue de cette assemblée, M. B...C...et Mme A... C...détenaient chacun 35 % du capital, tandis que leurs enfantsD..., F...et Alexandre détenaient chacun 10 % de ce même capital ; qu'à la même date, la SARL a acquis un fonds de commerce de transaction et de gestion immobilière ; que Mme C...est devenue gérante de la société à compter du 12 septembre 1997 ; que le 29 juin 2006, les membres de la famille C...ont cédé à la SARL Financière BM l'ensemble des titres de SARL Betrim Immobilier qu'ils détenaient ;

5. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées des articles 150-0 D ter et 885 O bis du code général des impôts que le droit à abattement et les conditions à remplir pour en bénéficier s'appliquent au cédant des titres, lequel est la personne physique qui cède ses droits sociaux et exerce ainsi de manière individuelle le droit de propriété sur ces titres ; qu'ils s'apprécient ainsi distinctement au niveau de chaque conjoint et non au niveau du foyer fiscal ; que, pour la même raison, ils s'apprécient distinctement au niveau de chaque membre d'une famille ;

S'agissant des titres cédés par M. B...C...:

6. Considérant que si l'administration peut, à tout moment de la procédure, invoquer un nouveau motif de droit propre à justifier l'imposition, une telle substitution ou un tel complément ne saurait avoir pour effet de priver le contribuable d'une garantie et, en particulier, de la faculté, prévue par les articles L. 59 et L. 59 A du livre des procédures fiscales, de demander la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, lorsque celle-ci est compétente pour connaître du différend ;

7. Considérant qu'il résulte des termes mêmes des dispositions précitées des articles 150-0 D ter et 885 O bis du code général des impôts qu'un contribuable cédant des actions ou des parts sociales ne peut prétendre, sous certaines conditions, au bénéfice d'un abattement que s'il a personnellement exercé au sein de la société dont les titres sont cédés, de manière continue pendant les cinq années précédant la cession, une des fonctions de direction mentionnées par le 1° de l'article 885 O bis ; qu'en particulier, s'agissant d'une société à responsabilité limitée, il doit avoir exercé la fonction de gérant nommé conformément aux statuts de ladite société ;

8. Considérant qu'il est constant qu'ainsi que le fait valoir, pour la première fois en appel, le ministre de l'économie et des finances, M. B...C..., simple détenteur de parts sociales de la SARL Betrim Immobilier et salarié de celle-ci, n'a exercé, au sein de cette société et au cours des cinq années précédant la cession de ses parts, aucune des fonctions de direction mentionnées au 1° de l'article 885 O bis du code général des impôts et notamment pas celle de gérant nommé conformément aux statuts ; que, dans la mesure où, en particulier, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'était pas compétente pour connaître du différend, ce motif, expressément invoqué par le ministre devant la Cour et de nature à lui seul à fonder, sur le terrain de la loi fiscale, la remise en cause du bénéfice de l'abattement, doit être substitué à celui, tiré de la doctrine administrative, initialement retenu ;

S'agissant des titres cédés par Mme A...C...:

9. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées des articles 150-0 D ter et 885 O bis du code général des impôts que, pour l'application de l'abattement, les fonctions de direction confiées au cédant doivent avoir été effectivement exercées par celui-ci et avoir donné lieu à une rémunération normale ;

10. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que si Mme C...a exercé du 12 septembre 1997 au 29 juin 2006 la fonction de gérante de la SARL Betrim Immobilier, elle n'a toutefois perçu aucune rémunération en contrepartie de l'accomplissement desdites fonctions ;

11. Considérant, d'autre part, que si les requérants font valoir que Mme C...a également perçu des dividendes, notamment au cours des années 2003, 2004 et 2005, ceux-ci lui ont été versés en qualité d'associée et ne sauraient, par conséquent constituer une rémunération au sens du 1° de l'article 885 O bis du code général des impôts ; que la circonstance que ces dividendes sont, à compter d'ailleurs du 1er janvier 2013 seulement, soumis aux cotisations sociales en application du troisième alinéa de l'article L. 131-6 du code de la sécurité sociale est à cet égard sans incidence ; qu'en tout état de cause, le ministre de l'économie et des finances fait valoir, sans être contredit, que le montant des dividendes versés à Mme C...personnellement n'excède pas 16 750 euros pour l'année 2003, 26 250 euros pour l'année 2004, 24 500 euros pour l'année 2005 et 3 500 euros pour l'année 2006, alors, au demeurant, qu'au cours des mêmes années, M. B... C..., son époux, associé n'exerçant aucune fonction de direction et simple salarié de la société, a perçu, outre des dividendes de même montant, un salaire de 38 869 euros en 2003, 36 842 euros en 2004, 36 780 euros en 2005 ;

12. Considérant, enfin, que si M. et Mme C...soutiennent que la SARL Betrim Immobilier a repris un fonds de commerce auprès d'une société en difficulté, ultérieurement liquidée, et se trouvait elle-même dans une situation économique et financière de nature à justifier, par souci de prudence, l'absence de rémunération de la gérante, ils se sont bornés à produire un extrait d'un rapport de la Caisse de garantie de la FNAIM établi en date du 3 mars 2003 indiquant que la rentabilité de la société au titre des exercices clos les 30 septembre 2001 et 2002, bien que principalement due au fait que ses dirigeants étaient peu rémunérés, était " excellente ", un rapport de gestion présenté à l'assemblée générale ordinaire du 22 mars 2003 faisant état d'un résultat bénéficiaire au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2002 et un document issu du site internet societe.com faisant également état d'un résultat bénéficiaire au titre des exercices clos les 30 septembre 2005 et 2006 ; qu'au vu de ces éléments, et alors qu'une importante plus-value a été réalisée au moment de la cession des titres de la société, il n'apparaît pas que les difficultés financières invoquées, à les supposer établies au cours des premières années d'exploitation, auraient persisté au cours des cinq années précédant la cession ;

13. Considérant que, dans ces conditions, et alors que M. et Mme C...ne peuvent utilement faire valoir, d'une part, qu'ils auraient pu, au lieu de ne rémunérer que M.C..., partager sa rémunération entre lui-même et son épouse et, d'autre part, qu'ils ont privilégié les distributions de dividendes sur les rémunérations des dirigeants, Mme C...ne peut être regardée comme ayant perçu une rémunération normale au sens du 1° de l'article 885 O bis du code général des impôts ; que, dès lors, elle ne pouvait bénéficier de l'abattement prévu par l'article 150-0 D ter ;

En ce qui concerne la doctrine administrative :

14. Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente (...) " ;

S'agissant des titres cédés par Mme A...C...:

15. Considérant qu'aux termes de l'instruction n° 7-S-7-05 du 3 octobre 2005 (n° 160) : " 9. Afin de permettre, lors de l'appréciation du caractère normal de la rémunération, la prise en compte de la situation économique et financière de l'entreprise et les modalités de fonctionnement de celle-ci, les assouplissements suivants sont apportés. / 10. Dirigeant d'une entreprise en début d'activité ou d'une entreprise en difficulté. / Dans le cas d'une entreprise nouvellement créée l'exonération des biens professionnels n'est pas remise en cause à raison du niveau de rémunération du dirigeant pendant deux ans. / Il en est de même s'agissant d'une entreprise rencontrant des difficultés économiques, commerciales ou financières (diminution du chiffre d'affaires, réduction des marges, charges financières excessives...), lorsque le contribuable en fait état dans sa déclaration. / Cette période de deux ans, décomptée depuis la première année au titre de laquelle les difficultés rencontrées ont été mentionnées dans la déclaration d'I.S.F., pourra être, le cas échéant, prorogée par voie de prise de position formelle de l'administration au sens de l'article L 80-B-1° du L.P.F. / 12- Dirigeant dont la rémunération est complétée par la perception de dividendes. / La prise en compte, dans la rémunération, des dividendes qui rémunèrent le capital investi - et donc la possibilité de les prendre en considération pour l'appréciation de la règle des 50 % - n'est pas possible au regard des dispositions de l'article 885 O bis du C.G.I. selon lequel la rémunération, pour ouvrir droit à l'exonération, doit correspondre à des revenus soumis à l'impôt sur le revenu. / Néanmoins, le versement de dividendes pourra être pris en compte pour apprécier le caractère normal de la rémunération à la double condition que l'importance de ces derniers contrebalance la faiblesse de la rémunération et que cette situation résulte de motifs économiques. (...) " ;

16. Considérant qu'une interprétation formelle de la loi fiscale par l'administration est susceptible d'être invoquée sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, quand bien même cette interprétation relative à un impôt serait exprimée dans un document concernant au premier chef un autre impôt ; que si les dispositions précitées de l'article 150-0 D ter du code général des impôts, qui subordonnent le bénéfice de l'abattement à l'exercice, par le cédant des parts sociales, de certaines fonctions au sein de la société, renvoient, pour la définition de ces fonctions et les conditions dans lesquelles elles doivent être exercées, au 1° de l'article 885 O bis du même code, ce renvoi ne saurait permettre à M. et MmeC..., qui sollicitent le bénéfice de l'abattement prévu par les articles 150-0 D bis et 150-0 D ter pour le calcul de leur impôt sur le revenu, de se prévaloir utilement de l'instruction 7 S-7-05 du 3 octobre 2005, qui se rapporte à l'impôt de solidarité sur la fortune et ne comporte expressément aucune interprétation formelle de la loi fiscale relative à l'impôt sur le revenu ;

17. Considérant, en tout état de cause, qu'il résulte de ce qui a été dit plus haut que ni la situation économique et financière de la SARL Betrim Immobilier, ni les modalités de fonctionnement de l'entreprise ne justifiaient l'absence de toute rémunération de sa gérante ; qu'ainsi que le relève le ministre, Mme C...n'a pas complété sa rémunération par des dividendes mais n'a au contraire perçu que des dividendes, de telle sorte que les dividendes qu'elle a perçus ne peuvent être pris en compte sur le fondement de l'assouplissement prévu au n° 12 de l'instruction 7 S-7-05 du 3 octobre 2005 ; que, dès lors, elle ne remplissait pas les conditions prévues par cette instruction ;

S'agissant des titres cédés par M. B...C...:

18. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'instruction n° 5 C-1-07 du 22 janvier 2007 : " c) Cas particulier des cessions de titres ou droits d'une même société réalisées conjointement par plusieurs co-fondateurs / 146. Lorsque le capital de la société dont les titres ou droits sont cédés est détenu par plusieurs co-fondateurs, il est admis que les dispositions de l'article 150-0 D ter s'appliquent aux gains nets de cession de titres ou droits de sociétés réalisés par les actionnaires ou associés co-fondateurs, lorsque les conditions suivantes sont remplies : / - les actionnaires ou associés cédants (dénommés ci-après co-fondateurs) doivent avoir été présents dans le capital de la société dont les titres sont cédés depuis sa constitution et de manière continue jusqu'à la cession ; / - l'ensemble des conditions prévues à l'article 150-0 D ter est rempli par l'un au moins des cédants co-fondateurs : / - les cessions réalisées par les autres co-fondateurs doivent porter sur l'intégralité des titres ou droits qu'ils détiennent dans la société concernée ; / - les cessions réalisées par l'ensemble des co-fondateurs interviennent à la même date et doivent porter sur plus de 25 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société concernée (...) " ;

19. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que, faute d'avoir perçu une rémunération normale en contrepartie de l'exercice de sa fonction de gérante, Mme C...ne remplissait pas elle-même l'ensemble des conditions prévues à l'article 150-0 D ter du code général des impôts ; qu'il n'est pas contesté que MM.D..., F...et E...C...ne remplissaient pas davantage l'ensemble de ces conditions ; que, dès lors, M. B...C..., qui n'avait pas exercé de fonction de direction au sein de la SARL Betrim Immobilier, ne pouvait bénéficier, sur le fondement du n° 146 de l'instruction n° 5 C-1-07 du 22 janvier 2007, de l'abattement instauré par l'article 150-0 D ter du code général des impôts ;

20. Considérant, en second lieu, que, pour les mêmes raisons, M. et Mme C...ne sont pas davantage fondés à invoquer, s'agissant des titres cédés par M.C..., les prévisions du rescrit fiscal n° 2009-5-FP du 3 février 2009 confirmant les prévisions de l'instruction n° 5 C-1-07 du 22 janvier 2007 ; qu'au demeurant, les prévisions dudit rescrit, postérieures, d'une part, à l'expiration du délai de déclaration et, d'autre part, à la mise en recouvrement de l'imposition primitive, ne peuvent être utilement invoquées sur le fondement, respectivement, des second et premier alinéas de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

21. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les plus-values réalisées lors des cessions de titres réalisées tant par M. B...C...que par Mme A...C...ne pouvaient bénéficier d'un abattement ni sur le fondement de l'article 150-0 D ter du code général des impôts, ni sur celui de la doctrine administrative ; que, les impositions ayant été établies conformément à la loi fiscale, il n'appartient pas au juge de l'impôt d'examiner " en équité " la demande de M. et Mme C... ;

22. Considérant, dès lors, que M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a refusé de faire droit à leur demande ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

23. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. et Mme C...doivent, dès lors, être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B...C...et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 24 avril 2014 à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président de chambre,

Mme Mear, président-assesseur,

M. Meillier, conseiller.

Lu en audience publique, le 22 mai 2014.

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N° 13LY00123


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY00123
Date de la décision : 22/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-08-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Plus-values des particuliers. Plus-values mobilières.


Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: M. Charles MEILLIER
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : VIA JURIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-05-22;13ly00123 ?
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