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24/04/2014 | FRANCE | N°13LY01810

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 24 avril 2014, 13LY01810


Vu la requête, enregistrée le 8 juillet 2013, présentée pour M. B... A..., domicilié ... ;

M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300008 du 28 mars 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant :

- à l'annulation des décisions du préfet du Rhône du 2 août 2012 refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et fixant le pays vers lequel il pourra être reconduit d'office ;

- à ce qu'il soit enjoint audit préfet de lu

i délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ;

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Vu la requête, enregistrée le 8 juillet 2013, présentée pour M. B... A..., domicilié ... ;

M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300008 du 28 mars 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant :

- à l'annulation des décisions du préfet du Rhône du 2 août 2012 refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et fixant le pays vers lequel il pourra être reconduit d'office ;

- à ce qu'il soit enjoint audit préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Il soutient :

- que la décision lui refusant un titre de séjour est insuffisamment motivée ; qu'elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ; qu'elle est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur de droit dès lors que le préfet a, à tort, considéré qu'il avait demandé un changement de statut le 1er avril 2011 alors qu'il n'a fait que solliciter le renouvellement du titre de séjour qui lui avait été délivré en application de l'article L. 313-11-4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle est entachée d'une erreur d'appréciation de sa situation au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est entachée d'une erreur de droit en ce que le préfet s'est estimé tenu d'édicter cette décision en conséquence du refus de lui délivrer un titre de séjour ; qu'elle est entachée d'une erreur d'appréciation de sa situation personnelle au regard, d'une part, des conséquences d'une exceptionnelle gravité qu'elle est susceptible d'entraîner et, d'autre part, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- que la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée ; qu'elle est entachée d'une erreur de droit en ce que le préfet s'est estimé en situation de compétence liée pour édicter cette décision ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) du 6 juin 2013, admettant M. A...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu l'ordonnance du 7 octobre 2013 fixant au 25 octobre 2013 la date de clôture de l'instruction ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 octobre 2013, présenté par le préfet du Rhône qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 100 euros soit mise à la charge de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé ;

Vu l'ordonnance du 29 octobre 2013 reportant au 19 novembre 2013 la date de clôture de l'instruction ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 novembre 2013, présenté pour M. A... qui conclut au mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que les conclusions présentées par le préfet au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées dès lors que, d'une part, il ne peut pas travailler et se trouve donc dépourvu de ressource et, d'autre part, parce que le recours qu'il a exercé, contrairement à ce que soutient le préfet, ne présente aucun caractère abusif, ni dilatoire ;

Vu l'ordonnance du 22 novembre 2013 prononçant la réouverture de l'instruction ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 avril 2014 le rapport de M. Poitreau, premier conseiller ;

1. Considérant que M.A..., né le 22 septembre 1971 au Bénin, pays dont il possède la nationalité, a épousé, le 19 juillet 2005, une ressortissante française ; que le 10 août 2010, il est entré régulièrement en France sous couvert d'un visa de long séjour mention " conjoint de Français " valable du 26 juillet 2010 au 26 juillet 2011 ; que, par décisions du 2 août 2012, le préfet du Rhône a, sur le fondement des articles L. 313-10 et L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit ; que M. A...fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions et à ce qu'il soit enjoint audit préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) " ;

3. Considérant, en premier lieu, que le préfet du Rhône a refusé de délivrer à M. A... un titre de séjour tant au regard des dispositions du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que de celles du 4° de l'article L. 313-11 du même code ; que ces refus visent ces deux articles et rappellent la situation de l'intéressé, notamment la rupture de sa vie commune avec son épouse et le rejet de sa demande d'autorisation de travail ; que, par suite, eu égard à l'énoncé des considérations de droit et de fait qu'elles comportent, ces décisions sont suffisamment motivées ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il est constant qu'à la date de la décision en litige, M. A...n'avait plus de droit au séjour au regard des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en raison de la rupture de la vie commune d'avec son épouse ; que la circonstance que, comme le soutient le requérant, le préfet du Rhône se serait cru à tort saisi d'une demande de titre de séjour sur le fondement du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors qu'il fait valoir qu'il avait seulement sollicité le renouvellement du titre de séjour qui lui avait été délivré en application des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du même code, ne révèle pas, par elle-même, que le préfet, qui s'est prononcé sur la demande de titre de séjour en application de ces dernières dispositions, n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de l'intéressé ; que cette circonstance ne révèle pas davantage d'erreur de fait ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui." ;

6. Considérant, qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date du refus de séjour en litige, M. A... était en instance de divorce et que toute vie commune avec son épouse, de nationalité française, avait cessé ; qu'eu égard aux conditions du séjour en France de l'intéressé, qui a conservé des attaches dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de 34 ans, et en dépit de la présence en France d'une soeur et d'un frère et de la circonstance qu'il serait bien intégré dans la société française, la décision, compte tenu du but en vue duquel elle a été prise, n'a pas méconnu le droit au respect de sa vie familiale garanti par les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes raisons, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences que ce refus est susceptible de comporter pour la situation personnelle de M. A... ;

7. Considérant, enfin, que le requérant n'établit pas, ni même n'allègue que, au regard du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le refus de titre de séjour qui lui a été opposé n'était pas justifié ; que s'il soutient que le préfet du Rhône ne justifie pas avoir examiné la possibilité de lui délivrer, sur un autre fondement, un titre de séjour l'autorisant à travailler, ce moyen est inopérant, le préfet n'étant pas tenu d'examiner la possibilité de lui délivrer un titre de séjour sur un fondement autre que celui invoqué dans la demande dont il est saisi ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) " ; que le 2 août 2012, date à laquelle le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, M. A..., ressortissant du Bénin, se trouvait dans le cas prévu par ces dispositions ;

9. Considérant que la décision en litige indique que M. A... n'entre dans aucune des catégories d'étrangers ne pouvant faire l'objet d'une obligation à quitter le territoire français en application de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le préfet du Rhône, qui ne s'est pas estimé tenu d'édicter cette mesure d'éloignement en conséquence du refus de titre de séjour pris à l'encontre de l'intéressé, n'a pas commis d'erreur de droit ;

10. Considérant que les moyens tirés de ce que la décision faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de ce qu'elle est entachée d'une erreur d'appréciation au regard des conséquences qu'elle est susceptible de comporter pour sa situation personnelle doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

11. Considérant que la décision en litige, qui vise l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne que M. A... n'établit pas être exposé à des traitements prohibés par les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, elle est suffisamment motivée ; qu'il n'est pas établi que le préfet aurait commis une erreur de droit en s'estimant tenu de l'édicter ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et celles de son conseil tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

13. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions du préfet du Rhône tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du préfet du Rhône tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'intérieur. Il en sera adressé copie au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 3 avril 2014 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Poitreau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 avril 2014.

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N° 13LY01810 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01810
Date de la décision : 24/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-02-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Autorisation de séjour. Régularisation.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Gérard POITREAU
Rapporteur public ?: M. SEGADO
Avocat(s) : SELARL BERNARDI ESQUERRE MONTEIRO PROUST

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-04-24;13ly01810 ?
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