Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 4 décembre 2012, présentée pour la société Sic Etanchéité, dont le siège est 12 rue Alexandre Grammont à Saint-Priest (69800) ;
La société Sic Etanchéité demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1002733 du 4 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation du marché passé entre la commune de Dardilly et la société Etanchéité Services pour l'exécution du lot n°4 " Etanchéité " de l'opération de réhabilitation des bâtiments " Grégoire I et II " situé dans le groupe scolaire Grégoire ;
2°) d'annuler le contrat ;
3°) de mettre à la charge de commune de Dardilly la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La société Sic Etanchéité soutient que sa demande d'annulation du marché enregistrée au Tribunal le 23 avril 2010 n'était pas tardive dès lors d'une part qu'au regard de l'article 85 du code des marchés publics, lequel était applicable contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal, l'avis d'attribution publié par la commune le 9 janvier 2010 sur le seul site internet du " Moniteur des travaux publics et du bâtiment " était insuffisante à faire courir le délai de recours dès lors que l'avis d'appel public à la concurrence avait été publié non seulement sur ce site mais également sur le site " marchésonline ", d'autre part que sa demande faite au préfet le 15 février 2010 de déférer le marché au Tribunal administratif et son recours gracieux au maire du même jour tendant au retrait du marché ont prolongé le délai de recours pour l'une jusqu'au 3 mai 2010 et pour l'autre jusqu'au 17 juin 2010 ; que la commune a commis une erreur manifeste d'appréciation dans le choix de l'offre, d'une part en procédant à une analyse erronée de son mémoire technique qui répondait parfaitement aux exigences du cahier des clauses techniques particulières (CCTP) contrairement à ce qu'a estimé la commune, d'autre part au regard de son prix qui était inférieur à celui de la société attributaire du marché ; qu'en effet le CCTP ne précisait pas la nécessité de déposer plusieurs complexes d'étanchéité et ne permettait pas de déterminer la consistance du complexe existant de sorte qu'elle a procédé à des constatations sur place pour déterminer strictement la prestation optimum à mettre en oeuvre ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu l'ordonnance en date du 10 avril 2013 fixant la clôture d'instruction au 25 avril 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 avril 2013, présenté pour la commune de Dardilly qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la société Sic Etanchéité à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que comme l'a jugé le Tribunal, la demande de la société Sic Etanchéité était tardive ; qu'en effet le délai de recours contre le marché avait couru dès la publication de la publicité appropriée qui a été effectuée valablement le 9 janvier 2010 selon les exigences de la jurisprudence " Tropic " ; qu'au regard de cette même jurisprudence, qui déroge au droit commun, le recours gracieux et la demande de déféré préfectoral, lequel aurait d'ailleurs été tardif, ne pouvaient prolonger le délai de recours ; que l'annulation du marché qui est achevé, porterait une atteinte excessive à l'intérêt général et au droit du contractant en ce qu'il obligerait les parties à se restituer les paiements et prestations correspondant, ce qui est impossible pour ces dernières, sauf à détruire les ouvrages ; qu'elle n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation dans le jugement de l'offre de la société Sic Etanchéité qui n'était pas conforme au cahier des clauses techniques particulières lequel ne limitait pas la dépose du complexe d'étanchéité à un seul complexe ; que la société requérante ne justifie pas de la réalité de sa visite sur place et de ses constatations au moyen du sondage allégué ;
Vu le mémoire, enregistré le 25 avril 2013, présenté pour la société Sic Etanchéité qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; elle fait en outre valoir que le Tribunal a irrégulièrement motivé son jugement en jugeant que l'article 85 du code des marchés publics ne s'appliquait pas alors que la commune avait entendu s'y soumettre volontairement ; que l'entière exécution d'un marché ne saurait par elle-même faire obstacle à son annulation par le juge alors que la commune ne démontre pas qu'une telle annulation aurait des conséquences préjudiciables à l'exécution du service public ou qu'elle porterait manifestement atteinte à l'intérêt général ; que s'agissant de la conformité de son offre, c'est uniquement grâce à sa visite sur les lieux qu'elle a pu déterminer l'existence d'un seul complexe composé d'une étanchéité multicouches et d'un lit d'isolant de 60 mm ;
Vu l'ordonnance en date du 26 avril 2013 reportant la clôture d'instruction au 14 mai 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 octobre 2013 :
- le rapport de M. Dursapt,
- les conclusions de Mme Vinet, rapporteur public ;
- et les observations de MeB..., représentant la société Sic Etanchéité, et de Me A..., représentant la commune de Dardilly ;
1. Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de la société Sic Etanchéité tendant à l'annulation du marché passé le 10 décembre 2009 entre la commune de Dardilly et la société Etanchéité Services pour l'exécution du lot n° 4 "étanchéité" de l'opération de réhabilitation des bâtiments " Grégoire I et II " situés dans le groupe scolaire Grégoire ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant que, indépendamment des actions dont les parties au contrat disposent devant le juge du contrat, tout concurrent évincé de la conclusion d'un contrat administratif est recevable à former devant ce même juge un recours de pleine juridiction contestant la validité de ce contrat ou de certaines de ses clauses, qui en sont divisibles, assorti, le cas échéant, de demandes indemnitaires ; que ce recours doit être exercé, y compris si le contrat contesté est relatif à des travaux publics, dans un délai de deux mois à compter de l'accomplissement des mesures de publicité appropriées, notamment au moyen d'un avis mentionnant à la fois la conclusion du contrat et les modalités de sa consultation dans le respect des secrets protégés par la loi ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le recours gracieux, invoqué en appel, formé le 15 février 2010 par lequel la société Sic Etanchéité demandait au maire de la commune de Dardilly de retirer le marché conclu avec la société Etanchéité Services pour l'exécution du lot n° 4, objet de l'avis d'attribution publié le 9 janvier 2010 sur le site du Moniteur, a été reçu par la commune le 16 février, soit avant l'expiration du délai de recours contentieux ; que ce recours gracieux qui a été rejeté implicitement au terme d'un délai de deux mois a ainsi prorogé le délai de recours contentieux qui n'était pas expiré lorsque la société Sic Etanchéité a introduit, le 23 avril 2010, sa demande devant le tribunal administratif de Lyon ; que, dès lors, la société requérante est fondée à soutenir que le jugement est irrégulier pour avoir rejeté sa demande comme tardive et doit par suite être annulé ;
5. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société Sic Etanchéité devant le Tribunal administratif ;
Sur la validité du marché :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés par la société Sic Etanchéité ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article 35 du code des marchés publics : " (...) Une offre irrégulière est une offre qui, tout en apportant une réponse au besoin du pouvoir adjudicateur, est incomplète ou ne respecte pas les exigences formulées dans l'avis d'appel public à la concurrence ou dans les documents de la consultation. Une offre est inacceptable si les conditions qui sont prévues pour son exécution méconnaissent la législation en vigueur, ou si les crédits budgétaires alloués au marché après évaluation du besoin à satisfaire ne permettent pas au pouvoir adjudicateur de la financer. / Les conditions initiales du marché ne doivent toutefois pas être substantiellement modifiées. / (...). " ; qu'aux termes de l'article 53 du même code : " (...) III.-Les offres inappropriées, irrégulières et inacceptables sont éliminées. Les autres offres sont classées par ordre décroissant. L'offre la mieux classée est retenue. / (...) " ;
7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que pour rejeter l'offre de la société Sic Etanchéité, la commune de Dardilly a estimé que l'indication de son mémoire technique selon laquelle elle s'engageait pour les toitures sur la dépose et l'évacuation " d'un seul " complexe d'étanchéité, ne répondait pas aux exigences du cahier des clauses techniques particulières prévoyant quant à lui la dépose et l'évacuation du complexe d'étanchéité " existant " ; que si la commune soutient que la formulation ainsi employée dans le mémoire technique l'exposait à des réclamations de l'entreprise et à des coûts supplémentaires en cas de présence de plusieurs complexes d'étanchéité, elle n'établit pas, que tel aurait pu être le cas alors d'une part qu'il lui appartenait de définir et décrire préalablement ses besoins et d'autre part que la société requérante établit qu'elle avait visité les toitures en question dont elle a inclus des photographies dans son mémoire technique ; qu'il ressort par ailleurs de ce mémoire d'une part qu'elle entendait se conformer à un avis technique relatif à l'isolation " sur béton " et d'autre part de sa décomposition du prix global et forfaitaire qu'elle avait prévu la " dépose du complexe d'étanchéité existant " conformément aux termes mêmes du CCTP, ainsi qu'une étanchéité multicouches pour terrasse béton avec pose sur " dalle béton ", une telle pose impliquant nécessairement l'enlèvement de tous dispositifs d'étanchéité existants ; qu'au demeurant la commune n'allègue pas que les travaux désormais achevés auraient révélé la présence de plusieurs complexes d'étanchéité ; qu'ainsi l'offre de la société Sic Etanchéité incluait la dépose et l'évacuation totale de l'unique complexe d'étanchéité existant sur la dalle béton ; que, dans ces conditions, c'est irrégulièrement que cette offre a été écartée comme non conforme sur le plan technique ;
8. Considérant toutefois que si l'offre de la société requérante était par ailleurs la moins disante sur le prix, il ne résulte pas de l'instruction, en l'absence de toute argumentation sur les qualités comparées des offres au regard de l'autre critère fondé sur la valeur technique, qu'elle aurait dû être retenue ; que, dès lors, l'irrégularité constatée au point 7 précité, dont il n'est ainsi pas établi qu'elle aurait affecté le consentement de la personne publique et qui n'affecte pas non plus le bien-fondé du contrat, ne justifie pas, en l'absence par ailleurs de toutes circonstances particulières révélant notamment une volonté de la personne publique de favoriser un candidat, que soit prononcée l'annulation du marché ; que, dès lors, les conclusions en ce sens de la société Sic Etanchéité doivent être rejetées ;
9. Considérant que le marché étant désormais achevé, il n'y a plus lieu, subsidiairement, de statuer d'office sur sa résiliation ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
11. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Dardilly la somme de 1 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés par la société Sic Etanchéité ;
12. Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Sic Etanchéité, qui n'est pas partie perdante dans l'instance, une somme quelconque au titre des frais exposés par la commune de Dardilly ;
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur la résiliation du marché passé le 10 décembre 2009 entre la commune de Dardilly et la société Etanchéité Services.
Article 2 : La commune de Dardilly versera à la société Sic Etanchéité la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Sic Etanchéité, à la commune de Dardilly et à la société Etanchéité Services.
Délibéré après l'audience du 10 octobre 2013, où siégeaient :
- M. Wyss, président de chambre,
- M. Mesmin d'Estienne, président assesseur,
- M. Dursapt, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 30 octobre 2013.
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N° 12LY02963