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24/10/2013 | FRANCE | N°13LY01527

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 24 octobre 2013, 13LY01527


Vu, I, sous le n° 13LY01527, la requête, enregistrée le 17 juin 2013, présentée pour le préfet de la Côte d'Or qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300520 du 16 mai 2013 par lequel le Tribunal administratif de Dijon :

- a annulé ses décisions du 4 février 2013 refusant le renouvellement du titre de séjour de M. B... A...et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours ;

- lui a enjoint de délivrer à M. A... une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " ;

- a mis à la char

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Vu, I, sous le n° 13LY01527, la requête, enregistrée le 17 juin 2013, présentée pour le préfet de la Côte d'Or qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300520 du 16 mai 2013 par lequel le Tribunal administratif de Dijon :

- a annulé ses décisions du 4 février 2013 refusant le renouvellement du titre de séjour de M. B... A...et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours ;

- lui a enjoint de délivrer à M. A... une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " ;

- a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de M. A... la somme de 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la décision par laquelle il a refusé le renouvellement du titre de séjour de M. A... n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que l'intéressé n'a pas poursuivi ses études avec sérieux et assiduité depuis son inscription en thèse en 2008 et n'apporte pas d'explications probantes de nature à justifier les difficultés qu'il aurait rencontrées ; qu'il n'a pas davantage commis d'erreur d'appréciation en refusant le renouvellement du titre de séjour ; que sa décision n'est pas entachée d'une erreur de fait ; que la décision fixant le délai de départ volontaire à trente jours n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 juillet 2013, présenté pour M. B... A..., domicilié..., qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 1 196 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Il soutient que le préfet de la Côte d'Or a entaché sa décision de refus de renouvellement de son titre de séjour d'une erreur d'appréciation dès lors qu'il a fait preuve de sérieux dans ses études et n'accuse qu'une année de retard dans la présentation de sa thèse de doctorat ; que cette décision est entachée d'une erreur de fait s'agissant de l'appréciation de ses ressources ;

Vu la décision du 22 août 2013 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. A... ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Vu, II, sous le n° 13LY01528, la requête enregistrée le 17 juin 2013, présentée par le préfet de la Côte d'Or qui demande à la Cour de prononcer, en application des articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement n° 1300520 du 16 mai 2013 du Tribunal administratif de Dijon ;

Il reprend, à l'appui de ses conclusions, les mêmes moyens que ceux ci-dessus analysés, qu'il invoque dans sa requête n° 13LY01527 ;

Vu le jugement dont il est demandé le sursis à exécution ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 juillet 2013, présenté pour M. A..., domicilié..., qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 1 196 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Il soutient que le préfet de la Côte d'Or, qui ne saurait fonder sa demande de sursis à exécution sur les dispositions de l'article R. 811-17 du code de justice administrative et qui, au demeurant, n'avait produit aucune défense en première instance, ne soulève aucun moyen sérieux de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué ; que la décision de refus de renouvellement du titre de séjour est entachée d'une erreur d'appréciation et d'une erreur de fait ;

Vu la décision du 22 août 2013 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. A... ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 octobre 2013 le rapport de M. Clot, président ;

1. Considérant que les requêtes susvisées du préfet de la Côte d'Or sont dirigées contre le même jugement et présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant que M. A..., ressortissant pakistanais né en 1982, est entré régulièrement en France le 28 juin 2007, sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de type D ; qu'il a bénéficié d'une carte de séjour temporaire mention " étudiant ", valable du 19 janvier 2009 au 30 novembre 2009, régulièrement renouvelée jusqu'au 15 octobre 2011 ; que le 12 octobre 2012, M. A... a formulé une demande de renouvellement de ce titre de séjour, qui a été rejetée par le préfet de la Côte d'Or, par décision du 4 février 2013 assortie de l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours ; que le préfet fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Dijon a annulé ces décisions ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

3. Considérant que pour annuler le refus de renouvellement du titre de séjour en litige, le Tribunal administratif de Dijon a estimé que cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'elle peut comporter pour la situation personnelle de M. A... eu égard aux circonstances particulières qui l'ont conduit à interrompre une année ses études, tenant à des problèmes de santé et au travail de collecte d'informations sur une longue période et de consultation d'une diversité importante de sites nécessaires à l'écriture de sa thèse de doctorat dont la soutenance devait intervenir dans le courant de l'année universitaire 2012-2013, et compte tenu de son niveau d'études, ainsi que des difficultés que rencontrerait l'intéressé à reprendre ses études si elles venaient à être brusquement interrompues ;

4. Considérant qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que M. A..., entré en France en 2007, a obtenu, au titre de l'année universitaire 2007-2008, un master de sciences politiques et sociales, mention " médias, information, communication ", spécialité " médias, langage et communications, finalité recherche ", délivré par l'université de Paris 2 ; qu'en septembre 2008, il s'est inscrit en doctorat de sciences de l'information et de la communication et a bénéficié d'un titre de séjour régulièrement renouvelé, valable jusqu'au 15 octobre 2011 ; que M. A... a sollicité de l'université de Bourgogne et obtenu une suspension d'inscription en doctorat pour l'année 2011-2012 ; qu'en se bornant à soutenir que cette suspension était motivée " par des soucis personnels et la volonté de ne pas gâcher une année universitaire ", alors que, d'une part, il avait indiqué au préfet de la Côte d'Or, dans sa demande de renouvellement de titre de séjour du 4 octobre 2012, qu'il lui était nécessaire d'améliorer ses connaissances linguistiques pour être en mesure de lire des ouvrages théoriques en français et que ces difficultés l'avaient empêché de " produire un travail suffisamment avancé " de sorte que son directeur de thèse, ne pouvant accepter sa réinscription, lui avait accordé une année de suspension et que, d'autre part, son directeur de thèse justifiait la suspension par " des problèmes de santé et des soucis d'intégration ", M. A... n'établit ni l'existence de circonstances particulières justifiant l'interruption de son cursus, ni même une progression quelconque ou une formation en langue française à laquelle il aurait participé ; qu'en outre, s'il soutient avoir continué, au cours de l'année de suspension, à travailler à sa thèse, il ressort de l'attestation de son directeur de thèse du 4 octobre 2012 que M. A... avait à cette date seulement élaboré une méthodologie ; qu'aucune pièce du dossier ne permet d'établir que, à la date du refus de titre en litige, il était en mesure de soutenir sa thèse dans le courant de l'année universitaire 2012-2013 ; que, dès lors, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a annulé, pour erreur manifeste d'appréciation, la décision du 4 février 2013 refusant le renouvellement du titre de séjour à M. A... et par voie de conséquence, l'obligation de quitter le territoire français dont elle était assortie ;

5. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. A..., tant devant le Tribunal administratif que devant la Cour ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention "étudiant". (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-7 du même code : " Pour l'application du I de l'article L. 313-7, l'étranger qui demande la carte de séjour portant la mention " étudiant " doit en outre présenter les pièces suivantes : / 1° La justification qu'il dispose de moyens d'existence, correspondant au moins au montant de l'allocation d'entretien mensuelle de base versée, au titre de l'année universitaire écoulée, aux boursiers du Gouvernement français ; / 2° Un certificat d'immatriculation, d'inscription ou de préinscription dans un établissement public ou privé d'enseignement ou de formation initiale (...) " ; que le respect de ces dispositions implique que le renouvellement de cette carte est subordonné, notamment, à la justification par son titulaire de la réalité et du sérieux des études qu'il a déclaré accomplir ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A... a obtenu, au titre de l'année universitaire 2007-2008, un master de sciences politiques et sociales, mention médias, information, communication, spécialité " médias, langage et communications, finalité recherche ", délivré par l'université Paris 2 ; qu'en septembre 2008, il s'est alors inscrit en doctorat de sciences de l'information et de la communication à l'université de Bourgogne jusqu'en octobre 2011, date à laquelle il a obtenu une suspension de son inscription ; que si M. A... fait valoir qu'il a obtenu de cette même université le droit de se réinscrire en doctorat pour l'année universitaire 2012-2013, il ne justifie pas de la réalité et du sérieux de ses études ; que, dès lors, le préfet de la Côte d'Or n'a pas entaché sa décision de refus de renouvellement du titre de séjour d'une erreur d'appréciation ;

8. Considérant que si M. A... soutient que la décision contestée est entachée d'une erreur de fait dès lors qu'elle mentionne qu'il est sans ressource, il résulte toutefois de l'instruction que le préfet de la Côte d'Or aurait pris la même décision s'il ne s'était pas fondé sur ce motif ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) " ;

10. Considérant que M. A..., de nationalité pakistanaise, qui s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour le 4 février 2013, se trouvait ainsi, à cette date, dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

11. Considérant que la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour n'étant pas illégale, M. A... n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de ce refus à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

Sur la légalité de la décision fixant le délai de départ volontaire à trente jours :

12. Considérant, qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. (...) " ;

13. Considérant qu'en bornant à se prévaloir de l'attestation de son directeur de thèse selon lequel " selon toute vraisemblance, il doit soutenir sa thèse en septembre prochain ", M. A... n'apporte aucune pièce de nature à établir la réalité de cette allégation à la date de la décision contestée ; que l'attestation qu'il produit en appel, datée du 27 septembre 2013, selon laquelle sa thèse, qui fait actuellement l'objet d'une relecture par des rapporteurs, pourrait être soutenue dans deux mois, ne suffit pas à établir l'illégalité de cette décision ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de la Côte d'Or est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a annulé ses décisions du 4 février 2013 ;

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :

15. Considérant que le présent arrêt statuant sur la requête à fin d'annulation du jugement du Tribunal administratif de Dijon du 16 mai 2013, les conclusions du préfet de la Côte d'Or tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont sans objet ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans les présentes instances, verse à M. A... une somme au titre des frais exposés à l'occasion du litige et non compris dans les dépens ;

17. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions du préfet de la Côte d'Or tendant à l'application de ces dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Dijon du 16 mai 2013 est annulé.

Article 2 : Les conclusions de M. A... sont rejetées.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête du préfet de la Côte d'Or à fin de sursis à exécution.

Article 4 : Les conclusions du préfet de la Côte d'Or tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'intérieur. Il en sera adressé copie au préfet de la Côte d'Or et au procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Dijon.

Délibéré après l'audience du 3 octobre 2013 à laquelle siégeaient :

M. Clot président,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Poitreau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 octobre 2013.

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N° 13LY01527,...


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01527
Date de la décision : 24/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre CLOT
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : CLAISSE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-10-24;13ly01527 ?
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