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26/09/2013 | FRANCE | N°13LY00339

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 26 septembre 2013, 13LY00339


Vu la requête, enregistrée le 7 février 2013, présentée pour M. B...C..., domicilié... ;

M. C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200951 du 6 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune d'Appoigny à l'indemniser des conséquences dommageables qu'a comportées pour lui le refus du maire, le 19 décembre 2008, de l'autoriser à céder à M. A...le droit de place afférent à l'activité de taxi qu'il exerçait ;

2°) de condamner la commune d'Appoigny à lui verser une

somme de 165 000 euros à titre personnel et de 127 576 euros en sa qualité de gérant de la...

Vu la requête, enregistrée le 7 février 2013, présentée pour M. B...C..., domicilié... ;

M. C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200951 du 6 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune d'Appoigny à l'indemniser des conséquences dommageables qu'a comportées pour lui le refus du maire, le 19 décembre 2008, de l'autoriser à céder à M. A...le droit de place afférent à l'activité de taxi qu'il exerçait ;

2°) de condamner la commune d'Appoigny à lui verser une somme de 165 000 euros à titre personnel et de 127 576 euros en sa qualité de gérant de la société Taxi 2000 Alfaco ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Appoigny une somme de 2 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- la décision de la Cour d'appel de Paris, qui a jugé que la commune ne s'était pas opposée à la cession du fonds de commerce, cession incluant nécessairement le droit de place, est revêtue de l'autorité de chose jugée ;

- c'est pour des raisons de santé qu'il a cédé son droit de place avant l'expiration du délai de 15 ans ;

- en refusant la cession gratuite, la commune a commis une faute ;

- elle a également engagé sa responsabilité en ne maintenant pas sa proposition ;

- la commune ne pouvait librement attribuer cette place en fonction de la liste d'attente prévue à l'article 6 de la loi de 1995 sans tenir compte de l'accord qu'il avait passé avec M.A..., comme elle y était tenue ;

- sa société a enregistré pour 127 576 euros de créances et à titre personnel, il a subi un préjudice de 165 000 euros ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 mai 2013, présenté pour la commune d'Appoigny, qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable faute d'être accompagnée du jugement attaqué ;

- la décision rendue par la Cour d'appel de Paris n'est pas opposable à la commune, qui n'a jamais été partie dans cette instance ;

- seule la cession à titre onéreux est possible à condition de justifier de 15 ans d'exploitation ;

- l'attribution d'un droit de place ne peut se faire sans avis préalable de la commission départementale des taxis ;

- il n'y a jamais eu promesse de la commune d'attribuer la place en litige ;

- les prétentions du requérant sont abusives ;

Vu le mémoire, enregistré le 23 août 2013, présenté pour M. C...qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre qu'aucune difficulté n'avait été soulevée par la commune lors de son acquisition, dans les mêmes conditions, du fonds de commerce auprès de son prédécesseur ; que l'obligation d'exploiter depuis 15 ans ne s'impose qu'au titulaire initial de l'autorisation et non à ses successeurs ; que le refus est intervenu sans qu'il ait pu être entendu par la commission et par le maire ;

Vu le mémoire, enregistré le 27 août 2013, présenté pour la commune d'Appoigny, qui conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que l'autorisation a été délivrée gratuitement par la commune d'Appoigny à M. C...après que M. D...a abandonné son droit de stationnement, M. C... devant ainsi justifier de 15 années d'exploitation ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 95-66 du 20 janvier 1995 relative à l'accès à l'activité de conducteur et à la profession d'exploitant de taxi ;

Vu le décret n° 86-427 du 13 mars 1986 portant création de la commission des taxis et des voitures de petite remise ;

Vu le décret n° 95-935 du 17 août 1995 portant application de la loi n° 95-66 du 20 janvier 1995 relative à l'accès à l'activité de conducteur et à la profession d'exploitant de taxi ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 septembre 2013 :

- le rapport de M. Segado, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;

- et les observations de M. C..., requérant ;

1. Considérant que M. C...a acquis le 26 mai 2000 auprès de M. D...un fonds de commerce de taxis à Appoigny dans l'Yonne, ce dernier ayant restitué gratuitement à la commune l'autorisation dont il disposait pour le stationnement de taxis et, le 13 juin 2000, il a obtenu du maire une autorisation de stationnement pour l'exercice de son activité ; que par acte authentique du 4 octobre 2008 M. C...a cédé son fonds de commerce à M. A... et informé la commune, le 14 octobre suivant, de sa volonté de restituer gracieusement son autorisation de stationnement ; que consultée, la commission départementale des taxis et des voitures de petite remise a émis le 29 octobre 2008 un avis défavorable à la reprise gracieuse par M. A...de l'autorisation de stationnement ; que par un courrier du 19 décembre 2008, le maire d'Appoigny a indiqué à MM. C...et A...qu'il considérait comme nulle et non avenue la proposition de cession gratuite du droit de place dont il avait été saisi et qu'il décidait de ne pas y donner suite ; que M. A...a été débouté, en dernier lieu par un arrêt de la Cour d'appel de Paris du 5 janvier 2011, de sa demande d'annulation de la vente du fonds de commerce ; que M. C...a demandé au Tribunal administratif de Dijon de condamner la commune d'Appoigny à réparer le préjudice financier résultant pour lui du refus de celle-ci de céder la place de stationnement à M. A... ; qu'il fait appel du jugement du 6 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 20 janvier 1995 susvisée, dans sa rédaction applicable le 19 décembre 2008 : " Le titulaire d'une autorisation de stationnement a la faculté de présenter à titre onéreux un successeur à l'autorité administrative qui a délivré celle-ci. / Cette faculté est subordonnée à l'exploitation effective et continue pendant une durée de cinq ans de l'autorisation de stationnement à compter de la date de délivrance de celle-ci. Toutefois, cette durée est de quinze ans dans les cas suivants : / - pour les titulaires d'autorisations nouvelles délivrées postérieurement à la date de publication de la présente loi... " ; qu'aux termes de l'article 4 de cette loi : " En cas d'inaptitude définitive, constatée selon les modalités fixées par décret, entraînant le retrait du permis de conduire les véhicules de toutes les catégories, les titulaires d'autorisation de stationnement acquises à titre onéreux peuvent présenter un successeur sans condition de durée d'exploitation effective et continue " ; que l'article 6 de cette même loi dispose que : " La délivrance de nouvelles autorisations par les autorités administratives compétentes n'ouvre pas droit à indemnité au profit des titulaires d'autorisations précédemment délivrées. /Les nouvelles autorisations sont délivrées en fonction de listes d'attente rendues publiques. " ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 9 du décret du 17 août 1995 susvisé : " Après avis de la commission départementale (...) des taxis et des véhicules de petite remise instituée par le décret du 13 mars 1986 susvisé, le maire, s'il y a lieu, (...) attribue les autorisations de stationnement (...) " ; qu'aux termes l'article 12 de ce texte : " Les listes d'attente en vue de la délivrance de nouvelles autorisations, mentionnées à l'article 6 de la loi du 20 janvier 1995 susvisée, sont établies par l'autorité compétente pour délivrer les autorisations. Elles mentionnent la date à laquelle chaque demande a été déposée et le numéro d'enregistrement de la demande (...) Les nouvelles autorisations sont attribuées dans l'ordre chronologique d'enregistrement des demandes. " ; que l'article 13-1 de ce décret prévoit que : " Le préfet (...) constate l'inaptitude physique d'un conducteur de taxi titulaire d'une autorisation de stationnement souhaitant présenter un successeur, au vu de l'avis émis par la commission médicale prévue au II de l'article R. 221-11 du code de la route (...) " ;

4. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de ce que la commission départementale des taxis et des voitures de petite remise n'aurait pas été mise à même de rendre un avis éclairé n'est pas assorti de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien fondé ; que, par ailleurs, il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire que M. C...devait être préalablement entendu par cette commission départementale et par le maire avant que ce dernier prenne sa décision concernant la demande de reprise gracieuse par M. A... de l'autorisation de stationnement ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que M. C...se prévaut de l'autorité de la chose jugée par la Cour d'appel de Paris qui, dans son arrêt du 5 janvier 2011, a retenu que le fonds artisanal de taxi cédé à M. A...comportait un droit de place ; que cet arrêt ne portait que sur un litige, opposant M. A...à M.C..., relatif à la cession d'un fonds de commerce ; que l'autorité relative de la chose jugée qui s'attache à cet arrêt ne pouvait faire obstacle à ce que le Tribunal administratif de Dijon se prononce sur le bien-fondé du recours indemnitaire dont l'avait saisi M. C...contre la commune d'Appoigny dès lors qu'il n'existait, avec le litige porté devant la Cour d'appel de Paris, ni identité de parties, la commune n'étant pas partie dans ce dernier litige, ni identité d'objet, l'action de l'intéressé devant le tribunal administratif tendant à la réparation du préjudice auquel l'aurait exposé le refus du maire d'Appoigny de céder l'autorisation de stationnement à M.A..., ni identité de cause, l'action indemnitaire devant le juge judiciaire étant fondée sur la nullité de la vente du fonds artisanal de taxi alors que celle dont M. C...avait saisi le juge administratif est fondée sur la faute du maire d'Appoigny à avoir renoncé à la cession de l'autorisation de stationnement ; que, par suite, M. C...ne saurait faire grief au Tribunal d'avoir méconnu l'autorité de la chose jugée par la Cour d'appel de Paris ;

6. Considérant, en troisième lieu, que M. C...fait valoir, qu'en ne tenant pas compte de l'accord qu'il avait conclu avec M. A...et en s'estimant libre d'attribuer la place de stationnement en fonction de la liste d'attente prévue à l'article 6 de la loi du 20 janvier 1995, le maire d'Appoigny a commis une faute ; que toutefois, une telle convention n'étant pas, s'agissant de l'attribution d'une place de stationnement, opposable à la commune, ce moyen ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant, en quatrième lieu, que si M. C...se plaint de ce que son notaire l'aurait induit en erreur sur la possibilité qui aurait été la sienne de céder gratuitement le droit de place à M.A..., un tel moyen est inopérant ;

8. Considérant, en cinquième lieu, que M. C...soutient que le maire d'Appoigny lui aurait fait la promesse d'attribuer le droit de place à M.A... ; que si, comme cela résulte d'un courrier du notaire du 27 novembre 2008, le maire avait estimé possible l'attribution à titre gratuit à M. A...du droit de place détenu par M. C..., il résulte également de ce courrier qu'il avait conditionné une telle attribution à l'avis de la commission départementale des taxis et des voitures de petite remise ; que le moyen ne peut donc qu'être écarté ;

9. Considérant, en dernier lieu, que M. C...soutient que le délai de 15 ans prévu à l'article 3 précité de la loi du 20 janvier 1995 ne s'imposait pas à lui dès lors que l'impossibilité dans laquelle il s'est trouvé d'exploiter son fonds de commerce s'explique, comme pour son prédécesseur, par des raisons de santé ; qu'il ne résulte cependant pas de l'instruction que, comme le prévoient les dispositions combinées des articles 4 de la loi du 20 janvier 1995 et 13-1 du décret du 17 août 1995, son inaptitude physique définitive a été constatée dans des conditions lui permettant de présenter un successeur sans condition de durée d'exploitation effective et continue ; que, dès lors, faute d'une exploitation effective et continue pendant une durée de 15 ans, M. C... ne pouvait, en application de l'article 3 de la loi du 20 janvier 1995, transmettre l'autorisation de stationnement dont il disposait à M. A..., la procédure prévue à l'article 6 de cette même loi, précisée aux articles 9 et 12 du décret du 17 août 1995, pour l'attribution d'une nouvelle autorisation, qui comprenait la consultation de la commission départementale des taxis, trouvant à s'appliquer ; qu'en prenant la décision litigieuse du 19 décembre 2008 après consultation, le 29 octobre 2008, de la commission départementale des taxis et des voitures de petite remise, le maire d'Appoigny n'a donc pas méconnu ces dispositions ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée à la requête par la commune d'Appoigny, M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune d'Appoigny sur ce même fondement ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune d'Appoigny tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C...et à la commune d'Appoigny.

Délibéré après l'audience du 5 septembre 2013 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Segado, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 septembre 2013.

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N° 13LY00339 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY00339
Date de la décision : 26/09/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

14-02-01-06 Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique. Réglementation des activités économiques. Activités soumises à réglementation. Taxis.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Juan SEGADO
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : ALLIOT-FOURRIER-MURN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-09-26;13ly00339 ?
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