Vu la requête, enregistrée le 3 avril 2012, présentée pour M. A...B...domicilié ... ;
M. B...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1100483 du 26 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions de la directrice de l'Institut de formation en soins infirmiers (IFSI) de Haute Côte d'Or du 8 septembre 2010 le suspendant et 29 septembre 2010 prononçant son exclusion définitive, y compris celle rejetant implicitement son recours gracieux contre cette mesure d'exclusion ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;
3°) d'enjoindre à l'IFSI de Haute Côte d'Or de procéder à sa réintégration ;
4°) de mettre à la charge de l'IFSI de Haute Côte d'Or une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- faute de communication du sens des conclusions du rapporteur public dans un délai raisonnable et en raison de la non-conformité du sens des conclusions communiquées à celles qui ont été prononcées, ainsi que de l'absence de mentions des conclusions dirigées contre la décision du 8 septembre 2010, le jugement est irrégulier ;
- en l'absence d'urgence, la décision de suspension du 8 septembre 2010 a été prise en violation de l'article 24 de l'arrêté du 21 avril 2007 ;
- s'agissant de la décision d'exclusion du 29 septembre 2010 et du rejet de son recours contre cette mesure, ses conclusions sont recevables faute de mention des voies et délais de recours dans l'accusé de réception de sa demande ou dans ces décisions ; il n'est pas un agent de l'IFSI de telle sorte qu'il peut se prévaloir des dispositions de la loi du 21 avril 2000 ; les principes du contradictoire et d'impartialité ont été méconnus ; la décision du 29 septembre 2010 n'est pas suffisamment motivée ; la matérialité des faits reprochés n'est pas établie ; ces faits ne sont pas constitutifs d'une faute disciplinaire ; la sanction est disproportionnée et procède d'un détournement de pouvoir ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) du 29 mai 2012, accordant le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. A...B... ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 août 2012, présenté pour l'IFSI de Haute Côte d'Or qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- le requérant n'a pas sollicité la communication du sens des conclusions du rapporteur public avant l'audience ;
- le sens général des conclusions était connu, même si le rapporteur public n'a pas distingué entre celles-ci ;
- la demande de l'intéressé devant le Tribunal était tardive même si l'accusé de réception faisait défaut dès lors que les voies et délais étaient mentionnés dans la décision de rejet initiale ;
- il y avait urgence dès lors que l'intéressé devait commencer un stage le 20 septembre 2010 ;
- les principes du contradictoire et d'impartialité ont été respectés ;
- la décision est motivée ;
- la matérialité des faits reprochés au requérant est établie et ces faits peuvent être qualifiés de faute disciplinaire ;
Vu l'ordonnance du 20 août 2012 fixant, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, la date de clôture de l'instruction au 7 septembre 2012 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
Vu l'arrêté du 21 avril 2007 relatif aux conditions de fonctionnement des instituts de formation paramédicaux ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 juin 2013 :
- le rapport de M. Picard, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Pourny, rapporteur public ;
- et les observations de Me Chaton, avocat de l'Institut de formation en soins infirmiers de Haute Côte d'Or ;
1. Considérant que le 8 septembre 2010, la directrice de l'Institut de formation en soins infirmiers (IFSI) de Haute Côte d'Or a suspendu la formation de M. B..., élève de troisième année, à raison de faits survenus lors d'un stage effectué au centre hospitalier de Sens entre les 28 juin et 13 août 2010 ; que le 29 septembre 2010, elle a prononcé son exclusion définitive et que le 15 novembre suivant, elle a rejeté le recours de l'intéressé contre cette décision ; que M. B... fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces trois décisions ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 711-3 du code de justice administrative : " Si le jugement de l'affaire doit intervenir après le prononcé de conclusions du rapporteur public, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l'audience, le sens de ces conclusions sur l'affaire qui les concerne. " ; que la communication aux parties du sens des conclusions a pour objet de mettre les parties en mesure d'apprécier l'opportunité d'assister à l'audience publique, de préparer, le cas échéant, les observations orales qu'elles peuvent y présenter, après les conclusions du rapporteur public, à l'appui de leur argumentation écrite et d'envisager, si elles l'estiment utile, la production, après la séance publique, d'une note en délibéré ; qu'en conséquence, les parties ou leurs mandataires doivent être mis en mesure de connaître, dans un délai raisonnable avant l'audience, l'ensemble des éléments du dispositif de la décision que le rapporteur public compte proposer à la formation de jugement d'adopter, à l'exception de la réponse aux conclusions qui revêtent un caractère accessoire ; que cette exigence s'impose à peine d'irrégularité de la décision rendue sur les conclusions du rapporteur public ;
3. Considérant, en premier lieu, que ni les dispositions du premier alinéa de l'article R. 711-3 du code de justice administrative, ni les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire ne font obligation au Tribunal de mettre les parties à même de connaître le sens des conclusions du rapporteur public dans un délai qui ne saurait être inférieur à 48 heures avant l'audience ;
4. Considérant que M. B... a été mis en mesure de prendre connaissance du sens des conclusions du rapporteur public par la mise en ligne sur l'application " Sagace " de ces informations le 11 janvier 2012 à 12 heures ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et n'est pas allégué que ce délai n'aurait pas été suffisant pour lui permettre d'apprécier l'opportunité d'assister ou de se faire représenter à l'audience publique qui s'est tenue le lendemain à 9 heures, d'y présenter des observations orales à l'appui de son argumentation écrite et, le cas échéant, de produire une note en délibéré ;
5. Considérant, en second lieu, qu'il est constant que, dans l'application " Sagace " du tribunal administratif, il a été uniquement indiqué, sous la rubrique " sens synthétique des conclusions ", mise en ligne le 11 janvier 2012, que le rapporteur public entendait conclure au rejet pour irrecevabilité de la demande de M. B... au motif qu'elle était tardive, alors que dans ses conclusions prononcées lors de l'audience publique du 12 janvier suivant, il a également conclu au rejet au fond des conclusions de M. B... dirigées contre la décision de suspension du 8 septembre 2010 ; qu'ainsi, s'agissant de cette dernière décision, le sens des conclusions du rapporteur public telles qu'elles ont été prononcées lors de l'audience publique a été différent de celui qui avait été porté à la connaissance des parties avant la tenue de l'audience ; que, dès lors, en tant qu'il statue sur cette partie du litige, le jugement attaqué est intervenu en méconnaissance des dispositions précitées du premier alinéa de l'article R. 711-3 du code de justice administrative ; que, par suite, le requérant est, dans cette mesure, fondé à en demander l'annulation ;
6. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par M. B... devant le Tribunal administratif de Dijon tendant à l'annulation de la décision du 8 septembre 2010 et de statuer sur les autres conclusions dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel ;
Sur la légalité de la décision de suspension du 8 septembre 2010 :
7. Considérant qu'aux termes de l'article 24 de l'arrêté du 21 avril 2007 susvisé : " En cas d'urgence, le directeur de l'institut de formation peut suspendre la formation de l'étudiant en attendant sa comparution devant le conseil de discipline. Ce dernier est toutefois convoqué et réuni dans un délai maximum de quinze jours à compter du jour de la suspension de la formation de l'étudiant " ;
8. Considérant que si les faits reprochés à M.B..., qui ont consisté à pratiquer de sa propre initiative des injections inappropriées sur un patient lors d'un stage au centre hospitalier de Sens dont le terme était fixé au 13 août 2010, étaient antérieurs de plus d'un mois et demi à la décision du 8 septembre 2010 prononçant sa suspension, ils étaient suffisamment graves pour caractériser l'urgence à prendre cette mesure, dès lors que l'intéressé devait accomplir un nouveau stage, à compter du 20 septembre 2010 ; que, par suite, M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du 8 septembre 2010 ;
Sur les conclusions dirigées contre les décisions des 29 septembre et 15 novembre 2010 :
9. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision " ; qu'aux termes de l'article 19 de la loi du 12 avril 2000 susvisée : " Toute demande adressée à une autorité administrative fait l'objet d'un accusé de réception délivré dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) Les délais de recours ne sont pas opposables à l'auteur d'une demande lorsque l'accusé de réception ne lui a pas été transmis ou ne comporte pas les indications prévues par le décret mentionné au premier alinéa. / Le défaut de délivrance d'un accusé de réception n'emporte pas l'inopposabilité des délais de recours à l'encontre de l'auteur de la demande lorsqu'une décision expresse lui a été régulièrement notifiée avant l'expiration du délai au terme duquel est susceptible de naître une décision implicite (...) " ;
10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision du 29 septembre 2010 comportait la mention des voies et délais de recours prévue à l'article R. 421-5 du code de justice administrative précité et indiquait la possibilité d'exercer un recours gracieux auprès du directeur de l'IFSI, l'administration n'étant pas tenue de préciser les conditions d'interruption du délai de recours contentieux ; que si, par un courrier du 28 octobre 2010, M. B...a formé un recours gracieux contre cette décision, la directrice de l'IFSI, avant l'expiration du délai au terme duquel était susceptible de naître une décision implicite, a expressément rejeté ce recours par une décision du 15 novembre 2010, notifiée par pli recommandé présenté le 18 novembre 2010 à l'adresse même que l'intéressé avait indiquée dans son recours gracieux et non retiré auprès des services postaux, malgré un avis de mise en instance ; que par suite, le délai de recours contentieux a de nouveau couru à compter de cette dernière date, sans qu'y fassent obstacle l'absence de délivrance à M. B... d'un accusé de réception de son recours gracieux, ni le défaut d'indication, dans la notification du rejet de ce recours, des voies et délais de recours contentieux ; qu'ainsi, le 25 février 2011, date à laquelle il a présenté au Tribunal sa demande d'annulation des décisions des 29 septembre et 15 novembre 2010, ce délai, d'une durée de deux mois, était expiré même si, à cette même date, il avait déposé une demande d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté, comme tardives et, par suite, irrecevables, ses conclusions tendant à l'annulation des décisions des 29 septembre et 15 novembre 2010 ;
Sur les conclusions à fins d'injonction :
12. Considérant que le présent arrêt n'impliquant aucune mesure d'exécution, les conclusions de M. B... tendant à ce qu'il soit enjoint à l'IFSI de le réintégrer doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Considérant que les conclusions de M.B..., partie perdante dans la présente instance, tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées sur ce même fondement par l'IFSI de Haute Côte d'Or ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Dijon du 26 janvier 2012, en tant qu'il statue sur les conclusions de M. B...dirigées contre la décision de la directrice de l'IFSI de Haute Côte d'Or du 8 septembre 2010, est annulé.
Article 2 : Les conclusions de M. B...dirigées contre la décision de la directrice de l'IFSI de Haute Côte d'Or du 8 septembre 2010 sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B...est rejeté.
Article 4 : Les conclusions de l'IFSI de Haute Côte d'Or tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et à l'Institut de formation en soins infirmiers de Haute Côte d'Or.
Délibéré après l'audience du 27 juin 2013 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Seillet, président-assesseur,
M. Picard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 18 juillet 2013.
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N° 12LY00893