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04/07/2013 | FRANCE | N°12LY02274

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 04 juillet 2013, 12LY02274


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 21 août 2012, présentée pour la SARL Les carreaux européens, dont le siège est 106 rue des Cèdres à Amphion-les-Bains (74500) ;

La SARL Les carreaux européens demande à la Cour de réformer le jugement n° 0900768 du 26 juin 2012 du Tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il l'a condamnée à payer à la commune de Boëge une indemnité supérieure à 37 807 euros et à supporter plus du tiers des dépens ;

Elle fait valoir que l'expert a relevé la responsabilité de l'architecte dans la surveillance de l'exé

cution des travaux en ce qu'il n'avait pas demandé un contrôle du dosage en ciment d...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 21 août 2012, présentée pour la SARL Les carreaux européens, dont le siège est 106 rue des Cèdres à Amphion-les-Bains (74500) ;

La SARL Les carreaux européens demande à la Cour de réformer le jugement n° 0900768 du 26 juin 2012 du Tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il l'a condamnée à payer à la commune de Boëge une indemnité supérieure à 37 807 euros et à supporter plus du tiers des dépens ;

Elle fait valoir que l'expert a relevé la responsabilité de l'architecte dans la surveillance de l'exécution des travaux en ce qu'il n'avait pas demandé un contrôle du dosage en ciment de la chape et n'avait pas veillé à la bonne exécution des travaux, ne s'apercevant pas des défauts et notamment de l'absence de désolidarisation de la chape par rapport aux éléments verticaux ; que dès lors le jugement doit être réformé en ce qu'il n'a pas retenu la responsabilité de l'architecte au regard de ses obligations contractuelles mais seulement la sienne et celle de la SARL Espace parquet ; que sa propre responsabilité doit ainsi être limitée au tiers du montant de 113 421,22 euros retenu par l'expert comme coût des travaux de reprise ; que par ailleurs le préjudice de jouissance de la commune n'est pas démontré ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 novembre 2012, présenté pour la société Mapelli Orlando qui demande à la Cour de la mettre hors de cause en confirmant le jugement et de mettre à la charge de la SARL Les carreaux européens une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens ; elle fait valoir qu'aucune demande n'est formulée à son encontre par la SARL Les carreaux européens ; que, si dans son rapport définitif du 20 novembre 2007 et en contradiction avec son pré-rapport du 12 octobre 2007, l'expert a retenu sa responsabilité pour une très faible part (4 %) du suivi des travaux au même titre que les manquements de l'architecte, il n'a toutefois retenu aucune faute au titre de sa mission propre de coordination entre les différents corps d'état ;

Vu l'ordonnance en date du 12 février 2013 fixant la clôture d'instruction au 1er mars 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 22 février 2013, présenté pour la SARL Les carreaux européens qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens et au rejet des demandes de la société Mapelli Orlando dirigées contre elle ; elle fait en outre valoir que si elle a intimé la société Mapelli Orlando c'est uniquement parce qu'elle était présente en première instance et qu'elle est concernée par la solution qui sera donnée au litige ; que sa présence est d'autant plus nécessaire que l'expert judiciaire retient pour partie sa responsabilité ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 février 2013, présenté pour l'EURL Atelier d'architecture Pierre Bajulaz qui conclut, à titre principal au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société Les carreaux européens une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et à titre subsidiaire à ce que sa propre responsabilité soit limitée à 5 %, et à ce qu'elle soit intégralement relevée et garantie in solidum de toute condamnation par les sociétés Les carreaux européens, Espace parquet, et Mapelli Orlando ; elle soutient qu'elle n'a pas commis de faute au regard de sa mission ; qu'en effet il ne lui appartenait pas de faire procéder à des analyses de la composition du ciment mis en oeuvre pour la chape ; qu'en revanche il appartenait à la société Les carreaux européens spécialisée dans la réalisation de tels ouvrages de respecter les quantitatifs établis par l'économiste et, conformément au cahier des clauses techniques particulières (CCTP), de se conformer au document technique unifié (DTU) ; que cette société est seule responsable des désordres de la chape ; que, l'absence de joints périphériques du parquet exécuté par la société Espace parquet étant localisée, comme l'a relevé l'expert, tout professionnel avisé n'aurait pas vu ces désordres ; que si sa responsabilité devait être retenue, elle serait recevable et bien fondée, pour les raisons précédemment indiquées, à être intégralement relevée et garantie de toute condamnation par les sociétés Les carreaux européens et Espace parquet, in solidum, sur le fondement de leur responsabilité civile délictuelle ; qu'à défaut les désordres ne lui seraient imputables qu'à titre très mineur, à hauteur tout au plus de 5 % ; qu'elle serait également recevable et bien fondée à être intégralement relevée et garantie de toute condamnation sur le fondement de la responsabilité contractuelle par la société Mapelli Orlando qui avait une mission d'économiste et d'ordonnancement, pilotage et coordination (OPC) et à laquelle l'expert a imputé une part de responsabilité ; qu'en effet il appartenait à cette dernière seule de vérifier le respect par les entreprises des quantitatifs qu'elle avait établis dès lors que, selon le tableau de répartition des missions annexé au marché, elle avait une mission de direction de l'exécution du ou des contrats de travaux (DET) et a perçu 19 % des honoraires sur cette phase ;

Vu l'ordonnance en date du 28 février 2013 reportant la clôture d'instruction au 15 avril 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 avril 2013, présenté pour la commune de Boëge qui conclut à la réformation du jugement, à la condamnation de la société Orlando Mapelli à lui payer la somme de 6 536,85 euros, à la condamnation in solidum des sociétés Les carreaux européens, Atelier d'architecture Pierre Bajulaz, et Espace parquet à lui payer la somme de 156 884,37 euros outre intérêts à compter du 31 octobre 2007, ainsi qu'une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que la responsabilité de ces intervenants, y compris celle de la société Atelier d'architecture Pierre Bajulaz, a été retenue par l'expert ; que cette responsabilité est engagée, avant réception des travaux, par leur obligation de résultat en vertu des articles 1147 et suivants du code civil ; qu'outre la réparation des désordres elle est bien fondée à demander à être indemnisée à hauteur de 50 000 euros du préjudice de jouissance qui est résulté du délai de reprise des désordres d'au moins 14 mois ;

Vu l'ordonnance en date du 16 avril 2013 reportant la clôture d'instruction au 3 mai 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 22 avril 2013, présenté pour l'EURL Atelier d'architecture Pierre Bajulaz qui conclut aux mêmes fins que précédemment et au rejet de l'appel incident de la commune de Boëge ; elle fait valoir que l'appel de la commune est tardif dès lors qu'il ne s'agit pas d'un appel provoqué, sa situation ne pouvant être aggravée par l'appel principal ; que sa demande n'est au demeurant pas fondée ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 avril 2013, présenté pour la SARL Les carreaux européens qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens et au rejet de l'appel provoqué de la commune de Boëge et des conclusions dirigées contre elle par la société Atelier d'architecture Pierre Bajulaz ; elle soutient qu'à la supposer recevable, la demande de la commune rejetée en première instance, tendant à être indemnisée de son préjudice de jouissance à hauteur de 50 000 euros n'est étayée d'aucun justificatif ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu les lettres du 10 juin 2013 adressées aux parties en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire enregistré le 12 juin 2013 présenté par la commune de Boëge en réponse à la lettre susvisée du 10 juin 2013 ; elle soutient que son appel provoqué est recevable dès lors que la Cour n'a pas déclaré irrecevable l'appel principal de la SARL Les carreaux européens ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 juin 2013 :

- le rapport de M. Dursapt,

- les conclusions de Mme Vinet, rapporteur public ;

- et les observations de MeA..., représentant l'EURL Atelier d'architecture Pierre Bajulaz, et de MeB..., représentant la société Orlando Mapelli ;

1. Considérant que, par marchés passés en 2004 et 2005, la commune de Boëge a confié l'aménagement d'une salle communale dans un ancien corps de ferme, à un groupement solidaire de maitrise d'oeuvre comprenant notamment l'EURL Atelier d'architecture Pierre Bajulaz et la SARL Mapelli Orlando, économiste, ainsi qu'à la SARL Les carreaux européens pour le lot n° 9 (carrelage/faïence/chape) et à la SARL Espace parquet pour le lot n° 11 (parquets bois) ; que des désordres étant apparus au niveau du parquet de la salle, à la mi-octobre 2006 avant réception des travaux, la commune de Boëge a demandé au Tribunal administratif de Grenoble, sur la base d'une expertise ordonnée en référé, la condamnation solidaire de ces sociétés à l'indemniser des préjudices résultant du coût de reprise des désordres pour un montant de 157 075,17 euros et d'une perte de jouissance des locaux pendant les travaux de reprise pour un montant de 60 000 euros ; que par jugement du 26 juin 2012 le Tribunal a rejeté ses conclusions dirigées contre l'EURL Atelier d'architecture Pierre Bajulaz et la SARL Mapelli Orlando et a condamné la SARL Les carreaux européens et la SARL Espace parquet à verser à la commune respectivement la somme de 91 145,50 euros et celle de 22 275,73 euros TTC, ainsi qu'à supporter les dépens pour moitié chacune ; que la SARL Les carreaux européens relève appel de ce jugement en tant qu'il a mis à sa charge une somme supérieure à 37 807 euros, qui représente le tiers des désordres évalués par l'expert à un montant de 113 421,22 euros, ainsi qu'une somme supérieure au tiers des dépens ; que, par des conclusions d'appel incident et provoqué, la commune de Boëge demande la condamnation de la SARL Mapelli Orlando à lui payer une somme de 6 536,85 euros et la condamnation solidaire de l'EURL Atelier d'architecture Pierre Bajulaz, la SARL Les carreaux européens et la SARL Espace parquet à lui payer une somme de 156 884,37 euros ;

Sur les conclusions de la SARL Les carreaux européens :

2. Considérant que pour demander que soit ramenée de 91 145,50 euros à 37 807 euros la somme qu'elle a été condamnée à payer à la commune en première instance, la SARL Les carreaux européens invoque la faute que l'EURL Atelier d'architecture Pierre Bajulaz aurait commise dans la surveillance des travaux qu'elle a réalisés ;

3. Considérant que, dans l'exercice de sa mission de surveillance, l'architecte ne peut être responsable vis-à-vis de l'entrepreneur que s'il a commis une faute caractérisée et d'une gravité suffisante ; que si la société Atelier d'architecture Pierre Bajulaz n'a pas demandé un contrôle du dosage en ciment de la chape et ne s'est pas aperçue des défauts, localisés selon l'expert, tenant à l'absence de désolidarisation entre la dalle sous-jacente au parquet et les surfaces verticales et à la mauvaise position du treillis soudé, de telles fautes ne présentent pas, eu égard aux caractéristiques des ouvrages à réaliser, un caractère de gravité suffisant pour qu'elles engagent sa responsabilité quasi délictuelle à l'égard de cette dernière ; qu'il suit de là que la société Les carreaux européens n'est pas fondée à soutenir que la société Atelier d'architecture Pierre Bajulaz aurait commis une faute susceptible de l'exonérer, même partiellement, de sa responsabilité ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL Les carreaux européens n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à payer à la commune de Boëge une indemnité de 91 145,50 euros et à supporter la moitié des dépens ;

Sur les conclusions de la commune de Boëge :

5. Considérant, en premier lieu, que si, par des conclusions d'appel incident, la commune de Boëge demande que la SARL Les carreaux européens soit condamnée, solidairement avec l'architecte et les deux entreprises de travaux, à lui payer une somme de 156 884,37 euros, elle n'explique pas en quoi les motifs pour lesquels les premiers juges ont fixé à 91 145,50 euros l'indemnité mise à la charge de la SARL Les carreaux européens seraient erronés, alors que par ailleurs elle n'établit pas plus qu'en première instance la réalité même d'un préjudice de jouissance ; qu'ainsi ses conclusions d'appel incident doivent être rejetées ;

6. Considérant, en second lieu, que la situation de la commune de Boëge n'étant pas aggravée en appel du fait du rejet des conclusions d'appel principal de la SARL Les carreaux européens, ses conclusions d'appel provoqué, tendant à la condamnation de la SARL Mapelli Orlando et de l'EURL Atelier d'architecture Pierre Bajulaz et à la majoration de l'indemnité mise par les premiers juges à la charge de la société Espace parquet, sont irrecevables ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

8. Considérant, d'une part, que les dispositions précitées font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'EURL Atelier d'architecture Pierre Bajulaz et de la SARL Espace parquet, qui ne sont pas parties perdantes à l'égard de la commune de Boëge, au titre des frais exposés par celle-ci ;

9. Considérant, d'autre part, qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au titre des dispositions précitées par la commune de Boëge, l'EURL Atelier d'architecture Pierre Bajulaz et de la SARL Mapelli Orlando contre la SARL Les carreaux européens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête n° 12LY02274 de la SARL Les carreaux européens est rejetée.

Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Les carreaux européens, à l'EURL Atelier d'architecture Pierre Bajulaz, à la SARL Mapelli Orlando, à la commune de Boëge, à la SARL Espace parquet et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 27 juin 2013, où siégeaient :

- M. du Besset, président de chambre,

- M. Gazagnes, président assesseur,

- M. Dursapt, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 4 juillet 2013.

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N° 12LY02274


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY02274
Date de la décision : 04/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-03-01-02-01 Marchés et contrats administratifs. Exécution technique du contrat. Conditions d'exécution des engagements contractuels en l'absence d'aléas. Marchés. Mauvaise exécution.


Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: M. Marc DURSAPT
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : DPA DUCROT AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-07-04;12ly02274 ?
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