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27/06/2013 | FRANCE | N°13LY00368

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 27 juin 2013, 13LY00368


Vu la requête, enregistrée à la Cour le 14 février 2013, présentée pour M. A...B..., domicilié ...;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1206692, du 15 janvier 2013, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions de la préfète de la Loire, du 19 septembre 2012, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmenti

onnées ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Loire de lui délivrer un titre de séjour por...

Vu la requête, enregistrée à la Cour le 14 février 2013, présentée pour M. A...B..., domicilié ...;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1206692, du 15 janvier 2013, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions de la préfète de la Loire, du 19 septembre 2012, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Loire de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 196 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de sa vie privée et familiale ; que l'obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour qui la fonde ; que la décision d'éloignement a méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision désignant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité des décisions de refus de séjour et d'éloignement ; que la décision fixant le pays de renvoi a méconnu les stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire présenté par la préfète de la Loire, enregistré à la Cour le 11 juin 2013, soit postérieurement à la clôture d'instruction de l'affaire ;

Vu la décision du 26 février 2013, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M.B... ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 juin 2013 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

Sur la décision de refus de délivrance de titre de séjour :

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.B..., ressortissant de la République démocratique du Congo, né le 30 juillet 1992, est entré irrégulièrement en France le 13 décembre 2009, à l'âge de dix-sept ans ; qu'il a alors été confié jusqu'à sa majorité à l'aide sociale à l'enfance, par ordonnance de placement provisoire du 11 janvier 2010, puis par jugement du tribunal pour enfants de Saint-Etienne du 28 janvier 2010 ; qu'il a conclu, avec le département de la Loire, un contrat d'aide au jeune majeur valable jusqu'au 31 octobre 2010 puis préparé un certificat d'aptitude professionnelle de boulanger dans le cadre d'un contrat d'apprentissage auquel il a été mis fin le 31 août 2012 ; que M. B...fait valoir qu'à la date de la décision en litige, il bénéficiait d'une promesse d'embauche en qualité de boulanger dans l'entreprise qui l'a formé ; que, toutefois, il ressort également des pièces du dossier que le requérant, célibataire et sans enfant, n'a aucune attache familiale en France alors qu'il a lui-même déclaré à la préfecture qu'il a encore un frère et deux soeurs dans son pays d'origine ; que la circonstance que M. B...ait une promesse d'embauche en France n'est pas suffisante pour justifier qu'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " lui soit délivré ; qu'enfin, il ne ressort des pièces du dossier aucune circonstance avérée qui mettrait M. B... dans l'impossibilité de retourner dans son pays d'origine pour y mener une vie privée et familiale normale ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions d'entrée et de séjour de M. B...en France, la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'ainsi, elle n'a méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, elle n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont d'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;

4. Considérant, d'une part, que si M. B...soutient qu'il encourt des risques dans son pays d'origine, en raison de ses origines tutsies et des activités politiques qui lui sont imputées, il n'établit pas, par les pièces produites au dossier, la réalité de risques pesant de façon individualisée sur sa personne en République démocratique du Congo ; que, d'autre part, s'il fait valoir qu'il bénéficie d'une promesse d'embauche dans une boulangerie, ce seul élément n'est pas, dans les circonstances de l'espèce, de nature à constituer un motif exceptionnel au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, la préfète de la Loire n'a pas méconnu ces dispositions en refusant à M. B... le titre de séjour sollicité ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

5. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit à propos de la légalité de la décision de refus de délivrance de titre de séjour que M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de celle-ci à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) " ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour par décision de la préfète de la Loire du 19 septembre 2012 ; qu'ainsi, à la date de la décision contestée du même jour, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui reprend ce qui a été précédemment développé à propos des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, doit être écarté pour les mêmes motifs que précédemment ;

Sur la décision désignant le pays de destination :

9. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit à propos de la légalité de la décision d'éloignement que M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de celle-ci à l'encontre de la décision désignant le pays de destination ;

10. Considérant que, pour contester la décision désignant le pays de destination, M. B... ne peut pas utilement exciper de l'illégalité de la décision par laquelle la préfète de la Loire lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, dès lors que celle-ci n'a pas servi de base légale à cette décision ;

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " et que ce dernier texte énonce que " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants. " ;

12. Considérant que M.B..., ressortissant de la République démocratique du Congo, soutient qu'il a quitté Kinshasa pour le Nord-Kivu en 1998, en raison des violences perpétrées contre les Tutsis Banyamulenges ; que son père a été exécuté en décembre 2004 après avoir refusé de s'enrôler dans l'armée patriotique rwandaise ; qu'en octobre 2008, il a été enrôlé de force comme enfant soldat dans les troupes de la rébellion menées par le général Laurent Nkunda ; qu'après avoir été blessé, il est parvenu à s'échapper et a rejoint le Soudan, puis la France ; qu'il est encore à ce jour recherché par les autorités congolaises qui le soupçonnent de conduire des activités subversives à l'extérieur du pays et que des membres de sa famille ont été persécutés ; que, toutefois, les témoignages peu circonstanciés et donc revêtus d'une faible force probante ne suffisent pas, à eux seuls, à établir la réalité des faits allégués par le requérant qui n'ont, d'ailleurs, convaincu ni l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, ni la Cour nationale du droit d'asile, qui ont rejeté sa demande d'asile ; que les risques de mauvais traitements invoqués par le requérant en cas de retour en République démocratique du Congo sur la seule base de rapports et de documents à caractère général, relatifs aux crimes de guerre perpétrés par les membres du mouvement du 23 mars et aux violences graves envers les populations civiles dans le Nord-Kivu, ne permettent pas d'établir qu'il y serait personnellement soumis ; que, par suite, la décision désignant la République démocratique du Congo comme possible destination de la mesure d'éloignement n'est pas intervenue en violation des stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés et non compris dans les dépens, dans les conditions prévues par les dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète de la Loire.

Délibéré après l'audience du 13 juin 2013 à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Rabaté, président assesseur,

M. Clément, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 juin 2013,

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N° 13LY00368


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY00368
Date de la décision : 27/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-06-27;13ly00368 ?
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