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27/06/2013 | FRANCE | N°12LY02982

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 27 juin 2013, 12LY02982


Vu, enregistré le 6 décembre 2012 au greffe de la Cour sous le n° 12LY02982, l'arrêt n° 340087 du 21 novembre 2012 par lequel le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi en cassation présenté pour M. C...B..., domicilié ... a :

1°) annulé l'arrêt n° 08LY01605 de la Cour administrative d'appel de Lyon, en date du 9 mars 2010 ;

2°) renvoyé le jugement de l'affaire à la Cour administrative d'appel de Lyon ;

3°) mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros à M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice admi

nistrative ;

Vu, le recours, enregistré le 10 juillet 2008, présenté par le minis...

Vu, enregistré le 6 décembre 2012 au greffe de la Cour sous le n° 12LY02982, l'arrêt n° 340087 du 21 novembre 2012 par lequel le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi en cassation présenté pour M. C...B..., domicilié ... a :

1°) annulé l'arrêt n° 08LY01605 de la Cour administrative d'appel de Lyon, en date du 9 mars 2010 ;

2°) renvoyé le jugement de l'affaire à la Cour administrative d'appel de Lyon ;

3°) mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros à M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu, le recours, enregistré le 10 juillet 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 070893 du 9 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a déchargé M. B...des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre des années 2002 et 2003 à raison de la remise en cause des déductions forfaitaires pour frais professionnels de 14 % et de 5 % appliquées à ses rémunérations ;

2°) de rétablir M. B...aux rôles de l'impôt sur le revenu au titre des années 2002 et 2003 à raison de ces impositions supplémentaires et des pénalités y afférentes ;

Le ministre soutient que le tribunal administratif a entaché son jugement d'erreur de droit en jugeant que les dispositions de l'instruction 5 F-1-99 du 30 décembre 1998 permettaient de prendre en compte comme revenus auxquels s'appliquent les déductions de 14 % et de 5 % aussi bien les cachets d'artiste que les rémunérations provenant de l'enseignement musical ; que l'interprétation du tribunal est, en outre, contraire à la réponse ministérielle du 11 novembre 2002 à la question deA..., député, laquelle est opposable aux contribuables dès lors qu'elle a fait l'objet d'une publication au Journal officiel avant le fait générateur des impositions en litige ; que, dès lors, M. B...n'était en droit de bénéficier des déductions de 14 % et 5 % qu'à raison du montant des rémunérations accessoires qu'il avait perçues ; que, toutefois, les déductions auxquelles avait droit M.B..., ajoutées aux autres frais réels qu'il avait déclarés n'excédant pas 10 % de son salaire imposable, c'est à bon droit que le service a substitué aux frais réels initialement déduits la déduction forfaitaire de droit commun de 10 % ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 juillet 2009, présenté pour M. B...qui conclut au rejet du recours du ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. B...soutient que l'instruction administrative 5 F-16-03 n'est pas applicable car elle a été annulée par un arrêt du Conseil d'Etat en date du 6 mars 2006 et que, dès lors, l'instruction précédente 5 F-1-99 régit seule les droits des musiciens ; qu'il ressort des termes mêmes de l'instruction 5 F-1-99 du 30 décembre 1998 qu'il convient de pratiquer l'abattement sur la totalité de la rémunération perçue par l'artiste musicien, y compris les rémunérations qu'il a perçues au titre de son activité d'enseignement artistique alors même que les sommes perçues à raison de son activité artistique ne présenteraient qu'un caractère accessoire ; que la réponse ministérielle A...invoquée par le ministre, qui a été reprise par une instruction annulée pour excès de pouvoir par le Conseil d'Etat, ne saurait modifier une instruction administrative ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 1er octobre 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, qui conclut aux mêmes fins que son recours par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire en défense complémentaire, enregistré le 29 décembre 2009, présenté pour M. B..., qui conclut aux mêmes fins que son mémoire précédent par les mêmes moyens ;

Vu la note en délibéré enregistrée le 3 février 2010 pour M. B...;

Vu le mémoire, enregistré le 20 mars 2013, présenté par le ministre de l'économie et des finances ; il persiste dans les conclusions présentées dans son recours enregistré le 10 juillet 2008 par les mêmes moyens que précédemment ; il soutient, en outre, que c'est l'intégralité de la doctrine, telle qu'elle figure dans la documentation de base 5 F 2544, qui est opposable, ce qui inclut la réponse ministérielle A...et le Bulletin officiel des impôts 5 F-16-03, même illégal, pour les années postérieures à leur publication ;

Vu l'ordonnance en date du 26 avril 2013 fixant la clôture de l'instruction au 13 mai 2013 à 16 heures 30, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 juin 2013 :

- le rapport de Mme Mear, présidente ;

- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

1. Considérant que M. B...exerce, parallèlement à ses fonctions d'enseignant de musique au sein de l'école de musique de la ville de Vichy, une activité d'artiste musicien ; que, dans ses déclarations sur le revenu au titre des années 2002 et 2003, M. B...a pratiqué sur la totalité de ses revenus les abattements forfaitaires prévus pour les artistes ayant opté pour les frais réels par l'instruction 5 F-1-99 du 30 décembre 1998, de 14 % au titre des frais d'instruments et frais accessoires pour les artistes musiciens et de 5 % au titre des frais divers pour l'ensemble des professions artistiques ; qu'à la suite d'un contrôle sur pièces, l'administration a, au titre des années 2002 et 2003, remis en cause dans leur totalité lesdites déductions et y a substitué la déduction forfaitaire de droit commun de 10 % ; que par jugement n° 070893 du 9 avril 2008 le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a fait droit à la demande de M. B...tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre des années 2002 et 2003 à raison de la remise en cause des déductions forfaitaires pour frais professionnels de 14 % et de 5 % ; que, par un arrêt n° 08LY01605 en date du 9 mars 2010, la Cour administrative d'appel de Lyon a annulé l'article 1er du jugement du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand et a rétabli M. B...aux rôles des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, et des pénalités y afférentes, auxquelles il a été assujetti au titre des années 2002 et 2003 ; que, par un arrêt n° 340087 en date du 21 novembre 2012, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi en cassation présenté pour M. B...a annulé l'arrêt n° 08LY01605 de la Cour administrative d'appel de Lyon, en date du 9 mars 2010 et renvoyé le jugement de l'affaire à cette Cour ;

Sur le bien fondé des impositions :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales " ; que ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet de conférer à l'administration fiscale un pouvoir réglementaire ou de lui permettre de déroger à la loi ; qu'elles instituent, en revanche, un mécanisme de garantie au profit du redevable qui, s'il l'invoque, est fondé à se prévaloir, à condition d'en respecter les termes, de l'interprétation de la loi formellement admise par l'administration, même lorsque cette interprétation ajoute à la loi ou la contredit ;

3. Considérant que ces dispositions ne permettent de se prévaloir d'une interprétation de la loi fiscale que dans son dernier état formellement accepté par l'administration à la date du fait générateur de l'imposition en litige ; qu'un redevable n'est donc pas fondé à se prévaloir de l'interprétation initialement admise par l'administration dans un premier acte lorsque cette interprétation a été complétée ou modifiée par un deuxième acte, et ce nonobstant l'annulation ultérieure de ce second acte ; qu'il a également la faculté d'opposer à l'administration l'interprétation formellement admise dans un acte, quand bien même un autre acte, exprimant la même interprétation a été annulé pour excès de pouvoir ;

4. Considérant qu'à la date du fait générateur des impositions litigieuses des années 2002 et 2003, soit respectivement au 31 décembre 2002 et au 31 décembre 2003, l'instruction 5 F-1-99 du 30 décembre 1998 avait été rapportée sur certains points, d'une part, par la réponse ministérielle du 11 novembre 2002 à la question de M.A..., député, et, d'autre part, par l'instruction 5 F-16-03 du 22 octobre 2003 reprenant le contenu de cette réponse ministérielle ; qu'à ces dates, l'instruction 5 F-1-99 du 30 décembre 1998 ne pouvait donc plus être opposée à l'administration sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales s'agissant des modalités d'application des déductions forfaitaires de 14 % et de 5 % aux professeurs de musique exerçant parallèlement à leur activité d'enseignement une activité d'artiste musicien pour laquelle ils sont spécifiquement rémunérés ; qu'à la date du 31 décembre 2002, l'interprétation formellement admise par l'administration, qui était ainsi seule invocable, résultait de la réponse ministérielle du 11 novembre 2002 dès lors qu'elle était régulièrement publiée au 31 décembre 2002 et contenait des dispositions impératives à caractère général rapportant en partie l'instruction 5 F-1-99 du 30 décembre 1998 en ce qui concerne les modalités d'application des déductions forfaitaires de 14 % et de 5 % aux professeurs de musique exerçant parallèlement à leur activité d'enseignement une activité d'artiste musicien ; qu'à la date du 31 décembre 2003, l'interprétation formellement admise par l'administration, seule invocable, résultait de la réponse ministérielle du 11 novembre 2002 et de l'instruction 5 F-16-03 du 22 octobre 2003 et ce, nonobstant l'annulation ultérieure de cette dernière instruction par l'arrêt du Conseil d'Etat du 6 mars 2006, n° 262982, Syndicat national des enseignants et artistes ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que pour décharger M. B... des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2002 et 2003, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand s'est fondé sur la doctrine administrative énoncée par l'instruction 5 F-1-99 du 30 décembre 1998 ;

6. Considérant, qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B...devant le Tribunal administratif et devant la Cour ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 83 du code général des impôts : " Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés : (...) 3° Les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales. La déduction à effectuer du chef des frais professionnels est calculée forfaitairement en fonction du revenu brut (...) ; elle est fixée à 10 % du montant de ce revenu. (...) Les bénéficiaires de traitements et salaires sont également admis à justifier du montant de leurs frais réels (...). " ; que M.B..., qui a opté pour la déduction de frais réels, ne justifie pas de frais d'un montant supérieur au montant retenu par l'administration ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a déchargé M. B...des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre des années 2002 et 2003 à raison de la remise en cause des déductions forfaitaires pour frais professionnels de 14 % et de 5 % appliquées à ses rémunérations ; qu'il y a lieu, dès lors, d'une part, d'annuler le jugement n° 070893 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand en date du 9 avril 2008 et, d'autre part, de rétablir M. B...aux rôles des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes, auxquelles il a été assujetti au titre des années 2002 et 2003 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. B...la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 070893 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand en date du 9 avril 2008 est annulé.

Article 2 : M. B...est rétabli aux rôles des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes, auxquelles il a été assujetti au titre des années 2002 et 2003.

Article 3 : Les conclusions de M. B...tendant à la condamnation de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie et des finances et à M. C... B....

Délibéré après l'audience du 6 juin 2013 à laquelle siégeaient :

Mme Mear, présidente,

M. Reynoird, premier conseiller,

Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 juin 2013.

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N° 12LY02982


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY02982
Date de la décision : 27/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-07-02-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Traitements, salaires et rentes viagères. Déductions pour frais professionnels. Frais réels.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEAR
Rapporteur ?: Mme Josiane MEAR
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : SCP CHENEAU et PUYBASSET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-06-27;12ly02982 ?
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