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07/05/2013 | FRANCE | N°12LY01895

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 07 mai 2013, 12LY01895


Vu la requête, enregistrée le 19 juillet 2012, présentée pour M. A...B...domicilié... ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002116 du 7 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet opposée par le ministre du travail, de l'emploi et de la santé à sa réclamation, présentée le 13 septembre 2010, en vue de l'inscription de l'établissement des Ancizes (Puy-de-Dôme) de la société Aubert et Duval, sur la liste des établissements ouvrant droit au

dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ;

2°)...

Vu la requête, enregistrée le 19 juillet 2012, présentée pour M. A...B...domicilié... ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002116 du 7 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet opposée par le ministre du travail, de l'emploi et de la santé à sa réclamation, présentée le 13 septembre 2010, en vue de l'inscription de l'établissement des Ancizes (Puy-de-Dôme) de la société Aubert et Duval, sur la liste des établissements ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;

3°) d'enjoindre au ministre chargé du travail d'inscrire l'établissement des Ancizes de la société Aubert et Duval, pour la période comprise entre 1917 et 2005, sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

- à titre principal, que, en l'absence de changement dans les circonstances de droit et de fait, l'administration a méconnu l'autorité de la chose jugée qui s'attache au jugement du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 24 novembre 2006, confirmé par l'arrêt de la Cour du 18 décembre 2008, annulant une précédente décision du 7 février 2005 ayant le même objet que la décision en litige ; qu'à cet égard, la modification apportée, par la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006, à l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, ne constitue pas un changement des circonstances de droit, cette modification n'ayant fait qu'intégrer à la loi le critère jurisprudentiel selon lequel l'exercice des activités de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, de flocage et de calorifugeage à l'amiante de l'établissement doit présenter un caractère significatif ;

- subsidiairement, que les opérations de calorifugeage ou de flocage à l'amiante représentaient une part significative de l'activité de l'établissement des Ancizes de la société Aubert et Duval, ainsi que cela résulte notamment de l'enquête et des témoignages recueillis ; que dans l'établissement, où s'exerce une activité d'aciérie et de fonderie, l'amiante était massivement utilisé pour le calorifugeage des installations ; que jusqu'en 2004, les opérateurs qui utilisaient quotidiennement ces installations n'ont pas bénéficié de dispositif de protection individuelle ou collective, plus particulièrement les salariés de la maintenance qui procédaient à la révision des installations ; que les opérations de dépose de calorifuges amiantés se sont poursuivies jusqu'en mars 2004 ; que les salariés ont continué à utiliser les stocks de produits amiantés présents sur le site jusqu'en mars 2004 ; qu'ainsi, l'amiante était massivement présent au sein de l'entreprise et les dirigeants de l'usine n'ont pas respecté les dispositions légales relatives à la protection des travailleurs contre les risques liés à cette substance ; que selon le rapport d'enquête du 8 octobre 2004 du directeur régional du travail, 1 592 personnes au sein de l'établissement étaient exposées régulièrement à l'inhalation de poussière d'amiante ; que le personnel du service de maintenance, qui comprenait 250 personnes, était exposé régulièrement jusqu'en 1992 du fait du remplacement des protections anti chaleur amiantées dans le secteur des fours ; que la ligne fonderie occupait 87 personnes en 1980 ; que le rapport précise le nombre de déclarations de maladies professionnelles liées à l'amiante, de 70 en 2004 ; que le rapport d'enquête du 2 juillet 2012, réalisé postérieurement au jugement attaqué, atteste de la réalité de ces éléments ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 septembre 2012, présenté par le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient :

- que le jugement du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 24 novembre 2006 n'impliquait pas une inscription sur la liste, mais seulement l'intervention d'une nouvelle décision, ce qui a été fait le 27 février 2007 ; que, comme la Cour l'a jugé par arrêt du 20 juillet 2010, ce jugement d'annulation a été exécuté ; qu'ainsi, l'administration n'a pas porté atteinte à l'autorité de la chose jugée attachée à cette annulation ; que ce jugement a totalement été exécuté, comme l'a relevé la Cour dans son arrêt du 20 juillet 2010 ;

- que l'enquête effectuée par l'inspecteur du travail le 24 décembre 2009 a montré que l'activité de calorifugeage a été essentielle seulement pour 37 salariés occupant des emplois de maçon fumiste, et ponctuelle pour d'autres salariés ; que la proportion de salariés exposés à l'amiante a donc été marginale ; qu'ainsi, il n'a pas commis d'erreur d'appréciation dans l'analyse de la situation de l'entreprise ou l'interprétation des dispositions de l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ;

Vu le mémoire, enregistré le 17 octobre 2012, présenté pour la société Aubert et Duval qui conclut au rejet de la requête ;

Elle soutient :

- que la décision du ministre du 27 février 2007, qui est définitive, est opposable au requérant ; que cette décision ne devait pas nécessairement faire l'objet d'une publication ; que le refus de classement opposé au syndicat CGT a fait l'objet d'une motivation et d'une notification ; que la demande du syndicat portait sur une mesure collective et que le requérant était nécessairement représenté par cette organisation syndicale ; que la notification de la décision au syndicat, qui est représentatif, est opposable à tous les membres du personnel dûment représentés ; que le requérant a eu connaissance de cette décision de refus au cours de la présente instance et il ne l'a pas déférée dans les délais au juge administratif, alors qu'en tant que personne légalement représentée par les syndicats, elle lui faisait nécessairement grief ; que, dès lors, le rejet de sa demande de classement, formulée individuellement par le requérant, doit être considéré comme une décision confirmative du précédent refus intervenu le 27 février 2007 ; qu'à défaut, il pourrait être présenté autant de demandes qu'il y a de salariés dans l'établissement, ce qui engendrerait une insécurité juridique pour l'entreprise ;

- que l'autorité de chose jugée ne pourrait concerner que la décision du 7 février 2005, mais non la décision du 27 février 2007, prise dans d'autres conditions et après une nouvelle instruction par l'administration ;

- qu'il n'est pas établi que les installations de calorifugeage caractériseraient nécessairement des activités de calorifugeage au sens précis de ce terme ;

- que l'irrecevabilité invoquée ne tient pas à l'absence de caractère normatif de la décision confirmative, mais à l'expiration du délai de recours ; qu'un recours étant irrecevable, une décision confirmative non réglementaire n'a pas besoin de faire l'objet d'une publicité ; que la décision de refus du ministre n'avait pas à faire l'objet d'une publication ; que seules les décisions d'inscription doivent être notifiées à l'employeur et affichées sur le lieu de travail et non les décisions de refus ;

- que le rapport d'enquête produit pour la première fois en appel par le requérant, qui ne présente pas les garanties d'une expertise, notamment au regard du respect du principe du contradictoire, doit être écarté des débats ;

Vu l'ordonnance du 29 octobre 2012 fixant au 13 novembre 2012 la date de clôture de l'instruction ;

Vu les mémoires, enregistrés les 9 et 12 novembre 2012, présentés pour la société Aubert et Duval, qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999, notamment son article 41 ;

Vu la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007, notamment son article 119 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 avril 2013 :

- le rapport de M. Picard, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Pourny, rapporteur public ;

- et les observations de Me Lafforgue, avocat de M. B...et de Me Blancpain, avocat de la société Aubert et Duval ;

1. Considérant que par un jugement du 24 novembre 2006, confirmé par un arrêt de la Cour du 18 décembre 2008, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand, sur la demande de la Confédération générale des travailleurs (CGT) de l'aciérie des Ancizes (Puy-de-Dôme) de la société Aubert et Duval, d'une part, a annulé la décision du ministre chargé du travail, du 7 février 2005, refusant d'inscrire cette usine sur la liste des établissements ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, prévue par l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 et, d'autre part, a enjoint audit ministre de procéder à un nouvel examen de la demande de la CGT ; qu'un nouveau refus d'inscription a été opposé à la CGT par une décision du 27 février 2007 ; que par un courrier adressé le 13 septembre 2010 au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Auvergne, M.B..., salarié de l'aciérie, a demandé l'inscription de l'établissement sur la liste précitée ; qu'il fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus implicite qui lui a été opposé par l'administration ;

2. Considérant que M. B...produit pour la première fois en appel un document intitulé " Enquête et témoignages sur l'amiante qui a été utilisé dans les différents services de l'entreprise Aubert et Duval des Ancizes " ; que la société Aubert et Duval fait valoir qu'il n'appartient pas aux parties de procéder elles-mêmes à une enquête, régie par l'article R. 623-1 du code de justice administrative, et qu'il n'est pas établi que ce document a été élaboré dans des conditions d'impartialité offrant des garanties suffisantes pour la régularité de la procédure ; que, toutefois, le juge administratif doit joindre au dossier les éléments d'information spontanément produits par une partie et statuer au vu de ces pièces après en avoir ordonné la communication pour en permettre la discussion contradictoire ; que, dès lors, les conclusions de la société Aubert et Duval tendant à ce que cette production, qui lui a été régulièrement communiquée, ainsi qu'à l'administration, soit écartée du dossier, doivent être rejetées ;

Sur la fin de non recevoir opposée par la société Aubert et Duval à la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif :

3. Considérant que le refus du ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement du 27 février 2007 d'inscrire l'aciérie des Ancizes sur la liste prévue à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 ne présente le caractère ni d'un acte réglementaire, ni d'un acte individuel ; qu'il n'a fait l'objet d'aucune mesure de publicité autre que sa notification au syndicat CGT de l'établissement ; qu'ainsi, il n'est pas opposable aux tiers, et notamment aux salariés de l'entreprise, qui n'étaient pas représentés par ledit syndicat ; que, dès lors, le refus implicitement opposé à la demande présentée le 13 septembre 2010 par M. B..., salarié de l'établissement des Ancizes, tendant également à son inscription sur la liste prévue à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, ne saurait être regardé comme purement confirmatif de la décision du 27 février 2007 ; que, par suite, la fin de non recevoir opposée par la société Aubert et Duval à la demande de celui-ci devant le tribunal administratif, tirée du caractère purement confirmatif de cette décision, ne peut être accueillie ;

Sur la légalité de la décision en litige :

En ce qui concerne l'autorité de chose jugée s'attachant à l'annulation de la décision du 7 février 2005 :

4. Considérant qu'aux termes du I de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 susvisée, dans sa rédaction applicable à la décision du 7 février 2005 : " Une allocation de cessation anticipée d'activité est versée aux salariés et anciens salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, des établissements de flocage et de calorifugeage à l'amiante ou de construction et de réparation navales, sous réserve qu'ils cessent toute activité professionnelle, lorsqu'ils remplissent les conditions suivantes : /1° Travailler ou avoir travaillé dans un des établissements mentionnés ci-dessus et figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget, pendant la période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante (...) " ;

5. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que doivent être inscrits sur la liste qu'elles prévoient les établissements dans lesquels les opérations de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, de calorifugeage ou de flocage à l'amiante ont, compte tenu notamment de leur fréquence et de la proportion de salariés qui y ont été affectés, représenté sur la période en cause une part significative de l'activité de ces établissements ; que cette interprétation a été confirmée par le I de l'article 119 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007, qui dispose que : " Le 1° du I de l'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (n° 98-1194 du 23 décembre 1998) est complété par une phrase ainsi rédigée : "L'exercice des activités de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, de flocage et de calorifugeage à l'amiante de l'établissement doit présenter un caractère significatif." (...) " ; qu'ainsi, les circonstances de droit existant le 13 novembre 2010, date de la décision en litige, sont identiques à celles qui existaient le 7 février 2005 ;

6. Considérant que pour confirmer le jugement du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 24 novembre 2006 annulant la décision du 7 février 2005 refusant d'inscrire l'aciérie des Ancizes de la société Aubert et Duval sur la liste prévue par l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, la Cour, par son arrêt du 18 décembre 2008, s'est fondée sur le motif tiré de ce que, compte tenu notamment de deux rapports d'enquête de l'inspection du travail, et plus particulièrement de celui du 8 octobre 2004, et du courrier de la caisse régionale d'assurance maladie du 25 octobre 2004, cet établissement doit être regardé comme ayant eu une part significative de son activité consacrée à la manipulation de calorifugeage et décalorifugeage de produits amiantés, et comme ayant eu un nombre significatif de ses salariés ainsi exposés à l'amiante ; que ce motif est inséparable de l'annulation prononcée, dont il constitue le soutien nécessaire ;

7. Considérant que si la société Aubert et Duval se prévaut des rapports du directeur régional du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle d'Auvergne au ministre chargé du travail, des 4 janvier 2007 et 24 décembre 2009, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces documents contiendraient des éléments se rapportant à la période antérieure au 8 février 2005 qui n'auraient pas été connus lorsque la décision du 7 février 2005 a été annulée ;

8. Considérant, il est vrai, que, pour assurer l'exécution de l'annulation de sa décision du 7 février 2005, le ministre chargé du travail, qui restait saisi de la demande de la CGT, lui a de nouveau opposé un refus, le 27 février 2007, en se fondant sur le rapport du directeur régional du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle d'Auvergne du 4 janvier 2007 ; que, dans le cadre d'une procédure juridictionnelle ouverte, à la demande de la CGT, afin d'assurer l'exécution du jugement du 24 novembre 2006 et de l'arrêt du 18 décembre 2008, la Cour a, par un arrêt du 20 juillet 2010, rejeté cette demande au motif que, en procédant à un nouvel examen de l'affaire et en prenant une nouvelle décision, le ministre avait exécuté ces décisions juridictionnelles ; que toutefois, contrairement à ce que soutient la société Aubert et Duval, ces circonstances ne peuvent faire obstacle à ce que M. B..., à qui la nouvelle décision, du 27 février 2007, n'a pas été notifiée, puisse se prévaloir de l'autorité absolue de chose jugée s'attachant à l'annulation de la décision du 7 février 2005 ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, en l'absence de circonstances de fait et de droit nouvelles, le ministre chargé du travail ne pouvait, sans méconnaître l'autorité absolue de chose jugée s'attachant au jugement et à l'arrêt annulant sa décision du 7 février 2005, rejeter la réclamation de M. B...tendant à l'inscription de l'aciérie des Ancizes sur la liste prévue par les dispositions du 1° du I de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 pour la période allant jusqu'à la date de cette décision ;

En ce qui concerne le moyen tiré de ce que les opérations de calorifugeage ou de flocage à l'amiante ont représenté une part significative de l'activité de l'établissement des Ancizes :

10. Considérant que, comme il a été rappelé au point 5, il résulte des dispositions du I de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 que doivent être inscrits sur la liste qu'elles prévoient les établissements dans lesquels les opérations de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, de calorifugeage ou de flocage à l'amiante ont, compte tenu notamment de leur fréquence et de la proportion de salariés qui y ont été affectés, représenté sur la période en cause une part significative de l'activité de ces établissements ; que les opérations de calorifugeage à l'amiante doivent, pour l'application de ces dispositions, s'entendre des interventions qui ont pour but d'utiliser l'amiante à des fins d'isolation thermique ; que ne sauraient par suite ouvrir droit à l'allocation prévue par ce texte les utilisations de l'amiante à des fins autres que l'isolation thermique, alors même que, par l'effet de ses propriétés intrinsèques, l'amiante ainsi utilisé assurerait également une isolation thermique ;

11. Considérant que selon le rapport du directeur régional du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle d'Auvergne au ministre chargé du travail, du 4 janvier 2007, dans l'aciérie des Ancizes, créée en 1917, qui n'a jamais fabriqué de matériaux contenant de l'amiante, " des matériaux à base d'amiante étaient utilisés en protection thermique collective pour isoler certains matériels à proximité des fours dont la température varie de 800° à 1 600° ou pour conserver la chaleur de certains aciers lors des transferts dans différents ateliers et en protection individuelle pour protéger les salariés travaillant sur les équipements à chaud " ; que ce rapport indique que l'activité de calorifugeage a concerné seulement une centaine de salariés sur les dix dernières années, alors que l'effectif total de l'entreprise étaient de 1 339 salariés en 2006 ; que ni le rapport de cette même autorité du 24 décembre 2009, ni le document intitulé " Enquête et témoignages sur l'amiante qui a été utilisée dans les différents services de l'entreprise Aubert et Duval des Ancizes ", produit par M.B..., ne contiennent d'éléments remettant en cause ces informations ; qu'ainsi, il ressort des pièces du dossier que, si l'amiante a été utilisé dans l'entreprise à des fins d'isolation thermique, l'activité de calorifugeage à l'amiante n'a pas, postérieurement au 7 février 2005, représenté sur la période en cause une part significative de son activité ; que, par suite, la décision implicite en litige du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, refusant l'inscription de l'établissement sur la liste prévue au I de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 pour la période postérieure au 7 février 2005, qui ne repose pas sur des faits matériellement inexacts, n'est pas entachée d'erreur d'appréciation ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet opposée par le ministre du travail, de l'emploi et de la santé à sa réclamation, en tant qu'elle porte sur la période de 1917 au 7 février 2005 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

13. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsqu'un jugement ou un arrêt implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel, saisi de conclusions en ce sens, prescrit cette mesure, assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution, par le même jugement ou le même arrêt ; " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ; que l'article L. 911-3 de ce code dispose que : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. " ;

14. Considérant que l'annulation prononcée par le présent arrêt implique nécessairement, eu égard au motif sur lequel elle repose, et en l'absence de circonstance de droit ou de fait qui s'y opposerait, que le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social procède à l'inscription de l'aciérie des Ancizes sur la liste prévue au 1° du I de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, pour la seule période de 1917 au 7 février 2005, dans le délai de deux mois suivant la date de notification de cet arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le paiement à M. B... d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : En tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de M. B...tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet de sa réclamation en tant qu'elle porte sur la période antérieure au 8 février 2005, le jugement du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 7 juin 2012 est annulé.

Article 2 : La décision implicite de rejet de la réclamation présentée par M. B...le 13 septembre 2010 est annulée en tant qu'elle porte sur la période antérieure au 8 février 2005.

Article 3 : Il est enjoint au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social de procéder à l'inscription de l'aciérie des Ancizes sur la liste prévue au 1° du I de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, pour la période de 1917 au 7 février 2005, dans le délai de deux mois suivant la date de notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à M. B...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B...est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à la société Aubert et Duval.

Délibéré après l'audience du 11 avril 2013, à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Picard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 mai 2013.

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N° 12LY01895


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Santé publique - Lutte contre les fléaux sociaux.

Travail et emploi - Conditions de travail.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Vincent-Marie PICARD
Rapporteur public ?: M. POURNY
Avocat(s) : TEISSONNIERE TOPALOFF LAFFORGUE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 07/05/2013
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 12LY01895
Numéro NOR : CETATEXT000027415735 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-05-07;12ly01895 ?
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