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26/03/2013 | FRANCE | N°12LY02755

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 26 mars 2013, 12LY02755


Vu la requête, enregistrée à la Cour le 8 novembre 2012, présentée pour Mme B...A..., domiciliée chez...,;

Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202529, du 11 juillet 2012, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Drôme, du 19 avril 2012, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel elle serait reconduite ;

2°) d'annuler, pour excè

s de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Drôme de l...

Vu la requête, enregistrée à la Cour le 8 novembre 2012, présentée pour Mme B...A..., domiciliée chez...,;

Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202529, du 11 juillet 2012, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Drôme, du 19 avril 2012, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel elle serait reconduite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Drôme de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de sept jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de lui délivrer un récépissé de demande de titre de séjour et de réexaminer sa demande, sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Elle soutient qu'elle réside en France habituellement depuis le 12 septembre 2001 et qu'elle devait donc bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement des stipulations du 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; que la décision lui refusant la délivrance du titre de séjour est entachée d'une irrégularité de procédure dès lors que le préfet de la Drôme s'est abstenu de saisir la commission du titre de séjour ; que le préfet n'a pas saisi le médecin de l'agence régionale de santé d'une demande d'avis sur son état de santé alors que sa demande de titre comportait des pièces médicales ; que les décisions contestées ont méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré à la Cour par télécopie le 28 décembre 2012 et régularisé le 3 janvier 2013, présenté par le préfet de la Drôme, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que l'arrêté contesté a été signé par une autorité compétente ; que le refus de séjour et la décision fixant le pays de destination sont suffisamment motivés et que l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation ; que la commission du titre de séjour, aux termes du 1er alinéa de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 ; que Mme A...ne remplissant pas les conditions prévues par les stipulations équivalentes des 1° et 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, il n'était pas tenu de saisir de son cas la commission du titre de séjour ; que son arrêté n'a méconnu ni les stipulations des 1° et 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, ni celles des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que Mme A...n'a pas présenté de demande de titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; qu'en fixant le délai de départ volontaire à trente jours, il n'a pas commis d'erreur dans l'appréciation de la situation de MmeA... ;

Vu le mémoire, enregistré à la Cour le 22 février 2013, présenté pour MmeA..., qui maintient les conclusions de sa requête, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire présenté par le préfet de la Drôme, enregistré à la Cour le 11 mars 2013, soit postérieurement à la clôture d'instruction de l'affaire ;

Vu la décision du 25 septembre 2012, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle à Mme A...;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mars 2013 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

Sur la décision de refus de délivrance de titre de séjour :

1. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : "(...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7° au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays(...)"; qu'il résulte de ces stipulations que lorsque un étranger justifie, à l'appui de sa demande de titre de séjour, d'éléments suffisamment précis sur la nature et la gravité des troubles dont il souffre, le préfet est tenu, préalablement à sa décision, de recueillir l'avis du médecin inspecteur de la santé publique qui statue dans les conditions prévues par l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

2. Considérant que Mme A...fait valoir l'irrégularité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé le 19 avril 2012 en l'absence d'avis d'un médecin de l'agence régionale de santé de la région Rhône-Alpes sur son état de santé alors que sa demande de titre comportait des pièces médicales ; qu'il ressort des pièces du dossier que si MmeA..., qui n'avait pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, avait produit, lors de sa demande formulée le 17 octobre 2011 et complétée le 7 novembre 2011, des pièces médicales relatives à son état de santé, qui révélaient qu'elle prenait des médicaments au premier semestre de l'année 2011 pour soigner une dépression, une hypertension artérielle et des migraines, ces pièces portées à la connaissance du préfet de la Drôme, antérieurement à l'arrêté litigieux du 19 avril 2012, ne donnaient toutefois aucune indication précise sur le degré de gravité des problèmes de santé dont elle souffrait à la période à laquelle cette décision a été prise et la requérante n'est donc pas fondée à soutenir que la décision de refus de séjour est irrégulière, faute d'avoir été précédée de la consultation du médecin inspecteur de santé publique de l'agence régionale de santé ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / 1° Au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;

4. Considérant que MmeA..., qui établit qu'elle est entrée régulièrement en France le 12 septembre 2001, soutient qu'elle y réside habituellement depuis cette date ; qu'elle ne produit toutefois, pour justifier de sa présence en France de 2001 à 2011, que des attestations d'affiliation à l'aide médicale d'Etat et à la couverture maladie universelle complémentaire, qui ne permettent pas de certifier sa présence effective sur le territoire français, des attestations de tiers dépourvues de caractère probant et des ordonnances médicales, des feuilles de soins et des résultats d'analyses biologiques et médicales qui ne peuvent attester que d'une présence ponctuelle de l'intéressée aux dates mentionnées et sont insuffisants pour justifier d'une résidence habituelle en France depuis le 12 septembre 2001 ; qu'en outre, Mme A...ne produit aucun document probant susceptible d'attester de sa présence en France au cours du premier semestre de l'année 2010 ; qu'il suit de là que Mme A...n'établit pas qu'elle résidait en France habituellement depuis plus de dix ans à la date de la décision contestée ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien doit être écarté ;

5. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour (...) " et qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. (...) " ;

6. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues par les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou par les stipulations équivalentes du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ou stipulations ; que Mme A...n'étant pas en droit de se voir délivrer un certificat de résidence algérien sur le fondement des stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, le préfet de la Drôme n'était pas tenu, en application des dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande de titre de séjour ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

8. Considérant que MmeA..., ressortissante algérienne, née le 22 octobre 1952, fait valoir qu'elle est divorcée, que ses deux enfants vivent en France et qu'elle y réside habituellement depuis le 12 septembre 2001 ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que MmeA..., qui a passé l'essentiel de sa vie dans son pays d'origine, n'établit pas qu'elle réside en France habituellement depuis le 12 septembre 2001 et qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales en Algérie, où vivent huit de ses enfants ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision refusant à Mme A...la délivrance d'un titre de séjour n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) " ;

10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A...s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour par décision du préfet de la Drôme du 19 avril 2012 ; qu'ainsi, à la date de la décision contestée du même jour, elle était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

11. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision refusant à Mme A...la délivrance d'un titre de séjour, le moyen tiré de la violation, par la décision l'obligeant à quitter le territoire français, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté ;

Sur la décision désignant le pays de destination :

12. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision refusant à Mme A...la délivrance d'un titre de séjour, le moyen tiré de la violation, par la décision fixant le pays de destination, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés et non compris dans les dépens, dans les conditions prévues par les dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 12 mars 2013 à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. du Besset, premier vice-président de la Cour,

M. Dursapt, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 mars 2013.

Le premier vice-président de la Cour,

E. du Besset

Le président de la Cour,

J-M. Le Gars

La greffière,

F. Desmoulières

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition,

La greffière,

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N° 12LY02755


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY02755
Date de la décision : 26/03/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : J. BORGES et M. ZAIEM

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-03-26;12ly02755 ?
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