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14/02/2013 | FRANCE | N°12LY01036

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 14 février 2013, 12LY01036


Vu la requête, enregistrée le 19 avril 2012, présentée pour la commune de Brides-les-Bains, représentée par son maire en exercice, domicilié... ;

La commune de Brides-les-Bains demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802638 du 20 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à verser :

- à Mme B...une indemnité de 5 000,35 euros en réparation des préjudices subis à la suite d'une chute survenue le 23 mai 2005 ;

- à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine une somme de 1 262,65 euros en remb

oursement de ses débours, outre une indemnité forfaitaire de 420,88 euros ;

2°) de rejet...

Vu la requête, enregistrée le 19 avril 2012, présentée pour la commune de Brides-les-Bains, représentée par son maire en exercice, domicilié... ;

La commune de Brides-les-Bains demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802638 du 20 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à verser :

- à Mme B...une indemnité de 5 000,35 euros en réparation des préjudices subis à la suite d'une chute survenue le 23 mai 2005 ;

- à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine une somme de 1 262,65 euros en remboursement de ses débours, outre une indemnité forfaitaire de 420,88 euros ;

2°) de rejeter les demandes de Mme B...et de la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine devant le tribunal administratif et, titre subsidiaire, de ramener à de plus justes proportions les indemnités ;

3°) de mettre à la charge de Mme B... la somme de 2 500 euros, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- contrairement à ce qu'ont considéré les premiers juges, après avoir constaté la faible importance du désaffleure, aucun défaut d'entretien normal de l'ouvrage public utilisé par Mme B... ne peut être retenu ;

- la victime, qui connaissait les lieux pour avoir emprunté régulièrement la passerelle où s'est produite sa chute, a manifestement commis une faute d'inattention qui justifie qu'elle soit déclarée intégralement responsable de cette chute et de ses conséquences dommageables ;

- les premiers juges ont commis une erreur matérielle en évaluant le préjudice patrimonial de Mme B...en prenant en compte une somme de 2 883 euros au titre de frais de transports restés à sa charge alors qu'elle ne faisait état que d'un montant de 112 euros sur ce point ;

- le préjudice résultant d'une incapacité permanente partielle ne peut être évalué à une somme supérieure à 1 000 euros et les souffrances ne peuvent être indemnisées au-delà de ce même montant ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les mémoires, enregistrés les 27 juin et 3 août 2012, présentés pour Mme B..., qui conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 20 février 2012 en tant qu'il a limité à la somme de 5 000,35 euros l'indemnité mise à la charge de la commune de Brides-les-Bains en réparation de ses préjudices ;

3°) à la condamnation de la commune de Brides-les-Bains à lui verser une indemnité d'un montant total de 10 230,70 euros ;

4°) à ce que soit mise à la charge de la commune de Brides-les-Bains la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la présence d'une barre métallique en un lieu exclusivement affecté à l'usage de curistes, à la santé fragile et vulnérables, dont il constitue un passage obligé plusieurs fois par jour, ne représente pas une défectuosité mineure, et la commune de Brides-les-Bains, qui devait faire preuve d'une vigilance particulière, et n'a procédé à aucune signalisation du danger, n'a pas assuré l'entretien normal de cette voirie particulière ;

- en se bornant à emprunter un passage qu'elle connaissait, elle n'a pas commis d'inattention ni d'imprudence de nature à exonérer la commune de sa responsabilité ;

Vu la lettre, en date du 7 janvier 2013, par laquelle les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour était susceptible de soulever d'office l'irrégularité du jugement attaqué, en l'absence de communication de la demande de MmeB..., ayant la qualité d'agent public de la commune de Clamart, à la Caisse des dépôts et consignations, en sa qualité de gérante de la caisse nationale des retraites des agents des collectivités locales ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 janvier 2013, présenté pour la commune de Brides-les-Bains, en réponse à la lettre du 7 janvier 2013, qui maintient les conclusions de sa requête par les mêmes moyens ;

Elle soutient, en outre, que le défaut de mise en cause, par les premiers juges, de la Caisse des dépôts et consignations, en sa qualité de gérante de la caisse nationale des retraites des agents des collectivités locales, implique la nullité du jugement attaqué, et que si la Caisse des dépôts et consignations a versé des sommes à MmeB..., elles devront venir en diminution de la réparation allouée à cette dernière ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 janvier 2013, présenté pour MmeB..., en réponse à la lettre du 7 janvier 2013, qui affirme n'avoir pas été tenue de communiquer une demande à la Caisse des dépôts et consignations, dès lors qu'elle était en congé au moment de son accident et qu'elle a pris sa retraite peu après ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 1er février 2012, présentée pour la Caisse des dépôts et consignations ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la code de la sécurité sociale ;

Vu l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 janvier 2013 :

- le rapport de M. Seillet, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Pourny, rapporteur public ;

- et les observations de Me Harel, avocat de la commune de Brides-les-Bains ;

1. Considérant que MmeB..., agent de la commune de Clamart en cure dans la commune de Brides-les-Bains, a été victime d'une chute, le 23 mai 2005, vers 9 h 30, alors qu'elle empruntait, à pied, la passerelle communale située à la sortie de l'établissement thermal ; que la commune de Brides-les-Bains fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à verser une indemnité de 5 000,35 euros à Mme B...et une somme de 1 262,65 euros à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine, en remboursement de ses débours, outre une indemnité forfaitaire de 420,88 euros ; que, par la voie de l'appel incident, Mme B...demande la majoration de la condamnation prononcée ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de l'ordonnance du 7 janvier 1959 relative aux actions en réparation civile de l'Etat et de certaines autres personnes publiques, les agents de l'Etat ou d'une personne publique mentionnée à l'article 7 de cette ordonnance ou leurs ayants droit qui demandent en justice la réparation d'un préjudice qu'ils imputent à un tiers " doivent appeler en déclaration de jugement commun la personne publique intéressée et indiquer la qualité qui leur ouvre droit aux prestations de celle-ci " ; que cette obligation, dont la méconnaissance est sanctionnée par la possibilité reconnue à toute personne intéressée de demander pendant deux ans l'annulation du jugement, a pour objet de permettre la mise en cause, à laquelle le juge administratif doit procéder d'office, des personnes publiques susceptibles d'avoir versé ou de devoir verser des prestations à la victime ou à ses ayants droit ; que devant le Tribunal administratif de Grenoble, Mme B...a fait connaître sa qualité d'agent public de la commune de Clamart ; qu'en ne communiquant pas sa demande à la Caisse des dépôts et consignations, en sa qualité de gérante de la caisse nationale des retraites des agents des collectivités locales, le Tribunal administratif de Grenoble a entaché son jugement d'irrégularité ;

3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de Mme B...;

Sur la responsabilité de la commune de Brides-les-Bains :

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des témoignages produits par MmeB..., que la chute dont elle a été victime a été provoquée par la présence, au niveau du décalage formé au sol entre la partie couverte de la passerelle, constituée alors d'une dalle bétonnée, et le platelage en bois de cette passerelle, d'une cornière métallique rendue glissante par la pluie ; qu'eu égard à la destination de cette passerelle, empruntée fréquemment par des personnes en cure après leurs soins, l'existence d'une telle défectuosité comportait un danger qu'il appartenait à la commune de Brides-les-Bains de faire disparaître ; que, dans ces conditions, ladite commune n'apporte pas la preuve de l'entretien normal de l'ouvrage emprunté par Mme B... ; que toutefois, l'inattention dont a fait preuve la victime, compte tenu des conditions climatiques, et alors qu'elle connaissait les lieux pour les avoir fréquentés à de nombreuses reprises durant la période de sa cure avant sa chute, est de nature à exonérer la commune de la moitié de sa responsabilité ;

Sur les préjudices :

En ce qui concerne les préjudices à caractère patrimonial :

5. Considérant que Mme B... justifie que des frais d'acquisition d'un gilet de contention, pour un montant de 99,26 euros, des frais d'hospitalisation, pour un montant de 18,44 euros, et des frais de transport, pour un montant de 112 euros, sont restés à sa charge ; qu'ainsi, son préjudice, au titre des dépenses de santé non prises en charge, doit être évalué à 229,70 euros ; que, dans ces conditions, compte tenu du partage de responsabilité retenu, une indemnité de 114,85 euros doit être mise à la charge de la commune de Brides-les-Bains ; que la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine établit avoir exposé pour le compte de son assurée une somme totale de 10 101,26 euros, correspondant à 2 208,90 euros au titre des frais médicaux et pharmaceutiques et à 7 892,36 euros au titre des frais d'hospitalisation de l'intéressée du 19 au 26 juillet 2005 ; que seul le quart des soins dont elle demande le remboursement, est lié à la chute de son assurée, ainsi qu'il résulte de l'attestation d'imputabilité établie par son médecin conseil, pour un montant de 2 525,31 euros ; que, compte tenu du partage de responsabilité retenu et des dépenses directement imputables à l'accident dont Mme B... a été victime, il y a lieu d'allouer à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine la somme de 1 262,65 euros ;

En ce qui concerne les préjudices à caractère personnel :

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme B...a subi une incapacité temporaire totale, du 23 mai 2005 au 23 juillet 2005, et une incapacité temporaire partielle de 25 % jusqu'au 22 février 2006 ; que seul un quart de l'incapacité permanente partielle de 16 % affectant son épaule droite est imputable à l'accident ; que les souffrances endurées sont évaluées par les experts à 2 sur une échelle de 7 ; que l'ensemble du préjudice personnel de Mme B... doit être évalué à la somme de 7 000 euros ; que, compte tenu du partage de responsabilité, il y a lieu de lui accorder la somme de 3 500 euros au titre de ses préjudices personnels ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...et la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine sont fondées à demander la condamnation de la commune de Brides-les-Bains à leur payer des sommes de, respectivement, 3 614,85 euros et 1 262,65 euros ;

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

8. Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine a droit aux intérêts au taux légal de la somme qui lui est due à compter du 7 juillet 2008, date d'enregistrement de son mémoire au greffe du Tribunal administratif de Grenoble ; que la capitalisation des intérêts est de droit dès lors que les intérêts sont dus au moins pour une année entière, soit en l'espèce à compter du 7 juillet 2009, puis à chaque échéance annuelle ultérieure ;

Sur l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale :

9. Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine a droit à l'indemnité forfaitaire régie par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, pour un montant de 420,88 euros, égal au tiers de la somme de 1 262,65 euros mise à la charge de la commune de Brides-les-Bains ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de MmeB..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Brides-les-Bains demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la commune de Brides-les-Bains une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par Mme B...et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 20 février 2012 est annulé.

Article 2 : La commune de Brides-les-Bains est condamnée à verser à Mme B...la somme de 3 614,85 euros en réparation de ses préjudices.

Article 3 : La commune de Brides-les-Bains est condamnée à payer à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine une somme de 1 262,65 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 7 juillet 2008. Les intérêts échus le 7 juillet 2009 seront capitalisés pour porter eux-mêmes intérêts à compter de cette date, puis à chaque échéance annuelle ultérieure.

Article 4 : La commune de Brides-les-Bains versera à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine la somme de 420,88 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.

Article 5 : La commune de Brides-Les-Bains versera à Mme B...une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Brides-les-Bains, à Mme A...B..., à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine, à la commune de Clamart et à la caisse des dépôts et consignations (CNRACL).

Délibéré après l'audience du 24 janvier 2013 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Poitreau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 février 2013.

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N° 12LY01036


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY01036
Date de la décision : 14/02/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

67-03-01-02 Travaux publics. Différentes catégories de dommages. Dommages sur les voies publiques terrestres. Défaut d'entretien normal.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: M. POURNY
Avocat(s) : CDMF-AVOCATS AFFAIRES PUBLIQUES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-02-14;12ly01036 ?
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