La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/12/2012 | FRANCE | N°12LY01558

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 27 décembre 2012, 12LY01558


Vu la requête, enregistrée à la Cour le 21 juin 2012, présentée pour Mme Nune , épouse , domiciliée à l'accueil de jour, 7 bis, rue Sainte-Rose à Clermont-Ferrand (63000) ;

Mme demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200391, du 22 mai 2012, par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Puy-de-Dôme, du 30 janvier 2012, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destinati

on duquel elle pourrait être reconduite à l'issue de ce délai ;

2°) d'annuler, po...

Vu la requête, enregistrée à la Cour le 21 juin 2012, présentée pour Mme Nune , épouse , domiciliée à l'accueil de jour, 7 bis, rue Sainte-Rose à Clermont-Ferrand (63000) ;

Mme demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200391, du 22 mai 2012, par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Puy-de-Dôme, du 30 janvier 2012, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite à l'issue de ce délai ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Elle soutient que le jugement attaqué est irrégulier du fait du non respect du principe du contradictoire durant la procédure contentieuse ; que la décision de refus de délivrance de titre de séjour contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, eu égard à son intégration et à celle de son fils dans la société française ainsi qu'à l'état de santé de son époux ; qu'un retour en Arménie l'exposerait à des traitements inhumains et dégradants et que la désignation de ce pays comme destination de la mesure d'éloignement prise à son encontre méconnaît donc les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré à la Cour le 21 août 2012, présenté par le préfet du Puy-de-Dôme qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que le jugement attaqué n'est pas entaché de l'irrégularité alléguée par la requérante ; que l'arrêté en litige ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale et que la décision fixant le pays de renvoi ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de cette même convention ;

Vu la décision du 6 juillet 2012, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 septembre 2012 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

1. Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué ni sur les autres moyens de la requête ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme , ressortissante arménienne née le 23 août 1966, est entrée irrégulièrement en France le 15 octobre 2009, selon ses déclarations, accompagnée de son fils né en 1994, pour rejoindre son époux arrivé en France au mois de juin de la même année ; qu'elle a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, par décision du 30 août 2010, confirmée le 15 juin 2011 par la Cour nationale du droit d'asile ; que, par arrêté du 30 janvier 2012, le préfet du Puy-de-Dôme lui a notamment refusé la délivrance du titre de séjour sollicité, en mentionnant par ailleurs que Mme ne remplissait aucune des conditions fixées à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susceptible de lui ouvrir droit à la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme , bien qu'arrivée en France depuis un peu plus de deux ans seulement, a présenté de fortes capacités d'insertion sociale et professionnelle et a commencé l'apprentissage de la langue française ; qu'à la date de la décision en litige, son fils était scolarisé en lycée d'enseignement adapté, en première année d'études en vue de l'obtention d'un certificat d'aptitude professionnelle d'installateur thermique ; qu'enfin, par arrêt de ce jour, la décision du 30 janvier 2012 par laquelle le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de délivrer à son époux le titre de séjour prévu au 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a été annulée pour méconnaissance de ces dispositions, la Cour de céans ayant jugé que l'état de santé de M. justifiait qu'il se maintienne en France pour se faire soigner ; qu'eu égard à l'affection d'ordre psychique dont ce dernier souffre, la présence à ses côtés de son épouse doit être regardée comme nécessaire ; qu'ainsi, compte tenu des circonstances toutes particulières du cas d'espèce, en refusant, le 30 janvier 2012, de délivrer un titre de séjour à Mme , le préfet du Puy-de-Dôme a porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus ; qu'il a, dès lors, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que cette décision de refus doit donc être annulée et qu'il en est de même, par voie de conséquence, des décisions du même jour par lesquelles le préfet du Puy-de-Dôme a fait obligation à Mme de quitter le territoire français et a désigné le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : "Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution" ;

6. Considérant que le présent arrêt, qui annule la décision de refus de titre de séjour du 30 janvier 2012 du préfet du Puy-de-Dôme et les décisions subséquentes, implique nécessairement, eu égard au motif sur lequel il se fonde, que le préfet du Puy-de-Dôme délivre une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à la requérante ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre audit préfet de délivrer ce titre de séjour à Mme dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; que, dans l'attente de la délivrance de ce titre de séjour, il y a lieu d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme de délivrer à l'intéressée une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours suivant la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que Mme a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Rauzier, avocat de Mme , renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de sept cents euros au profit de Me Rauzier, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1200391 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand en date du 22 mai 2012, ensemble les décisions du 30 janvier 2012 du préfet du Puy-de-Dôme refusant la délivrance d'un titre de séjour à Mme , lui faisant obligation de quitter le territoire français et désignant le pays à destination duquel elle pourrait être renvoyée, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Puy-de-Dôme de délivrer à Mme une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours et de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera la somme de sept cents euros à Me, Rauzier, avocat de Mme , en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Nune , épouse , au préfet du Puy-de-Dôme et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 14 décembre 2012 à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Montsec, président de chambre,

Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 décembre 2012.

''

''

''

''

1

5

N° 12LY01558


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY01558
Date de la décision : 27/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : RAUZIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-12-27;12ly01558 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award