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15/11/2012 | FRANCE | N°12LY00772

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 15 novembre 2012, 12LY00772


Vu la requête, enregistrée le 20 mars 2012, présentée pour Mme Béatrice A, domiciliée ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902197 du 20 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville du 23 juillet 2009, en tant qu'elle autorise la société internationale de lingerie à la licencier ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;

3°) de mettre à la char

ge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code ...

Vu la requête, enregistrée le 20 mars 2012, présentée pour Mme Béatrice A, domiciliée ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902197 du 20 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville du 23 juillet 2009, en tant qu'elle autorise la société internationale de lingerie à la licencier ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens, comprenant la contribution pour l'aide juridique et le droit de plaidoirie ;

Elle soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a considéré que la société internationale de lingerie (SIL) n'appartenait pas à un groupe alors que des articles de presse font état de son appartenance au groupe Eminence ; qu'en se bornant à envoyer le même document à tous les salariés de la SIL, le liquidateur de cette société n'a pas satisfait à l'obligation de reclassement qui doit être individualisée et porter sur des offres d'emploi réelles et non théoriques ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 juin 2012, présenté pour la SCP Becheret, Thierry, Senechal, Gorrias, en qualité de liquidateur de la société internationale de lingerie, qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 000 euros soit mise à la charge de Mme A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que, contrairement à ce qu'affirme la requérante, la société internationale de lingerie et la société Eminence ne forment pas entre elles un groupe, la société Eminence n'étant pas actionnaire de la SIL ; que le périmètre du reclassement ne s'étendait donc pas à la société Eminence et qu'il n'appartenait pas, en conséquence, à l'autorité administrative de vérifier le respect par le liquidateur de ses obligations relatives au reclassement au niveau du groupe ; que, par ailleurs, chacun des salariés protégés appartenant à la SIL a bénéficié d'une information identique concernant les mesures prévues dans le cadre du plan de sauvegarde de l'emploi ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 août 2012, présenté pour Mme A qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que quels que soient les montages capitalistiques et juridiques qui ont pu être opérés, la société Eminence exerce un contrôle économique de la SIL dès lors que la direction administrative et financière des deux sociétés était composée des mêmes personnes ; que le lien entre les deux sociétés est également établi par le fait que le personnel de la société Eminence en ce qui concerne les services informatiques ou d'intervention pour les installations, s'agissant par exemple de la mise aux normes de la scie à ruban, est intervenu sur le site de Nevers de la SIL ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 octobre 2012 :

- le rapport de M. Poitreau, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Pourny, rapporteur public ;

1. Considérant que par jugement du 29 décembre 2008, le Tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société internationale de lingerie ; que Me Gorrias, mandataire liquidateur de cette société, a demandé, le 9 janvier 2009, à l'inspecteur du travail l'autorisation de licencier Mme A, employée au sein de l'établissement de Nevers de la société internationale de lingerie et détenant les mandats de membre de la délégation unique du personnel, délégué syndical et conseiller du salarié ; que l'inspecteur du travail de la Nièvre a fait droit à cette demande ; que toutefois, sur le recours de Mme A, le ministre du travail, des relations sociales, de la famille de la solidarité et de la ville a, le 23 juillet 2009, annulé la décision de l'inspecteur du travail et accordé l'autorisation de licenciement sollicitée ; que Mme A fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette autorisation ;

2. Considérant que, lorsque le licenciement d'un salarié protégé est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions qu'il exerce, ni avec son appartenance syndicale ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif à caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

3. Considérant qu'il est constant qu'en conséquence du jugement ayant prononcé sa liquidation judiciaire, l'ensemble des emplois de la société internationale de lingerie ont été supprimés ; que Mme A fait valoir qu'une partie du personnel des directions administrative et financière était commun à la société Eminence et à la société internationale de lingerie, qui avaient conclu entre elles, en 2007, un contrat commercial d'exploitation d'une licence ; que ces circonstances ne suffisent pas, toutefois, à établir que la société internationale de lingerie, dont 69,80 % du capital était détenu par la holding financière de droit luxembourgeois SIL Europe, appartenait à un groupe ; que, dès lors, en se fondant, pour autoriser le licenciement de Mme A, sur le motif tiré de l'impossibilité de procéder au reclassement de cette salariée au sein de la société internationale de lingerie, dont les emplois avaient été supprimés, comme en dehors de cette société, qui n'appartient pas à un groupe, le ministre du travail, des relations sociales, de la famille de la solidarité et de la ville, dont la décision ne repose pas sur des faits matériellement inexacts, n'a pas commis d'erreur d'appréciation ;

4. Considérant enfin, qu'il ressort des pièces du dossier que le liquidateur de la société internationale de lingerie a vainement cherché à reclasser les salariés dans des entreprises du même secteur d'activité ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à la charge de Mme A les dépens, comprenant la contribution pour l'aide juridique ;

6. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la SCP Becheret, Thierry, Senechal, Gorrias tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : La contribution pour l'aide juridique acquittée par Mme A est laissée à sa charge.

Article 3 : Les conclusions de la SCP Becheret, Thierry, Senechal, Gorrias tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Béatrice A, au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à la SCP Becheret, Thierry, Senechal, Gorrias.

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2012 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Poitreau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 novembre 2012.

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N° 12LY00772


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY00772
Date de la décision : 15/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-03-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour motif économique. Obligation de reclassement.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Gérard POITREAU
Rapporteur public ?: M. POURNY
Avocat(s) : THURIOT STRZARLKA LEVOIR

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-11-15;12ly00772 ?
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