Vu la requête, enregistrée le 29 août 2011 au greffe de la Cour, présentée pour la société par actions simplifiée (SAS) Broderies Deschamps, dont le siège est lieudit La Croisette, BP 48, à Pontcharra-sur-Turdine (69490) ;
La SAS Broderies Deschamps demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0908024, en date du 21 juin 2011, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant au remboursement d'un montant de crédit d'impôt recherche de 72 132 euros afférent à l'année 2005 ;
2°) d'ordonner le remboursement de sa créance de crédit d'impôt recherche au titre de l'année 2005, d'un montant de 79 132 euros ;
3°) de mettre les entiers dépens de l'instance à la charge de l'Etat (administration fiscale) ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat (administration fiscale) une somme de 1 500 euros, à lui verser sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- la procédure est entachée d'une irrégularité substantielle, dans la mesure où, alors que ce crédit d'impôt recherche avait déjà été examiné dans le cadre d'une vérification de comptabilité ayant abouti à la diminution de son montant pour tenir compte des " règles de minimis ", l'administration fiscale a, pour rejeter sa demande de remboursement par une décision du 14 décembre 2009, procédé à une deuxième vérification irrégulière ;
- contrairement à ce qu'a considéré l'administration fiscale, elle avait bien déposé en temps utile, en même temps que la liasse fiscale pour 2005, la déclaration spéciale modèle 2069 A, portant option pour le bénéfice du régime du crédit d'impôt recherche, exigée par les dispositions de l'article 49 septies M de l'annexe III au code général des impôts ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu l'ordonnance, en date du 8 septembre 2011, fixant la clôture de l'instruction au 29 février 2012, à 16 heures 30, en application des dispositions des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 janvier 2012, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, qui conclut au rejet de la requête de la SAS Broderies Deschamps ; il fait valoir que la requête est irrecevable en tant qu'elle dépasse le montant de 72 132 euros auquel se limitait la demande de remboursement présentée devant le Tribunal administratif de Lyon ; que l'irrégularité de procédure alléguée manque en fait, la vérification de comptabilité réalisée du 17 avril 2009 au 23 juin 2009 n'ayant pas porté sur l'année 2005 ; qu'en tout état de cause, le moyen est inopérant dans la mesure où une telle demande de remboursement constitue une réclamation contentieuse au sens de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales et non une procédure de reprise ou de redressement ; que la société requérante n'établit pas avoir déposé en temps utile la déclaration 2069 A, alors d'ailleurs que la créance correspondante n'a pas été comptabilisée par la société à l'actif de son bilan au titre de 2005 et n'a pas été déduite de manière extra-comptable pour le calcul du résultat fiscal de cette année 2005 ; que la société n'en a pas fait état lorsqu'elle a été informée en 2007 du calcul définitif de son impôt sur les sociétés au titre de l'année 2005, ni lors du paiement de ce même impôt au titre de l'année 2006 ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 28 février 2012, présenté pour la SAS Broderies Deschamps, tendant aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ; elle demande en outre, à titre subsidiaire, que lui soit remboursée, au titre du crédit d'impôt recherche de 2006, la somme de 7 236 euros correspondant à la diminution du crédit d'impôt recherche de 2005 à laquelle avait procédé le service suite à la vérification de comptabilité effectuée en 2009 ; elle soutient en outre que, si elle n'a pas imputé le crédit d'impôt recherche au titre de l'année 2005, c'est que l'exercice était déficitaire et que, si elle ne l'a pas fait non plus au titre de l'année 2006, c'est qu'elle a utilisé une créance de carry-back ; que le service aurait dû lui adresser un accusé de réception de la déclaration qu'elle avait produite ; que le service a transmis cette déclaration à la direction générale des finances publiques, en même temps que sa demande de remboursement ; que le remboursement du crédit d'impôt recherche au titre de l'année 2006 a été accepté, alors que la situation était la même ; que la validation du crédit d'impôt recherche pour 2005 par la proposition de rectification du 26 juin 2009 adressée suite à la vérification de comptabilité constitue une prise de position formelle dont elle peut se prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;
Vu le mémoire en défense complémentaire, enregistré le 9 mars 2012, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, tendant aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens et par les moyens supplémentaires que l'administration n'a pas l'obligation d'envoyer au contribuable un accusé de réception ; que, s'agissant de l'année 2006, la demande de remboursement a été satisfaite parce qu'elle avait été présentée à l'intérieur du délai de réclamation prévu à l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales ; qu'en l'absence de rehaussement au titre de l'exercice 2005, la société requérante ne peut se prévaloir d'une prise de position formelle par l'administration ; que la demande subsidiaire de remboursement est irrecevable en l'absence de demande dans les délais requis ;
Vu l'ordonnance en date du 15 mars 2012 reportant la date de clôture de l'instruction du 29 février 2012 à 16 heures 30 au 13 avril 2012 à 16 heures 30 ;
Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 11 avril 2012, présenté pour la SAS Broderies Deschamps, tendant aux mêmes fins que précédemment et portant à 2 500 euros la somme demandée sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle développe les mêmes moyens et les moyens supplémentaires que la demande de remboursement a été présentée dans le délai requis et que sa demande subsidiaire de remboursement de 7 236 euros est recevable dès lors que le crédit d'impôt recherche au titre de l'année 2006 n'aurait pas été réduit en l'absence de crédit impôt recherche au titre de l'année 2005 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre de procédure fiscale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 octobre 2012 :
- le rapport de M. Montsec, président ;
- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;
1. Considérant que la SAS Broderies Deschamps, qui exerce une activité de création-vente de produits textiles à Pontcharra-sur-Turdine (Rhône), a demandé, par une lettre du 5 octobre 2009 et sur le fondement des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, le remboursement d'un crédit d'impôt recherche au titre de l'exercice 2005, pour un montant de 79 368 euros ; que, par une décision en date du 14 décembre 2009, le directeur des services fiscaux du Rhône a rejeté cette demande de remboursement, au motif que la société n'avait pas déclaré en temps utile son option pour ce crédit d'impôt recherche, dans les conditions prévues à l'article 49 septies M de l'annexe III au même code ; que la SAS Broderies Deschamps fait appel du jugement en date du 21 juin 2011 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant au remboursement de ce crédit d'impôt recherche, pour un montant qu'elle avait alors limité à 72 132 euros ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " I - Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 septies, 44 octies, 44 decies et 44 undecies qui exposent des dépenses de recherche peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt égal à la somme : / a. D'une part égale à 5 % des dépenses de recherche exposées au cours de l'année, dite part en volume ; / b. Et d'une part égale à 45 % de la différence entre les dépenses de recherche exposées au cours de l'année et la moyenne des dépenses de même nature, revalorisées de la hausse des prix à la consommation hors tabac, exposées au cours des deux années précédentes, dite part en accroissement. / (...) Les dispositions du présent article s'appliquent sur option annuelle de l'entreprise. Par exception, l'option est exercée pour cinq ans lorsqu'elle est formulée par des sociétés de personnes mentionnées aux articles 8 et 238 bis L et par des groupements mentionnés aux articles 239 quater, 239 quater B et 239 quater C. / Lorsque l'option, après avoir été exercée, n'est plus exercée au titre d'une ou de plusieurs années, le crédit d'impôt de l'année au titre de laquelle l'option est exercée à nouveau est calculé dans les mêmes conditions que si l'option avait été renouvelée continûment. / La fraction du crédit d'impôt qui résulte de la prise en compte de dépenses prévues au h et au i du II exposées à compter du 1er janvier 1999 est plafonnée pour chaque entreprise à 100 000 euros par période de trois ans consécutifs (...) " ; qu'aux termes de l'article 220 B du même code : " Le crédit d'impôt pour dépenses de recherche défini à l'article 244 quater B est imputé sur l'impôt sur les sociétés dû par l'entreprise dans les conditions prévues à l'article 199 ter B " ; qu'aux termes de cet article 199 ter B : " Le crédit d'impôt pour dépenses de recherche défini à l'article 244 quater B est imputé sur l'impôt sur le revenu dû par le contribuable au titre de l'année au cours de laquelle les dépenses de recherche prises en compte pour le calcul du crédit d'impôt ont été exposées. L'excédent de crédit d'impôt constitue au profit de l'entreprise une créance sur l'Etat d'égal montant. Cette créance est utilisée pour le paiement de l'impôt sur le revenu dû au titre des trois années suivant celle au titre de laquelle elle est constatée puis, s'il y a lieu, la fraction non utilisée est remboursée à l'expiration de cette période (...) " ; qu'aux termes de l'article 49 septies M de l'annexe III audit code : " I. - L'option pour le crédit d'impôt mentionné à l'article 244 quater B du code général des impôts résulte du dépôt de la déclaration spéciale prévue pour le calcul de ce crédit. / II. - La déclaration spéciale doit être déposée par les personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés avec le relevé de solde mentionné à l'article 360 auprès du comptable de la direction générale des impôts. Les autres entreprises joignent la déclaration spéciale à la déclaration annuelle de résultat qu'elles sont tenues de déposer en vertu de l'article 53 A du code général des impôts. (...) / III. - L'option mentionnée au I doit être formulée par les entreprises selon les modalités énoncées au II dans le délai prévu pour le dépôt du relevé de solde ou de la déclaration de résultat relatifs à l'exercice pour lequel elles souhaitent bénéficier du crédit d'impôt (...) " ;
3. Considérant, en premier lieu, que la société invoque une irrégularité substantielle de procédure liée au fait que l'administration aurait, pour lui opposer ce refus de remboursement du crédit d'impôt recherche en litige, procédé à une deuxième vérification de comptabilité, méconnaissant ainsi les dispositions de l'article L. 51 du livre des procédures fiscales, après avoir précédemment réduit ce crédit impôt recherche de l'année 2005 de la somme de 7 236 euros, en raison du dépassement du plafond de 100 000 euros fixé par les dispositions susmentionnées de l'article 244 quater B du code général des impôts, dans le cadre d'une vérification de comptabilité qu'elle avait diligentée du 17 avril au 23 juin 2009, portant sur les exercices correspondant aux années 2006 et 2007 ; que, toutefois, la demande de remboursement d'un crédit d'impôt recherche présentée sur le fondement des dispositions précitées de l'article 199 ter B du code général des impôts constitue une réclamation au sens de l'article L. 190 B du livre des procédures fiscales et la décision par laquelle l'administration rejette tout ou partie d'une telle réclamation n'a pas le caractère d'une procédure de reprise ou de redressement ; qu'ainsi, les éventuelles irrégularités susceptibles d'avoir entaché la procédure d'instruction de cette réclamation sont en tout état de cause sans incidence sur le bien-fondé de la décision de refus de remboursement opposé à la société requérante ; que son moyen tiré d'une telle irrégularité de procédure est donc inopérant ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que la SAS Broderies Deschamps ne conteste pas qu'elle n'a, au titre de l'exercice 2005, comptabilisé à son bilan aucune créance correspondant à un crédit impôt recherche ; que, par ailleurs, si elle soutient avoir adressé à l'administration l'imprimé 2069 A concernant ce crédit d'impôt recherche en même temps que sa liasse fiscale relative à l'exercice 2005, elle ne l'établit pas, en se bornant à produire une copie non signée de ce document et le courrier du 5 octobre 2009 par lequel son président fait référence à une demande de crédit impôt recherche au titre de l'exercice 2005, alors que, contrairement à ce qu'elle soutient à l'instance, l'administration n'était pas tenue de lui adresser le cas échéant un accusé de réception de ce document ; qu'ainsi et sans que la société requérante puisse utilement faire valoir que la demande de remboursement est intervenue dans le délai fixé à l'article 199 ter B du code général des impôts, l'administration fiscale était fondée à lui refuser, par une décision du 14 décembre 2009 et pour ce motif, le remboursement de crédit impôt recherche qu'elle avait demandé ;
5. Considérant, en troisième lieu, que la société requérante ne peut utilement faire valoir que le remboursement de son crédit d'impôt recherche au titre de 2006 a été accepté par l'administration, alors qu'au demeurant, l'administration fait valoir sans être contredite que la situation ne se présentait pas de la même façon pour cette autre demande qui avait été faite dans le délai de réclamation prévu à l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales ;
6. Considérant, en quatrième lieu, que la demande en litige ayant été faite en l'absence de tout rehaussement, la SAS Broderies Deschamps ne saurait utilement se prévaloir, sur le fondement des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales, d'une prise de position formelle de l'administration, à l'occasion de la vérification de comptabilité susmentionnée, sur son droit au crédit impôt recherche au titre de 2005 ;
7. Considérant, en cinquième lieu, que, si la SAS Broderies Deschamps demande, à titre subsidiaire, que lui soit accordé en compensation le remboursement d'un montant de crédit impôt recherche de 7 636 euros au titre de l'année 2006, une telle demande de compensation est en tout état de cause irrecevable comme portant sur un exercice différent ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SAS Broderies Deschamps n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ; qu'il en est de même, en l'absence de tout dépens dans la présente instance, de ses conclusions tendant à ce que les dépens soient mis à la charge de l'Etat ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SAS Broderies Deschamps est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Broderies Deschamps et au ministre de l'économie et des finances.
Délibéré après l'audience du 11 octobre 2012 à laquelle siégeaient :
M. Montsec, président de chambre,
Mme Mear, président-assesseur,
Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 8 novembre 2012.
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N° 11LY02165
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