Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 2011, présentée pour M. Florent A domicilié ...;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0902788 du 17 mai 2011 par lequel Tribunal administratif de Lyon a annulé la décision de l'inspecteur du travail de la 2ème section de La Loire du 23 février 2009 refusant d'autoriser le centre de formation d'apprentis du commerce, de l'industrie et de l'artisanat de Saint-Etienne Montbrison (CFA-CIASEM) à le licencier ;
2°) de rejeter la demande présentée par le CFA-CIASEM devant le Tribunal administratif de Lyon ;
2°) de mettre à la charge du CFA-CIASEM la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que son poste avait été vidé de son contenu ; qu'une partie de son travail, la réservation des vidéoprojecteurs et des ordinateurs portables, a été confiée à un autre service, que les formations " Excel " et " PowerPoint " ont été réalisées par une société extérieure et que les informaticiens de la chambre de commerce et d'industrie effectuaient régulièrement des opérations sur le réseau informatique du centre de formation, sans sa présence ; qu'il n'a jamais refusé la proposition de reclassement mais qu'il avait demandé des précisions sur des points essentiels, notamment l'emploi du temps ; que le licenciement n'était pas dénué de lien avec le mandat ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 21 février 2012, présenté pour le ministre du travail, de l'emploi et de la santé qui conclut à ce qu'il soit fait droit à la requête de M. A ;
Il soutient que si le motif économique est avéré, la proposition de reclassement du centre de formation des apprentis sur un poste dont la charge de travail est évaluée à 2,5 équivalents temps plein, est déraisonnable ; que l'inspecteur du travail ne pouvait écarter tout lien avec le mandat ; que les dissensions de M. A avec la direction du centre de formation ont débuté, selon lui, lorsqu'il a rejoint le syndicat SNPEFT-CGT qui était en conflit permanent avec la direction ;
Vu le mémoire en défense, transmis par télécopie le 7 juin 2012, présenté pour l'association centre de formation d'apprentis du commerce, de l'industrie et de l'artisanat de Saint-Etienne Montbrison (CFA-CIASEM), tendant au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. A d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que la requête ne comporte pas de critique du jugement ; que le requérant fait valoir l'absence de motif économique en se fondant sur des évènements postérieurs à la décision contestée ; que l'argument tiré de ce que la convention d'entreprise du CFA, faisant office de convention collective, ne prévoit pas de poste hybride est inopérant, s'agissant d'une proposition de reclassement ; que le conseil des prud'hommes n'a pas retenu de faits de harcèlement moral ; que le recours de M. A pourrait être considéré comme abusif ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 15 juin 2012, présentée pour le CFA-CIASEM ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 juin 2012 :
- le rapport de Mme Steck-Andrez, président-assesseur ;
- les conclusions de M. Pourny, rapporteur public ;
- et les observations de Me Crochet, avocat de M. A et de Me Legros, avocat du centre de formation des apprentis CFA-CIASEM ;
Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête par le CFA-CIASEM :
Considérant que la requête de M. A, qui tend à l'annulation du jugement du 17 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé, à la demande du centre de formation d'apprentis du commerce, de l'industrie et de l'artisanat de Saint-Etienne Montbrison (CFA-CIASEM), la décision de l'inspecteur du travail du 23 février 2009 refusant d'autoriser son licenciement, comporte une critique de ce jugement ; que, dès lors, la fin de non-recevoir opposée par le CFA-CIASEM, tirée de ce que cette requête ne satisfait pas à l'obligation de comporter l'exposé de moyens, qu'imposent les dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, ne peut être accueillie ;
Sur la légalité de la décision en litige :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant qu'en vertu des dispositions des articles L. 2411-13 et L. 2421-3 du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions de représentation au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre de rechercher sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que pour demander à l'inspecteur du travail, le 22 décembre 2008, l'autorisation de licencier pour motif économique M. A, le CFA-CIASEM s'est uniquement fondé sur le fait que son poste de responsable informatique " statut cadre " avait été supprimé et que l'intéressé avait refusé sans motif sérieux la proposition de reclassement qui lui avait été faite sur un poste d'enseignant en mathématiques pour partie, et d'animateur en informatique, chargé de la maintenance du parc informatique du centre de formation pour l'autre partie ; que le fait qu'une demande d'autorisation de licenciement pour motif économique repose sur le refus du salarié concerné d'accepter une modification de son contrat de travail ne suffit pas à établir la réalité du motif économique et ne dispense pas l'inspecteur du travail et, le cas échéant, le juge administratif de rechercher si les circonstances ayant conduit à la décision de modifier le contrat de travail sont ou non constitutives d'un motif économique ; qu'à cet égard, le refus de M. A d'accepter la proposition de reclassement qui lui a été faite ne pouvait être regardé comme établissant le motif économique du licenciement demandé, dès lors, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que cette offre aurait impliqué une modification du contrat de travail de l'intéressé par la perte de son statut de cadre et la diminution de son salaire et, d'autre part, que l'avenant au contrat de travail envisagé ne comportait aucune indication sur la répartition du temps de travail entre les nouvelles tâches dévolues, ni sur les éléments de référence de sa rémunération ; que la demande d'autorisation de licenciement formulée par le CFA-CIASEM ne mentionnait aucune autre circonstance constitutive d'un motif économique ayant conduit à la décision de licencier M. A ; que l'administration était tenue, pour ce seul motif, de refuser cette autorisation ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le Tribunal administratif de Lyon s'est fondé sur l'existence d'un motif économique justifiant le licenciement de M. A pour annuler la décision de l'inspecteur du travail refusant d'autoriser son licenciement ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par le CFA-CIASEM devant le Tribunal administratif de Lyon et la Cour ;
Considérant que si l'employeur soutient que le poste de responsable informatique ne répond plus aux besoins du centre de formation, que la proposition de reclassement faite à M. A revêt un caractère sérieux et que le projet de licencier l'intéressé ne présente pas de lien avec son mandat syndical, l'inspecteur du travail était en tout état de cause tenu de rejeter la demande d'autorisation de licenciement qui lui était soumise pour le seul motif que, comme il a été dit, la réalité du motif économique allégué à l'appui de cette demande n'était nullement établie ; que, par suite, les moyens ainsi soulevés par le CFA-CIASEM sont inopérants ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a annulé la décision de l'inspecteur du travail d'autoriser son licenciement ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CFA-CIASEM le paiement à M. A d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que les conclusions présentées par le CFA-CIASEM à ce même titre ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon du 17 mai 2011 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par le CFA-CIASEM devant le Tribunal administratif de Lyon est rejetée.
Article 3 : Le CFA-CIASEM versera la somme de 1 500 euros à M. A sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par le CFA-CIASEM sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Florent A, au centre de formation d'apprentis du commerce, de l'industrie et de l'artisanat de Saint-Etienne Montbrison, à Me Etienne-Martin, mandataire judiciaire du centre de formation d'apprentis du commerce, de l'industrie et de l'artisanat de Saint-Etienne Montbrison et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Délibéré après l'audience du 14 juin 2012 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
Mme Steck-Andrez, président-assesseur,
M. Poitreau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 juin 2012.
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N° 11LY01891