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28/06/2012 | FRANCE | N°11LY01593

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 28 juin 2012, 11LY01593


Vu la requête, enregistrée le 29 juin 2011, présentée pour le PREFET DU RHONE qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0906059 du 8 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé sa décision du 9 septembre 2009 refusant la délivrance d'un titre de séjour à Mlle Sondes A ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mlle A devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de Mlle A une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que Mlle A ne démontre pas qu

e sa présence est nécessaire auprès de ses parents malades qui résident en France, ni que...

Vu la requête, enregistrée le 29 juin 2011, présentée pour le PREFET DU RHONE qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0906059 du 8 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé sa décision du 9 septembre 2009 refusant la délivrance d'un titre de séjour à Mlle Sondes A ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mlle A devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de Mlle A une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que Mlle A ne démontre pas que sa présence est nécessaire auprès de ses parents malades qui résident en France, ni que sa soeur, qui a obtenu la nationalité française, est dans l'impossibilité de s'en occuper ou qu'il ne puissent pas bénéficier d'une aide à domicile ; que son entrée en France est récente, qu'elle est célibataire et sans charge de famille et a vécu pendant de nombreuses années éloignée de ses parents ; que, dès lors, c'est à tort que le Tribunal administratif de Lyon a estimé que sa décision refusant à Mlle A la délivrance d'un titre de séjour méconnaissait les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 septembre 2011, présenté pour Mlle A, qui conclut au rejet de la requête et demande à la Cour :

- d'enjoindre au PREFET DU RHONE de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour ;

- de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil d'une somme de 1 196 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Elle soutient que ses parents ont d'importants problèmes de santé qui nécessitent sa présence à leurs côtés ; que sa soeur, arrivée en France au bénéfice de la procédure de regroupement familial en 2002 et qui a ensuite obtenu la nationalité française, ne voit plus ses parents en raison de leur mésentente relative au choix de son mari ; que, dès lors, elle est seule à pouvoir s'occuper de ses parents qui souffrent de pathologies graves et que c'est en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que le PREFET DU RHONE a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

Vu la décision du 18 novembre 2011, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mlle A ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 juin 2012 :

- le rapport de M. Clot, président-rapporteur ;

- et les observations de Me Brun, avocat de Mlle A ;

Considérant que Mlle A, de nationalité tunisienne née en 1974, est entrée en France le 23 mars 2008 sous couvert d'un visa d'étudiant ; qu'elle a bénéficié d'une carte de séjour temporaire en qualité d'étudiant, qui a été renouvelée jusqu'au 30 novembre 2010 ; que, par lettre du 29 juin 2009, elle a sollicité une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " en invoquant la nécessité pour elle d'assister ses parents en raison de leur état de santé ; que le PREFET DU RHONE fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé le refus qu'il a opposé à cette demande, par une décision du 9 septembre 2009 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 : " Sans préjudice des dispositions du b) et du d) de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ;

Considérant que Mlle A, qui est entrée régulièrement en France le 23 mars 2008 en vue de suivre des études, a fait valoir que ses parents, qui sont titulaires d'une carte de résident de dix ans et qui sont entrés en France, respectivement, en 1965 et en 1996, ont besoin d'une assistance quotidienne à domicile, son père souffrant de problèmes ophtalmologiques ainsi que de diabète et sa mère, qui ne sait ni lire, ni écrire, ni parler le français, étant atteinte de troubles cardiaques et de diabète ; que cette assistance ne pourrait pas leur être apportée par sa soeur, de nationalité française, qui n'entretient plus aucune relation avec ses parents depuis novembre 2008 en raison d'une mésentente relative au choix de son époux ; que, toutefois, Mlle A, entrée en France à l'âge de trente-quatre ans, célibataire et sans enfant, ne vivait sur le territoire français que depuis dix-huit mois au jour de la décision en litige ; qu'elle a passé la majeure partie de sa vie en Tunisie, pays dont elle possède la nationalité, et a donc vécu éloignée de ses parents jusqu'à cette date ; que les seules attestations de sa soeur et de son époux ne suffisent pas à démontrer que sa soeur ne pourrait pas porter assistance à ses parents, ni que ces derniers ne pourraient pas bénéficier de l'assistance d'une tierce personne ; que les certificats médicaux qu'elle produit, qui se bornent à énoncer que l'état de santé de ses parents " nécessite la présence à domicile de leurs enfants " pour les aider à la prise en charge de leurs pathologies ou " nécessite une aide à domicile pérenne ", sont insuffisants pour démontrer le caractère indispensable de sa présence en France auprès de ses parents ; que, dès lors, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment de son entrée récente en France, la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour du 9 septembre 2009 n'a pas porté au droit de Mlle A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus ; que, par suite, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a annulé cette décision pour le motif tiré de la violation, par le PREFET DU RHONE, des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par Mlle A devant le Tribunal administratif de Lyon ;

Considérant, en premier lieu, que M. Stéphane B, sous-directeur des étrangers de la préfecture du Rhône, a reçu délégation du PREFET DU RHONE, par arrêté du 1er septembre 2009, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, " à l'effet de signer la totalité des actes établis pas la direction ou le service " dont il dépend ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte manque en fait ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance par le PREFET DU RHONE de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté par les mêmes motifs que ceux retenus ci-dessus pour écarter le moyen tiré de la violation du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, pour les mêmes motifs, le refus de titre de séjour en litige n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mlle A ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU RHONE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a annulé sa décision du 9 septembre 2009 refusant à Mlle A un titre de séjour ;

Considérant que le présent arrêt n'appelant aucune mesure d'exécution, les conclusions aux fins d'injonction présentées par Mlle A doivent être rejetées ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions du PREFET DU RHONE tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que les conclusions de Mlle A, partie perdante dans la présente instance, tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon du 8 avril 2011 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mlle A devant le Tribunal administratif de Lyon et ses conclusions présentées devant la Cour sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions du PREFET DU RHONE tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mlle Sondes A. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

En application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative, il en sera adressé copie au Procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Lyon.

Délibéré après l'audience du 14 juin 2012 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

Mme Steck-Andrez, président-assesseur,

M. Picard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 juin 2012.

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N° 11LY01593


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY01593
Date de la décision : 28/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre CLOT
Rapporteur public ?: M. POURNY
Avocat(s) : SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-06-28;11ly01593 ?
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