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24/04/2012 | FRANCE | N°11LY01453

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 24 avril 2012, 11LY01453


Vu la requête, enregistrée à la Cour par télécopie le 16 juin 2011 et régularisée le 17 juin 2011, présentée pour M. Vedin A, domicilié chez Aralis, 73 route de Corbas à Venissieux (69200) ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1006940, en date du 25 janvier 2011, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet du Rhône, du 5 juillet 2010, refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision susmentionnée ainsi que l'obligati

on de quitter le territoire français et la décision désignant le pays à destination duquel...

Vu la requête, enregistrée à la Cour par télécopie le 16 juin 2011 et régularisée le 17 juin 2011, présentée pour M. Vedin A, domicilié chez Aralis, 73 route de Corbas à Venissieux (69200) ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1006940, en date du 25 janvier 2011, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet du Rhône, du 5 juillet 2010, refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision susmentionnée ainsi que l'obligation de quitter le territoire français et la décision désignant le pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite, en date du 5 juillet 2010 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de cinquante euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient qu'il ne peut poursuivre sa vie privée et familiale qu'en France, eu égard à ses attaches et à la gravité de l'état de santé de son épouse qui souffre d'un syndrome post traumatique et ne peut pas être prise en charge médicalement dans son pays d'origine ; que dès lors, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, le préfet du Rhône a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il a également commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur sa vie privée et familiale ; que l'obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de délivrance du titre de séjour et viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne fait pas mention des risques encourus par son épouse, eu égard à son état de santé ; qu'elle viole les stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du 1er avril 2011 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. A ;

Vu le mémoire enregistré le 5 octobre 2011, présenté pour le préfet du Rhône, qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. A, de la somme de mille euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient, à titre principal, que la requête est irrecevable dès lors qu'il ne produit aucun élément nouveau et déterminant par rapport à ceux produits en première instance ; qu'à titre subsidiaire, les conclusions tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français qui lui a été faite et la décision fixant le pays de destination sont irrecevables dès lors que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a statué sur la légalité de ces décisions dont il a prononcé l'annulation par jugement du 22 novembre 2010 ; que s'agissant de la décision par laquelle il a refusé la délivrance d'un titre de séjour, il n'a méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'a pas commis une erreur manifeste d'appréciation dès lors que M. A qui se borne à produire des documents anciens, n'établit pas que son épouse ne pourrait pas bénéficier de soins appropriés dans son pays d'origine où il a conservé des attaches et ne justifie pas d'une insertion particulière en France ;

Vu la pièce complémentaire, enregistrée à la Cour le 30 mars 2012, produite pour M. A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 avril 2012 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public,

- et les observations de Me Robin, avocat de M. A ;

Sur la recevabilité des conclusions tendant à l'annulation des décisions faisant obligation de quitter le territoire et désignant le pays de destination :

Considérant que, par jugement du 22 novembre 2010, le magistrat désigné par le tribunal administratif de Lyon, statuant sur les conclusions de M. A, a prononcé l'annulation des décisions du préfet du Rhône du 5 juillet 2010 lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ; que le préfet du Rhône n'a pas relevé appel de ce jugement, devenu définitif ; que, dès lors, les conclusions de M. A présentées dans la présente instance tendant à contester la légalité des décisions du préfet du Rhône en date du 5 juillet 2010 lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination sont irrecevables ;

Sur la décision de refus de délivrance de titre de séjour :

Sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit :/ (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

Considérant que M. A, de nationalité bosnienne, est, selon ses déclarations, entré en France irrégulièrement en juillet 2005 à l'âge de 27 ans, accompagné de son épouse, ressortissante bosniaque et de leur fille aînée, née en Bosnie Herzégovine ; que, par décision du 20 septembre 2005, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'asile et que ce refus a été confirmé par la Commission des recours des réfugiés, le 11 mai 2007 ; que M. A a été autorisé à se maintenir provisoirement en raison de l'état de santé de son épouse, sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à compter du 3 décembre 2007, renouvelé jusqu'en 2008 ; qu'il a ensuite fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français dont la légalité a été confirmée par la Cour de céans, le 3 mars 2010 ; que, le 5 juillet 2010, le préfet du Rhône lui a de nouveau refusé la délivrance d'un titre de séjour ; que, pour contester cette décision, objet du présent litige, M. A fait notamment valoir que l'état de santé de son épouse qui souffre d'un syndrome post traumatique et d'angoisse, s'est aggravé et justifie qu'il demeure à ses côtés, en France, où elle bénéficie d'un suivi psychologique et d'un traitement médical appropriés, indisponibles en Bosnie Herzégovine ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que le préfet du Rhône a refusé la délivrance d'un titre de séjour pour raisons de santé à Mme A, le 5 juillet 2010, et lui a fait obligation de quitter le territoire français ; que la légalité de ces décisions a été confirmée par le Tribunal administratif de Lyon par jugement du 25 janvier 2011, devenu définitif ; que, dès lors, rien ne s'oppose à ce que M. A reconstitue, avec son épouse, en situation irrégulière, la cellule familiale en Bosnie Herzégovine ; qu'à la date de la décision attaquée, M. A avait passé l'essentiel de son existence dans son pays d'origine où il n'était pas dépourvu d'attaches et ne justifiait pas avoir en France des liens familiaux autres que sa femme et ses enfants ; que la circonstance que la fille aînée de M. A soit scolarisée en France est par elle-même insuffisante pour justifier d'une intégration particulière sur le territoire français ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions d'entrée et de séjour du requérant en France, la décision contestée n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, ainsi, méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

Sur les conclusions du préfet du Rhône tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A quelque somme que ce soit au profit du préfet du Rhône au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Vedin A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 10 avril 2012 à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Montsec, président assesseur,

Mme Besson-Ledey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 avril 2012.

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N° 11LY01453


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY01453
Date de la décision : 24/04/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : ROBIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-04-24;11ly01453 ?
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