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27/03/2012 | FRANCE | N°11LY01661

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 27 mars 2012, 11LY01661


Vu la requête, enregistrée à la Cour le 8 juillet 2011, présentée pour le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101756, du 7 juin 2011, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions du 31 janvier 2011 par lesquelles il a refusé à Mme Sadbere A la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a désigné le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai, à défaut pour elle d'obtempérer à l'o

bligation de quitter le territoire français qui lui était faite, lui a enjoint de dé...

Vu la requête, enregistrée à la Cour le 8 juillet 2011, présentée pour le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101756, du 7 juin 2011, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions du 31 janvier 2011 par lesquelles il a refusé à Mme Sadbere A la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a désigné le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai, à défaut pour elle d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite, lui a enjoint de délivrer à Mme Sadbere A une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois suivant la notification dudit jugement et a mis à la charge de l'Etat la somme de 800 euros, à verser au conseil de Mme Sadbere A, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme Sadbere A devant le Tribunal administratif de Lyon ;

3°) de mettre à la charge de Mme Sadbere A la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que si l'état de santé de Mme Sadbere A nécessite une prise en charge médicale, le défaut de cette prise en charge ne devrait pas entraîner pour elle de conséquences d'une exceptionnelle gravité et l'intéressée peut voyager sans risque vers son pays d'origine ; que, dès lors, la décision refusant à Mme Sadbere A la délivrance d'un titre de séjour n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que si les premiers juges ont retenu que le fils de Mme Sadbere A, qui souffre de troubles psychologiques, reçoit des soins médicaux, ils n'ont pas recherché si le défaut de cette prise en charge pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et n'ont pas établi qu'il ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé au Kosovo ; qu'en tout état de cause, le Kosovo dispose de structures sanitaires où les affections de Mme Sadbere A et de son fils peuvent être prises en charge ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré à la Cour le 23 novembre 2011, présenté pour Mme Sadbere A, domiciliée 3 montée de l'Observance à Lyon (69009), qui demande à la Cour de rejeter la requête du PREFET DU RHONE et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Elle soutient que la décision du PREFET DU RHONE lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ne s'est pas prononcé sur le degré de gravité de sa pathologie mais seulement sur la disponibilité des soins au Kosovo et que le préfet ne peut pas invoquer devant le juge des motifs qui ne figurent pas dans la décision en litige ; que son état de santé est dégradé et nécessite une prise en charge médicale et qu'une reconduite dans son pays d'origine aggraverait son état ; que son fils, qui souffre de troubles psychologiques, reçoit des soins médicaux en France ; qu'elle ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé au Kosovo ; que les notes d'information de l'Ambassade de France au Kosovo produites par le PREFET DU RHONE ne sont pas établies par une autorité indépendante et sont sommaires et lacunaires alors que les rapports de l'Organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR) qu'elle a produits en première instance, qui permettent de conclure que le Kosovo ne dispose pas de structures sanitaires où ses troubles psychiatriques pourraient être pris en charge et que le faible niveau de l'aide sociale y constitue un obstacle majeur à l'accès aux soins, émanent d'une organisation indépendante et sont complets et précis ; que le réseau d'organisations " Country of return information project " souligne également dans un rapport établi en décembre 2009 que la situation sanitaire et sociale au Kosovo est médiocre et se dégrade ; que le lien de confiance qu'elle a établi avec ses thérapeutes en France doit être maintenu pour assurer la réussite de la thérapie ; que les troubles psychiatriques dont elle souffre trouvent leur origine dans les événements traumatisants et stigmatisants qu'elle a vécus dans son pays d'origine et que, pour cette raison, elle ne peut pas bénéficier d'un traitement approprié au Kosovo ; que, par conséquent, la décision du PREFET DU RHONE, du 31 janvier 2011, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le refus de titre de séjour a également méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, et est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa vie personnelle ; que l'obligation de quitter le territoire français a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, et est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa vie personnelle ; que la décision désignant le pays de destination a méconnu les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu les pièces complémentaires, produites pour Mme Sadbere A, enregistrées à la Cour le 26 décembre 2011 ;

Vu la décision du 19 octobre 2011, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme Sadbere A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 mars 2012 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public,

- et les observations de Me Pochard, substituant Me Fréry, avocat de Mme A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Sadbere A, de nationalité kosovare, déclare être entrée irrégulièrement en France le 4 juillet 2007, accompagnée de son fils, afin de demander l'asile ; que sa demande a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 8 novembre 2007, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 22 juillet 2008 ; qu'elle a fait l'objet d'une décision de refus de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français et d'une décision fixant le pays de destination, par décisions du PREFET DU RHONE du 22 septembre 2008, dont la légalité a été confirmée par la Cour de céans, le 25 mai 2010 ; qu'elle a sollicité, le 22 novembre 2010, la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le triple fondement de l'article L. 313-14 et des 7° et 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par décisions du 31 janvier 2011, le PREFET DU RHONE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ; que le Tribunal administratif de Lyon a annulé ces décisions par un jugement du 7 juin 2011, dont le PREFET DU RHONE fait appel ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. (...) " ;

Considérant que, pour annuler la décision du 31 janvier 2011 par laquelle le PREFET DU RHONE a refusé la délivrance d'une carte de séjour temporaire pour raison de santé à Mme Sadbere A et, par voie de conséquence, les décisions du même jour lui faisant obligation de quitter le territoire français et désignant le pays de destination, le Tribunal administratif de Lyon a estimé, d'une part, que les troubles psychologiques dont souffre Mme Sadbere A nécessitent une prise en charge médicale dont le défaut est susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que le traitement requis n'est pas disponible au Kosovo et, d'autre part, que le fils de Mme Sadbere A, qui présente de graves troubles psychologiques, liés à l'état de sa mère, bénéficie de soins médico-psychologiques ;

Considérant que Mme Sadbere A produit plusieurs certificats établis par des psychiatres et des psychologues, tant avant qu'après la date de la décision en litige, indiquant qu'elle souffre d'un syndrome anxio-dépressif sévère nécessitant un traitement médicamenteux ainsi qu'un travail psychothérapique ; que si ces documents permettent d'établir que les troubles psychologiques dont souffre Mme Sadbere A nécessitent une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, toutefois, les informations qui ont été produites par le PREFET DU RHONE, émanant de l'Ambassade de France au Kosovo et du ministère de la santé de ce pays, démontrent que le Kosovo dispose de structures sanitaires où l'affection de Mme Sadbere A peut être totalement prise en charge ; que, si les rapports de l'Organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR), dont se prévaut Mme Sadbere A, indiquent que les moyens mis en oeuvre au Kosovo pour soigner les troubles psychiatriques sont insuffisants par rapport aux besoins de la population, il ne réfute pas l'existence, d'une part, d'un réseau de prise en charge, d'autre part, d'aides sociales pour financer les soins ; qu'il ressort ainsi des pièces du dossier que le suivi et le traitement requis par l'état de santé de Mme Sadbere A étaient disponibles au Kosovo à la date de la décision en litige ; que si Mme Sadbere A fait valoir, reprenant les termes de certificats établis par des psychiatres et des psychologues, qu'elle souffre de troubles psychologiques qui ont pour origine des maltraitances subies au Kosovo et que, pour cette raison, elle ne peut pas bénéficier d'un traitement approprié au Kosovo, il ressort des pièces du dossier que l'origine de la souffrance morale de Mme Sadbere A n'est pas établie de manière certaine et qu'une thérapie en France n'est pas la seule voie possible pour traiter le traumatisme de la patiente ; qu'en outre, Mme Sadbere A, qui ne donne aucune information relative au coût des soins qui lui sont nécessaires ou aux ressources dont elle disposerait au Kosovo pour financer le coût de son traitement, n'établit pas qu'elle ne pourrait pas bénéficier, pour des raisons économiques, des soins rendus nécessaires par ses troubles psychologiques ; que, dès lors, c'est à tort que les premiers juges ont annulé la décision du PREFET DU RHONE, du 31 janvier 2011, refusant la délivrance d'un titre de séjour à Mme Sadbere A au motif qu'elle a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, par voie de conséquence, les décisions du même jour faisant obligation à celle-ci de quitter le territoire français et désignant le pays de destination ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme Sadbere A devant le Tribunal administratif de Lyon et devant la Cour ;

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : "Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées des motifs des décisions défavorables qui les concernent. (...)" ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : "La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision." ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) " ;

Considérant que Mme Sadbere A soutient que la décision du PREFET DU RHONE, du 31 janvier 2011, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour est insuffisamment motivée dès lors que l'avis du médecin inspecteur de la santé publique ne lui a pas été communiqué et que la décision ne reproduit pas l'intégralité de l'avis ; que, toutefois, aucune disposition n'impose au préfet de communiquer au demandeur d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade l'avis du médecin inspecteur de santé publique et notamment de joindre cet avis à la décision de refus de titre, et l'autorité administrative saisie ayant motivé le rejet de la demande de titre pour raison de santé présentée par Mme Sadbere A par le fait que celle-ci peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine et voyager sans risque vers celui-ci, l'indication que l'état de santé de Mme Sadbere A nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, était alors superfétatoire ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision litigieuse doit être écarté ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l 'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

Considérant que Mme Sadbere A, née le 17 octobre 1978, déclare être entrée irrégulièrement en France le 4 juillet 2007, en compagnie de son enfant, afin de demander l'asile, et fait valoir qu'elle a été victime de violences de la part de sa belle-famille, qu'elle n'a plus aucun contact avec sa famille depuis sa séparation d'avec son époux et qu'elle ne pourrait donc pas poursuivre une vie familiale normale au Kosovo ; que, par ailleurs, son frère, marié avec une ressortissante française, réside régulièrement en France, que son fils, né le 2 septembre 2003, y est scolarisé, qu'elle maîtrise la langue française et qu'elle bénéficie d'une promesse d'embauche ; que, toutefois, la demande d'asile de Mme Sadbere A a été rejetée et elle n'établit pas, par les pièces produites au dossier et notamment par les attestations de proches, qui sont dépourvues de caractère probant, qu'elle ne pourrait pas poursuivre sa vie familiale ailleurs qu'en France ; que Mme Sadbere A a vécu l'essentiel de son existence dans son pays d'origine, où elle conserve des attaches familiales ; que, dans ces conditions, la décision contestée n'a pas porté au droit de Mme Sadbere A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, la décision de refus de séjour n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la vie personnelle de Mme Sadbere A ;

Considérant qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces dernières stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que Mme Sadbere A fait valoir qu'elle ne pourrait ni conserver la garde de son enfant, ni poursuivre une vie familiale normale au Kosovo, et que son fils, scolarisé en France depuis 2008, est parfaitement intégré au sein de la société française ; que, cependant, Mme Sadbere A n'établit ni qu'elle ne pourrait pas poursuivre une vie familiale normale ailleurs qu'en France, comme il a été dit ci-dessus, ni que son enfant ne pourrait pas poursuivre sa scolarité hors de France ; que, dès lors, dans les circonstances de l'espèce, le PREFET DU RHONE n'a pas méconnu l'intérêt supérieur de l'enfant de Mme Sadbere A et les stipulations de l'article 3-1 précitées ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme Sadbere A n'est pas fondée à exciper, au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision, du 31 janvier 2011, l'obligeant à quitter le territoire français, de l'illégalité de la décision du même jour refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux retenus plus haut dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision de refus de séjour, la mesure d'éloignement prise à l'encontre de Mme Sadbere A n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 3-1 de la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, et n'est pas entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa vie personnelle ;

Sur la légalité de la décision distincte fixant le pays de destination :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme Sadbere A n'est pas fondée à exciper, au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision, du 31 janvier 2011, fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement dont elle a fait l'objet, de l'illégalité de la décision du même jour refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été précédemment énoncés dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour, la décision fixant le pays de destination n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " et que ce dernier texte énonce que " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;

Considérant que Mme Sadbere A soutient qu'elle pourrait être victime de représailles de la part de sa belle-famille en cas de retour au Kosovo, dès lors qu'elle s'est enfuie de son foyer avec son fils sans le consentement de celle-ci ; que, toutefois, la demande d'asile de Mme Sadbere A a été rejetée et elle n'établit pas, par les pièces produites au dossier et notamment par les attestations de membres de sa famille, qui sont dépourvues de caractère probant, la réalité des menaces qui pèseraient sur elle en cas de retour au Kosovo ; que si elle produit également un rapport de l'OSAR relatif aux conséquences du transfert du droit de garde, mis à jour le 26 avril 2010, selon lequel les enfants sont généralement attribués au père (et à sa famille d'origine) après un divorce, le même rapport décrit la justice du Kosovo comme une institution opérationnelle, même si les délais de jugement sont longs, et soumise à des règles qui ne sont pas arbitraires ; que, dès lors, la décision du PREFET DU RHONE fixant le Kosovo comme pays de destination de la mesure d'éloignement dont Mme Sadbere A a fait l'objet, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU RHONE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions du 31 janvier 2011 rejetant la demande de titre de séjour présentée par Mme Sadbere A, lui faisant obligation de quitter le territoire national dans le délai d'un mois et désignant le pays de destination, et lui a enjoint de délivrer à Mme Sadbere A une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois suivant la notification dudit jugement ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante au présent litige, le versement de quelque somme que ce soit, au titre des frais exposés par Mme Sadbere A et non compris dans les dépens ;

Considérant, d'autre part, qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la requérante, une somme quelconque, au titre des frais exposés par le PREFET DU RHONE et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Lyon en date du 7 juin 2011 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme Sadbere A devant le Tribunal administratif de Lyon et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du PREFET DU RHONE est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Sadbere A, au PREFET DU RHONE et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Délibéré après l'audience du 15 mars 2012 à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Segado, premier conseiller,

M. Lévy Ben Cheton, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 mars 2012,

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N° 11LY01661


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY01661
Date de la décision : 27/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : TOMASI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-03-27;11ly01661 ?
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