Vu la requête, enregistrée le 20 mai 2011, présentée pour la COMMUNE DE CROLLES (Isère), représentée par son maire en exercice ;
La COMMUNE DE CROLLES demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Grenoble n° 0700217 du 21 mars 2011 en tant qu'il a annulé :
- la délibération du conseil municipal du 13 octobre 2006 en tant qu'elle décide du financement de l'intégralité de l'opération d'enfouissement du réseau de communications électroniques de France Telecom ;
- les articles 2 et 3 de l'arrêté du maire de Crolles du 21 décembre 2006 ;
- les deux décisions qui ont, d'une part, arrêté les caractéristiques techniques et économiques des travaux et, d'autre part, décidé l'engagement des travaux ;
2°) de rejeter la demande de M. A devant le tribunal administratif ;
3°) de mettre à la charge de M. A une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que le réseau de France Telecom n'avait pas d'appuis communs avec les réseaux publics, comme cela est indiqué dans la convention passée entre France Telecom et le SE38 ; que le câble du réseau de télécommunications ne fait que croiser le câble du réseau électrique, et que si une accroche est fixée au poteau électrique c'est uniquement parce que ces deux réseaux se croisent ; que M. A, en sa qualité de contribuable, n'a pas intérêt à attaquer l'arrêté du 21 décembre 2006 ; que la permission de voirie accordée par cet arrêté est un acte superfétatoire qui ne fait pas grief, dès lors que l'opérateur de distribution d'électricité dispose du droit permanent à occuper le domaine public ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 août 2011, présenté pour M. Emmanuel A, tendant au rejet de la requête et à la mise à la charge de la COMMUNE DE CROLLES d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que l'habilitation du maire à faire appel, par délibération du 25 mars 2011, est irrégulière en l'absence d'information suffisante du conseil municipal dont les membres n'ont eu communication ni du sens des conclusions du rapporteur public lors de l'audience du 8 mars 2011, ni du jugement du 21 mars 2011 ; qu'il existe plusieurs supports communs ; que les photographies avant travaux (n°s 10 et 23) montrent que le même poteau supporte deux réseaux différents ; que sur la photo n° 10 figure une goulotte dans laquelle passent les deux réseaux pour alimenter la maison située au fond du jardin ; qu'en sa qualité de riverain de la voie, il a intérêt à agir, ainsi qu'en sa qualité de contribuable dans la mesure où les travaux engagés par la commune auront un impact sur l'impôt ; que les articles 2 et 3 de l'arrêté du 21 décembre 2006 , qui déterminent les modalités d'exécution des travaux de réfection de l'avenue de la Résistance, n'ont pas pour objet d'accorder une permission de voirie à l'opérateur de distribution d'électricité qui dispose du droit permanent d'occuper le domaine public ; que ces dispositions n'ont donc pas le caractère d'une décision superfétatoire mais d'un acte faisant grief ; que le maire n'était pas compétent pour prescrire des mesures relatives aux travaux affectant le sol et le sous- sol de cette voie ; que les élus se sont prononcés sur le projet de financement des travaux sans disposer d'autre document que du projet de délibération ; que le règlement intérieur du conseil municipal n'a été établi qu'en janvier 2007 ; que l'avis de l'architecte des bâtiments de France n'a pas été requis, alors que l'avenue de la Résistance est située dans le périmètre de protection du château de Bernis ; qu'une autorisation d'occupation du domaine public aurait dû être accordée à France Telecom ; qu'un permis de construire aurait dû être sollicité préalablement à l'engagement des travaux, les façades de plusieurs maisons ayant vocation à être modifiées ; qu'aucun décret ministériel préalable à l'ancrage en façade de propriétés privées de câbles et de dispositifs d'éclairage public n'a été demandé ; que ni la commune ni le SE38 ne justifient d'un titre les autorisant à passer sur sa propriété ; que le tracé retenu pour le passage des câbles de France Telecom sur les murs de sa maison ne pouvait intervenir sans régularisation de la situation antérieure ; que ce tracé contrevient aux dispositions législatives et réglementaires encadrant les travaux afférents aux lignes de communications téléphoniques ;
Vu l'ordonnance du 29 septembre 2011 fixant la clôture d'instruction au 28 octobre 2011 ;
Vu enregistré le 28 octobre 2011 un mémoire complémentaire présenté pour la COMMUNE DE CROLLES tendant aux mêmes fins que ses écritures précédentes, selon les mêmes moyens ;
Vu enregistré le 15 novembre 2011, un mémoire présenté pour M. A ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la voirie routière ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 janvier 2012 :
- le rapport de Mme Steck-Andrez, président-assesseur ;
- les conclusions de M. Pourny, rapporteur public ;
- et les observations de Me Gonzague, avocat de la COMMUNE DE CROLLES et de Me Robichon, avocat de M. A ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non- recevoir opposée à la requête par la COMMUNE DE CROLLES ;
Sur la légalité de la délibération du conseil municipal de Crolles du 13 octobre 2006 :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 2224-35 du code général des collectivités territoriales : Tout opérateur de communications électroniques autorisé par une collectivité territoriale, par un établissement public de coopération compétent pour la distribution publique d'électricité, ou par un gestionnaire de réseau public de distribution d'électricité à installer un ouvrage aérien non radioélectrique sur un support de ligne aérienne d'un réseau public de distribution d'électricité procède, en cas de remplacement de cette ligne aérienne par une ligne souterraine à l'initiative de la collectivité ou de l'établissement précité, au remplacement de sa ligne aérienne en utilisant la partie aménagée à cet effet dans l'ouvrage souterrain construit en remplacement de l'ouvrage aérien commun. Les infrastructures communes de génie civil créées par la collectivité territoriale ou l'établissement public de coopération lui appartiennent. / L'opérateur de communications électroniques prend à sa charge les coûts de dépose, de réinstallation en souterrain et de remplacement des équipements de communications électroniques incluant les câbles, les fourreaux et les chambres de tirage, y compris les coûts d'études et d'ingénierie correspondants. Il prend à sa charge l'entretien de ses équipements. / Une convention conclue entre la collectivité ou l'établissement public de coopération et l'opérateur de communications électroniques fixe la participation financière de celui-ci sur la base des principes énoncés ci-dessus, ainsi que le montant de la redevance qu'il doit éventuellement verser au titre de l'occupation du domaine public. ; qu'il résulte de ces dispositions que lorsqu'un opérateur de communications électroniques est autorisé à utiliser, pour les besoins de son réseau de câbles, les supports de lignes aériennes installés par le gestionnaire de distribution d'électricité, et qu'il est contraint de procéder au remplacement de ses propres lignes aériennes pour leur faire emprunter les installations enfouies par le gestionnaire de la distribution d'électricité, la charge financière résultant de cette opération ne peut en être assumée ni par le gestionnaire de la distribution d'électricité ni par la commune concernée par l'opération ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des photographies prises antérieurement aux travaux d'enfouissement des réseaux, produites par M. A, que l'opérateur de communications électroniques France Telecom utilisait pour ses lignes aériennes plusieurs supports communs avec le réseau électrique détenu par le Syndicat Energies de l'Isère ; qu'alors même que ces fixations sur des poteaux électriques auraient eu seulement pour finalité d'éviter tout contact direct entre le poteau et le câble du réseau de France Télécom, il ne peut être sérieusement contesté que le support d'appui était commun aux deux réseaux ; que l'une des photographies révèle d'ailleurs que les câbles des deux réseaux passaient par un fourreau unique fixé sur le même poteau ; qu'en outre, aucune pièce du dossier ne permet d'établir que France Télécom n'aurait pas bénéficié, pour la réinstallation de ses lignes, des fourreaux et chambres de tirage posés par le Syndicat Energies de l'Isère ; que, dans ces conditions, France Télécom devait, en application des dispositions précitées, prendre en charge les coûts de dépose, de réinstallation en souterrain et de remplacement de ses équipements de communications électroniques ; que, par suite, la COMMUNE DE CROLLES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé la délibération du 13 octobre 2006 du conseil municipal de Crolles en tant qu'elle décide du financement de l'intégralité de l'opération d'enfouissement du réseau de communications électroniques de France Télécom ;
Sur les articles 2 et 3 de l'arrêté du maire de Crolles du 21 décembre 2006 :
En ce qui concerne la fin de non recevoir opposée par la COMMUNE DE CROLLES aux conclusions de la demande de M. A :
Considérant qu'en sa seule qualité de riverain de l'avenue de la Résistance, M. A justifiait d'un intérêt lui donnant qualité pour agir contre les articles 2 et 3 de l'arrêté susmentionné par lequel le maire de Crolles a prescrit à l'entreprise Sobeca des mesures de remise en état et de réfection de la tranchée pratiquée sur cette voie ;
Considérant que les articles 2 et 3 de l'arrêté du maire de Crolles du 21 décembre 2006 ont pour objet de déterminer les modalités d'exécution des travaux de réfection de l'avenue de la Résistance, et non d'accorder une permission de voirie à l'opérateur de distribution d'électricité, lequel dispose du droit permanent d'occuper le domaine public ; que ces dispositions n'ont donc pas le caractère d'une décision superfétatoire, mais d'un acte faisant grief, susceptible de recours contentieux ;
Considérant que, dès lors, la COMMUNE DE CROLLES n'est pas fondée à soutenir que les conclusions de la demande de M. A devant le tribunal administratif, dirigées contre l'arrêté du 21 décembre 2006, étaient irrecevables ;
En ce qui concerne la légalité des articles 2 et 3 de l'arrêté du maire de Crolles du 21 décembre 2006 :
Considérant qu'il est constant que l'avenue de la Résistance constitue une voie départementale ; que si le maire était compétent en vertu des articles L. 115-1 et suivants du code de la voirie routière, pour assurer la coordination des travaux sur cette voie, à l'intérieur de l'agglomération, seul le président du conseil général de l'Isère, en vertu des dispositions de l'article L. 131-3 du code de la voirie routière ou le conseil général, en vertu des dispositions de l'article L. 131-7 du même code, étaient compétents, pour prescrire des mesures relatives aux travaux affectant le sol et le sous- sol de cette voie ; qu'il s'ensuit, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, que l'arrêté du maire de Crolles est entaché d'incompétence en tant qu'il concerne les mesures prévues par ses articles 2 et 3 ; que, par suite, la COMMUNE DE CROLLES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé les articles 2 et 3 de l'arrêté du 21 décembre 2006 ;
Sur la légalité des deux décisions qui ont, d'une part, arrêté les caractéristiques techniques et économiques des travaux et, d'autre part, décidé l'engagement des travaux :
Considérant que la COMMUNE DE CROLLES ne formule aucune critique à l'égard du jugement du Tribunal en tant qu'il annule les décisions susmentionnées ; qu'il y a lieu, en tout état de cause, par adoption des motifs des premiers juges, de confirmer ce jugement sur ce point ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. A qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par la COMMUNE DE CROLLES à l'occasion du litige et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la COMMUNE DE CROLLES le versement à M. A d'une somme de 1 500 euros au titre de ces mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la COMMUNE DE CROLLES est rejetée.
Article 2 : La COMMUNE DE CROLLES versera à M. A la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE CROLLES, à M. Emmanuel A, au Syndicat Energies de l'Isère et au département de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 12 janvier 2012 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
Mme Steck-Andrez, président-assesseur,
M. Picard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 février 2012.
''
''
''
''
1
6
N° 11LY01279