Vu la requête, enregistrée le 2 mars 2011, présentée pour Mme Myriam A, domiciliée ... ;
Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1001422 du 28 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand et de la société Stryker France à lui verser diverses indemnités en réparation des conséquences dommageables de l'intervention chirurgicale du 27 octobre 2004 ;
2°) de prononcer la condamnation demandée ;
Elle soutient que le scanner lombaire du 14 octobre 2005 révèle une rupture des vis inférieures ; que l'expert ne s'est pas prononcé sur le point de savoir si cette rupture est de nature à avoir créé une pseudarthrose ; que le centre hospitalier a manqué à son obligation de résultat ; que le rapport de l'expert a omis d'apprécier plusieurs postes de préjudices ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 7 juillet 2011, présenté pour le centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand, tendant au rejet de la requête ;
Il soutient qu'il ressort du rapport de l'expertise ordonnée par la CRCI d'Auvergne que les praticiens du centre hospitalier n'ont commis aucune faute dans la prise en charge de Mme A ; que l'expert conclut que la rupture des vis est la conséquence d'une pseudarthrose du greffon ; qu'il n'existe aucun lien de causalité direct et certain entre l'intervention du 27 octobre 2004 et le préjudice dont la requérante réclame la réparation ;
Vu le mémoire, enregistré le 11 juillet 2011, présenté pour la société Stryker France, tendant au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme A d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que la demande présentée par Mme A à son encontre a été portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ; qu'à titre subsidiaire, seul l'état de santé antérieur de la patiente explique sa situation actuelle ; que pour l'expert, la cause de la rupture de la vis est la conséquence de la pseudarthrose ; que la requérante n'apporte pas la preuve d'un défaut du matériel fourni ;
Vu le mémoire, enregistré le 25 juillet 2011, présenté pour la CPAM du Puy-de-Dôme, informant la Cour de ce qu'elle n'a pas de créance à faire valoir ;
Vu le mémoire, enregistré le 11 octobre 2011, présenté pour Mme A, tendant aux mêmes fins que sa requête, selon les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er décembre 2011 :
- le rapport de Mme Steck-Andrez, président-assesseur ;
- les observations de Me Benissan, avocat de la société Stryker France ;
- et les conclusions de M. Pourny, rapporteur public ;
La parole ayant de nouveau été donnée à Me Benissan ;
Sur les conclusions dirigées contre la société Stryker France :
Considérant que les conclusions de Mme A dirigées contre la société Stryker France, qui concernent un litige de droit privé, ont été présentées devant une juridiction incompétente pour en connaître ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il rejette au fond ces conclusions et d'y statuer par la voie de l'évocation ;
Considérant, qu'ainsi qu'il a été dit, le juge administratif est incompétent pour se prononcer sur les conclusions dirigées contre la société Stryker France, qui doivent, par suite, être rejetées ;
Sur les conclusions dirigées contre le centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand :
Considérant que Mme A, qui souffrait d'une lombo-sciatique invalidante et rebelle au traitement médical, associée à une spondylolyse et une spondylolisthésis, a subi le 27 octobre 2004, au centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand, une intervention chirurgicale destinée à traiter l'ensemble de cette pathologie ; qu'il a été pratiqué une ostéosynthèse par la mise en place de vis implantées dans les pédicules des vertèbres L5 et S1 des deux côtés, reliées entre elles par des tiges de 50 millimètres de longueur ; que malgré cette opération, des douleurs importantes ont persisté du fait de l'apparition d'une pseudarthrose ; que Mme A, estimant que l'absence de consolidation des fragments osseux avait été provoquée par la rupture du matériel d'ostéosynthèse suite à la cassure des vis inférieures, a recherché la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand en raison de la seule défaillance des produits et appareils de santé utilisés au cours de l'opération chirurgicale ; que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande au motif que la rupture des vis était due à la pseudarthrose et non à un défaut de qualité de ce matériel ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment de l'expertise prescrite par la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux (CRCI) d'Auvergne, que le scanner lombaire de contrôle réalisé le 14 octobre 2005 révèle un résultat anatomique qualifié de bon , mais un greffon non encore fusionné ; qu'un nouveau scanner pratiqué le 15 mai 2006 atteste d'une bonne fusion du greffon au niveau de la vertèbre L5, mais de la persistance d'un espace entre le greffon et la vertèbre S1, qui n'est pas fusionné à ce niveau ; qu'à cette date, il est constaté que le matériel métallique est intact et parfaitement en place ; que le scanner réalisé le 3 octobre 2007 confirme l'absence de fusion du greffon au niveau de la vertèbre S1 et révèle une rupture des vis inférieures placées au niveau de la vertèbre S1, les vis pédiculaires étant en place ; que l'expert, qui s'est expressément prononcé sur la cause de la rupture des vis, estime que les micro-mouvements persistants au niveau de l'arthrodèse ont été responsables d'une fatigue du matériel et conclut que la rupture des vis n'est pas la cause, mais la conséquence de la pseudarthrose, celle-ci s'étant constituée avant la rupture du matériel ; que les conclusions de l'expert sont cohérentes avec la chronologie des observations résultant des différents scanners dont les résultats ne permettent pas d'imputer le dommage à la qualité défectueuse du matériel d'ostéosynthèse ; que la remarque portée dans l'avis de la CRCI du 6 mai 2010, qui n'est pas une instance médicale, selon laquelle l'examen du scanner du 14 octobre 2005 suggèrerait la possibilité d'une rupture de vis, alors qu'il n'en est pas fait mention dans le compte-rendu radiologique et que ce fait n'est pas non plus évoqué par l'expert, n'est pas de nature à remettre en cause les conclusions de l'expert sur l'antériorité de la pseudarthrose à l'origine de la rupture du matériel ; que Mme A n'apporte aucun élément sérieux permettant d'envisager l'hypothèse d'une rupture du matériel à cette date ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette partie des conclusions de sa demande ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la société Stryker France tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 28 décembre 2010 est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions de Mme A dirigées contre la société Stryker France.
Article 2 : Les conclusions de la demande présentée par Mme A contre la société Stryker France devant le tribunal administratif sont rejetées comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A est rejeté.
Article 4 : Les conclusions de la société Stryker France tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Myriam A, au centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand, à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme et à la société Stryker France.
Délibéré après l'audience du 1er décembre 2011 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
Mme Steck-Andrez, président-assesseur,
M. Picard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 décembre 2011.
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N° 11LY00535