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11/10/2011 | FRANCE | N°11LY00059

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 4ème chambre, 11 octobre 2011, 11LY00059


Vu, enregistrée au greffe le 11 janvier 2011, la requête présentée par le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE ;

Le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1007359 en date du 13 décembre 2010, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 9 décembre 2010, par lequel il a ordonné la reconduite à la frontière de M. Fatmir A, et les arrêtés du même jour fixant le pays de destination de la reconduite et ordonnant son placement en rétention administrative ;

2°) de rejeter la

demande de M. A tendant à l'annulation de ces arrêtés ;

Il soutient que M. A entrait d...

Vu, enregistrée au greffe le 11 janvier 2011, la requête présentée par le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE ;

Le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1007359 en date du 13 décembre 2010, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 9 décembre 2010, par lequel il a ordonné la reconduite à la frontière de M. Fatmir A, et les arrêtés du même jour fixant le pays de destination de la reconduite et ordonnant son placement en rétention administrative ;

2°) de rejeter la demande de M. A tendant à l'annulation de ces arrêtés ;

Il soutient que M. A entrait dans le champ des dispositions du 2° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et pouvait faire l'objet d'une reconduite à la frontière dès lors qu'il se maintenait dans l'espace Schengen depuis plus de trois mois et ne remplissait pas les conditions de l'article 5 du règlement CE n° 562-2006 du 15 mars 2006 ; qu'il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales eu égard aux conditions d'entrée et de séjour de M. A en France ; que sa décision fixant le pays de destination ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il n'est pas établi que M. A court des risques personnels et directs dans son pays d'origine ; qu'enfin, la décision ordonnant le placement en rétention administrative de M. A est justifiée dès lors que l'intéressé ne justifie pas de garanties effectives de représentation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les lettres des 14 et 16 septembre 2011, adressées aux parties en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;

Vu, enregistré le 22 septembre 2011, le nouveau mémoire présenté par le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE, qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens et en outre par le moyen qu'à supposer qu'il soit considéré que M. A n'entrait pas dans le champ des dispositions du 2° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est demandé à la cour de substituer à cette base légale celle du 1° du II du même article ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ;

Vu le règlement CE n° 562-2006 du 15 mars 2006 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2011 :

- le rapport de M. du Besset, président ;

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

Considérant que, par arrêté en date du 9 décembre 2010, pris sur le fondement du 2° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE a décidé que M. A, ressortissant albanais, serait reconduit à la frontière au motif qu'il s'était maintenu dans l'espace Schengen au delà des trois mois autorisés par son titre de séjour grec ; que, par deux arrêtés du même jour, il a décidé respectivement que l'intéressé serait reconduit à destination de l'Albanie ou de la Grèce et serait maintenu dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pendant 48 heures ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté de reconduite à la frontière au motif qu'il était entaché d'erreur de droit et a annulé les deux autres arrêtés par voie de conséquence ;

Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; (...) ; qu'aux termes de l'article L. 511-2 du même code : Les dispositions du 1° du II de l'article L. 511-1 sont applicables à l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne : / a) S'il ne remplit pas les conditions d'entrée prévues à l'article 5 de la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 ; / b) Ou si, en provenance directe du territoire d'un Etat partie à cette convention, il ne peut justifier être entré sur le territoire métropolitain en se conformant aux stipulations de ses articles 19, paragraphe 1 ou 2, 20, paragraphe 1, et 21, paragraphe 1 ou 2. ; qu'aux termes de l'article L. 511-3 : Les dispositions du 2° et du 8° du II de l'article L. 511-1 sont applicables à l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne si, en provenance directe du territoire d'un des Etats parties à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, il s'est maintenu sur le territoire métropolitain sans se conformer aux stipulations de l'article 19, paragraphe 1 ou 2, de l'article 20, paragraphe 1, et de l'article 21, paragraphe 1 ou 2, de ladite convention ;

Considérant que la seule circonstance qu'un étranger dispose d'un titre de séjour délivré par un Etat membre de l'Union européenne ne fait pas obstacle à ce que soit pris à son encontre un arrêté de reconduite à la frontière sur le fondement des dispositions combinées du 2° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 511-3 du même code ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Lyon a estimé que, dès lors que M. A disposait d'un titre de séjour de 18 mois, en cours de validité, délivré par les autorités grecques, l'arrêté de reconduite à la frontière pris à son encontre était entaché d'illégalité ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A ainsi que les moyens qu'il lui appartient de relever d'office ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date du 9 décembre 2010 M. A se trouvait en France depuis moins de trois mois ; qu'ainsi les dispositions du 2° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne lui étaient pas applicables ; que, toutefois, lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée ; qu'en l'espèce l'arrêté de reconduite à la frontière trouve son fondement légal dans les dispositions du 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui peuvent être substituées à celles du 2° dès lors, en premier lieu, que, ne pouvant justifier être entré régulièrement en France au regard des stipulations de l'article 5 de la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 auxquelles renvoient celles du paragraphe 1 de l'article 21 du même texte, M. A se trouvait dans la situation où, en application de ce 1°, le préfet pouvait décider qu'il serait reconduit à la frontière, en deuxième lieu, que cette substitution de base légale n'a pour effet de priver l'intéressé d'aucune garantie et, en troisième lieu, que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation pour appliquer l'une ou l'autre de ces deux dispositions ;

Considérant que, par arrêté préfectoral du 6 décembre 2010, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, M. Raffy, secrétaire général de la préfecture de la Haute-Savoie, a reçu délégation, à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de l'Etat dans le département , sous réserve de certaines exceptions parmi lesquelles ne figurent pas les actes relatifs aux étrangers ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions en litige doit être écarté ;

Considérant que les arrêtés en litige, qui énoncent les considérations de droit de fait qui les justifient, sont suffisamment motivés ;

Considérant que le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE pouvait légalement décider la reconduite à la frontière de M. A alors même que, par application de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il pouvait également décider de le remettre aux autorités compétentes de l'Etat grec, qui l'avait admis à séjourner sur son territoire ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a annulé ses arrêtés du 9 décembre 2010 ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1007359 en date du 13 décembre 2010 du Tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Lyon est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE, à M. Fatmir A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Lu en audience publique, le 11 octobre 2011.

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N° 11LY00059


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 11LY00059
Date de la décision : 11/10/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Emmanuel du BESSET
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-10-11;11ly00059 ?
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