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06/10/2011 | FRANCE | N°10LY01926

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 06 octobre 2011, 10LY01926


Vu la requête, enregistrée le 11 août 2010, présentée pour Mme Aminata A, domiciliée chez Mme B ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000695 du 17 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère en date du 30 novembre 2009 lui refusant un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer une

carte de séjour portant la mention vie privée et familiale et, à titre subsidiaire, une autor...

Vu la requête, enregistrée le 11 août 2010, présentée pour Mme Aminata A, domiciliée chez Mme B ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000695 du 17 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère en date du 30 novembre 2009 lui refusant un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer une carte de séjour portant la mention vie privée et familiale et, à titre subsidiaire, une autorisation provisoire de séjour jusqu'à réinstruction de sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'il ressort du certificat d'un praticien hospitalier, le Dr C, qu'elle n'avait pu bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et que le seul traitement anxiolytique qui lui était administré était inadapté ; que s'agissant de la fiche pays , il y apparaît que pour les états dépressifs, l'offre de soins mentionnée à la rubrique anxiolytiques + psychothérapie est assortie de la mention offre de soins insuffisante ; que ses problèmes sont en relation avec son abandon par son mari en 2002 et le décès de son père ; qu'elle présente des risques de passage à l'acte suicidaire ; que l'arrêté attaqué méconnaît l'article 4 de l'arrêté du 8 juillet 1999 en vertu duquel l'avis du médecin inspecteur doit indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers son pays de renvoi ; qu'elle a été abandonnée par son mari, son père est décédé au Sénégal et ses filles de nationalité française vivent en France ; que les décisions contestées violent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;

Vu la mise en demeure adressée au préfet de présenter ses observations, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle du 1er juillet 2010 accordant à Mme A le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 septembre 2011 :

- le rapport de Mme Steck-Andrez, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Pourny, rapporteur public ;

Sur la légalité du refus de séjour :

Considérant que Mme A, ressortissante sénégalaise, a sollicité la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale sur le fondement de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet de l'Isère lui a opposé un refus au motif que, si le défaut de prise en charge médicale de l'intéressée, qui souffre notamment d'un syndrome anxio-dépressif, pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et voyager sans risque en avion ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 11° A l'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ;

Considérant que Mme A produit un certificat d'un praticien hospitalier en date du 4 février 2010 indiquant qu'elle n'avait pu bénéficier d'un accompagnement psychologique dans son pays d'origine et que le seul traitement anxiolytique qui lui était alors administré était inadapté à l'état qu'elle présentait à l'époque ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que, si la gravité de la pathologie et la nécessité pour Mme A de bénéficier d'un traitement sont établies et d'ailleurs reconnues par le préfet, il existe sur tout le territoire du Sénégal une offre de soins adaptée au traitement des états dépressifs sous forme d'antidépresseurs ou d'anxiolytiques associés à des psychothérapies, ainsi que l'atteste la fiche établie par le ministère de la santé ; que la mention figurant sur cette fiche selon laquelle l'offre est insuffisante au regard des besoins n'établit pas l'impossibilité d'un accès effectif de Mme A à un traitement approprié au Sénégal ; que, par suite, en refusant de délivrer à l'intéressée un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale , le préfet de l'Isère n'a pas méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant que, conformément à l'obligation que prévoit l'article 4 de l'arrêté susvisé du 8 juillet 1999, selon laquelle l'avis du médecin inspecteur de santé publique indique, en outre, si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers le pays de renvoi, l'avis du médecin inspecteur mentionne qu'il n'existe aucune contre-indication médicale au voyage en avion ; que, dès lors, le moyen tiré de la violation de cette disposition manque en fait ;

Considérant que si Mme A fait valoir qu'elle a été abandonnée par son mari en 2002 et que ses deux filles, de nationalité française, sont installées en France, elle a vécu au Sénégal jusqu'à l'âge de 59 ans, sans la présence de ces dernières qui résident sur le territoire français depuis près de quinze ans ; qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales au Sénégal ; qu'ainsi, les décisions attaquées n'ont pas été prises en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le préfet n'a pas non plus porté sur les conséquences de son refus sur la situation personnelle de Mme A une appréciation manifestement erronée, dès lors que, comme il a été dit, elle peut effectivement bénéficier au Sénégal d'un traitement médical approprié ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à exciper, au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (...) ;

Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux mentionnés dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour, Mme A n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle n'est pas davantage fondée à soutenir que cette décision méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni qu'elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère en date du 30 novembre 2009 lui refusant un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire et fixant le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de Mme A, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions de la requérante tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de l'Isère de lui délivrer un carte de séjour temporaire ou une attestation provisoire de séjour doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à Mme A la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Aminata A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 15 septembre 2011 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

Mme Steck-Andrez, président-assesseur,

M. Picard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 octobre 2011.

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N° 10LY01926


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY01926
Date de la décision : 06/10/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: Mme Frédérique STECK-ANDREZ
Rapporteur public ?: M. POURNY
Avocat(s) : ABOUDAHAB

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-10-06;10ly01926 ?
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