Vu la requête, enregistrée le 24 août 2010, présentée pour l'OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT (OPH) DU CANTAL, dont le siège social est à Aurillac (15000) ;
L'OPH DU CANTAL demande à la Cour :
1°) l'annulation du jugement n° 0902246 du 22 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'a condamné à verser à M. et Mme Louis A une indemnité de 6 708,70 euros en réparation des préjudice matériels et personnels résultant d'une inondation subie par leur propriété située à Saint-Flour à la suite de l'effondrement dans un ruisseau d'un parking lui appartenant ;
2°) de rejeter la demande de M. et Mme Louis A devant le tribunal ou de réduire leurs prétentions et de condamner solidairement la compagnie Allianz et la SCP d'architectes Espagne, Allegre et Echalier à le garantir de toute condamnation prononcée à son encontre, y compris au titre des dépens et des frais non compris dans les dépens ;
3°) de mettre à la charge solidaire de la compagnie Allianz et de la SCP d'architectes Espagne, Allegre et Echalier les entiers dépens ainsi que le paiement d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- le préjudice moral n'est ni anormal ni spécial et sa réparation est donc injustifiée ;
- la SCP d'architectes Espagne, Allegre et Echalier, en sa qualité de concepteur des parkings, doit le garantir, sa responsabilité contractuelle étant engagée ;
- le contrat avec la compagnie Allianz a été souscrit dans le cadre des marchés publics ; le juge administratif est compétent pour en connaître ; cette compagnie doit supporter le coût des aménagements nécessaires pour remédier définitivement au sinistre ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 8 novembre 2010, présenté pour la compagnie Allianz, dont le siège est 87 rue de Richelieu à Paris (75002), qui conclut à la confirmation du jugement en ce qui la concerne, subsidiairement, à ce que l'assuré soit garanti de toute condamnation par la SCP d'architectes Espagne, Allegre et Echalier et, en toute hypothèse, à la réduction des indemnités réclamées par les époux A, à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SCP d'architectes Espagne, Allegre et Echalier au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens ;
Elle soutient que :
- les époux A, qui ont la charge de l'entretien de la partie de la berge délimitant leur propriété, ne démontrent pas s'en être acquitté de telle sorte que l'indemnité obtenue au titre du préjudice exposé pour la remise en état de la terre végétale doit être réduite ;
- c'est au seul maître d'oeuvre, qui a conçu l'enrochement dont l'effondrement est à l'origine des dommages, qu'incombe la réparation du préjudice subi par les intéressés ;
- le contrat d'assurance auquel se réfère l'office est antérieur à la date d'application de la loi Murcef ;
- elle ne saurait garantir la remise en état de l'enrochement et sa consolidation puisqu'elle a déjà indemnisé son assuré et qu'est seulement en cause ici l'amélioration de l'enrochement, qui doit rester à la seule charge de l'office ;
Vu le mémoire, enregistré le 30 novembre 2010, présenté pour l'OPH DU CANTAL, qui persiste dans ses précédents moyens et conclusions, soutenant en outre que :
- la compétence du juge administratif est avérée dès lors que le présent litige a été porté devant le tribunal administratif après l'entrée en vigueur de la loi Murcef ;
- la compagnie Allianz doit garantir l'office pour les travaux de remise en état et d'enrochement ;
Vu le mémoire, enregistré le 27 décembre 2010, présenté pour la compagnie Allianz qui maintient ses précédents moyens et conclusions, faisant en outre valoir que le contrat souscrit par l'office n'a pas pour objet l'amélioration des biens lui appartenant ;
Vu le mémoire, enregistré le 4 novembre 2011, présenté pour la SCP d'architectes Espagne, Allegre et Echalier, qui conclut au rejet des conclusions d'appel en garantie formulées par l'OPH DU CANTAL, la compagnie Allianz et les époux A à son encontre et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise solidairement à leur charge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- la demande formulée à son encontre est prescrite, la réception des travaux étant intervenue en 1997 et la demande des époux A ayant été présentée devant le tribunal administratif le 10 décembre 2009, soit plus de 10 ans après la date de réception ;
- c'est à la demande de l'Etat et du conseil supérieur de la pêche qu'a été réalisé l'enrochement en gradins sans béton ;
- aucune faute n'a été commise ;
- le permis de construire a été délivré sans aucune réserve à cet égard ;
- le préjudice est peu important ;
- les débordements occasionnés par les enrochements n'ont pas l'importance donnée par l'expert ;
- le lien de causalité entre les dommages et la présence de l'enrochement est incertain ;
- le préjudice des époux A n'est pas réel, et leur préjudice moral n'est certainement pas avéré ;
- l'injonction à réaliser des travaux n'est pas sérieuse ;
Vu les mémoires, enregistrés les 20 janvier et 28 février 2011, présentés pour l'OPH DU CANTAL qui maintient ses précédents moyens et conclusions, soutenant en outre que :
- aucune acceptation par l'assuré de la limitation de la garantie par son assureur n'est établie ;
- les procédures de référé avaient pour but de déterminer les éléments permettant d'engager les responsabilités des participants aux opérations de réalisation de l'ouvrage public ;
- leur responsabilité n'est enfermée dans aucun délai ;
- la délivrance d'un permis de construire ne vaut pas exonération de toute responsabilité ;
- sa demande contre les architectes repose sur le terrain contractuel ;
- les enrochements ne devaient pas réduire la section d'écoulement des eaux ;
- comme professionnel, le maître d'oeuvre aurait dû observer tout ce que commande le bon sens ;
Vu le mémoire, enregistré le 3 août 2001, présenté pour M. et Mme A, domiciliés Le Moulinou à Saint-Flour (15100) qui concluent à ce qu'il soit enjoint à l'OPH DU CANTAL de réaliser les travaux de remise en état de leur propriété dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à la condamnation personnelle, voire in solidum , de l'OPH DU CANTAL, de la compagnie Allianz et de la SCP d'architectes Espagne, Allegre et Echalier à leur verser une indemnité globale de 27 252,54 euros, de mettre à leur charge une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi qu'à la charge de l'office, l'ensemble des dépens exposés pour un montant de 2 928, 54 euros devant le juge civil ainsi que ceux exposés devant le tribunal administratif ;
Ils soutiennent que :
- leurs demandes sont recevables ;
- l'office est responsable des dommages subis ;
- les travaux de remise en état s'élèvent à 7 252, 54 euros ;
- ils ont subi un préjudice moral et des préjudices d'ordre matériel ;
- leur demande d'astreinte est justifiée ;
Vu le mémoire, enregistré le 24 août 2011, présenté pour la SCP d'architectes Espagne, Allegre et Echalier, qui conclut par les mêmes moyens aux mêmes fins que précédemment, faisant en outre valoir qu'il n'y a pas de preuve rapportée de l'intensité et de la régularité du prétendu dommage ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu la loi nº 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes à caractère économique et financier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er septembre 2011 :
- le rapport de M. Picard, premier conseiller ;
- les observations de Me Paras, avocat de la société Allianz et de Me Tournaire, avocat de la SCP d'architectes Espagne-Allègre et Echalier ;
- et les conclusions de M. Pourny, rapporteur public ;
La parole ayant été de nouveau donnée aux parties présentes ;
Considérant que le 3 décembre 2003, la propriété de M. et Mme A, située en bordure du ruisseau le Résonnet sur le territoire de la commune de Saint-Flour, a été inondée à la suite d'une crue d'intensité moyenne ; que l'expert désigné en référé par le président du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a attribué l'origine de cette inondation à un report de la crue sur leur propriété, consécutif à la présence sur la rive opposée d'un parking empiétant de près de 4 mètres sur le lit majeur du Résonnet et à l'obstruction partielle de l'écoulement des eaux du fait de l'effondrement dans ce ruisseau de l'enrochement servant d'appui à ce parking ; que les intéressés ont recherché devant le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand la responsabilité sans faute de l'OFFICE PUBLIC DE l'HABITAT (OPH) DU CANTAL, propriétaire de la résidence Beausoleil, dont fait partie le parking ; que, par un jugement du 22 juin 2010, le Tribunal a retenu la responsabilité de l'office et a fait partiellement droit à la demande des époux A en mettant à sa charge une indemnité de 6 708,70 euros mais a rejeté les conclusions d'appel en garantie présentées par l'office contre son assureur, la compagnie Allianz, et contre le maître d'oeuvre des travaux de construction de la résidence Beausoleil, la SCP Espagne, Allegre et Echalier ;
Considérant que le principe même de la responsabilité de l'OPH DU CANTAL dans la survenance du dommage dont ont été victimes les époux A n'est pas sérieusement contesté ; que si l'office et la compagnie Allianz soutiennent que ce dommage aurait en partie pour origine un mauvais entretien par les époux A des berges longeant leur propriété, il ne résulte pas de l'instruction, et notamment pas du rapport d'expertise, qu'une faute leur serait imputable de nature à exonérer l'office, même partiellement, de sa responsabilité ;
Considérant que l'envahissement de leur propriété par les eaux et la perte de terres sur une longueur de 70 mètres et une largeur de 2 mètres ont entraîné pour les époux A un préjudice de caractère anormal et spécial ; qu'ils ne justifient pas que les préjudices auxquels les a exposé cette inondation, correspondant au coût des travaux de réaménagement de leur terrain et aux désagréments d'ordre personnel encourus, seraient d'un montant supérieur aux sommes de, respectivement, 3 708,70 euros et de 3 000 euros allouées à ce titre par le Tribunal ; que les époux A n'établissent pas le préjudice qui résulterait pour eux de la perte de produits du jardin ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'OPH du CANTAL et la compagnie Allianz ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a retenu l'entière responsabilité de l'office et l'a condamné à verser aux époux A une indemnité de 6 708,70 euros ; que leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;
Considérant qu'il n'appartient pas aux juridictions administratives, en l'absence de texte le prévoyant expressément, d'adresser des injonctions à une autorité administrative ; qu'ainsi les conclusions des époux A tendant à ce qu'il soit enjoint à l'OPH du CANTAL de réaliser des travaux de remise en état de leur propriété sous astreinte de 150 euros par jour de retard, qui ne rentrent pas dans les hypothèses définies par les dispositions des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'OPH du CANTAL le paiement aux époux A d'une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Sur les conclusions d'appel en garantie de l'OPH du CANTAL contre la SCP Espagne, Allegre et Echalier :
Considérant que la SCP Espagne, Allegre et Echalier soutient, sans être contredite par l'OPH DU CANTAL, que la réception définitive des travaux de construction de la résidence Beausoleil, y compris du parking litigieux, est intervenue en 1997 ; que cette réception des travaux a eu pour effet de mettre fin à l'ensemble des rapports contractuels nés du marché passé par l'office pour la réalisation de ces travaux ; qu'il n'est ni soutenu ni établi que la SCP Espagne, Allegre et Echalier aurait commis une faute dans son obligation de conseil au moment de la réception ; que, dès lors, l'action en garantie entreprise par l'office à l'encontre du maître d'oeuvre, qui repose uniquement sur les manquements que ce dernier aurait commis dans l'exécution de ses obligations contractuelles, ne peut qu'être rejetée ; que l'OPH DU CANTAL n'est donc pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal a rejeté ses conclusions d'appel en garantie dirigées contre la SCP Espagne, Allegre et Echalier ;
Sur les conclusions d'appel en garantie de l'OPH DU CANTAL contre la compagnie Allianz :
Considérant que les services d'assurances ont été soumis aux dispositions du code des marchés publics par l'article 1er du décret du 27 février 1998 modifiant le code des marchés publics en ce qui concerne les règles de mise en concurrence et de publicité des marchés de services et codifié sur ce point à l'article 29 du code des marchés publics ; que l'article 2 de la loi du 11 décembre 2001 susvisée, portant mesures urgentes à caractère économique et financier, prévoit dans son alinéa premier que les marchés passés en application du code des marchés publics ont le caractère de contrats administratifs et que le deuxième alinéa de ce même article dispose que : Toutefois, le juge judiciaire demeure compétent pour connaître des litiges qui relèvent de sa compétence et qui ont été portés devant lui avant la date d'entrée en vigueur de la présente loi ; qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le contrat d'assurance Multirisque du patrimoine immobilier et mobilier signé en 1999 entre l'office et la compagnie Allianz, venue aux droits de la compagnie AGF, est soumis au code des marchés publics et présente donc le caractère d'un contrat administratif ; qu'il suit de là que, contrairement à ce que soutient la compagnie Allianz, les conclusions d'appel en garantie contractuelle présentées par l'office contre son assureur relèvent de la juridiction administrative ; que l'office est, dès lors, fondé à soutenir, qu'en rejetant comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître les conclusions qu'il avait présentées contre son assureur, le tribunal a entaché son jugement d'irrégularité ; qu'ainsi le jugement attaqué doit, dans cette mesure, être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur cette partie des conclusions présentées par l'office devant le tribunal administratif ;
En ce qui concerne les travaux de remise en état de l'enrochement et du parking :
Considérant que l'office n'a fait l'objet, par le jugement attaqué, d'aucune condamnation au titre des travaux de remise en état de l'enrochement et du parking ; qu'il n'est, dès lors, pas fondé à demander à être garanti du coût de ces travaux par la compagnie Allianz ;
En ce qui concerne les indemnités allouées aux époux A :
Considérant que le a) du A) de l'article 2 du titre III des conditions générales du contrat d'assurance souscrit par l'office prévoit que la compagnie Allianz doit supporter les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile pouvant incomber à l'assuré en raison des dommages notamment matériels et immatériels causés à autrui par un accident provenant de l'immeuble assuré ou de ses dépendances ; que la compagnie Allianz ne se prévaut d'aucune clause de limitation ou d'exclusion qui ferait totalement ou partiellement obstacle à ce qu'elle prenne en charge la somme de 6 708,70 euros que le Tribunal a condamné l'office à verser aux époux A au titre des travaux nécessaires au réaménagement des terres inondées de leur propriété et de leurs préjudices d'ordre personnel ; qu'il y a lieu, dès lors, de condamner la compagnie Allianz à garantir l'office du paiement de cette somme ; qu'en revanche, faute de stipulation du contrat en ce sens, la compagnie Allianz ne saurait garantir l'office du paiement des sommes que le Tribunal a mises à la charge de ce dernier au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ou de l'article R. 761-1 du même code ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, en l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par l'OPH DU CANTAL et par la SCP Espagne, Allegre et Echalier sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que les conclusions présentées sur ce même fondement par la compagnie Allianz ne peuvent qu'être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : L'article 5 du jugement du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 22 juin 2010 est annulé.
Article 2 : La compagnie Allianz est condamnée à garantir l'OPH DU CANTAL de la condamnation à payer la somme de 6 708,70 euros.
Article 3 : L'OPH DU CANTAL versera la somme de 1 000 euros aux époux A en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT DU CANTAL, à M. et Mme Louis A, à la société Allianz et à la SCP d'architectes Espagne,Allègre et Echalier.
Délibéré après l'audience du 1er septembre 2011 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
Mme Steck-Andrez, président-assesseur,
M. Picard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 septembre 2011.
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N° 10LY02063