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10/05/2011 | FRANCE | N°10LY02869

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 5, 10 mai 2011, 10LY02869


Vu la requête, enregistrée à la Cour par télécopie le 23 décembre 2010 et régularisée le 4 janvier 2011, présentée pour M. Sefik A, de nationalité turque, domicilié chez M. Mettin B, ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002022, en date du 2 juillet 2010, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère, du 12 avril 2010, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et d

signant le pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai...

Vu la requête, enregistrée à la Cour par télécopie le 23 décembre 2010 et régularisée le 4 janvier 2011, présentée pour M. Sefik A, de nationalité turque, domicilié chez M. Mettin B, ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002022, en date du 2 juillet 2010, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère, du 12 avril 2010, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, en cas d'annulation au fond, des décisions attaquées de lui délivrer un titre de séjour l'autorisant à travailler dans le délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, ou, en cas d'annulation pour un motif de forme desdites décisions, lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans le délai de trente jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que le refus de titre a été pris suite à un avis médical rendu par un médecin général de santé publique et non par un médecin inspecteur de santé publique ; que, dès lors, la décision litigieuse a suivi un avis dont la procédure était viciée ; que, par ailleurs, le refus de titre n'est pas assez motivé au sens des articles 1 et 3 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ; que le préfet a commis une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'en raison de son état de santé, ainsi que des soins et de la protection sociale en Turquie, le requérant pouvait bénéficier, au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'un titre de séjour ; que l'obligation de quitter le territoire méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'enfin, la décision fixant la Turquie comme pays de destination viole les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, compte tenu des risques que l'intéressé encourt en cas de retour ;

Vu, enregistré le 14 avril 2011, le mémoire en défense présenté par le préfet de l'Isère tendant au rejet de la requête par mêmes moyens que ceux qu'il a présentés en première instance ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 16 novembre 2011, rejetant la demande d'aide juridictionnelle de M. A ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 avril 2011 :

- le rapport de M. Bézard, président,

- et les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour :

Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent et qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ;

Considérant que la décision du préfet de l'Isère en date du 12 avril 2010 portant refus de délivrance de titre de séjour à M. A vise les articles L. 313-11, L. 511-1, L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade présentée par l'intéressé le 31 décembre 2009 et l'avis médical rendu le 2 mars 2010 par le médecin inspecteur de santé publique ; qu'elle mentionne, en outre, qu'il ne peut pas bénéficier d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d' asile et que sa situation a fait l'objet d'un examen particulier au regard des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle énonce ainsi clairement les éléments de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et doit, par suite, être regardée comme suffisamment motivée au regard des exigences de l'article 3 de la loi de 1979 susvisée ; qu'il y a lieu, dès lors, d'écarter le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision ;

Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que le médecin inspecteur de santé publique, Mme Isabelle Coudière, ait été inscrite au tableau d'avancement en qualité de médecin général de santé publique par arrêté du 9 février 2010, est sans incidence sur la régularité de la procédure relative à son avis rendu le 2 mars 2010 ; que dès lors, le moyen doit être écarté ;

Considérant en troisième lieu, qu'aux termes de l' article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire. (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité turque, souffre de troubles psychologiques qui nécessitent une prise en charge médicale, dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, si l'intéressé soutient qu'il ne peut pas bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine en raison de l'insuffisance de soins prodigués nécessaires à sa pathologie, le médecin inspecteur de santé publique, dans son avis rendu le 2 mars 2010, estime au contraire qu'il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié en Turquie ; que, si il allègue, par ailleurs, ne pas pouvoir bénéficier des soin réguliers en raison de la faiblesse de la protection sociale en Turquie, il n'apporte aucune pièce probante permettant d'apprécier la réalité de ces faits ; que, par suite, le préfet de l'Isère a pu légalement se fonder sur le motif tiré de ce que M. A pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine pour refuser de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que de même, il n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en prenant une décision de refus de titre au vu de l'examen de sa situation personnelle ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ;

Considérant que, pour les motifs indiqués ci-dessus, M. A n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire prise à son encontre le 12 avril 2010 a méconnu les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que M. A, de nationalité turque est entré en France en 2006 ; qu'il a sollicité son admission au titre de l'asile qu'il s'est vu refuser, une première fois, le 23 février 2007 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, refus confirmé par la Cour nationale du droit d'asile, le 18 décembre 2008 ; qu'il a, le 11 février 2009, sollicité le réexamen de sa situation par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, que toutefois, sa demande a été rejetée dans le cadre de la procédure du réexamen prioritaire ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'intéressé soutient avoir été agressé et menacé de mort par les forces de sécurité turques en raison de son adhésion au parti démocrate, le DEHAP ; qu'au cours d'une conférence, lors de la Semaine de la police, il aurait dénoncé les arrestations arbitraires et fait part de sa propre agression, il aurait alors été arrêté et maltraité ; qu'en outre, envisageant de ne pas effectuer son service militaire, alors qu'il devait y être appelé prochainement, il avait décidé de fuir son pays pour rejoindre la France ; que toutefois, le requérant n'apporte aucun élément probant à l'appui de ses allégations ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées par voie de conséquence ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions précitées s'opposent à ce que M. A, qui succombe dans l'instance, puisse obtenir le remboursement des frais non compris dans les dépens qu'il a exposés ;

DECIDE :

Article 1er : La requête n° 10LY02869 de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Sefik A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 19 avril 2011, à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Bézard, président,

M. Fontbonne, président-assesseur,

M. Chenevey et Mme Chevalier-Aubert, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 10 mai 2011

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N° 10LY02869


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 5
Numéro d'arrêt : 10LY02869
Date de la décision : 10/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Alain BEZARD
Rapporteur public ?: M. BESSON
Avocat(s) : AUDREY LEREIN ET CLEMENTINE FRANCES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-05-10;10ly02869 ?
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