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10/05/2011 | FRANCE | N°10LY00240

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 10 mai 2011, 10LY00240


Vu la requête, enregistrée à la Cour le 4 février 2010, présentée pour M. Hakob A, domicilié chez Forum Réfugiés, domiciliation n° 18478, B.P. 77412 à Lyon (69347) ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903956, en date du 29 septembre 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône, du 30 mars 2009, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel

il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'...

Vu la requête, enregistrée à la Cour le 4 février 2010, présentée pour M. Hakob A, domicilié chez Forum Réfugiés, domiciliation n° 18478, B.P. 77412 à Lyon (69347) ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903956, en date du 29 septembre 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône, du 30 mars 2009, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale , dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'au réexamen de son dossier ou, à titre infiniment subsidiaire, de lui délivrer une assignation à résidence dans le mois qui suit l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1000 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient que la décision de refus de délivrance de titre de séjour contestée est insuffisamment motivée au regard de son état de santé et de la possibilité qu'il aurait de se faire soigner en Arménie ; qu'elle a été prise sans examen préalable de son état de santé et que le préfet du Rhône, qui s'est estimé lié par l'avis émis par le médecin inspecteur de santé publique, a méconnu son pouvoir d'appréciation ; que l'avis émis par ce dernier aurait dû lui être communiqué ; que son état de santé fait obstacle à ce qu'il puisse voyager sans risque et que le préfet du Rhône n'apporte pas la preuve qui lui incombe qu'il est susceptible de recevoir des soins appropriés en Arménie, alors qu'il convient de prendre en compte le lien entre les troubles psychiatriques dont il est atteint et les évènements qu'il a vécus en Arménie, la nécessité pour lui de bénéficier d'un cadre sécuritaire alors que son pays représenterait un milieu pathogène, les certificats médicaux postérieurs à la décision en litige qu'il produit, ainsi que l'évolution prévisible de son état de santé à la date de cette décision ; que la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il est dépourvu d'attaches familiales en Arménie, où deux de ses enfants et sa mère sont décédés et où il n'a plus de contact avec son frère, lequel, ne supportant pas son mariage avec une ressortissante d'origine azérie, est à l'origine des coups ayant entraîné son traumatisme crânien, alors qu'il vit en France entouré de son épouse qui lui apporte son soutien et de leur enfant qui est parfaitement intégré et qu'il ne pourrait pas mener une vie privée et familiale normale en Arménie, où son épouse ne serait pas légalement admissible et où lui-même ne pourrait pas bénéficier de soins appropriés ; que, par suite, la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'obligation de quitter le territoire français qui lui est faite est privée de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour qui la fonde ; que la décision fixant le pays de renvoi est insuffisamment motivée ; que le préfet du Rhône s'est estimé lié par le rejet opposé à sa demande d'asile ; qu'il a été agressé par son frère et des nationalistes arméniens en raison des origines azéries de son épouse ; que cette dernière a, elle aussi, subie une violente agression et que les forces de police arméniennes ne leur ont pas apporté leur protection ; que les tensions ethniques demeurent vives en Arménie ; qu'ainsi, la décision désignant ce pays comme destination de la mesure d'éloignement prise à son encontre méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 25 juin 2010, présenté pour le préfet du Rhône, qui conclut au rejet de la requête et demande la mise à la charge du requérant de la somme de mille euros, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient, à titre principal, que la requête est irrecevable en l'absence de moyen d'appel ; à titre subsidiaire, que sa décision portant refus de titre de séjour est régulièrement motivée ; qu'il n'avait pas à communiquer au requérant l'avis rendu par le médecin de l'agence régionale de santé ; que M. A ne peut pas utilement se prévaloir de l'évolution de son état de santé postérieurement à l'arrêté litigieux ; qu'il n'établit pas l'existence d'un lien direct de causalité entre les troubles dont il souffre et des évènements qu'il aurait vécus en Arménie, dès lors qu'il ne justifie pas des persécutions qu'il allègue avoir subies ; que les pièces médicales qu'il produit n'attestent pas d'une indisponibilité des soins requis en Arménie ; que son épouse et son fils ne disposent pas d'un droit au séjour en France et que l'arrêté litigieux ne méconnaît donc pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision de refus de titre de séjour étant valide, M. A n'est pas fondé à se prévaloir de sa prétendue illégalité pour contester la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; que la décision fixant le pays de destination est régulièrement motivée et que, faute pour le requérant d'établir la réalité des risques qu'il encourrait dans son pays d'origine, cette même décision ne méconnaît ni l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale ni l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers prévus à l 'article 7-5 du décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 avril 2011 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- les observations de Me Fréry, avocat de M. A,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée à nouveau à Me Fréry ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet du Rhône ;

Sur la légalité du refus de délivrance de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, que la décision du 30 mars 2009 portant refus de délivrance d'un titre de séjour à M. A indique notamment que ce dernier, de nationalité arménienne, entré en France le 26 mars 2006, selon ses déclarations, a, par courrier du 6 juin 2008, sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'après avis du médecin inspecteur de santé publique, il apparaît qu'il peut effectivement bénéficier, dans son pays d'origine, d'un traitement approprié à son état de santé et qu'il ne remplit donc pas les conditions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour se voir délivrer un titre de séjour sur ce fondement ; qu'il résulte de ce qui précède que cette décision énonce ainsi les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et est, par suite, régulièrement motivée ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des mentions de l'arrêté contesté que le préfet du Rhône, qui a examiné, avant de l'écarter, la possibilité de faire bénéficier l'intéressé d'une mesure dérogatoire, ne s'est pas estimé en situation de compétence liée du fait de l'avis émis par le médecin inspecteur de santé publique pour refuser la délivrance d'un titre de séjour à M. A et n'a donc pas méconnu l'étendue de son pouvoir d'appréciation ;

Considérant, en troisième lieu, que si M. A soutient que l'avis rendu par le médecin inspecteur de santé publique aurait dû lui être communiqué, aucune disposition n'impose au préfet de communiquer au demandeur d'un titre de séjour étranger malade l'avis du médecin inspecteur de santé publique ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11°) A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire (...) ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : (...) le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin inspecteur de la santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la population et des migrations, du ministre chargé de la santé et du ministre de l'intérieur, au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ; qu'enfin, aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 8 juillet 1999 : Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin inspecteur de la santé publique (...) émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - si l'intéressé peut effectivement ou non bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire ; - et la durée prévisible du traitement. / Il indique, en outre, si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers son pays de renvoi (...) ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires qui ont précédé l'adoption de la loi du 11 mai 1998, dont sont issues les dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l' article R. 313-22 précité, que cette décision ne peut pas avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ; que si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut pas en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, arrivé en France le 26 mars 2006, selon ses déclarations, a sollicité, en 2008, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par décision du 30 mars 2009, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer ce titre de séjour, après que le médecin inspecteur de santé publique a considéré, par avis rendu le 8 octobre 2008, que l'état de santé de M. A nécessitait une prise en charge médicale de longue durée, dont le défaut pouvait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que l'intéressé pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, vers lequel il pouvait voyager sans risque, avec son traitement ; qu'il ressort des pièces médicales produites par M. A, que ce dernier a subi un traumatisme crânien en 2000 en Arménie, est suivi depuis le mois d'août 2008, en France, pour une pathologie psychotique et souffre de crises comitiales, que le traitement médicamenteux prescrit n'est pas suivi de façon rigoureuse et que la prise en charge médicale est rendue difficile par l'absence de maîtrise de la langue française par l'intéressé, lequel ne parle ni ne comprend cette langue ; que les pièces médicales versées au dossier par le requérant, qui, pour certaines, se bornent à affirmer, sans autre précision, qu'il ne pourra pas bénéficier, en Arménie, de la prise en charge médicale de longue durée requise ou que le traitement ne serait probablement pas accessible ou paraît impossible en Arménie, voire, s'agissant du rapport d'examen médical établi le 29 mai 2009 par un neuro-psychiatre, que les possibilités réelles de traitement dans le pays d'origine sont ignorées du praticien, ne permettent pas de remettre en cause l'avis susmentionné émis par le médecin inspecteur de santé publique quant à la disponibilité des soins en Arménie ; qu'en outre, la possible dégradation de l'état de santé de M. A, postérieurement à l'édiction de la décision contestée, est, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de cette décision, qui doit s'apprécier à la date à laquelle elle a été édictée ; que, par ailleurs, si M. A fait état d'un lien direct existant entre les pathologies dont il souffre et des événements traumatisants qu'il aurait vécus en Arménie en 2000, où il aurait été frappé à la tête par son frère, nationaliste arménien, qui ne supportait pas que sa belle-soeur soit d'origine azérie, il ne ressort pas des pièces du dossier que, dans les circonstances de l'espèce, à la supposer établie, cette circonstance fasse obstacle à ce que M. A puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié en Arménie ; qu'enfin, si plusieurs certificats médicaux font état, contrairement à l'avis rendu sur ce point par le médecin inspecteur de santé publique, de l'impossibilité, pour M. A, de voyager sans risque vers l'Arménie, cette circonstance, qui ne constitue pas une condition d'attribution de la carte de séjour temporaire prévue par les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut pas être utilement invoquée à l'appui du moyen tiré de la violation de ces dispositions par la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour sur ce fondement ; qu'il résulte de ce qui précède qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A soit fondé à soutenir que la décision du 30 mars 2009 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour méconnaît les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, ressortissant arménien né le 24 janvier 1955, est entré irrégulièrement sur le territoire français à la date déclarée du 26 mars 2006, soit trois ans avant la décision contestée ; qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, son état de santé n'exige pas des soins qui ne pourraient lui être effectivement prodigués qu'en France ; qu'il s'est vu notifier, après le rejet de sa demande d'asile, une première obligation de quitter le territoire français en date du 10 mai 2007, qui n'a pas été exécutée ; que si son épouse et son fils, né en 1990, vivent avec lui en France, aucun d'entre eux ne dispose d'un droit au séjour sur le territoire français ; que si son épouse est née en Azerbaïdjan le 1er janvier 1964, il ressort des écritures du requérant qu'elle est partie vivre en Arménie avec ses parents dès l'âge d'un an et qu'elle a vécu jusqu'en 2000 dans ce pays, où il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle ne serait pas admissible ; que si M. A soutient qu'ils ont dû quitter l'Arménie pour la Géorgie, où ils ont rejoint la soeur de son épouse, au cours de l'année 2000, en raison des menaces et violences exercées par son frère, arménien nationaliste, qui ne supportait pas que sa belle-soeur soit d'origine azérie, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant soit dans l'impossibilité d'avoir, hors de France, et notamment en Arménie, une vie privée et familiale similaire à celle qu'il mène sur le territoire français ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision de refus de titre de séjour contestée n'a pas porté au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus ; qu'elle n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant que M. A, qui se borne à exciper de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire français, n'est pas fondé, eu égard à ce qui précède, à invoquer l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la mesure d'éloignement prise à son encontre ;

Sur la légalité de la décision désignant le pays de destination de la mesure d'éloignement :

Considérant, en premier lieu, que cette décision est suffisamment motivée en droit par le visa des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoient que la décision portant obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire ; que cette décision est suffisamment motivée en fait par l'indication que M. A est de nationalité arménienne et qu'il pourra être reconduit d'office à la frontière du pays dont il a la nationalité ou de tout autre pays où il établirait être légalement admissible ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. et que ce dernier texte énonce que Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou de groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;

Considérant que M. A soutient qu'il a été contraint de quitter l'Arménie pour se réfugier auprès de sa belle-soeur en Géorgie, au cours de l'année 2000, consécutivement aux menaces et agressions dont sa compagne, son fils et lui-même avaient été victimes de la part de son frère, arménien nationaliste, qui ne supportait pas les origines azéries de son épouse, et faute pour eux de parvenir à obtenir la protection des autorités policières ; que M. A n'établit toutefois pas, par son récit et les pièces qu'il produit, l'existence de menaces et de risques personnels et actuels auxquels il serait exposé en cas de retour en Arménie ; que, par suite, en désignant ce pays comme destination de la mesure d'éloignement prise à son encontre, le préfet du Rhône, qui ne s'est pas estimé lié par le rejet opposé à la demande d'asile, n'a méconnu, ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

Sur les conclusions du préfet du Rhône tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A quelque somme que ce soit au profit de l'Etat, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le préfet du Rhône sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Hakob A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 27 avril 2011 à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Givord, président-assesseur,

M. Seillet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 mai 2011,

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N° 10LY00240


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY00240
Date de la décision : 10/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : FRERY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-05-10;10ly00240 ?
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