Vu la requête, enregistrée le 4 mars 2010, présentée Mme Charlotte A domiciliée ... ;
Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0707048 du Tribunal administratif de Lyon du 17 décembre 2009 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 septembre 2007 par lequel le maire de la commune de Bonson (Loire) a refusé de lui délivrer un permis de construire une maison d'habitation ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au maire de la commune de Bonson de lui délivrer le permis de construire demandé, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de condamner la commune de Bonson à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La requérante soutient que :
- elle a sollicité la délivrance d'un permis de construire une maison d'habitation en raison de sa nécessaire présence permanente sur les lieux de son exploitation, comme l'indique le courrier annexé à sa demande ; que, par suite, en rejetant son recours en raison d'une prétendue absence de démonstration de la nécessité de sa présence sur place, le Tribunal a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
- le maire a entaché son refus d'illégalité en se croyant, à tort, lié par les avis émis par le directeur départemental de l'agriculture et de la forêt et par la chambre d'agriculture de la Loire, dès lors qu'aucune disposition ne subordonne la délivrance du permis à des avis conformes de ces autorités ;
- en se bornant à reprendre les avis du directeur départemental de l'agriculture et de la forêt et de la chambre d'agriculture de la Loire, le maire de la commune de Bonson n'a pas motivé sa décision au regard des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 ;
- l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme énumère de façon limitative les pièces exigibles à l'appui d'une demande de permis de construire ; que le maire a exigé qu'elle remplisse une fiche de renseignements complémentaires ; qu'en exigeant une pièce non prévue par l'article R. 421-2, au regard de laquelle l'arrêté attaqué a été pris, le maire a entaché sa décision d'illégalité ;
- reprenant l'avis de la chambre d'agriculture, le maire a refusé de délivrer le permis demandé en raison du fait que, compte tenu de son âge, la construction serait réalisée en vue de sa retraite ; que, toutefois, aucune considération d'âge ne peut être prise en compte ; qu'au jour de la demande et encore aujourd'hui, elle justifie avoir le statut d'exploitant agricole ; que, dès lors, le maire a entaché son arrêté d'illégalité ; qu'en outre, les avis sur lesquels le maire s'est fondé ont été pris au regard d'une pièce illégalement demandée ; que l'arrêté attaqué est dès lors également entaché d'une erreur de droit ;
- en estimant que la maison d'habitation projetée ne semble pas nécessaire à l'activité agricole, le maire a commis une erreur manifeste d'appréciation ; que la culture maraîchère spécialisée de plein champ dans deux serres plastiques nécessite une attention particulière qui rend indispensable sa présence permanente sur place ; qu'en période hivernale, elle doit être présente très tôt le matin, pour lever les protections contre le gel et favoriser la photosynthèse ; qu'en période estivale, elle doit être présente tard le soir, pour procéder aux traitements des plantations ; que sa présence est également indispensable pour assurer l'irrigation de l'ensemble des parcelles et gérer la quantité d'eau apportée à chaque plantation ; que l'exploitation ne dispose que d'une seule bouche d'eau, ce qui impose plusieurs changements de réseaux pour assurer l'irrigation de l'ensemble des cultures ; que l'existence d'une culture spécialisée nécessite une présence constante, pour le soin des plantations, particulièrement sensibles, face aux aléas climatiques ; que, par ailleurs, elle élève des volailles et des lapins, ce qui rend également nécessaire sa présence sur place, pour vérifier leur état de santé, les panser et les nourrir tout au long de la journée ; qu'enfin, pour la vente des produits sur les marchés, elle doit être présente sur place dès cinq heures du matin ; que pour la vente sur l'exploitation, sa présence est nécessaire aux heures des repas, pendant lesquelles les acheteurs peuvent se libérer ; que, dans ces conditions, sa demande de permis de construire remplit les conditions fixées à l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols ;
- en application des dispositions des articles L. 911-1 et L. 911-3 du code de justice administrative, la Cour devra enjoindre à la commune de lui délivrer le permis de construire demandé, sous astreinte ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 20 septembre 2009, présenté pour la commune de Bonson qui demande à la Cour :
- de rejeter la requête ;
- de condamner la requérante à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La commune soutient que :
- Mme A, qui exerce son activité depuis 1989, soit depuis plus de 20 ans, en habitant à 2 km de son exploitation, ne démontre toujours pas la nécessité de sa présence permanente sur place ; que les premiers juges n'ont donc commis aucune erreur d'appréciation en rejetant la demande d'annulation de l'arrêté attaqué ;
- le maire a procédé à un examen particulier des circonstances de l'espèce, sans se croire lié par les appréciations de la direction départementale de l'agriculture et de la chambre d'agriculture ; qu'il a pleinement exercé sa compétence ; qu'en tout état de cause, la décision du maire se fonde sur les dispositions de l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols ;
- l'arrêté attaqué, qui énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde, est suffisamment motivé au regard des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 ;
- le formulaire rempli par l'intéressée a été joint à la demande de permis afin de démontrer que le projet remplit les conditions fixées par l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols ; qu'il appartient à Mme A d'apporter cette preuve ; que rien n'établit que le maire ait exigé que ledit formulaire soit joint à la demande ;
- l'arrêté litigieux ne se fonde pas sur l'âge de Mme A ; qu'en tout état de cause, cet arrêté se fonde également sur d'autres motifs, tirés du non-respect des dispositions de l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols, la nécessité de la présence permanente sur place n'étant pas démontrée et la condition d'exploitation pendant trois ans d'une demie SMI n'étant pas remplie ; qu'elle invoque une substitution de motif, dès lors que le maire aurait pris le même décision en se fondant sur la seule méconnaissance de ces dispositions ;
- les dispositions de l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols sont d'interprétation stricte et il appartient à Mme A d'apporter la preuve que son exploitation nécessite sa présence permanente sur place ; que l'intéressée exerce son activité depuis plus de 20 ans sans habiter sur place ; que le seul fait d'être en charge d'une culture maraîchère ne nécessite pas, ipso facto, une présence permanente ; que la nécessité d'une présence permanente pour assurer l'irrigation de l'exploitation et l'activité d'élevage de volailles et de lapins n'est pas démontrée ; que la requérante n'explique pas pour quelles raisons les aléas climatiques nécessitent sa présence permanente sur place, depuis l'année 2006 seulement ; qu'il en est de même s'agissant de l'activité de vente sur place ; qu'ainsi, Mme A n'établit pas que les conditions posées par les dispositions de l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols sont remplies ;
- la demande d'injonction sous astreinte devra être rejetée en raison du rejet des conclusions à fin d'annulation ; qu'en tout état de cause, l'annulation du permis attaqué n'impliquerait pas la délivrance du permis demandé ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 3 novembre 2010, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 décembre 2010 ;
Vu le mémoire, enregistré le 5 novembre 2010, présenté pour Mme A, tendant aux mêmes fins que précédemment ;
La requérante soutient, en outre, que :
- sa mère, qui réside à proximité immédiate de l'exploitation, ne peut plus désormais compte tenu de son âge et de son état de santé, assurer une présence permanente sur place, comme cela était le cas antérieurement, depuis 1989 ; qu'en outre, en raison tant des changements climatiques avérés que de l'étendue de l'exploitation, l'irrigation nécessite une présence permanente sur place ; que le Tribunal a ainsi commis une erreur d'appréciation en rejetant sa demande ;
- le maire ayant méconnu sa propre compétence, la Cour ne pourra faire droit à la substitution de motif sollicitée par la commune en défense ;
- la nécessité de sa présence sur l'exploitation doit être appréciée globalement, compte tenu de l'ensemble des contraintes auxquelles elle doit faire face et pour lesquelles sa mère ne peut plus l'aider ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative, et notamment son article R. 613-3, en application duquel le mémoire produit le 17 février 2011 pour la commune de Bonson, après la clôture de l'instruction, n'a pas été examiné par la Cour ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er mars 2011 :
- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;
- les observations de Me Duverneuil, avocat de Mme A, et celles de Me Mouseghian, avocat de la commune de Bonson ;
- les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;
- la parole ayant à nouveau été donnée aux parties présentes ;
Considérant qu'aux termes de l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Boson : 1.2 Ne sont admises que les occupations et utilisations du sol ci-après : / (...) 1.2.2 Les constructions à usage d'habitation liées à une exploitation agricole sous réserve des conditions fixées au § 1.3.1 / (...) 1.3.1 Les constructions à usage d'habitation ne sont admises que si elles sont liées à une exploitation agricole : / * Lien avec l'exploitation agricole : les locaux à usage d'habitation doivent être justifiés par la présence permanente d'un exploitant ou d'un salarié agricole sur les lieux de son activité (...) / * Caractère de l'exploitation agricole : l'exploitation doit mettre en valeur une superficie égale ou supérieure à la moitié de la surface d'installation définie par arrêté ministériel pour le département. Si l'exploitation agricole comporte des cultures ou élevages spécialisés, les coefficients d'équivalence ne pourront être appliqués à ces critères que si l'exploitation a été mise en valeur depuis plus de trois ans, sauf si le demandeur est bénéficiaire de DJA. / * Définition de l'exploitant agricole : l'exploitant doit mettre en valeur une exploitation agricole telle qu'elle est définie ci-dessus. Il doit en outre bénéficier des prestations de l'assurance maladie des exploitants agricoles (AMEXA) (...) ;
Considérant qu'il ressort des termes de l'arrêté attaqué, éclairés par les écritures en défense de la commune de Bonson (Loire), que, pour rejeter la demande de permis de construire une maison d'habitation présentée par Mme A, le maire de cette commune s'est fondé sur les motifs tirés de ce que, contrairement à ce qu'exigent les dispositions précitées de l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols, en premier lieu, la nécessité d'une présence permanente sur l'exploitation agricole n'est pas démontrée, en deuxième lieu, la justification de la mise en valeur d'une superficie égale ou supérieure à la moitié de la surface d'installation n'est pas apportée, et, enfin, sur ce que, compte tenu de l'âge de Mme A, la construction est, en réalité, réalisée en vue de la retraite de l'intéressée ;
Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté litigieux manque en fait, cet arrêté mentionnant l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols et citant les avis de la direction départementale de l'agriculture et de la chambre d'agriculture de la Loire, dont le maire a entendu s'approprier la teneur ;
Considérant, en deuxième lieu, que la requérante fait valoir que l'article R. 421-2 alors applicable du code de l'urbanisme énumérant de façon limitative les pièces exigibles à l'appui d'une demande de permis de construire, le maire ne pouvait lui imposer de produire une fiche de renseignements complémentaires, pour justifier du fait qu'elle remplit les conditions posées par l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols ; que ce moyen est inopérant, l'arrêté attaqué ne se fondant pas sur le fait que l'intéressée s'est abstenue de produire une pièce demandée lors de l'instruction de la demande ; qu'en outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'administration aurait imposé à Mme A la production d'une pièce non prévue par les dispositions de l'article R. 421-2 ;
Considérant, en troisième lieu, que, dans son arrêté attaqué, après avoir mentionné les dispositions de l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols, le maire a cité l'avis du 17 août 2007 de la direction départementale de l'agriculture et l'avis du 23 août 2007 de la chambre d'agriculture de la Loire, avant d'indiquer que, dans ces conditions, les dispositions susvisées ne sont pas respectées ; que les pièces du dossier, et notamment les termes d'une décision du 17 avril 2007 rejetant le recours gracieux de Mme A dirigé contre un précédent refus de permis de construire, ne font pas ressortir que le maire de la commune de Bonson aurait méconnu l'étendue de sa compétence et se serait cru, à tort, lié par les avis émis sur les demandes de permis, et notamment par les avis précités émis sur la demande litigieuse ; que l'arrêté attaqué n'est donc pas entaché d'une erreur de droit ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'en l'absence de fraude, le maire ne pouvait légalement se fonder sur le fait que, compte tenu de l'âge de Mme A, la construction serait en réalité réalisée en vue de la retraite de cette dernière, cette circonstance étant sans rapport avec les conditions d'application de l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols, qui exige seulement que l'intéressé ait la qualité d'exploitant agricole au moment de la délivrance du permis ;
Considérant, en cinquième lieu, que, pour justifier du fait que sa présence permanente sur place est nécessaire à la conduite de son exploitation agricole, Mme A fait valoir, notamment, que la culture maraîchère, et en particulier la culture spécialisée en serre, nécessite une attention particulière, qu'elle doit assurer l'irrigation de l'ensemble des parcelles et gérer la quantité d'eau apportée aux cultures, qu'elle doit vérifier l'état de santé des volailles et des lapins qu'elle élève et les nourrir tout au long de la journée, que, pour la préparation des produits agricoles vendus sur les marchés, elle doit être présente sur place dès cinq heures du matin, et, enfin, qu'elle réalise également des ventes sur l'exploitation, ce qui nécessite sa présence aux heures des repas, qui sont celles pendant lesquelles les acheteurs peuvent se libérer ; que, toutefois, les allégations de la requérante ne s'appuient sur aucun élément précis de justification, s'agissant notamment des contraintes particulières que génèrerait en l'espèce la culture maraîchère ; qu'en se bornant à sommairement invoquer le fait que sa mère, qui réside à proximité de l'exploitation, ne pourrait plus l'aider dans la conduite de cette dernière, après avoir initialement invoqué l'aide d' un voisin membre de la famille , Mme A n'explique pas d'une manière convaincante pour quelles raisons, alors qu'elle exerce son activité depuis 1989 en ne résidant pas sur place, sa présence permanente sur l'exploitation serait désormais devenue nécessaire ; que, dans ces conditions, en estimant que, contrairement à ce qu'imposent les dispositions de l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols, Mme A ne justifie pas de la nécessité de sa présence permanente sur les lieux de l'exploitation, le maire de la commune de Bonson n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que seul le motif fondé sur l'âge de Mme A est entaché d'illégalité ; qu'il résulte de l'instruction que, indépendamment même du 3ème motif précité de la décision attaquée, qui n'est pas contesté, le maire aurait pris la même décision s'il s'était fondé sur le motif tiré de ce que la nécessité d'une présence permanente de l'intéressée sur l'exploitation n'est pas démontrée ; que, par suite, le requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;
Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; qu'il y a lieu, en conséquence, de rejeter les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par Mme A ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Bonson, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamnée à payer à la requérante la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme A le versement d'une somme quelconque au bénéfice de cette commune sur le fondement de ces mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Bonson tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Charlotte A et à la commune de Bonson.
Délibéré après l'audience du 1er mars 2011 à laquelle siégeaient :
M. Bézard, président de chambre,
M. Fontbonne, président-assesseur,
M. Chenevey, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 7 mars 2011.
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N° 10LY00626
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