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28/12/2010 | FRANCE | N°08LY01687

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 28 décembre 2010, 08LY01687


Vu la requête, enregistrée le 21 juillet 2008, présentée pour la COMMUNE DE SENS (Yonne) ;

La COMMUNE DE SENS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601302 du Tribunal administratif de Dijon

du 15 mai 2008 qui, à la demande de M. A, a annulé l'arrêté du 14 mars 2006 par lequel son maire a délivré un permis de construire à M. B ;

2°) de rejeter la demande de M. A devant le Tribunal administratif ;

3°) de condamner M. A à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La

commune soutient que :

- en retenant le moyen tiré de la violation de l'article UB 4 du règlement ...

Vu la requête, enregistrée le 21 juillet 2008, présentée pour la COMMUNE DE SENS (Yonne) ;

La COMMUNE DE SENS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601302 du Tribunal administratif de Dijon

du 15 mai 2008 qui, à la demande de M. A, a annulé l'arrêté du 14 mars 2006 par lequel son maire a délivré un permis de construire à M. B ;

2°) de rejeter la demande de M. A devant le Tribunal administratif ;

3°) de condamner M. A à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune soutient que :

- en retenant le moyen tiré de la violation de l'article UB 4 du règlement du plan d'occupation des sols, le Tribunal a commis une erreur de droit ; qu'il n'existe aucune obligation légale de raccordement au réseau pour l'évacuation des eaux pluviales ; que, si le règlement prévoit une obligation de raccordement, c'est à la condition implicite qu'il existe un réseau collectif susceptible de recueillir les eaux pluviales ; que, dans le cas contraire, le terrain n'est pas inconstructible, le permis pouvant être assorti d'une prescription palliant l'absence de réseau ; qu'en l'espèce, le terrain n'étant pas desservi par un réseau destiné à recueillir les eaux pluviales, l'arrêté litigieux prescrit que les eaux pluviales devront être raccordées en puisard ; que le projet répond à cette prescription ;

- le signataire du permis de construire attaqué dispose d'une délégation de signature régulière, du 2 avril 2001, laquelle a été transmise en sous-préfecture le 6 avril 2001, a été affichée à cette même date et a été publiée au recueil des actes administratifs de la commune au second semestre 2001 ;

- le projet répond aux dispositions du 5° de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme ; qu'en effet, si les points et angles des prises de vues ne sont pas reportés sur le plan de masse et le plan de situation, il est néanmoins aisé, s'agissant de l'extension d'une construction existante, de repérer les lieux des différentes prises de vue ; que la localisation des points retenus est pertinente et les photographies sont de très bonne qualité ; que le service instructeur a pu apprécier de façon satisfaisante le contexte dans lequel s'inscrit le projet ;

- le plan de prévention des risques d'inondation n'était pas annexé au plan d'occupation des sols à la date de délivrance du permis de construire litigieux ; qu'en application de l'article L. 126-1 du code de l'urbanisme, ce plan n'était donc pas opposable ; que, subsidiairement, ce permis est assorti de prescriptions spéciales ; que le plancher de l'extension se situe à la cote de 66,50 NGF ; qu'aucun sous-sol n'est créé ; que le permis est assorti des prescriptions qui ont été émises par le service de la navigation dans son avis du 10 mars 2006 ; que les travaux autorisés ne sont pas de nature à aggraver la situation au regard des crues ou à porter atteinte à la sécurité ou à la salubrité publique ;

- le secteur dans lequel se situe le projet ne présente aucun intérêt particulier ; que le projet consiste en une simple extension, sans surélévation, et ne diffère pas des constructions environnantes, constituées de pavillons de styles divers ; qu'il ne méconnaît donc pas l'article

R. 111-21 du code de l'urbanisme ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 11 mai 2009, présenté pour M. A, qui demande à la Cour :

- de rejeter la requête ;

- de condamner la COMMUNE DE SENS à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A soutient que :

- s'il est vrai qu'il n'existe pas d'obligation légale de raccordement au réseau pour les eaux pluviales, une telle obligation peut être prescrite par le plan d'occupation des sols ; que l'article UB 4 du règlement du plan d'occupation des sols de la COMMUNE DE SENS, qui est dépourvu de toute ambiguïté, impose un raccordement au réseau pour les eaux pluviales ; qu'aucune exception n'est énoncée ; qu'il n'est pas contesté qu'il existe bien en l'espèce un réseau d'assainissement, auquel toutes les constructions doivent être raccordées, y compris pour l'évacuation des eaux pluviales ; que le règlement ne comporte aucune condition implicite d'existence d'un réseau susceptible de recueillir les eaux de pluie, toutes les eaux devant faire l'objet d'une collecte dans le réseau d'assainissement ; qu'ainsi, comme le Tribunal l'a jugé, le maire ne pouvait prescrire l'évacuation des eaux pluviales dans un puisard ;

- subsidiairement, à supposer même que la réglementation locale soit subordonnée à la réalisation effective d'un réseau de collecte des eaux pluviales, distinct du réseau d'assainissement, le projet litigieux n'aurait pas pour effet de rendre la construction existante, qui elle-même n'est pas raccordée à un réseau autonome de collecte des eaux pluviales, plus conforme aux prescriptions de l'article UB 4 du règlement ; que ce projet n'est, par ailleurs, pas étranger aux dispositions méconnues, dès lors qu'il aura pour effet d'accroître l'emprise au sol et, par suite, la part des eaux de ruissellement ;

- la nouvelle demande de permis, censée régulariser l'existant, aurait dû porter sur toute la construction, y compris sur la partie irrégulièrement édifiée du fait de l'annulation précédente du permis de construire ; que le projet litigieux diffère de la construction qui a été effectivement réalisée, laquelle comporte une terrasse de 30 m² ; que le pétitionnaire aurait dû mettre l'existant en conformité avec sa demande de permis, ou déposer une demande ayant le même objet que la précédente, ce qui est toutefois exclu de fait de l'autorité de chose jugée s'attachant au jugement d'annulation du 30 décembre 2005 ; que, par suite, le maire ne pouvait légalement délivrer un permis de régularisation portant sur un projet substantiellement différent de l'existant ;

- le permis attaqué a été délivré sur la base d'une demande comportant des documents imprécis, difficilement compréhensibles et parfois contradictoires ; qu'ainsi, le permis mentionne que la surface hors oeuvre nette est supérieure à la surface hors oeuvre brute ; que la surface des bâtiments existants a varié ;

- contrairement à ce qu'impose le 5° de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme, les points et angles des prises de vue ne sont pas reportés sur le plan de masse et le plan de situation ;

- il ne ressort pas des pièces du dossier que le permis de construire attaqué a été signé par une personne bénéficiant d'une délégation régulière de signature, préalablement publiée, notamment au Recueil des actes administratifs de la commune ;

- le permis de construire attaqué a été délivré en méconnaissance des dispositions du plan de prévention des risques naturels prévisibles qui a été approuvé par le préfet de l'Yonne le 4 septembre 2001 et qui était bien opposable à la date de délivrance du permis ; qu'en effet, l'emprise au sol totale est de 169,37 m², pour un terrain d'une superficie de 347 m², ce qui est supérieur à la limite de 30 % imposée par l'article 4.2 de cette réglementation ; que le plan de prévention des risques naturels prévoit également que les constructions existantes implantées en zone bleue peuvent se voir adjoindre une extension, dans la limite le plus favorable entre, d'une part, le plafond défini précédemment, et, d'autre part, 20 m² d'emprise au sol ; que le projet autorisé, de 77 m², viole ces deux dispositions, la construction existante étant de 89 m² ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 30 décembre 2009, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 février 2010 ;

Vu les mémoires, enregistrés les 10 février et 9 avril 2010, présentés pour la COMMUNE DE SENS, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

La commune soutient, en outre, que :

- contrairement à ce que prétend M. A, il n'existait pas dans la rue Paul Malluile un système d'assainissement de type unitaire permettant l'évacuation des eaux usées et des eaux pluviales ; que le réseau, strictement dimensionné pour recevoir les effluents usés, est inapte à recevoir les eaux pluviales ; qu'il était donc techniquement impossible de permettre l'évacuation des eaux de pluie dans le réseau d'assainissement, ce qui a justifié l'édiction d'une prescription particulière ;

- la construction existante n'est pas raccordée, pour l'évacuation des eaux de pluie, au réseau d'assainissement ; que les travaux autorisés n'auront pas pour conséquence d'aggraver les conditions d'évacuation des eaux pluviales ; que la terrasse a été supprimée ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 12 avril 2010, la clôture de l'instruction a été reportée au 28 avril 2010 ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 avril 2010, présenté pour M. A, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

M. A soutient, en outre, que :

- si l'article L. 123-12 du code de l'urbanisme dispose que, dans les communes non couvertes par un schéma de cohérence territoriale, le plan local d'urbanisme devient exécutoire un mois suivant sa transmission au préfet, la COMMUNE DE SENS n'établit pas, ni même n'allègue, que son territoire n'était pas couvert par un tel schéma au moment de l'approbation de son plan local d'urbanisme ; que, par suite, le plan de prévention des risques naturels était bien opposable à la date du permis de construire attaqué ;

- pour les raisons déjà indiquées, le permis de construire litigieux a été délivré en contrariété manifeste des prescriptions du plan de prévention des risques naturels ; que, par ailleurs, les règles en cause étaient déjà suffisamment avancées ; que, par suite, en application du 2ème alinéa de l'article L. 123-6 du code de l'urbanisme, le maire était tenu de surseoir à statuer sur la demande de M. B ; qu'en s'abstenant de prendre une décision de sursis à statuer, le maire a entaché son arrêté attaqué d'une erreur manifeste d'appréciation ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 30 avril 2010, la clôture de l'instruction a été reportée au 28 mai 2010 ;

Vu le mémoire, enregistré le 27 mai 2010, présenté pour M. A, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

M. A soutient, en outre que :

- la COMMUNE DE SENS ne saurait se prévaloir de l'état existant des canalisations pour se soustraire aux obligations qui s'imposent à elle en application de l'article 4 du règlement de zone du plan local d'urbanisme ; que la commune commet une erreur de droit en contestant le jugement attaqué au motif qu'il n'existait pas de réseau unitaire de collecte des eaux usées et des eaux pluviales ;

- à supposer même que la terrasse ait bien été supprimée, l'extension, de 77 m², de l'emprise au sol entraînera une aggravation des dispositions d'urbanisme méconnues ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 décembre 2010 :

- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;

Considérant que, par un arrêté du 14 mars 2006, le maire de la COMMUNE DE SENS a délivré un permis de construire à M. B, pour l'extension d'une maison d'habitation ; que, par un jugement du 15 mai 2008, le Tribunal administratif de Dijon a annulé ce permis de construire ; que la commune relève appel de ce jugement ;

Considérant que le conseil municipal de la COMMUNE DE SENS a adopté un plan local d'urbanisme par une délibération du 27 février 2006 ; que ce plan n'était toutefois pas encore entré en vigueur le 14 mars 2006, date de délivrance du permis de construire litigieux, dès lors qu'il est en effet constant que la publication dans la presse prescrite par l'article

R. 123-25 du code de l'urbanisme n'est intervenue que le 17 mars 2006 ; qu'aux termes de l'article UB 4 du règlement du plan d'occupation des sols : Toute construction ou installation doit évacuer ses eaux usées et pluviales par des canalisations souterraines raccordées au réseau d'assainissement, conformément à la réglementation en vigueur. / Le branchement sur le réseau d'assainissement est obligatoire ;

Considérant que, si la COMMUNE DE SENS fait valoir qu'il n'existe aucune obligation légale de raccordement au réseau public pour l'évacuation des eaux pluviales, les dispositions précitées du règlement du plan d'occupation des sols, qui sont claires et, dès lors, n'impliquent aucun interprétation, imposent d'évacuer les eaux pluviales dans le réseau d'assainissement ; que, si la commune fait également valoir que le réseau d'assainissement passant au droit du terrain d'assiette du projet ne dispose pas d'une capacité permettant de recueillir les eaux de pluie du projet, le maire ne pouvait en conséquence, par application de ces dispositions, que rejeter la demande de permis de M. B, mais non autoriser l'évacuation des eaux pluviales du projet dans un puisard ; que, par suite, le permis de construire litigieux ne respecte pas l'article UB 4 précité du règlement du plan d'occupation des sols ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE SENS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a annulé le permis de construire que son maire a délivré le 14 mars 2006 à M. B ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. A, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamné à payer à la COMMUNE DE SENS la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu de mettre à la charge de cette commune le versement d'une somme de 1 200 euros au bénéfice de M. A sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE SENS est rejetée.

Article 2 : La COMMUNE DE SENS versera à M. A une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE SENS et à M. Patrice C.

Délibéré après l'audience du 7 décembre 2010, à laquelle siégeaient :

M. Bézard, président de chambre,

M. Fontbonne, président-assesseur,

M. Chenevey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 décembre 2010.

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N° 08LY01687

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY01687
Date de la décision : 28/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BEZARD
Rapporteur ?: M. Jean-Pascal CHENEVEY
Rapporteur public ?: M. BESSON
Avocat(s) : GROUPEMENT D'AVOCATS INTERDISCIPLINAIRES ASSOCIES (GAIA)

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-12-28;08ly01687 ?
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