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01/12/2010 | FRANCE | N°10LY00327

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 01 décembre 2010, 10LY00327


Vu la requête, enregistrée à la Cour le 16 février 2010, présentée pour M. Soufiane A, domicilié chez M. et Mme Jkaou, 9, rue d'Amsterdam, appartement 762, à Sens (89100) ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902537, en date du 14 janvier 2010, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Yonne, du 6 octobre 2009, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination

duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtem...

Vu la requête, enregistrée à la Cour le 16 février 2010, présentée pour M. Soufiane A, domicilié chez M. et Mme Jkaou, 9, rue d'Amsterdam, appartement 762, à Sens (89100) ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902537, en date du 14 janvier 2010, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Yonne, du 6 octobre 2009, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Yonne de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation ;

Il soutient que ses attaches familiales se situent en France, où il séjourne depuis le mois d'août 2006 chez son oncle et sa tante, auxquels il a été confié par acte de Kafala, qu'il est scolarisé depuis son entrée sur le territoire français et que ses parents vivant au Maroc sont dans l'incapacité de l'y accueillir ; qu'en conséquence, la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour en litige méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de séjour qui la fonde ; que pour les mêmes motifs que ceux précédemment énoncés, cette mesure d'éloignement méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'enfin, la décision fixant le pays de destination est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français qui la fondent ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 30 juin 2010 à la Cour, présenté pour le préfet de l'Yonne, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que le requérant n'établit pas l'ancienneté de son séjour sur le territoire français antérieurement à 2009 et ne justifie pas d'une intégration particulière en France, alors que ses plus proches attaches familiales se situent au Maroc ; qu'en conséquence, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés ;

Vu le mémoire enregistré à la Cour le 29 octobre 2010, présenté pour M. Soufiane A, qui maintient les conclusions de sa requête, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 novembre 2010 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; / (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Soufiane A, ressortissant marocain né le 23 avril 1991, est entré sur le territoire français au cours de l'année 2006, afin de rejoindre son oncle et sa tante, de même nationalité que lui, auxquels il a été confié par acte de Kafala du Tribunal de Sidi Kacem en date du 22 août 2006, ce qui leur conférait l'autorité parentale sur lui ; qu'il soutient que ses attaches familiales se situent en France, où il demeure au domicile de sa tante qui prenait déjà soin de lui lorsqu'elle vivait au Maroc, pays qu'elle a quitté en 2001, et que ses parents restés au Maroc ne disposent pas de ressources suffisantes pour assurer son éducation ; qu'à l'appui de ses allégations, le requérant verse au dossier de nombreuses attestations indiquant qu'il a été pris en charge par sa tante dès l'âge de deux ans et apporte un commencement de preuve, qui n'est pas contredit par le préfet, s'agissant de l'impossibilité financière pour ses parents, qui sont séparés, de le prendre en charge ; qu'en outre, il ressort des pièces du dossier que le requérant justifie d'une bonne insertion en France, pays où il réside depuis plus de trois ans à la date de la décision en litige, dont il parle la langue et où il entretient de nombreux liens sociaux et amicaux ; qu'en particulier, le requérant poursuit depuis son entrée en France une scolarité sérieuse en vue de l'obtention du brevet d'études professionnelles au sein d'un lycée professionnel et qu'à la date de la décision en litige, le requérant est inscrit en classe de terminale, au titre de l'année 2009-2010 ; qu'ainsi, compte tenu des circonstances particulières de l'espèce, notamment de l'âge de l'intéressé lors de son arrivée sur le territoire français, de son parcours scolaire en France depuis plusieurs années, de la formation professionnalisante qu'il suit à la date de la décision contestée et des attaches dont il dispose sur le territoire français, la décision en litige du préfet de l'Yonne portant refus de délivrance de titre de séjour a porté au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus ; qu'elle a, dès lors, méconnu les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que les décisions subséquentes portant obligation de quitter le territoire français et désignant le Maroc comme pays de renvoi doivent être annulées par voie de conséquence ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution et qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé ;

Considérant que M. A demande à la Cour qu'il soit fait injonction au préfet de l'Yonne de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation administrative ; qu'il convient de faire droit à ces conclusions aux fins d'injonction et donc d'enjoindre audit préfet de délivrer à M. A une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours suivant la notification du présent arrêt et de se prononcer sur la situation de l'intéressé dans le délai de deux mois ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0902537, du 14 janvier 2010, du Tribunal administratif de Dijon, ensemble, les décisions du 6 octobre 2009 par lesquelles le préfet de l'Yonne a refusé à M. A la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé s'il n'obtempérait pas à cette obligation, sont annulés.

Article 2 : Il est fait injonction au préfet de l'Yonne de délivrer à M. A une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours suivant la notification du présent arrêt et de se prononcer sur sa situation dans le délai de deux mois.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Soufiane A, au préfet de l'Yonne et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Délibéré après l'audience du 18 novembre 2010 à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Duchon-Doris, président de chambre,

M. Montsec, président assesseur.

Lu en audience publique, le 1er décembre 2010.

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N° 10LY00327


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY00327
Date de la décision : 01/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : DOMINIQUE FYOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-12-01;10ly00327 ?
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