Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 novembre 2009 et 5 janvier 2010, présentés pour la société MONTE CARLO MARITIME SERVICES, dont le siège est 13 boulevard Princesse Charlotte à Monaco (98000) ;
La société MONTE CARLO MARITIME SERVICES demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0806168 du 24 septembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lyon l'a condamnée à payer une amende de 3 000 euros à l'établissement public Voies navigables de France, ainsi que la somme de 12 600 euros au titre de l'action domaniale ;
2°) de la relaxer de tous chefs de prévention ;
3°) de mettre à la charge de l'établissement public Voies navigables de France la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient :
- que la tardiveté de la notification a porté atteinte aux droits de la défense ;
- que la notification a été faite par une autorité incompétente ;
- qu'elle n'est que le mandataire du propriétaire du navire ; que l'établissement public Voies navigables de France connaissait l'identité du propriétaire du navire ;
- que la réalité du préjudice n'est pas établie ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 mai 2010, présenté par l'établissement public Voies navigables de France qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient :
- que la notification de la contravention de grande voirie un jour après l'expiration du délai de dix jours normalement imparti pour ce faire, n'a pas porté atteinte aux droits de la défense de la requérante ;
- que la notification de la contravention litigieuse a été faite par une autorité compétente ;
- que le courrier adressé à la société requérante et lui demandant l'identité du propriétaire du bateau est resté sans réponse ; que, par suite, il pouvait la poursuivre, faute de connaître l'identité du propriétaire du bateau en cause ;
- que le préjudice pour le domaine public existe et est établi ;
Vu le mémoire, enregistré le 20 octobre 2010, présenté pour la société MONTE CARLO MARITIME SERVICES, qui conclut aux mêmes fins que dans sa requête susvisée par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire, enregistré le 3 novembre 2010, soit postérieurement à la clôture de l'instruction, présenté pour l'établissement public Voies navigables de France ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la propriété des personnes publiques ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu la loi n° 91-1385 du 31 décembre 1991 portant dispositions diverses en matière de transports ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 novembre 2010 :
- le rapport de Mme Vinet, conseiller,
- les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public ;
Considérant que, par un procès-verbal établi le 19 janvier 2008, il a été constaté par un agent de l'établissement public Voies navigables de France (VNF) que le bateau Carina s'était échoué le jour même, en amont du pont de Trévoux, situé au point kilométrique 30.500 de la Saône, et avait détérioré une balise implantée à cet endroit ; que le directeur interrégional de l'établissement public Voies navigables de France (VNF) a déféré au Tribunal administratif de Lyon comme prévenus d'une contravention de grande voirie, M. Izquierdo, pilote du bateau le jour de l'incident, et la société MONTE CARLO MARITIME SERVICES (MCMS) ; que la société MCMS relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif l'a condamnée, solidairement avec M. Izquierdo, à payer une amende de 3 000 euros et à verser à l'établissement public VNF la somme de 12 600 euros au titre de l'action domaniale ;
Sur l'action publique :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 2132-8 du code général de la propriété des personnes publiques : Nul ne peut : 1° Dégrader, détruire ou enlever les ouvrages construits pour la sûreté et la facilité de la navigation et du halage sur les cours d'eau et canaux domaniaux ou le long de ces dépendances ; 2° Causer des dommages aux ouvrages provisoires établis en vue de la construction ou de l'entretien des ouvrages mentionnés au 1° ; 3° Naviguer sous les arches des ponts qui seraient fermés à la navigation du fait de tels travaux. Le contrevenant est passible d'une amende de 150 à 12 000 euros. Il doit supporter les frais de réparations et, en outre, dédommager les entrepreneurs chargés des travaux à dire d'experts nommés par les parties ou d'office ;
Considérant, en premier lieu, que le délai de dix jours prévu à l'article L. 774-2 du code de justice administrative n'est pas prévu à peine de nullité ; que si la société MCMS soutient que la notification tardive du procès-verbal aurait porté atteinte aux droits de la défense, elle ne l'établit pas en se bornant à une telle allégation dépourvue de toute précision et justification ;
Considérant, en deuxième lieu, que les paragraphes III et IV de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1991 susvisée donnent compétence au président de l'établissement public VNF, en cas d'atteinte à l'intégrité et à la conservation du domaine confié à cet établissement public, pour exercer les pouvoirs dévolus au préfet à l'article L. 774-2 du code de justice administrative et notamment pour notifier au contrevenant une copie du procès-verbal établi à son encontre et le citer à comparaître devant le tribunal administratif ; que ces dispositions prévoient également que le président de l'établissement public VNF peut déléguer sa signature au directeur général qui peut lui-même subdéléguer sa signature aux chefs des services déconcentrés qui sont les représentants locaux de l'établissement ; que l'établissement public VNF a produit une décision du 26 avril 2007, qui donne délégation de signature à son directeur général en matière de répression des atteintes à l'intégrité ou à la conservation du domaine public confié à l'établissement public VNF ; que, par décision du 8 août 2008, le directeur général de l'établissement VNF a régulièrement donné à M. Calfas subdélégation pour signer en son nom, toutes décisions, actes ou mémoires de première instance relatifs à la répression des atteintes à l'intégrité et à la conservation du domaine public confié (...) ; que, par suite, la notification litigieuse a été signée par une autorité compétente ;
Considérant, en troisième lieu, que si en cas de contravention de grande voirie, le mandataire de l'armateur du navire peut recevoir notification des condamnations prononcées contre l'armateur ou le capitaine, il ne peut, en l'absence de texte permettant de le déclarer responsable, être personnellement condamné, sauf si l'infraction lui est imputable ou s'il refuse de révéler l'identité de son mandant ; qu'en l'espèce, il résulte de l'instruction que l'établissement public VNF a demandé à la société MCMS, par lettre du 31 janvier 2008 reçue le 6 février 2008, de lui indiquer les coordonnées du propriétaire du bateau Carina et que cette lettre est demeurée sans réponse ; qu'à cet égard, la société MCMS ne peut opposer à l'établissement public VNF la connaissance qu'il aurait acquise, en d'autres occasions et dans l'exercice d'une autre mission, de l'identité du propriétaire du bateau ; qu'il appartenait au contraire à cette société de répondre au courrier lui demandant l'identité du propriétaire du bateau ; qu'elle ne soutient pas avoir répondu audit courrier ; que, par suite, l'administration pouvait la poursuivre, en sa qualité de mandataire ;
Sur l'action domaniale :
Considérant qu'en produisant une facture relative à une balise située au point kilométrique 30.400 et en précisant que celle-ci se trouve bien à ce point kilométrique, rive gauche de la Saône, en amont du pont routier de Trévoux, situé au point kilométrique 30.500, l'établissement public VNF a suffisamment établi son préjudice, à hauteur de la somme mentionnée sur la facture, qui correspond au montant de la condamnation prononcée par le Tribunal administratif ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société MONTE CARLO MARITIME SERVICES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon l'a condamnée à payer une amende de 3 000 euros et à verser la somme de 12 600 euros à l'établissement public VNF ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la MONTE CARLO MARITIME SERVICES est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la MONTE CARLO MARITIME SERVICES, à la l'établissement public Voies navigables de France et au ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.
Délibéré après l'audience du 4 novembre 2010, où siégeaient :
M. du Besset, président de chambre,
Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,
Mme Vinet, conseiller.
Lu en audience publique, le 25 novembre 2010.
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N° 09LY02698