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04/11/2010 | FRANCE | N°10LY00544

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 04 novembre 2010, 10LY00544


Vu la requête, enregistrée à la Cour par télécopie le 10 mars 2010 et régularisée le 11 mars 2010, présentée pour M. Nurdin A, domicilié chez Forum Réfugiés n° 13200 - BP 77412 à Lyon Cedex 07 (69347);

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0904759, en date du 22 octobre 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône, du 6 avril 2009, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et dési

gnation du pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à...

Vu la requête, enregistrée à la Cour par télécopie le 10 mars 2010 et régularisée le 11 mars 2010, présentée pour M. Nurdin A, domicilié chez Forum Réfugiés n° 13200 - BP 77412 à Lyon Cedex 07 (69347);

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0904759, en date du 22 octobre 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône, du 6 avril 2009, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour mention vie privée et familiale ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1200 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient que la décision lui refusant le titre de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que le préfet du Rhône s'est estimé en situation de compétence liée par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile pour fixer le pays de destination de la mesure de reconduite, qui, eu égard aux risques qu'il encourt dans son pays d'origine, méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 25 mai 2010 présenté par le préfet du Rhône, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que sa décision portant refus de titre de séjour ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que M. A est dépourvu d'attaches familiales en France et ne justifie pas d'une insertion particulière dans la société française ; que l'intéressé n'établit pas la réalité des risques qu'il encourt personnellement dans son pays d'origine de sorte que la décision fixant le pays de destination ne méconnaît ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 octobre 2010 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- les observations de Me Rahmani, avocat de M. A,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée à nouveau à Me Rahmani ;

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que M. A fait valoir qu'il réside en France depuis 2004, qu'il y a fixé le centre de sa vie privée et familiale, qu'il est pleinement inséré et bénéficie d'une promesse d'embauche ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que M. A, de nationalité bosniaque, est entré irrégulièrement en France, selon ses dires, le 19 juin 2004 ; que sa demande d'asile alors formulée a fait l'objet d'un refus par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, par décision du 30 septembre 2004, confirmé par la commission de recours des réfugiés, le 20 avril 2005 ; que M. A a alors fait l'objet d'une invitation à quitter le territoire national, le 15 juin 2005, puis d'un arrêté de reconduite à la frontière, le 17 janvier 2007 ; qu'il a ensuite sollicité le réexamen de sa demande d'asile ; que le préfet du Rhône, par décision du 4 février 2009, lui a refusé la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour mais l'a invité à se présenter dans ses services, sous quinze jours, aux fins de compléter sa demande d'asile en vue de son réexamen, en application des dispositions de l'article R. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet du Rhône a regardé M. A comme ayant renoncé à sa demande, faute pour lui d'avoir complété son dossier et de s'être présenté à ses services, et a pris à son encontre un refus de délivrance du titre de séjour ; que M. A, célibataire et sans enfant, a vécu l'essentiel de son existence en Bosnie Herzégovine, où réside encore sa famille alors qu'il est dépourvu de famille en France où il réside de façon précaire ; que M. A ne peut pas utilement se prévaloir d'une promesse d'embauche en qualité de peintre datée du 10 septembre 2009, soit postérieurement à la date de la décision contestée ; que par suite, et nonobstant les efforts de l'intéressé dans l'apprentissage du français, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment des conditions d'entrée et de séjour du requérant en France, la décision contestée n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant que M. A ne soulève aucun moyen à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

Sur la légalité de la décision distincte fixant le pays de destination :

Considérant, d'une part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Rhône se serait cru lié par les décisions de l'Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides et de la commission de recours des réfugiés ; que ce moyen ne peut, par suite, être accueilli ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. et que ce dernier texte énonce que Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou de groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;

Considérant que M. A n'établit pas, par la seule production de documents généraux relatifs à la Bosnie, la réalité des risques qu'il encourrait, selon lui, en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut être qu'écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A, et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 21 octobre 2010 à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Chanel, président de chambre,

M. Pourny, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 novembre 2010.

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N° 10LY00544


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY00544
Date de la décision : 04/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : DELBES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-11-04;10ly00544 ?
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