La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/10/2010 | FRANCE | N°08LY01737

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 26 octobre 2010, 08LY01737


Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 2008, présentée pour M. Denis A, domicilié ...;

Il demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0604461 du Tribunal administratif de Lyon du 29 mai 2008 qui a rejeté sa demande tendant, à titre principal, à la condamnation du département de l'Ain à lui verser une somme de 27 600 euros correspondant à la cession gratuite au département de l'Ain d'un tènement immobilier de 230 m2 lui appartenant et à titre subsidiaire, à lui accorder la restitution de son terrain ;

2°) d'ordonner la restitution de son terrain da

ns l'hypothèse où la commune de Bourg-Saint-Christophe refuserait de lui verser l'in...

Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 2008, présentée pour M. Denis A, domicilié ...;

Il demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0604461 du Tribunal administratif de Lyon du 29 mai 2008 qui a rejeté sa demande tendant, à titre principal, à la condamnation du département de l'Ain à lui verser une somme de 27 600 euros correspondant à la cession gratuite au département de l'Ain d'un tènement immobilier de 230 m2 lui appartenant et à titre subsidiaire, à lui accorder la restitution de son terrain ;

2°) d'ordonner la restitution de son terrain dans l'hypothèse où la commune de Bourg-Saint-Christophe refuserait de lui verser l'indemnité demandée ;

3°) de mettre à la charge du département de l'Ain et de la commune de Bourg-Saint-Christophe le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient qu'il sollicite le versement d'une juste et préalable indemnité pour compenser la perte de son terrain ; que les dispositions de l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, reprises dans une formulation analogue dans le projet de constitution européenne prévoient une juste et préalable indemnité ; que le problème juridique posé par le présent litige fait partie des droits protégés par l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 11 décembre 2008, présenté pour le département de l'Ain, représenté par son président en exercice ; il conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. A en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que les dispositions des articles L. 332-6-1-2 et R. 332-15 du code de l'urbanisme permettent de subordonner la délivrance d'un permis de construire à la cession gratuite de 10 % au plus de la superficie du terrain ; que la Cour est incompétente pour se prononcer sur la conformité de ces dispositions législatives au projet de constitution européenne et aux dispositions de l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

Vu le mémoire, enregistré le 11 juin 2009, présenté pour M. A ; il conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; il soutient en outre que la commune a pris 2 ares 90 ca au lieu des 2 ares 30 à l'origine du litige ;

Vu l'avis adressé aux parties le 21 juillet 2010 pour les informer en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative que la décision de la Cour est susceptible d'être fondée sur un moyen d'ordre public ;

Vu l'avis adressé aux parties le 24 septembre 2010 pour les informer en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative que la décision de la Cour est susceptible d'être fondée sur un moyen d'ordre public ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 septembre 2010, présenté pour M. A, il soutient que le Conseil constitutionnel dans sa décision du 22 septembre 2010 a déclaré l'article L. 332-6-1 du code de l'urbanisme non conforme à la constitution ; que faute de fondement légal le département de l'Ain ne pouvait sans commettre de faute bénéficier de la cession gratuite prévue par le permis de construire le 2 mars 1999 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution ;

Vu la décision du Conseil constitutionnel du 22 septembre 2010 (n° 2010-33) ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 octobre 2010 :

- le rapport de Mme Chevalier-Aubert, premier-conseiller ;

- les observations de Me Hemery, avocat de M. A ;

- les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;

- la parole ayant été à nouveau donnée à la partie présente ;

Considérant que, par le jugement attaqué, du 29 mai 2008, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M. A tendant à titre principal, à condamner le département de l'Ain à lui verser une somme de 27 600 euros correspondant à la cession gratuite au département de l'Ain d'un tènement immobilier de 230 m2 lui appartenant et à titre subsidiaire, à lui accorder la restitution de la parcelle cédée, dans le cas où l'indemnisation serait refusée ; que M. A relève appel de ce jugement ;

Sur la recevabilité des conclusions dirigées contre la commune de Bourg-Saint-Christophe :

Considérant que M. A n'a pas demandé au tribunal administratif la condamnation de la commune de Bourg-Saint-Christophe ; que les conclusions dirigées contre la commune sont nouvelles en appel et, par suite, irrecevables ;

Sur la compétence de la juridiction administrative sur le surplus de conclusions :

Considérant, qu'aux termes de l'article L. 332-6 du code de l'urbanisme : Les bénéficiaires d'autorisations de construire ne peuvent être tenus que des obligations suivantes : (...) 2°) Le versement des contributions aux dépenses d'équipements publics mentionnés à l'article L. 332-6-1. ; qu'aux termes de l'article L. 332-6-1 du même code : les contributions aux dépenses d'équipements publics prévues au 2° de l'article L. 332-6 sont les suivantes : (...) e) les cessions gratuites de terrains destinés à être affectés à certains usages publics qui, dans la limite de 10 p.100 de la superficie du terrain auquel s'applique la demande, peuvent être exigées des bénéficiaires d'autorisations portant sur la création de nouveaux bâtiments ou de nouvelles surfaces construites ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause ;

Considérant qu'il est constant que le permis de construire, délivré le 2 mars 1999 à M. A, par le maire de la commune de Bourg-Saint-Christophe, comportait une clause de cession gratuite au profit du département de l'Ain d'un tènement immobilier d'une superficie de 230 m2, nécessaire à l'élargissement de la route départementale n° 4 et de la voie communale n° 36, en application du 2ème alinéa de l'article L. 332-6-1 du code de l'urbanisme ; que le Conseil constitutionnel a été saisi le 1er juillet 2010 par la Cour de cassation d'une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité du dispositif de cessions gratuites de terrains prévu à l'article L. 332-6-1 e) précité ; que le Conseil constitutionnel, par une décision en date du 22 septembre 2010 a déclaré contraire à la constitution l'article L. 332-6-1 2°) e du code de l'urbanisme et a précisé que cette déclaration d'inconstitutionnalité prend effet à compter de la publication de la présente décision et qu'elle peut être invoquée dans les instances en cours à cette date et dont l'issue dépend de l'application des dispositions déclarées inconstitutionnelles ; que, dès lors, la cession gratuite prévue par le permis de construire du 2 mars 1999 ne repose sur aucun fondement légal et constitue une emprise irrégulière sur une propriété privée, dont il n'appartient qu'aux tribunaux judiciaires, gardiens de la propriété privée, de connaître ; que, par suite, c'est à tort que les premiers juges n'ont pas rejeté les conclusions principales et subsidiaires de M. A comme portées devant un ordre de juridiction incompétent ; qu'il y a donc lieu d'annuler le jugement attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu de statuer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur la demande de M. A ; qu'il résulte de ce qui vient d'être dit qu'il appartient à la Cour de rejeter comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître les conclusions du requérant tendant à titre principal à l'indemnisation de son préjudice résultant de la cession gratuite de sa parcelle et à titre subsidiaire à la restitution de cette parcelle ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er Les conclusions de M. A dirigées contre la commune de Bourg-Saint-Christophe sont rejetées.

Article 2 : Le jugement n° 0604461 du Tribunal administratif de Lyon du 29 mai 2008 est annulé.

Article 3 : La demande de M. A devant le Tribunal administratif de Lyon est rejetée comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Article 4 : Les conclusions de M. A et du département de l'Ain tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Denis A, à la commune de Bourg-Saint-Christophe, et au Département de l'Ain.

Délibéré après l'audience du 5 octobre 2010 à laquelle siégeaient :

M. Bézard, président de chambre,

M. Chenevey et Mme Chevalier-Aubert, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 26 octobre 2010.

''

''

''

''

1

2

N° 08LY01737

mg


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY01737
Date de la décision : 26/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR UN CRITÈRE JURISPRUDENTIEL - LIBERTÉ INDIVIDUELLE - PROPRIÉTÉ PRIVÉE ET ÉTAT DES PERSONNES - PROPRIÉTÉ - EMPRISE IRRÉGULIÈRE - ARTICLE L - 332-6-1 DU CODE DE L'URBANISME - CESSION GRATUITE DE TERRAIN - DÉCLARATION D'INCONSTITUTIONNALITÉ - VIOLATION DE L'ARTICLE 17 DE LA DÉCLARATION DES DROITS DE L'HOMME ET DU CITOYEN.

17-03-02-08-02-01 Le Conseil constitutionnel, par une décision en date du 22 septembre 2010 (n° 2010-33) a déclaré contraire à la constitution l'article L. 332-6-1 2°)e du code de l'urbanisme et a précisé que cette déclaration d'inconstitutionnalité prenait effet à compter de la publication de la présente décision et qu'elle peut être invoquée dans les instances en cours à cette date et dont l'issue dépend de l'application des dispositions déclarées inconstitutionnelles.,,Il découle de cette décision que la cession gratuite prévue dans un permis de construire délivré avant cette date et faisant l'objet d'un recours pendant ne repose sur aucun fondement légal et constitue une emprise irrégulière sur une propriété privée, dont il n'appartient qu'aux tribunaux judiciaires, gardiens de la propriété privée, de connaître.,,Il y a donc lieu de rejeter les conclusions tendant à l'indemnisation de la cession gratuite, prévue dans un permis de construire, délivré dans ces conditions, comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - DROIT DE PROPRIÉTÉ - ACTES DES AUTORITÉS ADMINISTRATIVES CONCERNANT LES BIENS PRIVÉS - VOIE DE FAIT ET EMPRISE IRRÉGULIÈRE - ARTICLE L - 332-6-1 DU CODE DE L'URBANISME - CESSION GRATUITE DE TERRAIN - DÉCLARATION D'INCONSTITUTIONNALITÉ - VIOLATION DE L'ARTICLE 17 DE LA DÉCLARATION DES DROITS DE L'HOMME ET DU CITOYEN.

26-04-04-01 Le Conseil constitutionnel, par une décision en date du 22 septembre 2010 (n° 2010-33) a déclaré contraire à la constitution l'article L. 332-6-1 2°)e du code de l'urbanisme et a précisé que cette déclaration d'inconstitutionnalité prenait effet à compter de la publication de la présente décision et qu'elle peut être invoquée dans les instances en cours à cette date et dont l'issue dépend de l'application des dispositions déclarées inconstitutionnelles.,,Il découle de cette décision que la cession gratuite prévue dans un permis de construire délivré avant cette date et faisant l'objet d'un recours pendant ne repose sur aucun fondement légal et constitue une emprise irrégulière sur une propriété privée, dont il n'appartient qu'aux tribunaux judiciaires, gardiens de la propriété privée, de connaître.,,Il y a donc lieu de rejeter les conclusions tendant à l'indemnisation de la cession gratuite, prévue dans un permis de construire, délivré dans ces conditions, comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

URBANISME ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE - PERMIS DE CONSTRUIRE - NATURE DE LA DÉCISION - OCTROI DU PERMIS - PERMIS ASSORTI DE RÉSERVES OU DE CONDITIONS - ARTICLE L - 332-6-1 DU CODE DE L'URBANISME - CESSION GRATUITE DE TERRAIN - DÉCLARATION D'INCONSTITUTIONNALITÉ - VIOLATION DE L'ARTICLE 17 DE LA DÉCLARATION DES DROITS DE L'HOMME ET DU CITOYEN.

68-03-025-02-02 Le Conseil constitutionnel, par une décision en date du 22 septembre 2010 (n° 2010-33) a déclaré contraire à la constitution l'article L. 332-6-1 2°)e du code de l'urbanisme et a précisé que cette déclaration d'inconstitutionnalité prenait effet à compter de la publication de la présente décision et qu'elle peut être invoquée dans les instances en cours à cette date et dont l'issue dépend de l'application des dispositions déclarées inconstitutionnelles.,,Il découle de cette décision que la cession gratuite prévue dans un permis de construire délivré avant cette date et faisant l'objet d'un recours pendant ne repose sur aucun fondement légal et constitue une emprise irrégulière sur une propriété privée, dont il n'appartient qu'aux tribunaux judiciaires, gardiens de la propriété privée, de connaître.,,Il y a donc lieu de rejeter les conclusions tendant à l'indemnisation de la cession gratuite, prévue dans un permis de construire, délivré dans ces conditions, comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.


Composition du Tribunal
Président : M. BEZARD
Rapporteur ?: Mme Virginie CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur public ?: M. BESSON
Avocat(s) : NGUE-NO

Origine de la décision
Date de l'import : 22/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-10-26;08ly01737 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award