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21/10/2010 | FRANCE | N°10LY01191

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 21 octobre 2010, 10LY01191


Vu I./ sous le n° 10LY01191, la requête, enregistrée à la Cour le 20 mai 2010, présentée pour M. Qamil A et Mme Nusrete A, domiciliés ... ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000024-1000025, en date du 25 mars 2010, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions du 3 décembre 2009 du préfet du Rhône portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel ils seraien

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Vu I./ sous le n° 10LY01191, la requête, enregistrée à la Cour le 20 mai 2010, présentée pour M. Qamil A et Mme Nusrete A, domiciliés ... ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000024-1000025, en date du 25 mars 2010, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions du 3 décembre 2009 du préfet du Rhône portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel ils seraient reconduits à l'expiration de ce délai, à défaut pour eux d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui leur était faite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions préfectorales susmentionnées ;

3°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise médicale concernant M. A ;

4°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal de leur délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale ou, à titre subsidiaire, de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de réexaminer leur situation administrative dans le délai d'un mois ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de mille sept cents euros, au profit de leur conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Ils soutiennent qu'ils sont de nationalité kosovare, qu'ils avaient fait état de cette nationalité auprès du préfet du Rhône et que la circonstance que ce dernier a mentionné à tort, dans ses arrêtés en litige, qu'ils étaient de nationalité serbe, révèle un défaut d'examen préalable de leur situation et une erreur de fait substantielle ; que le préfet du Rhône a commis une seconde erreur de fait en se méprenant sur la nature du titre de séjour sollicité par Mme A qui demandait, comme son époux, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le refus de titre de séjour la concernant est entaché d'un vice de procédure en l'absence de consultation préalable du médecin de l'agence régionale de santé et que l'avis émis par ce dernier sur la demande de M. A est vicié par l'erreur qu'il a commise quant à son pays d'origine ; que les refus de délivrance de titre de séjour contestés méconnaissent les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les obligations de quitter le territoire français qui les accompagnent violent les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du même code ; qu'eu égard à l'ancienneté de leur séjour sur le territoire français, où ils ont trouvé sécurité et stabilité et où leur enfant est scolarisé et suivi médicalement, au suivi médical dont eux-mêmes bénéficient et à leur volonté d'insertion sociale et professionnelle, les décisions de refus de délivrance de titre de séjour et les obligations de quitter le territoire français qui les accompagnent méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur leur situation personnelle ; qu'enfin, en raison des risques qu'ils encourent dans leur pays d'origine, les décisions fixant le pays de renvoi méconnaissent les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur leur situation personnelle ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré à la Cour le 9 septembre 2010, présenté par le préfet du Rhône, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que les décisions de refus de titre de séjour sont régulièrement motivées et ont été prises après un examen attentif de la situation personnelle de M. et Mme A ; que si les requérants établissent être des ressortissants du Kosovo et si une erreur a effectivement été commise quant à leur nationalité dans les décisions en litige, les décisions fixant le pays de renvoi indiquent que les intéressés pourraient également être reconduits dans tout pays où ils établiraient être légalement admissibles et le Kosovo a donné son accord, le 2 septembre 2010, pour leur réadmission dans ce pays ; que les décisions de refus de délivrance de titre de séjour ne méconnaissent pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le moyen tiré de la violation des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut pas être utilement invoqué à l'encontre du refus opposé à la demande de titre de séjour de Mme A, qui n'avait pas été déposée sur ce fondement, et n'est pas fondé à l'encontre du refus de titre de séjour pris à l'encontre de M. A ; qu'enfin, les décisions fixant le pays de renvoi ne méconnaissent pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu les pièces complémentaires, enregistrées à la Cour le 1er octobre 2010, produites pour M. et Mme A ;

VU II./ sous le n° 10LY02205, la requête, enregistrée à la Cour le 17 septembre 2010, présentée pour Mme Nusrete A, domiciliée ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'ordonner, en application de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement n° 1000024-1000025, en date du 25 mars 2010, du Tribunal administratif de Lyon, en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 3 décembre 2009 du préfet du Rhône portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai, à défaut pour elle d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de mille cinq cents euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Elle soutient que son placement en centre de rétention administrative affecte son enfant qui est suivi depuis plus de quatre ans pour de graves problèmes psychologiques ; que son éloignement du territoire français, rendu possible par le jugement dont le sursis à exécution est demandé, aurait pour elle des conséquences difficilement réparables, dès lors qu'il rendrait impossible la poursuite d'une vie familiale normale avec son époux, qui n'a pas été placé en rétention administrative, qu'elle encourt des risques au Kosovo, en raison des anciennes fonctions de surveillant de prison exercées par son époux, et que ces risques sont actuels, comme le démontre la tentative d'enlèvement dont sa belle-soeur a été victime au mois de mars 2010 et que son état de santé n'a pas fait l'objet d'un réel examen, en l'absence de consultation du médecin de l'agence régionale de santé préalablement à la mesure d'éloignement, alors qu'elle se trouve dans un état de profonde détresse sur le plan psychologique, entraînant un risque suicidaire et qu'elle se retrouverait isolée au Kosovo, son époux n'étant pas placé en centre de rétention administrative ; que le préfet du Rhône, qui a commis une erreur quant à sa nationalité, qui n'est pas serbe mais kosovare, n'a pas procédé à un examen préalable particulier de sa situation personnelle, alors que cet élément a une influence sur l'appréciation d'une demande de titre de séjour fondée sur le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la procédure suivie par le préfet du Rhône est irrégulière en l'absence de consultation préalable du médecin de l'agence régionale de santé ; que l'arrêté en litige est entaché de deux erreurs de fait, tenant, d'une part, à sa nationalité et, d'autre part, à la nature du titre de séjour qui était demandé, lequel n'était pas sollicité en tant qu'accompagnante de son époux malade mais en qualité d'étrangère malade ; qu'elle souffre d'un retentissement psychique post-traumatique, consécutif aux violences qu'elle a subies au Kosovo et qui ne pourrait pas être pris en charge de façon appropriée dans le pays où elle a vécu ces évènements traumatisants ; que la décision de refus de délivrance de titre de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que la mesure d'éloignement qui l'accompagne méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du même code ; qu'à titre subsidiaire, une expertise médicale pourrait être diligentée ; que l'hépatite B dont son époux est atteint, ne pourrait pas, en cas de réactivation, être soignée au Kosovo et que son état de santé actuel, s'il ne fait pas l'objet d'un traitement antiviral, nécessite néanmoins une surveillance régulière et une prise en charge médicale rapide en cas de besoin, dont il n'est pas établi qu'elles seraient possibles au Kosovo, alors, au demeurant, que le médecin de l'agence régionale de santé publique et le préfet du Rhône n'ont pas examiné sa situation au regard de son pays d'origine mais de la Serbie et que le pronostic vital de son époux pourrait être engagé à moyen terme ; qu'à titre subsidiaire, une expertise pourrait être diligentée ; qu'eu égard à l'ancienneté de son séjour en France, pays dont elle parle désormais la langue, où son époux, qui souffre d'un problème de santé, bénéficie de promesses d'embauche et où leur enfant, qui est de santé précaire, est scolarisé en cours préparatoire, et alors qu'elle n'a plus de contact avec sa famille restée au Kosovo, où elle se retrouverait isolée et psychologiquement fragilisée, la décision de refus de délivrance de titre de séjour et la mesure d'éloignement qui l'accompagne méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'enfin, la profession de surveillant de prison de son époux a exposé ce dernier et sa famille à des menaces et à des violences sur leurs biens et leurs personnes de la part des anciens prisonniers et de leurs familles et que ces menaces demeurent actuelles ; que, par suite, la décision fixant le pays de renvoi méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement dont est demandé le sursis à exécution ;

Vu le mémoire enregistré à la Cour le 5 octobre 2010, postérieurement à la clôture d'instruction, présenté par le préfet du Rhône ;

Vu la lettre du 24 septembre 2010, par laquelle le président de la Cour a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour est susceptible de soulever d'office l'irrecevabilité des conclusions tendant au prononcé du sursis à exécution du jugement attaqué, en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande d'annulation de la décision de refus de délivrance de titre de séjour du préfet du Rhône du 3 décembre 2009 ;

Vu III./ sous le n° 10LY02227, la requête, enregistrée à la Cour le 22 septembre 2010, présentée pour M. Qamil A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'ordonner, en application de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement n° 1000024-1000025, en date du 25 mars 2010, du Tribunal administratif de Lyon, en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 3 décembre 2009 du préfet du Rhône portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de mille cinq cents euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient que son éloignement du territoire français, rendu possible par le jugement dont le sursis à exécution est demandé, aurait pour lui des conséquences difficilement réparables, dès lors qu'il encourt des risques au Kosovo, en raison de ses anciennes fonctions de surveillant de prison, et que ces risques sont actuels, comme le démontre la tentative d'enlèvement dont sa soeur a été victime au mois de mars 2010, que son état de santé n'a pas été examiné au regard des soins disponibles dans son pays d'origine en raison d'une erreur commise par le préfet sur ledit pays d'origine, que l'état de santé de son épouse n'a pas fait l'objet d'un réel examen, en l'absence de consultation du médecin de l'agence régionale de santé préalablement à la mesure d'éloignement, alors qu'elle se trouve dans un état de profonde détresse sur le plan psychologique, entraînant un risque suicidaire et que sa demande de titre de séjour en qualité d'étrangère malade n'a pas été examinée et que leur enfant, scolarisé en France depuis cinq ans, est fragile psychologiquement ; que le préfet du Rhône, qui a commis une erreur quant à sa nationalité, qui n'est pas serbe mais kosovare, n'a pas procédé à un examen préalable particulier de sa situation personnelle, alors que cet élément a une influence sur l'appréciation d'une demande de titre de séjour fondée sur le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'arrêté en litige, comme celui de son épouse, est entaché d'une erreur de fait quant à sa nationalité et que la décision préfectorale relative à son épouse, qui a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière en l'absence de consultation préalable du médecin de l'agence régionale de santé, est également entachée d'une seconde erreur de fait tenant à la nature du titre de séjour qui était demandé, lequel n'était pas sollicité en tant qu'accompagnante de son époux malade mais en qualité d'étrangère malade ; que son épouse souffre d'un retentissement psychique post-traumatique, consécutif aux violences qu'elle a subies au Kosovo et qui ne pourrait pas être pris en charge de façon appropriée dans le pays où elle a vécu ces évènements traumatisants ; qu'à titre subsidiaire, une expertise médicale la concernant pourrait être diligentée ; que l'hépatite B dont il souffre ne pourrait pas, en cas de réactivation, être soignée au Kosovo et que son état de santé actuel, s'il ne fait pas l'objet d'un traitement antiviral, nécessite néanmoins une surveillance régulière et une prise en charge médicale rapide en cas de besoin, dont il n'est pas établi qu'elles seraient possibles au Kosovo, alors, au demeurant, que le médecin de l'agence régionale de santé publique et le préfet du Rhône n'ont pas examiné sa situation au regard de son pays d'origine mais de la Serbie et que son pronostic vital pourrait être engagé à moyen terme ; que la décision de refus de délivrance de titre de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que la mesure d'éloignement qui l'accompagne méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du même code ; qu'à titre subsidiaire, une expertise médicale pourrait être diligentée ; qu'eu égard à l'ancienneté de son séjour en France, pays dont il parle désormais la langue, où il est suivi médicalement, où il bénéficie de promesses d'embauche et où son enfant, qui est de santé précaire, est scolarisé en cours préparatoire, et alors que sa soeur restée au Kosovo n'est pas susceptible d'accueillir sa famille, la décision de refus de délivrance de titre de séjour et la mesure d'éloignement qui l'accompagne méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'enfin, son ancienne profession de surveillant de prison l'a exposé à des menaces et à des violences sur ses biens et sur la personne de son épouse de la part des anciens prisonniers et de leurs familles et que ces menaces demeurent actuelles ; que, par suite, la décision fixant le pays de renvoi méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement dont est demandé le sursis à exécution ;

Vu le mémoire enregistré à la Cour le 5 octobre 2010, postérieurement à la clôture d'instruction, présenté par le préfet du Rhône ;

Vu la lettre du 24 septembre 2010, par laquelle le président de la Cour a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour est susceptible de soulever d'office l'irrecevabilité des conclusions tendant au prononcé du sursis à exécution du jugement attaqué, en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande d'annulation de la décision de refus de délivrance de titre de séjour du préfet du Rhône du 3 décembre 2009 ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 octobre 2010 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- les observations de Me Rodrigues, avocat de M. et Mme A,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée à nouveau à Me Rodrigues ;

Considérant que les requêtes susvisées de M. et Mme A concernent le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la requête enregistrée à la Cour sous le n° 10LY01191 :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin inspecteur ou le médecin chef peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. et qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin inspecteur départemental de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé et, à Paris, par le médecin, chef du service médical de la préfecture de police. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ;

Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme A sont de nationalité kosovare, comme l'attestent les certificats de naissance établis le 31 août 2001 par la mission d'administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo produits au dossier ; que les intéressés ont déposé auprès du préfet du Rhône, le 18 mai 2009, une demande de délivrance de titre de séjour en qualité d'étranger malade, en ce qui concerne M. A, et une demande qui a été regardée par l'administration comme tendant à la délivrance d'un titre de séjour pour lui permettre de demeurer en France aux côtés de son conjoint malade, en ce qui concerne Mme A ; que le courrier établi le 18 mai 2009 par les services de la préfecture du Rhône, attestant du dépôt de la demande de titre de séjour par Mme A, destiné au médecin agréé ou au praticien hospitalier chargé de rédiger le rapport médical devant être soumis au médecin inspecteur de santé publique et devant être joint à cette expertise médicale indique expressément que Mme A et son époux sont de nationalité kosovare, tandis que le courrier similaire établi le même jour par les services de la préfecture du Rhône, consécutivement au dépôt de la demande présentée par M. A, indique que ce dernier est de nationalité serbe-et-monténégrine, alors, au demeurant, que le Monténégro est un pays indépendant depuis le 3 juin 2006 ; que le courrier en date du 4 juin 2009, par lequel M. A a notamment transmis au médecin inspecteur de santé publique la copie d'un certificat médical d'une assistante chef de clinique dans le service hospitalier d'hépato-gastro-entérologie qui le suit médicalement, mentionne expressément, tout comme la pièce médicale susmentionnée qu'il accompagnait, que M. A est originaire du Kosovo ; que, toutefois, dans son avis en date du 19 juin 2009, par lequel il a estimé que l'état de santé de M. A nécessite une surveillance médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qui peut effectivement être réalisée dans son pays d'origine, vers lequel l'intéressé peut voyager sans risque, le médecin inspecteur de santé publique mentionne que M. A est de nationalité serbe-et-monténégrine ; qu'enfin et surtout, la décision du 3 décembre 2009 contestée, par laquelle le préfet du Rhône a refusé à M. A la délivrance de la carte de séjour temporaire prévue au 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en se fondant sur le seul motif que l'intéressé peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, indique, à tort, que M. A est de nationalité serbe ; que, compte tenu de la nature du titre de séjour refusé à M. A et de l'unique motif du refus opposé à l'intéressé, alors qu'il n'est pas établi, ni même allégué, que le préfet aurait pris la même décision s'il s'était prononcé au regard des possibilités pour M. A de bénéficier effectivement d'un traitement médical approprié au Kosovo, pays indépendant depuis le 17 février 2008, l'erreur quant à la nationalité de M. A qui a été commise par le préfet du Rhône dans sa décision susmentionnée du 3 décembre 2009, constitue une erreur substantielle entachant d'illégalité ladite décision ; que la décision du 3 décembre 2009 par laquelle le préfet du Rhône a refusé à M. A la délivrance d'un titre de séjour doit donc être annulée ; qu'il en est de même, par voie de conséquence, des décisions du même jour faisant obligation à l'intéressé de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel il serait éloigné s'il n'obtempérait pas à cette obligation ;

Considérant, d'autre part, que pour refuser à Mme A la délivrance d'une carte de séjour temporaire au titre du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Rhône s'est uniquement fondé, dans sa décision du 3 décembre 2009, sur la circonstance que M. A ne remplit pas les conditions du 11° de ce même article pour bénéficier d'un droit au séjour en France dès lors qu'il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et que, par conséquent, Mme A ne peut pas se prévaloir de la nécessité de sa présence en France auprès de son époux ; que, par suite, eu égard à ce motif unique, qui fait entièrement dépendre le droit au séjour en France de Mme A de celui de son époux, l'erreur de fait susmentionnée, commise par le préfet du Rhône sur la nationalité de M. A, qui entache d'illégalité le refus de titre de séjour opposé à ce dernier, est également de nature à entacher d'illégalité le refus de délivrance de titre de séjour opposé, le 3 décembre 2009, à Mme A, qui doit, dès lors, être annulé ; que les décisions du même jour faisant obligation à l'intéressée de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel elle serait éloignée si elle n'obtempérait pas à cette obligation doivent être annulées par voie de conséquence ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise demandée, que M. et Mme A sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé ;

Considérant que le présent arrêt, qui annule les décisions portant refus de titre de séjour du 3 décembre 2009 du préfet du Rhône et les décisions subséquentes, n'implique pas, eu égard au motif sur lequel il se fonde, que le préfet du Rhône délivre les titres sollicités aux requérants ; qu'il implique seulement que les intéressés voient leur situation réexaminée ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet du Rhône de délivrer, dans le délai de quinze jours, une autorisation provisoire de séjour à M. et Mme A et de se prononcer sur leur situation dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Rodrigues, avocat de M. A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de mille cinq cents euros au profit de Me Rodrigues, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Sur les requêtes enregistrées à la Cour sous les n° 10LY02205 et n° 10LY02227 :

Considérant que le présent arrêt statuant sur la requête en annulation présentée contre le jugement n° 1000024 - 1000025, du 25 mars 2010, du Tribunal administratif de Lyon, les requêtes n° 10LY02205 et n° 10LY02227 tendant à ce qu'il soit sursis à son exécution sont devenues sans objet ; qu'il n'y a plus lieu d'y statuer ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les requêtes enregistrées sous le n° 10LY02205 et n° 10LY02227.

Article 2 : Le jugement n° 1000024 - 1000025 du 25 mars 2010 du Tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 3 : Les décisions du 3 décembre 2009 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé à M. et Mme A la délivrance d'un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a désigné le pays à destination duquel ils seraient reconduits à l'expiration de ce délai, à défaut pour eux d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui leur était faite, sont annulées.

Article 4 : Il est enjoint au préfet du Rhône de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. et Mme A dans le délai de 15 jours suivant la notification du présent arrêt et de procéder au réexamen de leur situation dans le délai de deux mois.

Article 5 : En application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, L'Etat versera la somme globale de 1 500 euros à Me Rodrigues, avocat de M. A, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 6 : Le surplus des conclusions de M. et Mme A est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Nusrete A, à M. Qamil A, au préfet du Rhône et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Délibéré après l'audience du 7 octobre 2010 à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Fontanelle, président de chambre,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 octobre 2010.

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N° 10LY01191-10LY02205-10LY02227


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY01191
Date de la décision : 21/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : SANDRINE RODRIGUES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-10-21;10ly01191 ?
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