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07/10/2010 | FRANCE | N°10LY00001

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 07 octobre 2010, 10LY00001


Vu la requête, enregistrée à la Cour par télécopie le 4 janvier 2010 et régularisée le 5 janvier 2010, présentée pour M. Salaheddine A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0904445, en date du 30 novembre 2009, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère, du 22 juin 2009, portant refus de délivrance de certificat de résidence algérien, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination d

uquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer...

Vu la requête, enregistrée à la Cour par télécopie le 4 janvier 2010 et régularisée le 5 janvier 2010, présentée pour M. Salaheddine A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0904445, en date du 30 novembre 2009, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère, du 22 juin 2009, portant refus de délivrance de certificat de résidence algérien, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un certificat de résidence algérien mention vie privée et familiale dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour et de travail sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient que les décisions portant refus de délivrance de certificat de résidence algérien et obligation de quitter le territoire français méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ; qu'en outre, la décision susmentionnée refusant le certificat de résidence algérien sollicité viole les stipulations du point 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles alors que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît encore les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'enfin, la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée en droit et en fait ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 juillet 2010 à la Cour, présenté pour M. A, qui maintient les conclusions de sa requête, par les mêmes moyens ;

Il soutient, en outre, qu'il appartient au préfet de l'Isère de démontrer la possibilité qu'il aurait de bénéficier effectivement d'une prise en charge médicale appropriée en Algérie ; que l'accès effectif à un traitement médical lui serait impossible, notamment en raison de l'incapacité dans laquelle il se trouverait de financer ledit traitement ;

Vu le mémoire, enregistré à la Cour le 23 septembre 2010, présenté par le préfet de l'Isère, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que le requérant pourra effectivement bénéficier d'une prise en charge médicale appropriée en Algérie ; qu'il n'a, ainsi, ni méconnu les stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, ni commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur l'état de santé de l'intéressé ; que le requérant, célibataire et sans enfant, n'est présent en France que depuis trois ans, alors qu'il a vécu jusqu'à l'âge de trente ans en Algérie, où il conserve ses attaches familiales ; que, par suite, il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni commis d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ; que la décision fixant le pays de renvoi est suffisamment motivée et ne méconnaît, ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 septembre 2010 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance de certificat de résidence algérien :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. ;

Considérant que M. A se prévaut de l'impossibilité d'accès effectif, en Algérie, aux soins que son état de santé nécessite, en raison du caractère insuffisant de l'offre de soins actuellement disponible dans ce pays pour des troubles psychiatriques, de la non disponibilité de certains des médicaments qui lui sont prescrits et de l'incapacité dans laquelle il se trouverait de financer son traitement, et fait valoir que les troubles dont il souffre trouvent leur origine dans des traumatismes qu'il a subis dans ce pays ; que le refus de délivrance de certificat de résidence algérien attaquée a, toutefois, été décidé au vu, notamment, de l'avis du médecin inspecteur de santé publique du 26 mai 2009, selon lequel, si l'état de santé de M. A nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'en outre, il ressort de la fiche pays Algérie , diffusée par le ministère des Affaires Etrangères et versée au dossier, que s'agissant du syndrome de stress post-traumatique dont souffre le requérant, les médicaments sont disponibles et des médecins spécialisés sont répartis sur tout le territoire algérien, ce que confirme un courrier du chef du service hospitalo-universitaire de psychiatrie d'Alger du mois de juin 2007 ; que dès lors, les documents médicaux produits par M. A, et notamment les certificats médicaux en date du 29 décembre 2005, du 7 septembre 2006, du 16 décembre 2008 et du 19 mai 2009, dont aucun n'affirme que le requérant serait dans l'impossibilité, en Algérie, de se voir administrer les médicaments qui lui sont prescrits en France et d'accéder aux personnels médicaux et structures requis par sa pathologie, ne sont pas de nature à remettre en cause l'avis susmentionné du médecin inspecteur de la santé publique ; que M. A n'apporte aucune précision à l'appui de son allégation selon laquelle il serait dans l'incapacité de financer son traitement médical en Algérie ; qu'enfin, les allégations de M. A selon lesquelles son état serait lié à des traumatismes qui lui ont été infligés en Algérie ne sont appuyées d'aucun commencement de preuve ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que M. A, né le 24 février 1975 en Algérie, pays dont il a la nationalité, est entré en France le 4 septembre 2005 muni d'un passeport revêtu d'un visa court séjour valable pour une durée de trente jours ; que s'il se prévaut de la durée de son séjour en France, supérieure selon lui à quatre années, et de ce qu'il y fait l'objet d'une prise en charge médicale appropriée dont il ne pourrait pas bénéficier en Algérie en raison du lien de causalité entre les troubles dont il est atteint et les traumatismes qu'il prétend avoir subis dans ce pays, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il résidait sur le territoire français depuis seulement trois ans et neuf mois à la date de la décision attaquée, et qu'il n'apporte aucun élément probant qui attesterait de la réalité des traumatismes dont il prétend avoir été victime en Algérie, ni, a fortiori, de l'existence d'un lien de causalité entre ces prétendus traumatismes et sa pathologie ; qu'en outre, M. A, célibataire et sans enfant à charge, n'établit ni même n'allègue posséder des attaches particulières en France alors qu'il n'est pas dépourvu de liens familiaux dans son pays d'origine où résident ses parents et l'ensemble des membres de sa fratrie et où lui-même a vécu jusqu'à l'âge de 30 ans en exerçant la profession de commerçant ; que, compte tenu des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour du requérant en France, la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus ; qu'elle n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant que pour les mêmes motifs que ceux qui ont été précédemment retenus dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision portant refus de délivrance de certificat de résidence algérien, la décision contestée portant obligation, pour M. A, de quitter le territoire français, n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de la décision distincte fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. et que ce dernier texte énonce que Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que la décision fixant le pays de renvoi de M. A est suffisamment motivée en droit par le visa des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui prévoient que la décision portant obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire ; que cette décision doit, par ailleurs, être regardée comme suffisamment motivée en fait par l'indication de ce que l'intéressé est de nationalité algérienne et qu'il pourra être reconduit d'office à la frontière du pays dont il a la nationalité ou de tout pays dans lequel il établirait être légalement admissible ; qu'en outre, contrairement à ce que soutient M. A, il ressort des termes mêmes de l'article L. 513-2 susmentionné du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la charge de la preuve des traitements prohibés par les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, auxquels sera soumis l'étranger dans son pays d'origine, incombe à ce dernier, à l'exclusion de l'autorité préfectorale ; que, dès lors, la décision querellée fixant le pays de destination est suffisamment motivée tant en droit qu'en fait ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Salaheddine A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 28 septembre 2010 à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

Mme Steck-Andrez, président assesseur,

M. Stillmunkes, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 octobre 2010.

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N° 10LY00001


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY00001
Date de la décision : 07/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : BORGES DE DEUS CORREIA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-10-07;10ly00001 ?
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