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15/07/2010 | FRANCE | N°09LY01294

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 15 juillet 2010, 09LY01294


Vu la requête, enregistrée le 12 juin 2009 au greffe de la Cour et rectifiée le 15 juin 2009, présentée pour Mme Catherine A, domiciliée ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0606195 - 0700113, en date du 31 mars 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2001 à 2004 ;

2°) de prononcer la décharge desdites cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu ;

Mme A s

outient que c'est à tort que le Tribunal a considéré que la réponse écrite du 26 mars 2001, ...

Vu la requête, enregistrée le 12 juin 2009 au greffe de la Cour et rectifiée le 15 juin 2009, présentée pour Mme Catherine A, domiciliée ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0606195 - 0700113, en date du 31 mars 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2001 à 2004 ;

2°) de prononcer la décharge desdites cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu ;

Mme A soutient que c'est à tort que le Tribunal a considéré que la réponse écrite du 26 mars 2001, que lui a adressée le contrôleur des impôts, ne pouvait valoir appréciation formelle sur une situation de fait au sens de l'article L. 80 B du code général des impôts ; que le contrôleur a considéré, sur la base des éléments transmis, qu'elle ne percevait pas de revenus propres et ne devait pas effectuer de déclaration distincte ; qu'elle s'est conformée aux indications données par le contrôleur des impôts et n'a pas déclaré les revenus éventuels de parts de société civile immobilière (SCI) comme des revenus propres ; que l'administration a réitéré sa position dans la proposition de rectification du 21 décembre 2004, après un nouvel examen de sa situation d'ensemble ; qu'en application des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales, aucun supplément d'imposition ne peut lui être réclamé pour les années d'imposition antérieures au revirement de position de l'administration, en 2005 ; que, si elle avait été avisée que la perception de revenus de la SCI la rendrait personnellement imposable, elle aurait pris des dispositions au regard de cette SCI ; que, concernant l'abandon du domicile conjugal, s'il est exact qu'une requête en divorce a été présentée par son époux le 10 juillet 1997 et qu'une ordonnance de non-conciliation a été rendue le 12 novembre 1997, autorisant la résidence séparée des époux, le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Villefranche-sur-Saône le 26 janvier 2000 a toutefois rejeté la demande en divorce et fait cesser les effets de l'ordonnance de non-conciliation autorisant la résidence séparée des époux ; que le fait que ce jugement ait, à titre conservatoire, arrêté des dispositions provisoires et prévu le maintien d'une contribution aux charges du mariage est, par contre, indifférent ; que l'article 6-4 du code général des impôts ne vise pas l'existence d'une résidence séparée, mais l'abandon du domicile conjugal ; que l'abandon du domicile conjugal renvoie à une rupture du foyer ayant un caractère définitif ; que les époux sont restés mariés et leur régime de communauté a perduré ; que, selon la jurisprudence, il n'y a pas rupture définitive du foyer lorsque les époux ayant des résidences distinctes agissent de concert, tant pour la gestion de leurs intérêts financiers que pour l'éducation des enfants ; que la première condition d'application de l'article 6-4 du code général des impôts fait donc défaut ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 novembre 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient, concernant la prise de position formelle de l'administration, que la réponse du service du 26 mars 2001, qui est rédigée en termes généraux, ne présente pas le caractère d'une appréciation formelle sur une situation de fait au regard d'un texte fiscal au sens de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ; qu'elle ne comporte pas davantage une interprétation de la loi fiscale différente de celle qui résulte des dispositions du c) de l'article 6-4 du code général des impôts ; que la prise de position résultant de la proposition de rectification du 21 décembre 2004 ne concerne pas le c) mais le b) de l'article 6-4 du code général des impôts ; qu'elle est, en tout état de cause, postérieure aux périodes d'imposition en litige des années 2001, 2002 et 2003 et que, s'agissant de l'année 2004, elle a été rapportée le 3 mars 2005, antérieurement à la date limite de dépôt de la déclaration de revenus ; que Mme A n'est, par suite, pas fondée à se prévaloir d'une prise de position formelle de l'administration ; que, sur le bien-fondé des impositions, les éléments du dossier caractérisent une rupture définitive du foyer des époux A ; que le caractère temporaire d'une séparation ne peut pas être invoqué ; que la circonstance que M. A vive avec une autre personne est constitutif par ce dernier d'un abandon du domicile conjugal ; que la relation des époux A était conflictuelle ; qu'aucune déclaration commune de revenus n'a été souscrite depuis 1997 ; que le jugement du Tribunal de grande instance de Villefranche-sur-Saône du 26 janvier 2000 a arrêté, à titre conservatoire, des dispositions concernant la résidence habituelle des enfants, le droit de visite du père et le versement, par ce dernier, d'une contribution aux charges du mariage ; que Mme A a déposé une nouvelle demande de divorce en 2004, qui a donné lieu à une ordonnance de non-conciliation du 22 novembre 2004 ; que ces circonstances démontrent la rupture définitive du foyer ; que, ni la mise à disposition gratuite de la maison familiale à Mme A, ni l'utilisation d'un compte bancaire commun utilisé pour les versements des pensions alimentaires ne sauraient être regardées comme des éléments constitutifs d'une reprise de vie commune ou d'une gestion commune de patrimoine ; qu'en outre, la circonstance que les époux auraient agi de concert pour la gestion d'intérêts matériels et patrimoniaux communs est sans incidence sur l'imposition distincte ; que Mme A détenait 50 % des parts de la SCI Saint Ferréol qu'elle a constituée en 1990 avec son époux et devait être regardée, conformément à l'article 8 du code général des impôts, comme disposant des revenus fonciers de cette société à concurrence de ses droits, constitutifs de revenus patrimoniaux personnels ; que l'ensemble des conditions prévues au c) de l'article 6-4 du code général des impôts étant rempli, c'est à juste titre que la requérante a été imposée, à titre personnel, à l'impôt sur le revenu au titre des années 2001 à 2004 ;

Vu les mémoires en réplique, enregistrés les 3 mars et 8 avril 2010, présentés pour Mme A, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ; elle soutient, en outre, que, concernant la prise de position formelle de l'administration, cette dernière, qui disposait de tous les éléments nécessaires, a exprimé une position claire et précise au regard du c) de l'article 6-4 du code général des impôts, à l'interrogation qui lui était soumise ; que le ministre ne peut, en conséquence, se prévaloir du caractère général de la réponse apportée le 26 mars 2001 ; que, sur le bien-fondé, elle a cessé de souscrire une déclaration séparée après le jugement du 26 janvier 2000 du Tribunal de grande instance de Villefranche-sur-Saône, conformément à l'avis du contrôleur des impôts ; que, suite à ce jugement, les époux sont restés mariés ; que seule l'assignation en divorce signifiée par elle le 23 décembre 2004 matérialise le caractère définitif de la rupture, alors même que son époux avait une relation extra-conjugale au moment où le jugement du 26 janvier 2000 a été rendu ;

Vu le mémoire en défense complémentaire, enregistré le 22 avril 2010, produit par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, qui conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ; il soutient, en outre, que le courrier du 26 mars 2001 ne peut valoir prise de position selon l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, dès lors que son auteur n'avait pas le grade de contrôleur ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 juin 2010 :

- le rapport de Mme Besson-Ledey, premier conseiller ;

- les observations de Me Gérant, avocat de Mme A ;

- et les conclusions de M. Raisson, rapporteur public ;

- la parole ayant été donnée à nouveau à Me Gérant, avocat de Mme A ;

Considérant qu'aux termes de l'article 6 du code général des impôts : 1. Chaque contribuable est imposable à l'impôt sur le revenu, tant en raison de ses bénéfices et revenus personnels que de ceux de ses enfants et des personnes considérés comme étant à sa charge au sens des articles 196 et 196 A bis. (...) / Sauf application des dispositions des 4 et 5, les personnes mariées sont soumises à une imposition commune pour les revenus perçus par chacune d'elles et ceux de leurs enfants et des personnes à charge mentionnés au premier alinéa ; cette imposition est établie au nom de l'époux, précédée de la mention Monsieur ou Madame. / (...) / 4. Les époux font l'objet d'impositions distinctes : (...) c) Lorsqu'en cas d'abandon du domicile conjugal par l'un ou l'autre des époux, chacun dispose de revenus distincts. (...) ; qu'en vertu des dispositions combinées des articles 193 et 194 du code général des impôts, le revenu imposable est, pour le calcul de l'impôt sur le revenu, divisé en un certain nombre de parts, qui est de 1 pour un contribuable célibataire et de 2 pour un couple marié sans enfant à charge, l'article 194 précisant qu' en cas d'imposition séparée des époux (...) chaque époux est considéré comme un célibataire (...) ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'administration doit, lorsqu'elle entend soumettre à des impositions distinctes, selon le régime applicable aux célibataires, des époux non séparés de biens et disposant de revenus distincts, apporter la preuve de la cessation de toute vie commune entre eux pendant l'année ou les années d'imposition concernées ; qu'eu égard aux dispositions du premier alinéa de l'article 108 du code civil, selon lesquelles le mari et la femme peuvent avoir des résidences séparées, sans qu'il soit pour autant porté atteinte aux règles relatives à la communauté de vie , cette preuve ne peut résulter de la seule existence de telles résidences séparées ;

Considérant que ni la circonstance que les relations entre les époux étaient conflictuelles, ni le fait que M. A ne résidait plus au domicile conjugal mais chez une autre personne, ni celui qu'aucune déclaration de revenus commune n'a été souscrite, ne peuvent, dans les circonstances de l'espèce, suffire à établir un abandon du domicile conjugal par M. A, de nature à entraîner une imposition séparée, alors qu'il est constant que M. et Mme A étaient mariés au cours des années d'imposition en litige selon le régime légal de communauté, qu'ils n'étaient pas en instance de séparation de corps ou de divorce, que leurs relations étaient régies par un jugement du Tribunal de grande instance de Villefranche-sur-Saône du 26 janvier 2000 qui, après avoir rejeté la demande de divorce présentée par M. A, a, notamment, ordonné l'exercice conjoint de l'autorité parentale des époux sur leurs enfants et condamné M. A au paiement d'une pension alimentaire mensuelle au titre de sa participation aux charges du mariage et qu'il ne résulte pas de l'instruction que M. A se serait soustrait à ses obligations et, qu'en outre, il assurait, ainsi que le prétend la requérante, sans être contredite, le remboursement de l'emprunt ayant servi à l'acquisition du logement familial dans lequel résidait Mme A ; que, par suite, l'administration n'était pas fondée à procéder au rehaussement des revenus de Mme A sur le fondement du c) de l'article 6-4 du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2001 à 2004 ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon du 31 mars 2009 est annulé.

Article 2 : Mme A est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2001 à 2004, à raison de son imposition séparée de celle de son époux.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Catherine A et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

Délibéré après l'audience du 24 juin 2010 à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président,

Mme Jourdan et Mme Besson-Ledey, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 15 juillet 2010.

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N° 09LY01294


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY01294
Date de la décision : 15/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: Mme Laurence BESSON-LEDEY
Rapporteur public ?: M. RAISSON
Avocat(s) : BCF et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-07-15;09ly01294 ?
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