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07/07/2010 | FRANCE | N°10LY00780

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 07 juillet 2010, 10LY00780


Vu I/ sous le n° 10LY00780, la requête, enregistrée à la Cour par télécopie 6 avril 2010 et régularisée le 8 avril 2010, présentée par le PREFET DE LA DROME ;

Le PREFET DE LA DROME demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000007, en date du 16 mars 2010, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble, en premier lieu, a annulé ses décisions du 4 décembre 2009 par lesquelles il a refusé à M. Aissa A la délivrance d'un titre de séjour, il a fait obligation à ce dernier de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et il a désigné le p

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Vu I/ sous le n° 10LY00780, la requête, enregistrée à la Cour par télécopie 6 avril 2010 et régularisée le 8 avril 2010, présentée par le PREFET DE LA DROME ;

Le PREFET DE LA DROME demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000007, en date du 16 mars 2010, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble, en premier lieu, a annulé ses décisions du 4 décembre 2009 par lesquelles il a refusé à M. Aissa A la délivrance d'un titre de séjour, il a fait obligation à ce dernier de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et il a désigné le pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite, en deuxième lieu, lui a enjoint de délivrer à M. A un certificat de résidence algérien d'une durée d'un an et, en dernier lieu, a mis à sa charge la somme de mille euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Aissa A devant le Tribunal administratif ;

Il soutient que les premiers juges auraient dû tenir compte du fait qu'il les avait informés de ce qu'il avait décidé de convoquer M. A devant la commission du titre de séjour ; que M. A n'établit pas l'ancienneté alléguée de sa résidence habituelle sur le territoire français ni la réalité des activités professionnelles qu'il a exercées et que les années qu'il a passées en France sous une identité usurpée ne sauraient être prises en compte ; que M. A est célibataire, sans enfant, et n'établit pas le caractère indispensable de sa présence aux côtés de sa mère malade, alors que cette dernière ne se trouve pas isolée sur le territoire français ; que son arrêté en litige n'a donc pas méconnu les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; que la présence en France de M. A constitue une menace pour l'ordre public ; que la délivrance d'un certificat de résidence d'un an à M. A donnerait ensuite droit à ce dernier à un titre de séjour de dix ans ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré par télécopie à la Cour le 7 mai 2010 et régularisé le 12 mai 2010, présenté par le PREFET DE LA DROME, qui maintient les conclusions de sa requête, par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que M. A a été muni d'un récépissé de dépôt de demande de titre de séjour valable jusqu'au 5 août 2010 et qu'il est convoqué devant la commission du titre de séjour le 23 juin 2010 ;

Vu, sous une forme irrégulière, le mémoire enregistré le 7 mai 2010, présenté par M. A ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 juin 2010, présenté pour M. Aissa A, domicilié ..., qui conclut au rejet de la requête du PREFET DE LA DROME et demande en outre à la Cour :

1°) d'enjoindre au PREFET DE LA DROME de lui délivrer un certificat de résidence algérien d'un an portant la mention vie privée et familiale , dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de deux mille euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient qu'il réside en France depuis 1958 et que la décision de refus de délivrance de titre de séjour en litige a donc méconnu les stipulations du 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ; que tous les membres de sa famille proche vivent régulièrement en France, où lui-même réside depuis son enfance et qu'il n'a plus de lien avec l'Algérie ; que la décision de refus de titre de séjour contestée méconnaît donc les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien susmentionné ; que, pour les mêmes motifs, et alors qu'il ne parle pas l'arabe et prend soin de sa mère malade, cette décision méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que s'il a vécu en France sous une identité usurpée, entre 1982 et 2006, il a été condamné pour ces faits et ne présente pas une menace pour l'ordre public ; qu'enfin, le PREFET DE LA DROME n'a pas fait précéder son refus de titre de séjour d'un examen préalable de l'ensemble de sa situation et a commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;

VU, II/, sous le n° 10LY00781, la requête, enregistrée à la Cour par télécopie 6 avril 2010 et régularisée le 8 avril 2010, présentée par le PREFET DE LA DROME ;

Le PREFET DE LA DROME demande à la Cour :

1°) de prononcer, en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement n° 1000007, en date du 16 mars 2010, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé ses décisions du 4 décembre 2009 par lesquelles il a refusé à M. Aissa A la délivrance d'un titre de séjour, il a fait obligation à ce dernier de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et il a désigné le pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2°) de prononcer, en application de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à exécution de ce même jugement, en ce qu'il lui a enjoint de délivrer à M. A un certificat de résidence algérien d'une durée d'un an ;

3°) de prononcer, en application de l'article R. 811-16 du code de justice administrative, le sursis à exécution dudit jugement, en ce qu'il a mis à sa charge la somme de mille euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il reprend les mêmes moyens que ceux, énoncés ci-dessus, qu'il invoque dans sa requête enregistrée sous le n° 10LY00780, et soutient en outre, d'une part, que la délivrance d'un titre de séjour d'un an à M. A lui donnerait droit, à l'expiration de la durée de validité de ce titre, à la délivrance d'un titre de séjour d'une durée de dix ans et, d'autre part, que le versement de la somme mise à sa charge en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative l'exposerait au risque de ne pas être en mesure de recouvrer ensuite cette somme en cas d'insolvabilité de M. A ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré par télécopie à la Cour le 7 mai 2010 et régularisé le 12 mai 2010, présenté par le PREFET DE LA DROME, qui maintient les conclusions de sa requête, par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que M. A a été muni d'un récépissé de dépôt de demande de titre de séjour valable du 6 mai 2010 au 5 août 2010 et qu'il est convoqué devant la commission du titre de séjour le 23 juin 2010 ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 juin 2010, présenté pour M. Aissa A, domicilié ..., qui conclut au rejet de la requête du PREFET DE LA DROME et demande en outre à la Cour :

1°) d'enjoindre au PREFET DE LA DROME de lui délivrer un certificat de résidence algérien d'un an portant la mention vie privée et familiale , dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de deux mille euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il reprend les mêmes moyens, énoncés ci-dessus, qu'il invoque dans son mémoire produit en défense dans le cadre de la requête enregistrée à la Cour sous le n° 10LY00780 ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 juin 2010 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

Considérant que les requêtes enregistrées sous les numéros 10LY00780 et 10LY00781 sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la requête enregistrée à la Cour sous le n° 10LY00780 :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que par jugement du 16 mars 2010, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé, pour méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la décision du 4 décembre 2009, par laquelle le PREFET DE LA DROME a rejeté la demande de délivrance de titre de séjour que lui avait présentée M. A ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, ressortissant algérien né en 1949, est arrivé en France avec sa famille durant son enfance et a été scolarisé dans ce pays ; que s'il a fait l'objet d'une décision d'expulsion, en 1966, en raison d'un délit commis alors qu'il était encore mineur, il est ensuite revenu, à une date indéterminée, en France où s'était installée sa famille et où vivent toujours sa mère, entrée en France en 1958 et titulaire d'un certificat de résidence algérien d'un durée de validité de dix ans, ainsi que ses frères et soeurs de nationalité française ; qu'il établit, en particulier, par les contrats de travail, bulletins de paye et documents fiscaux qu'il produit, résider habituellement sur le territoire français depuis de longues années et, en tout état de cause, depuis une durée largement supérieure à dix années, et doit être regardé, eu égard à la très grande ancienneté de son séjour sur le territoire français, où se situent ses attaches familiales, comme ayant fixé en France le centre de ses intérêts privés et familiaux ; que la circonstance qu'il se soit maintenu en France sous couvert de l'identité usurpée d'un ressortissant français, entre 1982 et 2006, et qu'il ait été condamné par le Tribunal correctionnel de Nice, le 2 janvier 2007, à une peine principale de six mois d'emprisonnement avec sursis pour avoir notamment falsifié et fait usage de documents administratifs constatant un droit, une identité ou une qualité, ne saurait avoir pour effet de permettre de regarder sa présence en France comme constituant actuellement une menace pour l'ordre public ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée de séjour de M. A en France, la décision du 4 décembre 2009 par laquelle le PREFET DE LA DROME a refusé à M. A la délivrance d'un titre de séjour a porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus ; qu'elle a, dès lors, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA DROME n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé ses décisions du 4 décembre 2009 par lesquelles il a refusé à M. Aissa A la délivrance d'un titre de séjour, il a fait obligation à ce dernier de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et il a désigné le pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite, lui a enjoint de délivrer à M. A un certificat de résidence algérien d'une durée d'un an et a mis à sa charge la somme de mille euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

En ce qui concerne les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. A :

Considérant que le présent arrêt implique nécessairement que le PREFET DE LA DROME lui délivre un certificat de résidence algérien portant la mention vie privée et familiale ; que, toutefois, l'injonction déjà prononcée en ce sens par le tribunal administratif a rempli l'intéressé de ses droits ; qu'il n'y a pas lieu de compléter ou modifier le dispositif adopté par les premiers juges sur ce point ;

En ce qui concerne les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat quelque somme que ce soit au profit de l'avocat de M. A en application des dispositions susmentionnées ;

Sur la requête enregistrée à la Cour sous le n° 10LY00781 :

Considérant que le présent arrêt statuant sur la requête en annulation présentée contre le jugement n° 1000007, en date du 16 mars 2010, du Tribunal administratif de Grenoble, la requête n° 10LY00781 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution dudit jugement est devenue sans objet ; qu'il n'y a plus lieu d'y statuer ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur la requête enregistrée sous le n° 10LY00781 du PREFET DE LA DROME.

Article 2 : La requête du PREFET DE LA DROME enregistrée sous le n° 10LY00780 est rejetée.

Article 3 : Les conclusions aux fins d'injonction et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, présentées pour M. A devant la Cour, sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au PREFET DE LA DROME, à M. Aissa A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Délibéré après l'audience du 30 juin 2010, à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Bézard, président de chambre,

Mme Chevalier-Aubert, Premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 juillet 2010.

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N° 10LY00780 - 10LY00781


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY00780
Date de la décision : 07/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : LADET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-07-07;10ly00780 ?
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