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16/06/2010 | FRANCE | N°09LY00423

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 16 juin 2010, 09LY00423


Vu la requête, enregistrée à la Cour le 27 février 2009, présentée par le PREFET DE

SAÔNE-ET-LOIRE ;

Le PREFET DE SAÔNE-ET-LOIRE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802433 - 0802434, en date du 29 janvier 2009, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a annulé ses décisions du 8 août 2008 désignant l'Arménie comme pays à destination duquel M. A et Mlle B seraient reconduits à l'expiration d'un délai d'un mois, à défaut pour eux d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui leur était faite par des décisions

du même jour ;

2°) de rejeter les demandes dirigées contre les décisions susmentionnées, ...

Vu la requête, enregistrée à la Cour le 27 février 2009, présentée par le PREFET DE

SAÔNE-ET-LOIRE ;

Le PREFET DE SAÔNE-ET-LOIRE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802433 - 0802434, en date du 29 janvier 2009, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a annulé ses décisions du 8 août 2008 désignant l'Arménie comme pays à destination duquel M. A et Mlle B seraient reconduits à l'expiration d'un délai d'un mois, à défaut pour eux d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui leur était faite par des décisions du même jour ;

2°) de rejeter les demandes dirigées contre les décisions susmentionnées, présentées par M. A et Mlle B devant le Tribunal administratif ;

Il soutient, à titre principal, qu'en mettant à sa charge la preuve de la possibilité de réadmission en Arménie de Mlle B, alors qu'il appartient à l'intéressée de démontrer qu'elle ne serait pas admissible dans ce pays, les premiers juges ont commis une erreur de droit ; à titre subsidiaire, qu'en tout état de cause, Mlle B devait être regardée comme réadmissible en Arménie, pays où elle avait sa résidence habituelle et dont elle maîtrisait la langue et la culture, et alors qu'elle ne démontrait pas la réalité de son ascendance azérie ; qu'il n'a donc pas commis d'erreur d'appréciation en désignant ce pays comme destination de la mesure d'éloignement prise à l'encontre de Mlle B ; que le jugement attaqué est donc entaché d'une erreur de fait ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 11 mai 2009, présenté pour M. A et Mlle B, qui concluent au rejet de la requête et demandent à la Cour, d'une part, d'annuler le jugement n° 0802433-0802434, en date du 29 janvier 2009, du Tribunal administratif de Dijon, en ce qu'il a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation des décision du 8 août 2008 du PREFET DE SAÔNE-ET-LOIRE leur refusant la délivrance d'un titre de séjour et leur faisant obligation de quitter le territoire français et, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat la somme 2 000 euros, au profit de leur conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Ils soutiennent que les décisions portant refus de délivrance de titre de séjour sont entachées d'un défaut de motivation et que le préfet, qui n'a pas statué sur leur demande du 17 juillet 2008, laquelle doit être regardée comme fondée sur les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'a pas procédé à un examen de l'ensemble de leur situation personnelle ; que ces décisions de refus méconnaissent les dispositions de l'article L. 313-14 du code susmentionné ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont, en outre, entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ; que les décisions portant obligation de quitter le territoire français sont illégales en conséquence de l'illégalité des décisions portant refus de délivrance de titre de séjour qui les fondent, sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention susmentionnée ainsi que celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; que la décision désignant l'Arménie comme pays de destination de la mesure d'éloignement prise à l'encontre de Mlle B méconnaît les dispositions du 3° de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que cette décision et celle fixant le pays de renvoi de M. A méconnaissent les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 juin 2010 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- les observations de M. A et Mlle B,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée à nouveau à M. A et Mlle B ;

Sur l'appel incident de M. A et Mlle B :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens soulevés par les intéressés ;

Considérant que selon leurs déclarations, M. A et Mlle B sont entrés irrégulièrement sur le territoire français le 21 septembre 2006 ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'ils ont déposé une demande d'asile qui a été rejetée par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 10 mai 2007, confirmées le 2 juillet 2008 par la Cour nationale du droit d'asile ; que, par un courrier du 17 juillet 2008, M. A et Mlle B ont déposé auprès du PREFET DE SAÔNE-ET-LOIRE un recours gracieux suite au rejet de leurs demandes d'asile, et ont sollicité la régularisation de leur situation afin de permettre à M. A d'exercer une activité professionnelle pour subvenir aux besoins de sa famille, en indiquant précisément qu'il s'agissait d'une demande de régularisation par le travail ; que, par des arrêtés du 8 août 2008, le PREFET DE SAÔNE-ET-LOIRE a refusé à M. A et Mlle B la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il ressort des mentions de ces arrêtés que le PREFET DE SAÔNE-ET-LOIRE, prenant acte du rejet des demandes d'asile formulées par les intéressés, a refusé à ces derniers la délivrance de la carte de résident prévue par les dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la carte de séjour temporaire prévue à l'article L. 313-13 du même code ; qu'il a toutefois également entendu répondre à la demande qui avait été formulée par le courrier des intéressés du 17 juillet 2008, qui est visée par ces arrêtés ; que si ces décisions indiquent que la situation de M. A et Mlle B ne justifie pas une dérogation à la réglementation, il n'est fait référence qu'à l'atteinte portée au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale eu égard au caractère irrégulier de leur séjour en France et au fait que l'ensemble de la famille composée du couple et de ses deux enfants pourra repartir ensemble en Arménie ; qu'ainsi, il ne ressort, ni des pièces du dossier, ni des termes des arrêtés contestés que le PREFET DE SAÔNE-ET-LOIRE a procédé à l'examen préalable de la situation personnelle de M. A et Mlle B au regard de l'objet de la demande du 17 juillet 2008, qui était motivée par la volonté, exprimée par M. A, d'exercer une activité professionnelle sur le territoire français ; que, par suite, les refus de délivrance de titre de séjour opposés à M. A et Mlle B, le 8 août 2008, ont été pris à l'issue d'une procédure irrégulière et encourent l'annulation ainsi que, par voie de conséquence, les décisions du même jour faisant obligation aux intéressés de quitter le territoire français dans le délai d'un mois ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A et Mlle B sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions du PREFET DE SAÔNE-ET-LOIRE, du 8 août 2008, leur refusant la délivrance d'un titre de séjour et leur faisant obligation de quitter le territoire français ;

Sur l'appel principal du PREFET DE SAÔNE-ET-LOIRE :

Considérant que l'annulation des décisions susmentionnées portant obligation de quitter le territoire français prive de base légale les décisions du 8 août 2008 par lesquelles le PREFET DE SAÔNE-ET-LOIRE a fixé le pays de destination des mesures d'éloignement prises à l'encontre de M. A et Mlle B ; que, par suite, le PREFET DE SAÔNE-ET-LOIRE n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a annulé ces décisions ;

Sur les conclusions de M. A et Mlle B tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que M. A et Mlle B ont obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, leur avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Clemang, avocat de M. A et de Mlle B, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de mille euros au profit de Me Clemang, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0802433-0802434, en date du 29 janvier 2009, du Tribunal administratif de Dijon est annulé en ce qu'il a rejeté les conclusions de M. A et Mlle B tendant à l'annulation des décisions du 8 août 2008 par lesquelles le PREFET DE SAÔNE-ET-LOIRE leur a refusé la délivrance d'un titre de séjour et leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois.

Article 2 : Les décisions du 8 août 2008 par lesquelles le PREFET DE SAÔNE-ET-LOIRE a refusé à M. A et Mlle B la délivrance d'un titre de séjour et leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois sont annulées.

Article 3 : En application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'Etat versera la somme de mille euros à Me Clemang, avocat de M. A et de Mlle B, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 4 : La requête du PREFET DE SAÔNE-ET-LOIRE est rejetée.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au PREFET DE SAÔNE-ET-LOIRE, à M. Alik A, à Mlle Naïna B et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Délibéré après l'audience du 9 juin 2010, à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Montsec, président assesseur,

Mme Jourdan, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 juin 2010.

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N° 09LY00423


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY00423
Date de la décision : 16/06/2010
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : CLEMANG

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-06-16;09ly00423 ?
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