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06/05/2010 | FRANCE | N°08LY00282

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 06 mai 2010, 08LY00282


Vu la requête, enregistrée à la Cour le 5 février 2009, présentée pour La SAS ONET SERVICES, ayant son siège social 20 traverse de Pomègues à Marseille (13414 Cedex 20) ;

La SOCIETE ONET SERVICES demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0503993 du 4 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 14 avril 2005 de l'inspectrice du travail autorisant le licenciement de M. Pascal A ;

2°) de confirmer la décision de l'inspectrice du travail ;

3°) de condamner M. A à lui verser une somme 2 000 e

uros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société soutie...

Vu la requête, enregistrée à la Cour le 5 février 2009, présentée pour La SAS ONET SERVICES, ayant son siège social 20 traverse de Pomègues à Marseille (13414 Cedex 20) ;

La SOCIETE ONET SERVICES demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0503993 du 4 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 14 avril 2005 de l'inspectrice du travail autorisant le licenciement de M. Pascal A ;

2°) de confirmer la décision de l'inspectrice du travail ;

3°) de condamner M. A à lui verser une somme 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société soutient que la formulation de l'inspectrice du travail ne suffit pas à établir l'absence de recherche d'un éventuel lien avec le mandat ; que le Tribunal n'a caractérisé ni l'absence de recherche par l'inspectrice du travail, ni l'existence d'un lien entre le licenciement et le mandat de M. A ; que l'administration peut substituer à tout moment une nouvelle motivation ; que le tribunal a soulevé d'office le moyen tiré de l'erreur de droit ; que le jugement du tribunal est entaché d'erreur matérielle dès lors qu'il mentionne à tort que Me Durand représentait l'administration alors qu'il la représentait ; que le moyen tiré de la partialité de l'inspectrice du travail devra être écarté dès lors que cette dernière s'est déportée ; que le moyen tiré de la prescription au regard des dispositions de l'article L. 122-44 du code du travail devra être écarté dès lors qu'elle a eu connaissance des faits fautifs le 27 janvier 2005 et a engagé la procédure disciplinaire dès le 14 février suivant ; que le moyen tiré de l'imprécision des motifs de l'autorisation de licenciement et du licenciement manque en fait ; que l'inspectrice du travail n'a pas violé le principe du contradictoire ; que les faits de harcèlement moral, qui sont établis et qu'elle n'a jamais couverts, sont d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement de M. A ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 28 juillet 2008 pour M. A qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la société ONET SERVICES à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A soutient que c'est à bon droit que le tribunal a jugé que l'inspectrice avait méconnu l'étendue de ses pouvoirs ainsi qu'il l'avait soutenu dès sa requête introductive d'instance ; que l'inspectrice du travail n'était pas impartiale dès lors qu'elle a participé à la procédure de licenciement ; que l'enquête menée par l'inspection du travail a méconnu les principes élémentaires du contradictoire ; que la décision est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne permet pas de connaître les griefs qui lui sont adressés ni les personnes à l'origine de ces griefs ; que l'inspectrice aurait dû vérifier que les faits reprochés n'étaient pas prescrits au regard des dispositions de l'article L. 122-44 du code du travail ; que les griefs allégués étaient prescrits à l'engagement de la procédure de licenciement en application de l'article L. 1332-4 du code du travail ; que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis ; que son licenciement est en rapport avec son mandat syndical ;

Vu le mémoire enregistré le 18 décembre 2008 présenté pour la société ONET SERVICES qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire enregistré le 7 septembre 2009 présenté pour M. A qui conclut aux mêmes fins que son mémoire précédent par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 avril 2010 :

- le rapport de M. Monnier, rapporteur,

- les observations de Me Durand au nom de la SCP Dufour - Hartemann - Martin - Palazzolo, avocat de la SOCIETE ONET SERVICES ;

- et les conclusions de M. Gimenez, rapporteur public ;

- La parole ayant été de nouveau donnée à Me Durand ;

Considérant que la société ONET SERVICES relève appel de l'article 1er du jugement du 4 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé la décision en date du 14 avril 2005 de l'inspectrice du travail autorisant le licenciement de M. Pascal A, alors délégué du personnel ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : La décision mentionne que l'audience a été publique (...). / Elle contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application / Mention y est faite que le rapporteur et le commissaire du gouvernement et, s'il y a lieu, les parties, leurs mandataires ou défenseurs ainsi que toute personne entendue sur décision du président en vertu du deuxième alinéa de l'article R. 731-3 ont été entendus. / Mention est également faite de la production d'une note en délibéré. / La décision fait apparaître la date de l'audience et la date à laquelle elle a été prononcée. ;

Considérant qu'au cours de l'audience publique, qui s'est tenue le 20 novembre 2007, le tribunal a entendu les observations orales de Me Durand, substituant Me Martin, ès qualité d'avocat de la SOCIETE ONET SERVICES ; que c'est dès lors à tort que le jugement attaqué mentionne que les observations de cet avocat ont été faites pour le compte du directeur régional du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de Rhône-Alpes ; que, par suite, la SOCIETE ONET SERVICES est fondée à soutenir que le jugement, qui ne satisfait pas aux exigences de l'article R. 741-2 précité du code de justice administrative, est irrégulier ; qu'il suit de là que, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen tiré de l'irrégularité du jugement, l'article 1er de ce jugement annulant l'autorisation litigieuse, dont la société requérante s'est bornée à demander l'annulation, doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Lyon tendant à l'annulation de la décision de l'inspectrice du travail ;

Sur la légalité de la décision de l'inspectrice du travail :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 122-50 du code du travail alors en vigueur, dont les dispositions sont désormais reprises à l'article L. 1152-4 du même code : L'employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral ; qu'aux termes des dispositions de l'article L. 122-51, reprises à l'article L. 1152-5 du code du travail : Tout salarié ayant procédé à des agissements de harcèlement moral est passible d'une sanction disciplinaire ;

Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les délégués du personnel bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou avec l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, fût-il constitutif de harcèlement, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables à son contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

Considérant que, pour demander l'autorisation de licencier M. A, qu'elle employait en qualité d'inspecteur, et qui était délégué du personnel, la société ONET SERVICES s'est fondée sur les agissements de harcèlement vis-à-vis de certains de ses collègues de travail ; que, pour autoriser ce licenciement, l'inspectrice du travail a vérifié que les faits allégués étaient établis et que les fautes commises par M. A était d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement mais s'est bornée à constater que la demande de licenciement était sans lien avec le mandat du seul fait qu'elle constituait une application des dispositions précitées des articles L. 122-50 et L. 122-51 du code du travail ; que, ce faisant, elle a méconnu l'étendue de sa compétence en ne recherchant pas si la demande d'autorisation de licenciement n'était pas, bien qu'elle fût fondée sur des agissements de harcèlement alors visés par les articles L. 122-50 et L. 122-51 du code du travail, en rapport avec son mandat de délégué du personnel, et a ainsi entaché d'erreur de droit sa décision quand bien même l'administration aurait établi, postérieurement à la décision attaquée, l'absence de lien entre le licenciement et le mandat ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa demande, que M. A est fondé à demander l'annulation de la décision attaquée ;

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la société ONET SERVICES à payer à M. A une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative précitées, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la société ONET SERVICES doivent, dès lors, être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement du 4 décembre 2007 du Tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : La décision en date du 14 avril 2005 de l'inspectrice du travail autorisant le licenciement de M. Pascal A est annulée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société ONET SERVICES est rejeté.

Article 4 : La société ONET SERVICES versera à M. Pascal A une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société ONET SERVICES, à M. Pascal A et au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.

Délibéré après l'audience du 8 avril 2010, où siégeaient :

Mme Serre, présidente de chambre,

MM. Monnier et Segado, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 6 mai 2010.

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N° 08LY00282


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY00282
Date de la décision : 06/05/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme SERRE
Rapporteur ?: M. Pierre MONNIER
Rapporteur public ?: M. GIMENEZ
Avocat(s) : SCP DUFOUR-HARTEMANN-MARTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-05-06;08ly00282 ?
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