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02/03/2010 | FRANCE | N°09LY01188

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 02 mars 2010, 09LY01188


Vu la requête, enregistrée le 2 juin 2009 à la Cour, présentée pour M. Pline A, domicilié chez M. Bouba Moutome, 15 rue François Guillard à Vaulx-en-Velin (69120) ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0806367, en date du 29 décembre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône du 16 juin 2008 portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant le pays de destination ;

2°) d'an

nuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet...

Vu la requête, enregistrée le 2 juin 2009 à la Cour, présentée pour M. Pline A, domicilié chez M. Bouba Moutome, 15 rue François Guillard à Vaulx-en-Velin (69120) ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0806367, en date du 29 décembre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône du 16 juin 2008 portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, en cas d'annulation de la décision portant refus de renouvellement du titre de séjour, de lui délivrer un titre de séjour l'autorisant à travailler, dans le délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, en cas d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation, dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient que :

- la décision portant refus de renouvellement du titre de séjour est entachée d'erreur de droit au regard des dispositions des articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article R. 5221-20 du code du travail ;

- cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, d'erreur de fait et méconnaît les énonciations de la circulaire du 7 janvier 2008 ;

- cette décision méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination sont entachées d'erreur de droit au regard des dispositions des articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article R. 5221-20 du code du travail ;

- ces deux décisions sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;

- elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 novembre 2009, présenté par le préfet du Rhône, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que les décisions portant refus de renouvellement du titre de séjour, portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ne sont pas entachées d'erreur de droit au regard des dispositions de l'article R. 5221-20 du code du travail, ni d'erreur manifeste d'appréciation ; que la circulaire du 7 janvier 2008 n'est pas invocable ; que ces décisions ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale dès lors qu'il peut vivre de manière autonome au Cameroun où il pourra faire valoir les études qu'il y a poursuivies ; que, par ailleurs, la promesse d'embauche dont il fait état en qualité d'ouvrier polyvalent ne répond pas aux conditions de l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance des autorisations de travail aux non-ressortissants d'un état membre de l'Union européenne ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, section administrative d'appel, en date du 31 mars 2009, par laquelle a été accordée à M. A l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 février 2010 :

- le rapport de Mme Jourdan, premier conseiller ;

- les observations de Me Guérault, avocat de M. A ;

- et les conclusions de M. Raison, rapporteur public ;

La parole ayant été de nouveau donnée à Me Guérault, avocat de M. A ;

Considérant que M. A, né le 21 août 1980 au Cameroun, pays dont il a la nationalité, a effectué une partie de ses études en Côte d'Ivoire, où il a obtenu le 16 juillet 1997 son baccalauréat, avant de s'inscrire en sciences juridiques à l'université d'Abidjan ; que l'intéressé est entré sur le territoire français le 29 août 2001, sous couvert d'un visa étudiant valable un an ; que, par décision du 30 décembre 2004, le préfet du Rhône lui a refusé le renouvellement de ce titre au motif que la progression et la réalité de ses études n'étaient pas établies ; que M. A s'est alors maintenu sur le territoire national en dépit d'un arrêté de reconduite à la frontière en date du 14 juin 2005, puis a, par courrier en date du 26 mai 2008, demandé au préfet du Rhône, sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un titre de séjour ; que, par décisions en date du 16 juin 2008, le préfet du Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour portant la mention salarié, l'a obligé à quitter le territoire et a fixé le Cameroun comme pays de renvoi ; que l'intéressé relève appel du jugement, en date du 29 décembre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation desdites décisions ;

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) ; qu'aux termes de l'article L. 313-10 du même code : La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. / Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2 (...) ; qu'aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail, qui a remplacé à compter du 1er mai 2008 l'article L. 341-2 : Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ; qu'aux termes de l'article R. 5221-20 du même code : Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes de placement concourant au service public du placement pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; 2° L'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'étranger et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule ; 3° le respect par l'employeur, l'utilisateur, l'entreprise d'accueil ou l'employeur, l'utilisateur mentionné à l'article L. 1251-1 ou l'entreprise d'accueil de la législation relative au travail et à la protection sociale ; 4° Le cas échéant, le respect par l'employeur, l'utilisateur, l'entreprise d'accueil ou le salarié des conditions réglementaires d'exercice de l'activité considérée ; (...) ;

Considérant que M. A fait valoir que le préfet aurait commis une erreur de droit en examinant sa demande au regard des dispositions de l'article R. 5221-20 du code du travail, relatives à la délivrance d'une autorisation de travail, alors que le titre sollicité était fondé sur les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ; qu'il résulte toutefois expressément des termes de la décision litigieuse que le préfet a visé le fondement de la demande du requérant, avant d'estimer qu'il ne faisait état d'aucune considération ou motif exceptionnel exigé par les dispositions dont il entend se prévaloir ;

Considérant que la nécessité invoquée, notamment économique, pour la société Saccucci Pneu, exerçant une activité d'expédition de pneus à destination de l'Afrique, d'embaucher M. A en qualité d'ouvrier polyvalent et la production d'un contrat à durée indéterminée en qualité d'ouvrier polyvalent, conclu le 24 juin 2008, quelques jours après l'intervention de la décision litigieuse, ne sont pas, dans les circonstances de l'espèce, de nature à constituer un motif exceptionnel au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le requérant n'est donc pas fondé à soutenir que le préfet aurait, sur ce point, entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant que M. A ne peut utilement se prévaloir des énonciations de la circulaire du 7 janvier 2008 relative à la délivrance des cartes de séjour portant la mention salarié , dépourvue de caractère réglementaire ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que M. A soutient qu'il est dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, qu'il a quitté depuis de nombreuses années, et qu'il présente de réelles opportunités d'être embauché en France ; que, toutefois, si le requérant se prévaut de la durée de son séjour en France, où il réside depuis son arrivée en 2001, il ne conteste pas s'être maintenu sur le territoire national de façon irrégulière depuis 2004 ; qu'il est célibataire, sans enfants à charge ; qu'eu égard à la durée et aux conditions de séjour de M. A en France et alors même qu'il avait séjourné plusieurs années en Côte d'Ivoire avant de venir en France, la décision contestée n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :

Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux précédemment évoqués, M. A ne peut soutenir que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination emporteraient à son encontre des conséquences d'une exceptionnelle gravité ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse M. A la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Pline A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 4 février 2010 à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président,

Mmes Jourdan et Besson-Ledey, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 2 mars 2010.

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N° 09LY01188


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY01188
Date de la décision : 02/03/2010
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: Mme Dominique JOURDAN
Rapporteur public ?: M. RAISSON
Avocat(s) : GUERAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-03-02;09ly01188 ?
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