La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/02/2010 | FRANCE | N°09LY01361

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 03 février 2010, 09LY01361


Vu la requête, enregistrée le 17 juin 2009 à la Cour, présentée pour Mme Mina A, domiciliée ...

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0804962, en date du 23 octobre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 30 juin 2008 du préfet du Rhône portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai, à défaut pour elle d'o

btempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2...

Vu la requête, enregistrée le 17 juin 2009 à la Cour, présentée pour Mme Mina A, domiciliée ...

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0804962, en date du 23 octobre 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 30 juin 2008 du préfet du Rhône portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai, à défaut pour elle d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte, de réexaminer sa situation et de prendre à son encontre une nouvelle décision ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1300 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Elle soutient que la décision portant refus de délivrance de titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors que sa présence auprès de son père, résident régulier en France, âgé et malade, revêt un caractère indispensable ; que cette décision méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, eu égard à l'ancienneté de son séjour et à ses attaches sur le territoire français ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 28 octobre 2009, présenté pour le préfet du Rhône, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient, à titre principal, que l'appelante reprend ses observations de première instance sans mettre le juge d'appel en mesure de se prononcer sur les prétendues erreurs commises par les premiers juges et que la requête est, de ce fait, irrecevable ; à titre subsidiaire, que les décisions contestées n'ont pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'elles ne sont pas davantage entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;

Vu la décision du 3 mars 2009, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 janvier 2010 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- les observations de Me Ouchia, avocat de Mme A,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée à nouveau à Me Ouchia ;

Considérant que Mme A, ressortissante marocaine, a sollicité, au mois d'avril 2008, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° ou, à défaut, du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par décisions du 30 juin 2008, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que, par jugement du 23 octobre 2008, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de Mme A, tendant à l'annulation de ces trois décisions ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet du Rhône :

Considérant que la requête de Mme A, qui ne constitue pas la seule reproduction littérale de sa demande présentée au Tribunal administratif de Lyon, contient l'exposé des faits et des moyens ainsi que l'énoncé des conclusions soumises à la Cour ; qu'elle est, par suite, suffisamment motivée ; que, dès lors, la fin de non recevoir opposée par le préfet du Rhône, tirée du défaut de motivation de la requête, doit être écartée ;

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen de la requête ;

Considérant qu'il ressort d'un rapport médical établi le 19 septembre 2007 par un médecin spécialiste en maladies du coeur et des vaisseaux, que le père de la requérante, âgé de soixante dix-huit ans, souffre d'insuffisance cardiaque et de diabète insulino-dépendant, que le lourd traitement qui lui est administré est responsable d'une asthénie et que cet état de santé justifie une étroite surveillance médicale, une observance médicamenteuse précise ainsi qu'une assistance de la part d'un tiers, du fait de l'autonomie limitée de l'intéressé ; qu'il ressort des pièces du dossier que le père de la requérante, qui est titulaire d'un certificat de résidence de dix ans valable jusqu'au 23 février 2011, est veuf depuis 1998 et qu'il est affirmé, sans être contredit, qu'il ne dispose pas d'autre attache sur le territoire français que sa fille, Mme Mina A, âgée de quarante-huit ans, qui vit avec lui et qui l'assiste dans les actes de la vie courante et dans sa prise en charge médicamenteuse ; qu'eu égard à son âge, à son degré d'autonomie et à l'intensité des soins rendus nécessaires par son état de santé, et nonobstant la possibilité pour lui de faire appel à une auxiliaire de vie, la présence de la requérante auprès de son père est indispensable à ce dernier ; que, dès lors, en refusant la délivrance d'un titre de séjour à Mme A, le 30 juin 2008, le préfet du Rhône a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de cette décision sur la situation personnelle de la requérante ; que cette décision est donc entachée d'illégalité ; que les décisions du même jour portant obligation de quitter le territoire français et désignation du pays de renvoi doivent être annulées par voie de conséquence ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme Mina A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ;

Considérant que le présent arrêt, qui annule la décision portant refus de délivrance de titre de séjour du 30 juin 2008 du préfet du Rhône et les décisions subséquentes, implique nécessairement, eu égard au motif sur lequel il se fonde, que le préfet du Rhône délivre le titre de séjour sollicité à la requérante ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre audit préfet de délivrer à Mme Mina A une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la requête tendant à ce que cette injonction soit assortie d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que Mme Mina A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Ouchia, avocat de Mme Mina A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat la somme de mille euros au profit de Me Ouchia, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0804962, en date du 23 octobre 2008, du Tribunal administratif de Lyon et les décisions du 30 juin 2008 du préfet du Rhône portant refus de délivrance d'un titre de séjour à Mme Mina A, faisant obligation à cette dernière de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai, à défaut pour elle d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Rhône de délivrer à Mme A une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale , dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 000 euros à Me Ouchia, avocat de Mme A, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Mina A, au préfet du Rhône et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Délibéré après l'audience du 20 janvier 2010 à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Pourny, premier conseiller,

M. Segado, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 février 2010.

''

''

''

''

1

4

N° 09LY01361


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY01361
Date de la décision : 03/02/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : OUCHIA NADIR

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-02-03;09ly01361 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award