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03/02/2010 | FRANCE | N°09LY00618

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 2ème chambre, 03 février 2010, 09LY00618


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 16 mars 2009, présentée pour M. Frédérick Kwaku A, domicilié chez Madame Joyce B, ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0806872 en date du 5 novembre 2008, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 27 octobre 2008 par lequel le préfet du Rhône a ordonné sa reconduite à la frontière et, d'autre part, de la décision distincte du même jour fixant

le pays dont M. A a la nationalité comme destination de la reconduite ;

2°) d'annu...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 16 mars 2009, présentée pour M. Frédérick Kwaku A, domicilié chez Madame Joyce B, ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0806872 en date du 5 novembre 2008, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 27 octobre 2008 par lequel le préfet du Rhône a ordonné sa reconduite à la frontière et, d'autre part, de la décision distincte du même jour fixant le pays dont M. A a la nationalité comme destination de la reconduite ;

2°) d'annuler l'arrêté et la décision susmentionnés pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer son dossier dans les deux mois suivants la notification du présent arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Il soutient que le jugement est irrégulier en ce qu'il est insuffisamment motivé, que l'arrêté de reconduite à la frontière est lui-même entaché d'un vice de motivation en ce qu'il ne mentionne pas des éléments tenant à sa situation personnelle et familiale et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que celles de l'article 3-1 de la Convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant ; que la décision fixant le pays de destination doit être annulée en conséquence de l'illégalité de la décision de reconduite à la frontière ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance du 16 décembre 2009 portant dispense d'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 91-1647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Le requérant ayant été régulièrement averti du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 janvier 2010 :

- le rapport de M. Chanel, président ;

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que le jugement du 5 novembre 2008 précise en quoi l'arrêté contesté est suffisamment motivé ; qu'ainsi, le jugement attaqué n'est pas entaché d'une insuffisance de motivation ;

Sur l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité ghanéenne, n'établit pas être entré régulièrement en France et ne justifie pas être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; qu'il entrait ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;

Considérant, en premier lieu, que l'arrêté du 27 octobre 2008 par lequel le préfet du Rhône a décidé la reconduite à la frontière de M. A énonce de façon précise les circonstances qui justifient qu'il lui soit fait application des dispositions du 1° du II de l'article 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, et alors même qu'il n'est pas fait explicitement mention de certains éléments de fait caractérisant la vie privée et familiale de l'intéressé et que l'autorité administrative n'est pas tenue de préciser en quoi la situation de l'intéressé ne fait pas obstacle à la mise en oeuvre de la procédure de reconduite à la frontière, l'arrêté contesté répond aux exigences de motivation prévue par la loi susvisée du 11 juillet 1979 ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance, 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que M. A soutient, sans que cette allégation ne ressorte toutefois du dossier, que le préfet du Rhône s'est abstenu de prendre en considération son droit au respect de sa vie privée et familiale dès lors qu'il n'a pas tenu compte de ses liens distendus avec son pays d'origine, de sa situation de concubinage avec une ressortissante en situation régulière, Mlle Joyce B, et de la reconnaissance en paternité de l'enfant de cette dernière, Abigail, dont il s'occupe ; qu'au vu des éléments du dossier, la déclaration sur l'honneur de concubinage de M. A et de sa compagne, ne saurait établir incontestablement l'ancienneté de la communauté de vie entre les intéressés au 2 janvier 2008 dès lors que cette déclaration est intervenue le 5 mars 2009 et sans que les autres pièces du dossier, toutes postérieures au 27 octobre 2008 ou encore les photographies prises à la maternité ne le confirment ; qu'ainsi, l'ancienneté et la réalité même de la vie commune ne sont pas établies à la date de la décision contestée ; que si M. A se prévaut de la présence régulière en France de sa soeur, il dispose toutefois d'attaches dans son pays d'origine où résident sa mère, ses demi-frères et demi-soeurs et où il a vécu la majeure partie de son existence ; que M. A ne peut utilement se prévaloir ni de la reconnaissance de paternité de la petite Abigail, née le 5 avril 2007, dès lors que cette reconnaissance est intervenue le 29 octobre 2008, postérieurement à la date de la décision contestée, ni de la nécessité pour lui de soutenir financièrement sa compagne et de subvenir au besoin de sa famille alors qu'il n'a effectué aucune démarche en vue de sa régularisation ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions d'entrée et de séjour du requérant en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces dernières stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que, toutefois, M. A ne saurait utilement se prévaloir de la méconnaissance de ces dispositions par le préfet du Rhône et de la séparation avec la petite Abidail et sa mère résultant de sa reconduite à la frontière dès lors que la réalité de la communauté de vie n'est pas établi et que l'acte de reconnaissance est postérieur à la décision contestée ; qu'au demeurant, M. A ne justifie pas participer à l'entretien et à l'éducation de sa fille par la seule production de deux photographies, jointes au dossier, prises après la naissance et lors du baptême de Mlle Joyce B ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de la convention relative aux droits de l'enfant doit être écarté ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

Considérant que, compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré, par voie d'exception, de ce que la décision fixant le pays de destination est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision de reconduite à la frontière sur laquelle elle se fonde doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône du 27 octobre 2008 ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Frédérick Kwaku A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Lu en audience publique le 3 février 2010.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 09LY00618
Date de la décision : 03/02/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Christian CHANEL
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : HASSID

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-02-03;09ly00618 ?
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